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( N° 90.)

Chambre des Représentants.

SÉANCE DU 4 FÉVRIER 1841.

ROUTES DE L'ÉTAT. — 1830-1840.

RAPPORT PRÉSENTÉ AUX CHAMBRES LÉGISLATIVES,

PAR LE MINISTRE DES TRAVAUX PUBLICS,

Les routes de la Belgique peuvent être citées au nombre des plus belles de l'Europe.

Cette situation favorable de nos communications pavées et empierrées doit être attribuée aux soins que l'on apporte à leur entretien et à l'excellente qualité des matériaux que l'on cherche toujours à se procurer, même au prix de sacrifices considérables.

En 1830, les routes de la Belgique se trouvaient, en général, dans une situation satisfaisante; mais elles n'étaient pas entretenues peut-être avec les mêmes soins qu'aujourd'hui.

Avant 1830 et à partir de 1815, le revenu des barrières était affecté à l'entretien des routes; mais il ne constituait pas un fonds spécial destiné exclusivement à cet usage.

Le gouvernement accordait des fonds, selon qu'il le jugeait convenable, pour l'entretien des routes de 1re et 2e classe, et il disposait de l'excédant du produit des barrières avec toute la latitude que lui laissait l'art. 225 de la loi fondamentale.

En 1819, le gouvernement imposa aux provinces la charge de l'entretien

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des routes de 2e classe, en se bornant à leur allouer des subsides qui n'étaient pas toujours en rapport avec les dépenses que nécessitait l'entretien de ces communications.

Enfin, par une disposition du 12 août 1828, les routes de 1re classe furent abandonnées au syndicat d'amortissement qui en perçut les revenus et pourvut à leur entretien.

Les routes se ressentirent beaucoup du changement complet d'administration qui venait de s'opérer; le syndicat d'amortissement, institution toute financière, s'attachait trop exclusivement à borner l'entretien des routes au plus strict nécessaire.

Quant aux routes de 2o classe, dont l'administration fut imposée aux provinces, elles étaient assez bien entretenues; mais les ressources des provinces étaient généralement insuffisantes pour les besoins auxquels elles devaient subvenir.

Telle était la situation des choses lors des événements de 1830.

Le congrès national décréta le maintien de la taxe des barrières pour subvenir à l'entretien des grandes routes.

Les décrets émanés à ce sujet de cette assemblée portent la date du 6 mars 1831: ils établissent en principe que les droits payés aux barrières sont exclusivement affectés à l'entretien et à l'amélioration des routes. Le cahier des charges qui forme le 3e de ces décrets, stipule, art. 2, que le bail sera d'une année, d'où l'on a inféré que les trois décrets devenaient sans effet après ce terme.

Ces décrets furent en effet prorogés jusqu'au 1er avril 1833, par la loi du 8 mars 1832, et la loi du 18 mars 1833 remplaça tous les décrets antérieurs et régla définitivement la législation sur la matière, en statuant, art. 5, que les fonds provenant de la taxe des barrières seront versés dans les caisses de l'État et affectés à l'entretien et à l'amélioration des routes, ainsi qu'à l'ouverture des routes nouvelles.

Ce fonds obtint par cette disposition une destination toute spéciale et ne put plus être affecté à un autre usage.

La même loi reprit aux provinces l'administration des routes de 2o classe pour les faire rentrer dans le domaine de l'État.

La loi du 18 mars 1833, légèrement modifiée, fut prorogée, pour une année, par la loi du 12 mars 1834.

La loi du 12 mars 1834 fut successivement prorogée, par les lois subséquentes du 23 mars 1836 et du 6 mars 1837.

Enfin, la loi du 10 mars 1838 rendit les lois des barrières permanentes, en établissant toutefois les réserves suivantes :

1o La durée des baux ne pourra excéder trois années.

2° La faculté de résilier à des époques et pour des cas annoncés avant la mise en adjudication et rappelés dans le procès-verbal d'adjudication, pourra être stipulée en faveur, tant du gouvernement que de l'adjudicataire.

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3o Ces baux n'engageront l'État que pour les années pour lesquelles la loi annuelle des voies et moyens aura autorisé la continuation de la perception de la taxe.

A partir de 1831 et jusqu'en 1835, l'entretien ordinaire des routes de l'État fut adjugé, soit pour un an, soit pour deux ans, sur des cahiers de charges établis d'après les besoins spéciaux ou les usages des localités.

A partir de 1835, cet entretien fit l'objet d'un bail de trois ans, qui a pris fin le 1er avril 1838.

Les cahiers des charges de ce nouveau bail n'étaient pas conçus d'après des principes communs ni rédigés d'après des bases uniformes; dans chaque province on suivait la marche que l'on considérait comme la mieux adaptée aux besoins locaux.

Dans telle province l'entreprise constituait un forfait à peu près absolu; dans telle autre, les quantités de matériaux à fournir et d'ouvrages à exécuter étaient exactement déterminées.

Ailleurs la fourniture des matériaux faisait seule l'objet d'une adjudication, l'administration des ponts et chaussées se réservant de les mettre en œuvre.

Ce défaut d'ensemble à l'égard d'entreprises qui, par leur nature, semblaient susceptibles d'être ramenées, sinon à une marche uniforme, du moins à des principes communs, fit sentir le besoin d'un cahier des charges général applicable à toutes les provinces; mais ce travail important, qui soulevait de nombreuses difficultés, ne put se trouver terminé au 1er avril 1838; force fut donc de proroger le dernier bail d'une année.

Enfin, au commencement de 1839, sauf quelques exceptions là où les baux n'étaient pas encore expirés, l'entretien des routes de l'État fut adjugé d'après des bases uniformes pour un terme de six années, qui a pris cours le 1er mai 1839, et qui expirera le 1er avril 1845.

Toutefois le nouveau contrat stipule la faculté de résiliation, de part et d'autre, au 30 avril 1842; c'est-à-dire à la fin de la moitié de la période.

L'avantage des baux à long terme est évident : l'entrepreneur qui a un bail de quelques années se procure en temps utile, à l'avance et à des prix plus modérés, les matériaux dont il a besoin. Il a aussi les moyens de commencer ses travaux en saison convenable et de leur donner une plus grande extension les premières années, afin d'avoir moins à faire les années suivantes.

Ces facilités permettent des réductions de prix; aussi les résultats des dernières adjudications sont-ils généralement avantageux, en tenant compte du renchérissement du prix des matériaux et de la main-d'œuvre, et eu égard aussi aux exigences du cahier des charges qui renferme des stipulations nouvelles, jusqu'alors inconnues dans plusieurs provinces.

L'entretien des routes de l'État a donc été assuré d'une manière convenable, pour le terme de 6 années, et le gouvernement est fixé sur la dépense annuelle de cet entretien. En ajoutant à cette dépense les salaires des préposés aux ponts à bascule, chefs-cantonniers, chefs-terrassiers, etc., ainsi que la

somme qu'il convient de tenir en réserve pour faire face aux éventualités et aux événements de force majeure, l'administration connaît le chiffre dont elle peut disposer, tant pour travaux d'améliorations ou de constructions nouvelles que pour subsides à accorder aux provinces ou à des concessionnaires.

Cette ressource n'est pas sans importance; mais elle est par elle-même trop restreinte pour permettre de donner, dans un temps limité, aux constructions nouvelles un remarquable développement.

De là l'idée de créer des ressources extraordinaires, idée qui fut accueillie par la législature,

La loi du 2 mai 1836 a ouvert au gouvernement, pour le service des routes, un crédit extraordinaire de 6 millions.

L'emploi de ce crédit, tout insuffisant qu'il fût pour compléter notre système de routes, a eu un résultat très satisfaisant. Ce résultat a été double : des lignes considérables, s'étendant dans toutes les directions, ont été décrétées successivement plusieurs sont déjà ouvertes et d'autres se trouvent en plein cours d'exécution.

Il a été donné aussi une grande impulsion aux travaux provinciaux, impulsion qui a déjà porté les meilleurs fruits et qui, sans doute, ne s'arrêtera pas dans ses heureux effets.

L'exemple donné par le vote du crédit de 6 millions fut suivi par les conseils provinciaux. Les travaux publics remplirent presqu'exclusivement la session de 1837 : chaque province vota avec une sorte d'entraînement auquel ne répondaient pas toujours ses ressources financières, une série de communications dont l'utilité était reconnue et l'exécution vivement désirée.

Il résulte des tableaux annexés aux délibérations des conseils provinciaux, et qui se trouvent reproduits dans le rapport présenté aux Chambres, par mon prédécesseur, le 4 mai 1838, que l'on a proposé la construction de 212 routes, savoir :

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La dépense de ces constructions a été évaluée approximativement à la somme de 48,000,000 de fr., qui peut être portée, sans exagération, à soixante millions.

Toutefois, comme il est à prévoir que plusieurs des communications décrétées par les provinces ne seront entreprises, si elles le sont, qu'à des

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