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Le troisième délai, celui de trois jours, soulève, quand il s'agit de régler sa computation, une question grave: doit-on comprendre dans les trois jours celui de la clôture du procès-verbal? En d'autres termes, la règle dies à quo non computatur in termino doit-elle s'appliquer ici? Il serait en dehors de notre sujet d'établir d'une manière générale cette règle, qui a été contestée par M. Merlin', mais que M. Troplong a maintenue avec une supériorité évidente de raison 2, et qui s'appuie d'ailleurs sur une longue jurisprudence la seule question qui doive nous occuper est de savoir si le délai de l'affirmation y est soumis. Les lois qui prescrivent ce délai se bornent à dire que l'affirmation aura lieu dans les trois jours. Or, de ce texte seul, d'abord, on peut induire que la loi n'a pas entendu comprendre dans ces trois jours le jour à quo ce sont les trois jours qui suivent le jour de la constatation; et ce qui le prouve, c'est que ces trois jours sont les jours du délai: or, s'il fallait y comprendre celui de la rédaction du procès-verbal, le délai n'aurait plus trois jours, puisqu'il faudrait en déduire toutes les heures écoulées jusqu'à celle de la clôture. Ce n'est pas qu'en matière criminelle la maxime dies à quo non computatur in termino doive s'appliquer sans distinction: s'il s'agit de régler l'exécution d'une peine temporaire, s'il s'agit encore de

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Rép., vo Délai, sect. 1, § 3; et vo Prescription, sect. 2, § 2.
Des Hypothèques, t. I, p. 450, no 293 à 314.

3 Tiraqueau, De retractu, art. 1, gloss. 11, num. 17 et seq.; Voet, Ad Pand., tit. 12, De feriis, n°14; Toullier, t. VI, no 682, et t. XIII, no 54.

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fixer le point de départ d'une prescription', il y a lieu de faire exception à cette règle, soit parce que les lois pénales doivent être interprétées dans leur sens le plus favorable à l'humanité ou à la défense, soit parce que leurs dispositions sont conçues en termes exprès; mais lorsqu'il s'agit de l'accomplissement d'une formalité destinée à imprimer aux procès-verbaux un caractère probant, quel serait le motif de l'exception? Il est certain que le délai de trois jours n'est point excessif; et la défense ne peut faire valoir d'autre intérêt que celui de la vérité. Il y a donc lieu de se référer dans ce cas au droit commun, et le droit commun est la règle dies à quo non computatur in termino 2. La Cour de cassation a confirmé cette interprétation. Un procès-verbal, soumis à l'affirmation dans les trois jours, avait été dressé le 7, à onze heures du soir, et n'avait été affirmé que le 10. La Cour a cassé un arrêt qui avait annulé ce procès-verbal : « Attendu qu'il est établi et reconnu que le procès-verbal des préposés a été affirmé le troisième jour après sa clôture; qu'ainsi, il l'a été dans le délai fixé par la loi, et que l'arrêt est en contravention expresse à son texte 3. >>> Dans une autre espèce, le procès-verbal avait été terminé le 15 et affirmé le 16, et la Cour de cassation a jugé : Que ce procès-verbal, commencé le 12 et terminé le 13, à six heures du soir, a été signifié le 14 après midi, et affirmé le 16, à huit heures du matin, de

1 Voy. notre tome III, p. 701.

2 Conf. Mangin, no 28.

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3. Arr. Cass. 7 oct. 1809 Journ. du pal., t. VII, p. 841).

vant le juge de paix; qu'il suit de là que cet acte a été notifié et affirmé dans les délais de la loi '. » L'énonciation des heures, dans ce dernier arrêt, pourrait porter à penser que la Cour a voulu compter les trois jours par heure et non par jour; mais telle n'a pas dû être la pensée de l'arrêt les délais de plus de vingt-quatre heures ne se comptent que par jour.

Deux règles générales s'appliquent à ces différents délais. La première est qu'il n'y a pas lieu de prolonger le délai lorsqu'il expire un jour férié. En effet, tous les actes qui se rapportent à l'expédition des affaires criminelles peuvent, aux termes de l'art. 2 de la loi du 17 thermidor an vi, être faits même les jours fériés. Ce principe, qui existait déjà dans notre ancienne jurisprudence 2, a été étendu par notre législation actuelle même aux jugements 3. Quelques lois spéciales ont pris soin de l'appliquer particulièrement aux procès-verbaux. L'art. 24 du décret du 1er germinal an xIII et l'art. 77 de l'ordonnance du 9 décembre 1814 portent : « Les procèsverbaux pourront être faits tous les jours indistinctement. » Il est donc certain que le délai de l'affirmation ne se prolonge pas lorsque le jour ad quem est

un jour de fête.

La seconde est que le délai ne commence à courir, lorsque le procès-verbal constate des recherches ou

1 Arr. Cass. 14 juin 1834 (Journ. du droit crim., t.VI, p. 305). 2 Arr. Parl de Provence. 17 déc. 1667.

3 C. d'instr. crim., art. 353; Arr. Cass. 14 avril 1815, 10 juin 1826, 8 mars et 12 juill. 1832, 5 déc. 1839, etc.

des opérations qui peuvent avoir une durée plus ou moins longue, qu'à partir du jour ou de l'heure de sa clôture. En effet, ce délai a été accordé aux préposés pour qu'ils puissent, sans nuire à leur service, le quitter momentanément pour remplir cette formalité; il ne doit donc compter que du moment où ils ont terminé les actes qui se rattachent à la rédaction, puisque jusqu'à ce moment ils ne peuvent en profiter. La Cour de cassation a reconnu cette règle en déclarant : « Que la loi ne présente aucune disposition qui exige que, dans le cas où la longue durée des opérations relatives à une saisie demande nécessairement que les rapports ou procès-verbaux soient divisés en deux ou plusieurs séances ou vacations, il y ait autant d'actes d'affirmation que d'actes particuliers énonciatifs de ce qui a été fait dans chaque séance; que, lorsque la force des circonstances oblige les préposés à diviser un procès-verbal en deux séances, et conséquemment en deux contextes, il n'est pas nécessaire que chacun de ces actes, intimement liés l'un à l'autre et ne formant qu'un seul rapport, soit suivi d'un acte particulier d'affirmation; qu'il suffit qu'à la suite du second, lequel se réfère au premier, dont il est le complément, ait été remplie la dernière formalité d'un procès-verbal qui, bien que divisé en deux vacations, ne constitue qu'un seul et même corps d'acte '. » La même Cour a jugé dans une autre espèce, par application de la même règle: «Que les employés des contributions indirec

1 Arr. Cass. 11 oct. 1827 (Journ. du pal., t. XXI, p. 816).

tes peuvent, si le cas l'exige, employer plusieurs vacations pour continuer et finir leurs opérations et en rédiger procès-verbal; que ce n'est que lorsque cet acte est complet et entièrement terminé qu'il peut être signifié et affirmé; d'où il résulte la conséquence que le délai fixé pour opérer cette signification et cette affirmation court de la clôture du procès-verbal ou de la dernière vacation '. »

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De l'enregistrement des procès-verbaux.

L'enregistrement est la dernière des formes dont le procès-verbal doit être revêtu. Cet acte est clos, et toutes les solennités propres à lui imprimer le caractère d'une preuve juridique sont accomplies, lorsqu'il est soumis à cette nouvelle formalité.

L'enregistrement a pour but, non pas de donner au procès-verbal une date certaine, car il fait foi de la date que lui a donnée son rédacteur comme de toutes les autres énonciations qu'il renferme; mais de constater l'existence même de cet acte, qui ne doit pas rester entre les mains de l'agent qui l'a rédigé, et de contrôler la date qui lui a été donnée, de manière que l'erreur ou l'omission puisse en être relevée. Cette formalité est extrinsèque au procès-verbal, puisqu'elle n'y est apposée que lorsqu'il est complet; elle n'a d'importance réelle, en ce qui con

Arr. Cass. 14 juin 1834 (Journ. du pal., t. XXVI, p. 636).

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