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vations toutefois méritent d'être signalées. Avant de voter, les membres de l'assemblée devaient prêter le serment suivant: “ Je jure obéissance aux constitutions de l'Empire et fidélité à l'Empereur., D'autre part, il n'était plus requis pour la validité des opérations que la moitié des membres de l'assemblée eût pris part au vote. "Trente-six heures. après l'ouverture du scrutin, disait l'art. 23 du décret du 17 janvier 1806, quel que soit le nombre des personnes qui auront voté, il sera clos et dépouillé. „

810. LES ÉLecteurs du second degré : LES COLLEGES ÉLECTORAUX DE DÉPARTEMENT ET D'ARRONDISSEMENT. L'organisation des collèges électoraux ne fut pas radicalement modifiée sous l'Empire, comme l'avait été celle des assemblées cantonales. Le sénatus consulte du 28 floréal an XII et le règlement organique du 13 mai 1806 (1) introduisirent cependant dans la composition de ces collèges et dans leur fonctionne. ment un certain nombre de modifications, dont les principales avaient pour objet d'y renforcer l'influence du Gouverne

ment.

C'est ainsi que le nombre de leurs membres non élus fut assez notablement accru. D'après l'art. 99 du sénatus-consulte organique de l'Empire, les grands officiers, les commandants et les officiers de la Légion d'honneur étaient de droit membres du collège électoral, soit du département où ils avaient leur domicile, soit de l'un des départements de la cohorte à laquelle ils appartenaient; les simples légionnaires faisaient partie du collège électoral de leur arrondissement. Plus tard, un sénatus-consulte du 22 février 1806 décida que le nombre des premiers ne pouvait dépasser vingt-cinq par collège, et le nombre des seconds, trente, et confia à l'Empereur le soin de faire les désignations individuelles.

Les changements introduits sous l'Empire dans le fonctionnement des collèges électoraux concernaient surtout la

(1) Il remplaçait l'arrêté du 19 fructidor an X, en ce qui concerne les collèges électoraux. Voir plus haut, no 727. — On trouvera les formules d'actes relatifs aux collèges électoraux dans la Coll. HUYGHE, t. IV, pp. 190 et suiv.

présidence de ces assemblées, le serment à prêter par leurs membres, et la suppression des candidats supplémentaires.

L'art. 45 du sénatus consulte du 28 floréal an XII décida que chaque titulaire des grandes dignités de l'Empire présiderait un collège électoral de département : le grand-électeur (Joseph Bonaparte) fut chargé de la présidence du collège électoral du département de la Dyle. L'art. 50 décidait de même que chacun des grands officiers de l'Empire présiderait le collège électoral qui lui serait attribué au moment de sa nomination. En cas d'empêchement du titulaire, l'Empereur nommait un vice-président pour le suppléer.

L'art. 56 du sénatus-consulte organique de l'Empire imposait aux membres des collèges électoraux le même serment que celui imposé aux membres des assemblées cantonales (1). D'après l'art. 5 du décret du 13 mai 1806, ce serment devait être adressé par écrit au préfet du département aussitôt après la nomination en qualité de membre du collège électoral.

"Dans les départements, disait l'art. 27 du décret du 13 mai 1806, où la présentation des deux candidats par collège ne produirait pas un nombre de candidats au moins triple de celui des députés à nommer au Corps législatif, il sera élu, par chaque collège, trois candidats; il en sera nommé quatre,si la présentation des trois n'est pas suffisante pour former ce nombre triple., Le décret du 13 mai 1806 ne prévoyait plus la réduction éventuelle de la liste des candidats effectifs, et il décidait que les suppléants ne devaient être appelés à faire partie de la liste des candidats du département que "si le nombre des doubles emplois (parmi les effectifs) laissait le nombre total des candidats inférieur au triple de celui des places à nommer, (art.31) (2).

811. ÉLIGIBILITÉ. Le sénatus-consulte du 28 floréal an XII permit aux députés d'être réélus sans intervalle, et celui du 19 août 1807 portant suppression du Tribunat éleva pour l'avenir à quarante ans accomplis l'âge de l'éligibilité (art.10). " Les

(1) Voir plus haut, no 809.

(2) Voir plus haut, no 735, in fine.

législateurs d'une nation généreuse et fière, disait l'exposé des motifs fait au Sénat (1), mais ardente et exaltée dans ses sentiments comme dans ses opinions, doivent avoir toute la maturité de l'âge. Les passions doivent se taire dans leur sein. La raison doit seule se faire entendre et inspirer leurs résolutions. Ce n'est qu'à quarante ans que l'on peut être sûr de trouver dans un homme le calme réfléchi garant de la sagesse de sa volonté. Alors il a une épouse, des enfants, un état, une propriété. Il a deux fois une Patrie. C'est par ces considérations que S. M. vous propose de fixer à quarante ans l'âge nécessaire pour être élu au Corps législatif.,,

Signalons encore que le président du collège électoral ne pouvait être nommé par ce collège candidat pour une fonction quelconque comme pris hors du collège (2).

812. LES ÉLECTIONS EN BELGIQUE SOUS LE CONSULAT ET L'EMPIRE (3). Dans plusieurs départements belges, spécialement dans ceux de l'Ourthe et des Forêts, l'hostilité contre les Français, qui avait caractérisé les élections de l'an V (4), survécut à la chute du Directoire et se manifesta même sous l'Empire. C'est avec douleur, écrivait le préfet des Forêts dans un rapport sur les élections de l'an IX (5), que j'ai vu s'exécuter un plan combiné depuis longtemps pour l'exclusion des Français. "Point de Français sur les listes de notabilité, écrivait le préfet de l'Ourthe (6), tel est le mot d'ordre du plus grand nombre des hommes qui se croient de l'influence. En 1805, dans le département des Forêts, les adversaires de la France avaient encore ouvertement dirigé les élections." Ces messieurs, dit un rapport de gendarmerie, se sont répandus dans les estaminets où se réunissaient les

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(1) Procès-verbal de la séance du 14 août 1807. Archives nationales. (2) Art. 34 du décret du 13 mai 1806.

(3) DE LANZAC DE LABORIE, ouv. cité, t. I, pp. 376 et suiv., et t. II, pp. 200 et suiv.; POULLET, Quelques notes sur l'esprit public, pp. 54, 59, 66, 75.

(4) Voir plus haut, no 24.

(5) Rapport du 19 brumaire an X (10 novembre 1801). Poullet, ouv. cité, p. 55; LANZAC, t. I, ouv. cité, p. 376.

(6) Rapport du 28 germinal an IX. POULLET, ouv. cité, p. 55.

électeurs et là, par des invectives contre le préfet et tout ce qu'ils appellent étrangers (ils désignent par là les anciens Français), ils sont parvenus à leur enlever tous les suffrages, (1).

Remarquons d'ailleurs que dès l'an XII le Gouvernement, désireux d'assimiler les départements réunis par la douceur plutôt que par la contrainte, avait manifesté lui-même aux préfets le désir de voir le choix des collèges électoraux se fixer sur des indigènes plutôt que sur d'anciens Français, (2).

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813. Au début du Consulat à vie, les notables commu naux (3) s'étaient assez régulièrement rendus aux assemblées cantonales. Ainsi, dans presque tous les cantons du département de la Dyle la majorité absolue des inscrits avait pris part au vote. Dans d'autres départements, le petit nombre des votants empêcha souvent d'aboutir à un résultat. Lorsque après 1806 les assemblées cantonales furent constituées sur la base du suffrage universel, la grande majorité des citoyens inscrits s'abstint de prendre part à leurs travaux. En 1810, par exemple, sur 90.673 citoyens ayant le droit de vote dans le département de la Dyle, il en vint 14.564 aux assemblées. Trois ans plus tard, le préfet du département écrivait: “ A chaque convocation, le nombre des votants diminue,, et son collègue de Liége: "On ne remarque aucun empressement en faveur de ces sortes de réunions politiques, qui finiront par être abandonnées : le public paraît très indifférent pour l'exercice de cette espèce de droit,, (4). Le décret du 17 janvier 1806 avait donc été sagement inspiré en ne subordonnant plus la validité des scrutins à la présence de la majorité des inscrits.

Les collèges électoraux d'arrondissement et de département furent un peu plus fréquentés, tout au moins pendant

(1) Cité dans POULLET, Quelques notes sur l'esprit public, p. 67. — Cfr. sur les élections de l'Ourthe en 1808, LANZAC DE LABORIE, ouv. cité, t. II, p. 202.

(2) Rapport du préfet de l'Ourthe, du 18 vendémiaire an XII, Poullet, ouv. cité, p. 75.

(3) Voir plus haut, no 612.

(4) Citations de M. DE LANZAC, ouv. cité, t. II, p.

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les premières séances de leurs sessions. "La plupart des électeurs, écrivait en 1805 le préfet de l'Escaut (1), n'assistaient aux séances que lorsqu'ils savaient que leur voix pouvait être utile à telle personne dont ils connaissaient et appuyaient le désir d'être promue à une place. Les premiers choix une fois faits, les séances étaient désertées. C'est ainsi qu'en l'an XI, au troisième tour de scrutin, il n'y avait plus au collège électoral de Sambre-et-Meuse que trente et un votants sur cent quarante et un (2). En 1811, faute du quorum exigé (3), le collège électoral du département de la Lys fut dans l'impossibilité de nommer un seul candidat au Conseil général (4).

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814. L'esprit qui animait les assemblées cantonales et les collèges électoraux se distingua, surtout après le Concordat, par des tendances très conservatrices et très gouvernementales. Les assemblées cantonales, écrivait en septembre 1803 le préfet de Jemmappes, avaient appelé dans les col· lèges électoraux la plupart des citoyens marquants dans le département par leurs propriétés ou par les places qu'ils ont occupées ou occupaient encore. Beaucoup de membres de la ci-devant noblesse en faisaient partie. On était incertain de savoir s'ils se présenteraient aux collèges... Ils ont paru. Bien plus, plusieurs d'entre eux connus précédemment pour des principes opposés non au gouvernement consulaire, mais au régime républicain, ont paru ambitionner les suffrages de l'assemblée et de devenir candidats pour une fonction quelconque. Même symptôme dans les Deux-Nèthes: "Les choix sont en général très bons, écrivait le préfet, et se sont réunis sur des propriétaires riches et considérés, sur des hommes de loi et autres personnes de la même classe „ (5).

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Sauf dans les départements où l'hostilité aux Français continua à se manifester dans les élections, les efforts des

(1) Citation de M. DE LANZAC, ouv. cité, t. I, p. 379.

(2) Ibid., p. 380.

(3) D'après l'art. 17 du décret du 13 mai 1806, le scrutin devait rester ouvert jusqu'à ce que la moitié des membres du collège eût voté. (4) LANZAC, ouv. cité, t. II, p. 202.

(5) Rapports du 29 fructidor an XI et du 13 fructidor an XI, cités dans POULLET, Quelques notes sur l'esprit public, p. 59.

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