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801. Comme les actes constitutionnels de l'an VIII et de l'an X, celui du 28 floréal an XII était presqu'exclusivement consacré à l'organisation des grands pouvoirs de l'Etat. Après avoir successivement traité de l'hérédité de la dignité impériale, de la famille impériale, de la régence, des grandes dignités de l'Empire, etc., il s'occupait du Sénat, du Conseil d'Etat, du Corps législatif et du Tribunat, pour apporter à ces institutions les changements nécessaires. Les derniers titres avaient pour objet la Haute Cour impériale et l'ordre judiciaire ainsi que la promulgation des sénatus-consultes et des lois. Sauf la création de la commission sénatoriale, de la liberté individuelle et celle de la commission sénatoriale de la liberté de la presse, l'acte constitutionnel nouveau, pas plus que les précédents, ne s'occupait de garanties de droits. Encore les règles protectrices introduites par lui en matière de presse et d'arrestation n'avaient-elles de libéral que l'apparence. Ajoutons cependant que le serment prêté par l'Empereur lui imposait, entre autres devoirs, celui "... de respecter et de faire respecter les lois du concordat et la liberté des cultes; de faire respecter l'égalité des droits, la liberté politique et civile „.

802. Après l'établissement de l'Empire, la constitution de l'Etat, telle qu'elle résultait des actes constitutionnels combinés du 22 frimaire an VIII, du 16 thermidor an X et du 28 floréal an XII, pour ne citer que les principaux, subit encore des remaniements partiels. Citons spécialement le sénatus-consulte du 19 août 1807 supprimant le Tribunat, celui du 12 octobre 1807 suspendant l'inamovibilité de la magistrature, et celui du 5 février 1813 relatif à la régence de l'Empire, etc.

CHAPITRE I

LE POUVOIR LÉGISLATIF

803. Au début de l'Empire, le pouvoir législatif resta constitué comme sous le Consulat à vie (1). Lorsqu'il s'agissait de grandes questions politiques ou de régler soit" tout ce qui n'a pas été prévu par la constitution et qui est nécessaire à sa marche,, soit d' "expliquer les articles de la constitution qui donnent lieu à différentes interprétations,, ce pouvoir appartenait collectivement à l'Empereur et au Sénat. Dans les autres cas, il appartenait sous le haut contrôle du Sénat à l'Empereur, au Corps législatif et au Tribunat. Plus tard, en 1807, le Tribunat fut supprimé, et le pouvoir législatif s'exerça dès lors, en matière ordinaire, par l'Empereur et le Corps législatif, sous le haut contrôle du Sénat.

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804. COMPOSITION. Les agrandissements successifs du territoire français résultant des conquêtes de l'Empire entrainèrent une augmentation corrélative du nombre des mem bres du Corps législatif (2). On vit bientôt siéger dans cette assemblée les députés des départements gênois, toscans, romains, hollandais, hanséatiques, etc.

A côté des conquêtes, une autre cause eut pour effet d'augmenter tout au moins transitoirement le nombre des membres du Corps législatif: la suppression du Tribunat,

(1) Voir plus haut, no 723.

(2) Voir à cet égard les sénatus-consultes d'annexion: 16 vendémiaire an XIV (Gênes), 24 mai 1808 (Parme, Toscane, etc.), 17 février 1810 (Rome), 13 décembre 1810 (Hollande, villes hanséatiques, etc.), tc.

prononcée par le sénatus-consulte du 19 août 1807. Cet acte décidait, en effet, que les tribuns dont le mandat expirait en 1812 (1) entreraient au Corps législatif et feraient partie de ce Corps jusqu'à l'époque où leurs fonctions auraient dû cesser au Tribunat.

805. Aucun changement ne fut apporté à la durée des fonctions législatives, mais le sénatus-consulte organique de l'Empire décida que les membres sortants du Corps législatif pourraient désormais être réélus sans intervalle (art. 78, C. XII).

806. La règle du renouvellement annuel du Corps législatif par cinquième ne fut pas modifiée non plus. Elle subit cependant en fait des accrocs assez notables. C'est ainsi qu'un sénatus-consulte du 30 décembre 1809 (2) prorogea d'office la durée des pouvoirs des députés de la cinquième série, qui devaient sortir le 31 décembre 1809. Cette série ne fut renouvelée que le 9 août 1810. La première série, qui sortait le 31 décembre 1811, ne fut renouvelée que les 5-6 janvier 1813. La quatrième série, enfin, dont les pouvoirs expiraient le le 31 décembre 1812, les vit successivement proroger deux fois par des sénatus-consultes (3). Et ce ne fut qu'à la fin de 1813 qu'un décret (4) vint prescrire la réunion sans délai des collèges électoraux des deux séries (5) dont les pouvoirs étaient expirés, ainsi que la réunion des collèges électoraux de la cinquième série dont les membres sortaient le 31 décembre 1814.

(1) Voir plus bas, no 831.

(2) La nécessité de cette prorogation fut considérée comme un de ces cas non prévus par la constitution et nécessaires à sa marche, et qui devaient dès lors être réglés par le Sénat. Cfr. le procès-verbal de la séance du Sénat du 28 décembre 1809, aux Archives nationales, et plus haut, nos 723 et 772.

(3) Sénatus-consultes du 9 janvier 1813 et du 15 novembre 1813. (4) Décret du 31 décembre 1813.

(5) Savoir la quatrième série (Escaut et Sambre-et-Meuse) dont les pouvoirs auraient dû normalement expirer le 31 décembre 1812 et la troisième série (Ourthe, Deux-Nèthes et Jemmapes) dont les pouvoirs expiraient le 31 décembre 1813.

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807. ÉLECTION. Les députés des départements au Corps législatif continuèrent sous l'Empire à être élus par le Sénat, parmi les candidats présentés par les collèges électoraux (1). Toutefois, la première formation des députations départemen. tales des pays annexés eut lieu sans présentation préalable de candidats (2).

L'élection des candidats continua à se faire par un suffrage à plusieurs degrés. Le corps électoral du second degré les collèges électoraux resta, à peu de chose près, composé comme sous le Consulat à vie (3). Le corps électoral du premier degré les assemblées cantonales subit au contraire une transformation radicale par l'introduction du suffrage universel (sauf les domestiques à gages). Cette modification avait déjà été annoncée par le sénatus-consulte organique du Consulat à vie (4). Après avoir décidé que pour la première fois les assemblées cantonales se composeraient seulement des notables communaux, ce sénatus-consulte ajoutait dans son article 4: "... (à partir de l'an XII)... l'assemblée de canton sera composée de tous les citoyens domiciliés dans le canton, et qui y jouissent des droits de citoyen, (5).

Le Gouvernement retarda d'ailleurs assez longtemps la mise à exécution de cette disposition du sénatus-consulte du 16 thermidor an X: ce fut seulement le 17 janvier 1806 qu'un décret impérial vint organiser les assemblées cantonales sur la base du suffrage universel.

(1) Voir plus haut, nos 727 et suiv.

(2) La nomination des députés se faisait alors par voie de sénatus-consulte (voir plus haut, no 774). Cfr. les sénatus-consultes du 22 février 1806, du 21 septembre 1808, du 19 et du 23 février 1811. Coll. HUYGHE, t. III, p. 359; t. VII, p. 197; t. XII, pp. 182 et suiv. — La Corse fut soumise à un régime électoral spécial. Cfr. le sénatus. consulte du 19 avril 1811.

(3) Voir plus haut, no 734.

(4) Voir plus haut, no 728.

(5) Sur la jouissance des droits de citoyen, voir plus haut, no 610 et 728.

808. L'introduction du suffrage universel dans les assemblées cantonales fut parfaitement illusoire au point de vue de la formation du Corps législatif. Les membres des collèges électoraux que les assemblées cantonales avaient élus, lorsqu'elles ne comprenaient encore que les notables communaux, avaient reçu un mandat à vie, et le sénatus-consulte du 16 thermidor avait même décidé que les assemblées cantonales ne pouvaient procéder au remplacement des membres décédés, etc., d'un collège électoral que lorsque ce collège serait réduit aux deux tiers (art. 35). Il en résulta, qu'en règle générale, les listes qui avaient été formées par les notables communaux en l'an XI servirent jusqu'à la fin de l'Empire. En juillet 1813, cependant, dans le département de la Dyle notamment, les assemblées cantonales furent convoquées dans plusieurs cantons pour procéder à des nominations dans les collèges d'arrondissement et dans le collège électoral du département (1).

les ASSEM

809. LE CORPS ÉLECTORAL DU PREMIER degré BLÉES CANTONALES. Avaient droit de vote dans les assemblées cantonales, depuis leur réorganisation sur la base du suffrage universel" tous les citoyens (2), disait l'art. 8 du décret du 17 janvier 1806, qui, ayant leur domicile politique (3) dans une des communes du canton, seront inscrits sur le registre civique de l'arrondissement „. Ce registre était tenu par les sous-préfets,d'après les renseignements fournis par les maires.

A quelques détails près, les opérations du scrutin furent réglées par le décret du 17 janvier 1806 comme elles l'étaient précédemment par l'arrêté du 19 fructidor an X. Deux inno

(1) Coll. HUYGHE, t. XVII, p. 401.

(2) Sur la qualité de citoyen, voir plus haut, nos 610 et 728.

(3) Sur le domicile politique, voir les art. 2 et 6 de la constitution du 22 frimaire an VIII (voir plus haut, no 610), les art. 4, 16, 18, 19, 27, 28, 30 et 32 du sénatus-consulte du 16 thermidor an X (voir plus haut, nos 729, 730, 734, 737), et les art. 45, 50 et 99 du sénatus-consulte du 28 floréal an XII (voir plus bas, no 810). Cfr. également les art. 1 à 7 du décret du 17 janvier 1806. — On trouvera dans la Coll. HUYGHE, t. III, pp. 330 et suiv., les formules de différents actes relatifs aux assemblées cantonales.

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