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§ 2. Les juridictions répressives en matière correctionnelle

J.

LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE (1)

1039. ORGANISATION. Le Code d'instruction criminelle n'introduisit pas de modifications dans l'organisation des tribunaux de première instance, chargés, comme on l'a vu, depuis l'an VIII (2) de connaître, sous le titre de tribunaux correctionnels, de la répression en matière de délits. Signalons toutefois qu'en vertu du décret du 18 août 1810 contenant règlement sur l'organisation des tribunaux, lorsqu'un tribunal de première instance se composait de plusieurs chambres, l'une d'elles devait connaître principalement ou exclusivement des affaires de police correctionnelle. "Les chambres de service pour les matières correctionnelles, disait l'art. 36 du même décret, n'auront point de vacances ; il en sera de même des juges d'instruction.

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1040. COMPÉTENCE. Les mêmes principes que précédemment continuèrent à régler la compétence des tribunaux de première instance en matière correctionnelle. Outre les délits dont la peine excède cinq jours d'emprisonnement et quinze francs d'amende ils connaissaient, en vertu de l'art. 179 du Code d'instruction criminelle, de toutes les infractions en matière forestière poursuivies à la requête de l'administration.

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Les tribunaux correctionnels des chefs-lieux de département, autres que ceux établis au siège d'une cour d'appel avaient, en outre, la juridiction d'appel en matière correctionnelle.

1041. PROCÉDURE. La procédure devant les tribunaux correctionnels continua, sous le Code d'instruction criminelle, à être dominée par les grands principes introduits à la Révolution de l'oralité, de la publicité et de la contradiction des débats.

(1) FAUSTIN HÉLIE, ouv. cité, t. III, pp. 180 et suiv.

(2) Voir plus haut, no 917.

1042. VOIES DE RECOURS. Au lieu d'être déféré comme précédemment aux tribunaux criminels de département, dont la suppression avait été décrétée par le Code d'instruction criminelle, l'appel des jugements rendus en première instance par les tribunaux correctionnels fut désormais soumis à des règles nouvelles que nous allons indiquer.

II.

LA JURIDICTION D'APPEL EN MATIÈRE CORRECTIONNELLE

1043. TRIBUNAUX EXERÇANT LA JURIDICTION D'Appel. Aux termes du Code d'instruction criminelle, les appels des juge. ments rendus en police correctionnelle devaient être portés des tribunaux d'arrondissement au tribunal du chef-lieu du département. Les appels des jugements rendus en police correctionnelle par le tribunal de première instance établi au chef-lieu du département, devaient être portés au tribunal du chef-lieu du département le plus voisin et appartenant au ressort de la même cour impériale (1). Ils étaient portés à la cour impériale elle même, lorsque la distance de cette cour n'était pas plus forte que celle du chef-lieu d'un autre département (2).

La cour impériale jugeait également les appels des décisions rendues par les tribunaux de première instance du département où elle avait son siège.

Lorsque les tribunaux correctionnels du chef lieu de dépar tement statuaient comme juges d'appel, ils devaient se prononcer au nombre de cinq juges au moins, et c'était le procureur criminel impérial qui remplissait près d'eux les fonctions du ministère public (3).

(1) Jamais cependant les tribunaux du chef-lieu de département ne pouvaient être respectivement juges d'appel de leurs jugements. (2) En fait, grâce à la combinaison de ces règles, l'appel des tribunaux de chef-lieu était dans la plupart des cas porté à la cour impériale. Cependant, le tribunal de Gand jugeait les appels de celui de Bruges, le tribunal d'Anvers ceux de Middelbourg et de Bois-le-Duc. - Consulter les tableaux annexés au décret du 18 août 1810.

(3) Loi du 20 avril 1810, art. 40, et Code d'instruction criminelle, art. 287.

1044. Le Code d'instruction criminelle porta à deux mois (art. 205) le délai dans lequel le ministère public près la juridiction d'appel devait notifier son recours. Pour le surplus, il n'introduisit pas d'innovations capitales dans la procédure précédemment établie.

1045. RECOURS EN CASSATION. La partie civile, le prévenu, la partie publique et les personnes civilement responsables pouvaient se pourvoir en cassation.

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§ 4. Les cours d'assises (1)

1046. ORIGINE. L'organisation toute nouvelle que le Code d'instruction criminelle donna aux juridictions chargées de la justice criminelle avait fait l'objet de laborieuses discussions au sein du Conseil d'État. Deux questions surtout avaient été examinées, tranchées d'abord, puis remises en discussion maintiendrait-on la procédure par jurés ? réunirait-on dans les mêmes mains la justice civile et la justice criminelle? L'Empereur était partisan de cette réunion : il demandait la suppression des tribunaux criminels de dépar tement, dont il voulait transporter les attributions aux cours impériales. Il y avait là tout à la fois une simplification et un accroissement de dignité pour la magistrature.

La combinaison soulevait toutefois des objections d'ordre pratique. C'était peut-être compromettre l'institution du jury, dont la majorité du Conseil d'État demeurait partisan. "Jusque là, dit M. Esmein, la réunion des jurés dans chaque département avait toujours été un principe, et elle était passée dans les mœurs. Vouloir porter au chef-lieu de la cour toutes les affaires criminelles du ressort, c'était rendre impossible le service du jury, déjà obtenu à grand'peine., Le système offrait un autre danger. "C'était aussi, continue M. Esmein, dans un avenir prochain la substitution de la procédure écrite à la procédure orale, le transport des témoins au chef-lieu de la cour devenant trop difficile et trop coûteux,, (2).

(1) FAUSTIN HÉLIE, ouv. cité, t. III, pp. 331 et suiv.

(2) ESMEIN, ouv. cité, p. 516.

Après avoir agité un certain nombre de combinaisons, on finit par trouver la solution du problème. Il fut décidé que la justice criminelle serait réunie à la justice civile, mais que pourtant les jurés de chaque département s'assembleraient au chef-lieu de département. On conciliait les deux principes en substituant au tribunal criminel permanent des assises, présidées par un membre de la cour d'appel siégeant avec des assesseurs, pris soit parmi les membres de la cour, soit parmi ceux du tribunal de première instance.

1047. ORGANISATION. Aux termes du Code d'instruction, les assises pour l'exercice de la juridiction criminelle devaient se tenir dans chaque département, et autant que possible au chef-lieu (1).

La tenue des assises avait lieu tous les trois mois, ou plus souvent si le besoin l'exigeait.

Le jury étant maintenu, la juridiction répressive en matière criminelle comprenait, comme précédemment, un élément judiciaire, la cour, et un élément non judiciaire, les jurés.

1048. Composition de la cour proprement dite. Dans le département où siégeait la cour impériale, la cour se composait (2) d'un président et de quatre assesseurs choisis parmi les membres de la cour impériale, du procureur général ou d'un de ses substituts, et du greffier de la cour.

Dans les autres départements, elle se composait d'un président pris dans la cour impériale, de quatre assesseurs pris parmi les président et juges les plus anciens du tribunal de première instance du lieu de la tenue des séances, d'un substitut du procureur général impérial, qui portait le titre de procureur impérial criminel, et du greffier du tribunal de première instance.

La cour impériale pouvait cependant déléguer un ou plusieurs de ses membres pour compléter le nombre des quatre juges de la cour d'assises.

En principe, aux termes de la loi du 20 avril 1810, il appar

(1) Voir à cet égard l'avis du Conseil d'Etat du 6 août 1811. (2) Code d'instruction criminelle, art. 251 et suiv.

tenait au premier président de désigner le président de la cour d'assises ainsi que les membres de la cour qui devaient remplir les fonctions d'assesseurs. La nomination du président et des conseillers qui devaient tenir les assises pouvait néanmoins être extraordinairement faite par le grand-juge ministre de la justice.

1049. Formation du jury (1). Le Code d'instruction criminelle rendit aux préfets la mission de former la liste générale des personnes appelées à faire éventuellement partie du jury. Ces fonctionnaires dressaient cette liste chaque fois qu'ils en étaient requis par le président de la cour d'assises. La réquisition devait être faite quinze jours au moins avant chaque session.

Les jurés devaient être pris: 1o parmi les membres des collèges électoraux; 2o parmi les trois cents citoyens les plus imposés, domiciliés dans le département; 3o parmi les fonctionnaires de l'ordre administratif à la nomination de l'Empereur; 40 parmi les docteurs et licenciés des facultés, les membres de l'Institut, et autres sociétés savantes; 5o parmi les notaires; 6o parmi les banquiers, négociants, etc., payant patente de l'une des deux premières classes; 7o parmi les employés des administrations jouissant d'un traitement de quatre mille francs au moins. Avec l'autorisation du ministre, le préfet pouvait placer sur la liste d'autres personnes que celles appartenant à ces diverses catégories.

Nul ne pouvait remplir les fonctions de juré s'il n'avait trente ans accomplis et s'il ne jouissait des droits politiques et civils. Il y avait incompatibilité entre les fonctions de juré et celles de ministre des cultes, de ministre, préfet, sous-préfet, juge, membre du parquet, etc.

"Sa Majesté impériale, disait l'art. 391 du Code d'instruction criminelle, se réserve de donner aux jurés qui auront montré un zèle louable des témoignages honorables de sa satisfaction.,

(1) Sur la suspension des fonctions du jury, voir plus haut, nos 772, 1001, 1010, et plus bas, no 1062.

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