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gistrement; cette division n'est, dans notre législation, la base d'aucune distinction légale, soit dans la rédaction, soit dans les effets des procès-verbaux. On pourrait plutôt distinguer leurs formalités en générales et spéciales: générales, qui s'appliquent à peu près à tous les procès-verbaux ; spéciales, qui ne s'appliquent qu'à ceux de ces actes qui concernent les matières fiscales. Cette distinction, qui indique les deux classes de procès-verbaux que notre législation a établis, est la seule qui puisse jeter quelque lumière sur cette matière; nous allons en faire la base de notre travail.

Les formalités générales qui sont, sauf quelques exceptions, communes à tous les procès-verbaux,

sont :

Le délai dans lequel le procès-verbal doit être rédigé;

L'écriture de cet acte;

Les énonciations qu'il doit contenir;
La signature des agents;

La date;

L'affirmation;

L'enregistrement.

Les formalités spéciales qui sont restreintes aux procès-verbaux de quelques administrations fiscales,

sont :

Les énonciations particulières que l'acte doit renfermer;

Les formalités qui se rattachent aux saisies; Les formalités de la lecture, de la remise de la copie, de la signification ou de l'affiche du procès-verbal.

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Du délai dans lequel les procès-verbaux doivent être dressés.

La première règle relative à la rédaction des procès-verbaux est la fixation du délai dans lequel ils doivent être rédigés.

Dans notre ancien droit, le procès-verbal devait être dressé au moment même de la découverte du délit ou dans un délai qui n'excédait jamais trois jours. « Les procès-verbaux des commis des fermes, dit Lefebvre de la Bellande, doivent être faits surle-champ et à l'instant de la découverte de la fraude, à moins qu'il n'y ait rébellion ou autre empêchement dont il doit y être fait mention 1. » En matière forestière, les sergents étaient tenus de faire leur rapport et de le déposer au greffe de la maîtrise ou gruerie, deux jours au plus tard après le délit commis 2. En matière de police rurale, le délai était, en général, de vingt-quatre heures, et dans quelques coutumes, de trois jours, pour faciliter les transactions des propriétaires avec les délinquants : « Le messier, dit Lapoix de Fréminville, ayant pris des bêtes en mésus et mis icelles dans les prisons, peut bien ne pas faire le rapport de la prise dans l'instant, parce que la partic qui a souffert le dommage peut s'accommoder

Traité des aydes, p. 228 et conf. Arr. du Cons. des 21 ma 1726 et 25 mars 1727.

2 Ord. 1669, tit. 10, art. 9.

avec le propriétaire des bêtes prises en mésus et éviter par cet endroit des frais toujours à charge à de pauvres habitants; c'est sans doute par ces considérations que nombre de coutumes donnent aux messiers le temps de trois jours pour faire leur rapport, ainsi qu'il se voit en la coutume de Mons en Hainault, où il est dit que les messiers feront leur rapport dans le tiers-jour '. Il y a d'autres coutumes qui ne donnaient que vingt-quatre heures, comme celle de Dourdan, art. 60, et celle de Tours, art. 205 2.

La règle posée par notre ancien droit est la véritable règle de la matière. En thèse générale, le procès-verbal doit être rédigé immédiatement après la découverte du délit. En effet, cet acte n'est qu'un témoignage écrit; les agents déclarent ce qu'ils ont vu, ils attestent les faits qu'ils ont reconnus et vérifiés. Il est donc nécessaire que ce témoignage suive immédiatement la découverte ou la vérification de ces faits, car il doit les relater tels qu'ils se sont présentés aux yeux du rédacteur, avec toutes leurs circonstances, et par conséquent il ne doit pas substituer à la certitude d'une impression encore vivante l'incertitude du souvenir. Cette rédaction instantanée est d'autant plus importante qu'il s'agit d'un témoignage qui n'est pas soumis à un débat contradictoire, qui n'admet pas même en certains cas la preuve contraire, et qui, dès lors, doit réunir toutes les conditions d'une parfaite sincérité. Lorsque

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le procès-verbal est rédigé en face même des faits. qu'il constate, la description qu'il en fait doit être présumée exacte, car l'agent rapporte ce qu'il voit, ce qu'il entend; lorsqu'il n'est rédigé que quelques jours après leur perpétration, la présomption de vérité s'affaiblit, car il ne constate plus ce qu'il voit, ce qu'il entend, mais ce qu'il se souvient d'avoir vu et entendu. L'instantanéité du procès-verbal est donc de l'essence même de cet acte; c'est la garantie et la condition de la preuve qu'il apporte à la justice.

Ce principe a été, en général, consacré par la législation. L'art. 15 du C. d'inst. crim. porte que : « Les maires ou adjoints de maire remettront à l'officier par qui sera rempli le ministère public près le tribunal de police toutes les pièces et renseignements, dans les trois jours au plus tard, y compris celui où ils ont reconnu le fait sur lequel ils ont procédé. » Les art. 18 et 20 ajoutent que les gardes forestiers, les gardes champêtres et les gardes particuliers remettront leurs procès-verbaux dans le délai fixé par l'art. 15. Les lois spéciales sont plus rigoureuses encore. L'art. 10 de la loi du 30 avril 1790 porte que les rapports en matière de chasse seront dressés et affirmés dans les vingt-quatre heures du délit qui en sera l'objet, et cette disposition a été reproduite par l'art. 24 de la loi du 3 mai 1844. L'art. 7 de la loi du 28 septembre-6 octobre 1791 prescrit aux gardes champêtres de faire les rapports des délits ruraux dans les vingt-quatre heures. En matière de douanes, l'art. 2 du tit. 4 de la loi du 9 floréal an vII porte que les préposés rédigeront de

suite leur rapport. En matière de contributions indirectes, l'art, 2 du décret du 1er germinal an xiii suppose que la rédaction du procès-verbal suit immédiatement la saisie, et l'art, 68 de la loi du 28 avril 1816 ajoute que : « Les procès-verbaux rapportés pour refus d'exercice seront présentés, dans les vingt-quatre heures, au maire de la commune qui sera tenu de viser l'original. « En matière de garantie d'or et d'argent, l'art. 102 de la loi du 19 brumaire an vi veut que le procès-verbal soit dressé à l'instant et sans déplacer. En matière de poids et mesures, l'ordonnance du 17 avril 1839 porte que : « Les vérificateurs dressent leurs procès-verbaux dans les vingtquatre heures de la contravention par eux constatée. »

Les procès-verbaux dressés en dehors de ces différents délais doivent-ils être déclarés nuls? Il ne peut exister sur ce point aucun doute en matière de contributions indirectes, de douanes, de garantie d'or et d'argent et même de poids et mesures. Ces procèsverbaux, étant le titre de l'action et la preuve exclusive de la contravention, doivent présenter toutes les garanties de la vérité du témoignage qu'ils expriment; or, l'une de ces garanties est qu'ils soient rédigés dans les délais fixés par la loi. La Cour de cassation a jugé, conformément à cette opinion: 1° que le procès-verbal rédigé en matière de poids et mesures, plus de vingt-quatre heures après la contravention constatée, est nul'; 2o que le procèsverbal en matière d'or et d'argent qui n'a pas été

Arr. Cass. 28 sept. 1850, rapp. M. Quénault.

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