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ils affirmeront véritable par devant les maistres particuliers, verdiers, gruyers, ségruyers et maistres sergents, chacun en son pouvoir. »

Voilà donc les procès-verbaux des délits forestiers qui peu à peu se sont établis et ont revêtu leurs formes; ils font foi de leur contenu : « car il convient, dit l'ordonnance de septembre 1402, que les sergents quièrent les malfaiteurs le plus coyement qu'ils pèvent, et s'ils allaient querre tesmoin, les malfaiteurs s'en pourraient aller avant qu'ils revinssent, ni ne pèvent pas toujours mener tesmoin pour tesmoigner leurs prinses. Les procès-verbaux devaient donner une description détaillée des choses, de la cause des personnes et du temz du délit; car, comme ils remplacent tous les témoignages, c'est un devoir pour leurs rédacteurs, ajoute l'ordonnance, de rendre le délit aussi clair que la lumière du jour en faisant connaître toutes les cir

constances.

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Les mêmes règles avaient été appliquées aux commis des fermes: « Les formalités de leurs procèsverbaux, dit M. de Roquemont, consistent en la date, aux sommations au fraudeur de signer ses réponses, à faire mention de l'élection de domicile, de l'interpellation de signer après lecture à lui faite, et à délivrer copie du procès dans le jour'. » Ils devaient « avoir toujours en main une requête répondue par messieurs les Élus, à telle fin que de raison, avec permission d'entrer dans les maisons de ceux qu'ils

Les aydes de France et leur régie, par le S de Roquemont,

p. 185.

soupçonnaient de fraude '. » Foi devait être ajoutée à leurs procès-verbaux, dûment affirmés jusqu'à inscription de faux, et il était enjoint aux officiers des Élections et des cours des Aydes de juger en conformité 2.

Ainsi, le système des procès-verbaux, émané de la procédure écrite, avait peu à peu envahi, non seulement les matières de grand criminel, mais aussi celles du petit criminel et s'était établi dans celles-ci avec des règles spéciales. Ce système ne fut régulièrement institué qu'au xvir siècle. Nous allons essayer de le faire connaître.

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Système de notre ancienne législation sur cette matière.

Toute la procédure, dans notre ancien droit, était écrite. Les jugements n'avaient pour base que des procès-verbaux, procès-verbaux d'information, de récolement, de confrontation, d'interrogatoires. Nous avons exposé précédemment le système de cette législation 3.

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Mais il ne faut pas confondre ces procès-verbaux avec ceux qui font en ce moment l'objet de notre examen. Les procès-verbaux d'information, dressés

Les aydes de France et leur régie, par le S' de Roquemont, p. 182.

2Eod. loc., p. 185.

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Voy. notre tome Ier, p. 619.

sur les lieux par les juges commissaires ou les officiers qu'ils avaient délégués, et qui avaient pour but de recueillir tous les indices des crimes et d'en constater toutes les traces, ne formaient par eux-mêmes aucune preuve; c'était une enquête provisoire destinée à préparer la procédure; les preuves ne résultaient que du récolement. Ces procès-verbaux subsistent encore dans notre législation; ce sont les informations que dressent nos officiers de police judiciaire, dans les cas de flagrant délit, et nos juges d'instruction dans tous les cas. Ce n'est pas de ceux-là qu'il s'agit ici.

Il s'agit des procès-verbaux que dressaient des of ficiers inférieurs, par suite d'une délégation spéciale pour constater certains faits du petit criminel; le législateur arriva à poser deux règles, qui avaient pour but d'assurer la répression souvent difficile de ces faits la première consistait à imposer à ces procèsverbaux des formes spéciales et rigoureuses qui étaient une garantie de leurs déclarations; la seconde, à imprimer aux faits qu'ils constataient des caractères de vérité, à leurs déclarations un caractère de preuve qui enchaînaient nécessairement la décision des juges.

Ces deux règles ont été principalement posées par notre ancien droit à l'égard des procès-verbaux des agents forestiers et des commis des fermes, aujourd'hui perpétués dans nos employés des contributions indirectes et des douanes. Nous allons rapidement retracer les dispositions des ordonnances qui avaient statué sur ces deux matières.

Le titre 10 de l'ordonnance d'août 1669, sur les eaux et forêts, contenait les dispositions suivantes : « Art. 2. Ñe seront reçus aucuns sergents à garde que sur information de vie et mœurs par témoins qui seront administrés par notre procureur en la maîtrise, et qu'ils ne sachent lire et écrire, même qu'ils n'en aient fait l'expérience en présence des officiers des siéges. Art. 4. Les gardes généraux à cheval de nos eaux et forêts marcheront incessamment dans les forêts et bois et le long des rivières, afin de tenir les gardes ordinaires dans leur devoir, prêteront main-forte aux gardes particuliers, feront toutes sortes de captures et rapports aux maîtrises dans l'étendue desquelles les délits auront été commis, en la manière que font les autres gardes. Art. 7. Les sergents auront chacun un registre cotté par nombre et paraphé du maître particulier et de notre procureur contenant les procès-verbaux de leurs visites, rapports, exploits et tous autres actes de leurs charges. Art. 8. Le nombre des sergents sera divisé en deux parties qui comparaîtront alternativement à l'audience de la maîtrise ou de la gruerie, même aux assises, suivant l'ordre des officiers, pour les informer de l'état de leurs gardes, y présenter, affirmer et faire enregistrer les rapports qu'ils pourront lors avoir en leurs mains, sur lesquels voulons que les officiers puissent condamner à peine pécuniaire, quoiqu'il n'y ait aucune preuve ni information, pourvu que les parties accusées ne proposent point. de cause suffisante de récusation. Art. 9. Les sergents répondront des délits, dégâts, abus et abrou

tissements qui se trouveront en leurs gardes, et seront condamnés en l'amende, restitution et aux intérêts, comme le seraient les délinquants, faute d'en avoir fait leur rapport, et icelui mis au greffe de la maîtrise ou gruerie, deux jours au plus tard après le délit commis, et faute de nommer dans leur rapport les délinquants et d'imprimer les lieux où les arbres et bois de délit auront été trouvés, le nombre et la qualité des bêtes surprises en faisant le dommage et déclarer ceux à qui elles appartiendront. »>

Lapoix de Fréminville' a résumé, d'après ces dispositions et les usages de la pratique, les devoirs des sergents et les règles qu'ils devaient suivre pour la réduction de leurs procès-verbaux dans les termes suivants :

« Il faut : 1° que le sergent-garde ait l'âge de vingtcinq ans accomplis, qu'il sache lire et écrire, et tout ce qui est de son devoir, sur lequel il doit être interrogé ; qu'il soit pourvu des provisions signées du seigneur, qu'il soit reçu par le juge des lieux, ait prêté serment devant lui, et que ses provisions aient été enregistrées et publiées en audience; sans toutes ces choses, on peut arguer le procès-verbal de nullité, parce que, les formalités étant de rigueur, le garde n'aurait pas un caractère suffisant; -2° il faut que tout garde commence son procès-verbal par la date du jour, du mois, de l'année et de l'heure, si c'est devant ou après midi, si c'est devant le lever du soleil ou après qu'il est couché, si c'est la nuit, le

Pratique des terriers, t. III, p. 156.

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