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débâcles, et qu'elle ne sera attaquée ni par les glaces, ni par les corps d'arbres ou autres objets destructifs des ouvrages, charriés seulement dans les hautes eaux (1).

Le massif de la jetée, dont la construction a été brusquement interrompue, sera en moellons bruts, et il a été décidé que son couronnement, qui s'élèvera à 0m,20 en contre-haut de l'étiage ordinaire, serait en moellons dégrossis au marteau, posés de champ, par rangées transversales, en hérisson, serrés ́et joignants, de manière que les angles d'arête soient bien dressés.

L'enrochement sera formé, pour plus des trois quarts, de libages ayant au moins un dixième de mètre cube. Les autres pierres pour garnir les vides seront plus petites.

La rive gauche, sur laquelle se fait le halage, a été dressée dans toute l'étendue de la passe artificielle, à l'amont et à l'aval, avec un talus de 1m,50 de base par mètre de hauteur. En quelques parties, elle a été couverte par un enrochement qui protége le pied du talus, et défendue, au-dessus de l'enrochement, par un péré en moellons bruts, dont les faces de joints sont perpendiculaires au plan du talus, ayant une épaisseur moyenne de 0,30 et 0m,40 de queue

au minimum.

Partout le halage est tenu à plus de 3m,50 au-dessus des basses eaux, et la largeur du chemin est partout au moins de 5 mèt.

Le draguage était déjà très-avancé, il se commençait dans la partie la plus étroite du courant, et la jetée en rivière eût été facilement achevée : il aurait suffi de quelques semaines; mais des crues rapides sont venues tout interrompre. Les travaux noyés une première fois le 14 juillet, ont été envahis de nouveau, dans la nuit du 8 au 9 octobre, par une crue de 1m, 10, hauteur au-dessus de laquelle les eaux sont presque constamment restées, et il n'a plus été possible de les reprendre.

La totalité des ouvrages a été soumissionnée pour la somme de fr. 90,9-45-85, sur laquelle il a été payé fr. 27,325-68 en à-compte pour une partie des

travaux exécutés.

Un travail analogue, mais dont les conditions ne sont pas les mêmes, a pu être poursuivi malgré la hauteur des eaux. C'est le barrage de Tailfer et celui de Dave.

(1) La pression hydrostatique exercée sur la jetée étant représentée par P=pgaz, et égale au poids d'un cylindre d'eau qui aurait pour base la surface du talus intérieur, et pour hauteur la distance du centre de gravité de cette surface au niveau de l'eau, est exprimée, dans le cas de l'étiage, par 1,000 × 2,70 × 0,75=2,025*. Quand l'eau atteint le sommet de la jetće et l'affleure, la pression est 1,000 × 3,064 × 0.85 = 2,604*. Enfin, quand la jetée devient déversoir, on a 1,000 × 0,20 × 0,10 × 2 = 40*. Mécanique de POISSON; Traité d'Hydraulique de D'AUBUISSON, etc.

L'épaisseur de 1 mèt. en couronne serait beaucoup trop forte si la jetée ne devait résister qu'aux eaux ordinaires; c'est à cause des effets auxquels elle est exposée dans les hautes eaux que ses dimensions ont été exagérées. Du reste, il fallait bien les fixer par approximation, les talus ayant une inclinaison qui s'oppose à l'emploi direct des formules. Résumé des leçons données à l'école des ponts et chaussées, etc.; par M. NAVIER. Paris 1833.

Au droit de Tailfer, le lit de la Meuse, à l'étiage, a 80 mèt. de large et une profondeur moyenne d'environ 1 mèt.; elle s'élargit graduellement jusqu'à l'ile Très-Douce, sur une longueur de 700 mèt., et sa largeur est de 130 mèt. lorsqu'elle se bifurque en amont de l'île. L'un des deux bras, celui de droite, n'est suivi par la navigation qu'en descente et dans les grosses eaux seulement : il a pour largeur moyenne, comme le lit entier à Tailfer, à peu près 80 mèt. et sa profondeur est insuffisante à l'étiage; l'autre, celui de gauche, qui n'a que 25 à 30 mèt. de large, est à cette époque le seul chemin des bateaux, à la descente comme à la remonte.

Les mesures de vitesse prises à quelques centaines de mètres au-dessous de l'île Très-Douce, en amont de l'île de Dave et au Péribonier, ont donné les résultats suivants :

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Les formules dont on déduit la vitesse moyenne manquant d'exactitude pour les profils où la masse d'eau ne participe pas sensiblement au mouvement général, le produit ne peut guère être évalué ici qu'à 40m3; mais, vu l'époque de la jauge, il doit être regardé comme un minimum.

La hauteur constante à laquelle se sont maintenues les eaux dans l'été de 1841, n'a pas permis de faire des jaugeages avant la présentation du projet de Tailfer (1); celles de l'année précédente, applicables aux parties du fleuve voisines du point où elles ont été faites, ne pouvaient donner lieu à aucune erreur. Le but des travaux en cette localité était :

1o D'opérer un rétrécissement propre à augmenter le tirant d'eau d'étiage; 2o D'apprécier l'effet des hautes eaux sur le fond de la rivière, lorsque, resserrée dans de certaines limites, la passe est dans leur direction;

3o De reconnaître si la longueur de la passe, quand sa direction est conve

(1) Le 2 juin 1841.

VOLUME D'EAU.

nablement établie et que sa section est en rapport avec le débit de la rivière, présente des inconvénients pour la navigation;

4o Et enfin, de s'assurer de l'économie avec laquelle les améliorations au cours de la Meuse pourraient être opérées, si, dans les parties qui ne requièrent point un approfondissement immédiat, ou qui ne demandent qu'une augmentation actuelle de quelques centimètres dans le mouillage, on abandonnait aux crues du fleuve le travail d'un approfondissement ultérieur.

Il s'agissait donc de calculer les dimensions de la passe dans l'hypothèse d'un débit de 40m3 par seconde.

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PENTE

DE RI.

PAR MÈTRE.

Avec une largeur de 35 mèt. au plafond, ou de 39m,50 à la ligne d'eau, et un mouillage de 1m,50, la passe devrait avoir 1,307m de longueur. Dans l'exécution, elle a 40 mèt. de largeur à la surface d'étiage, depuis Tailfer jusqu'à l'ile Très-Douce, sur 650 mèt. de développement; réunie ainsi avec le bras de gauche de l'ile, qui sur une longueur de 556 mèt., n'a guère que 30 mèt. de section moyenne, elle a en tout 1,206 mèt. La différence de 100 mèt. en moins avec la formule est certainement plus que compensée par le rétrécissement de la passe, 30 mèt. au lieu de 40, sur une étendue de 556 mèt.

A la hauteur d'eau qui variait dans le chenal de 0,50 à 0m,80,et qui était déjà de 1m,20 dans le bras de gauche, s'est ajouté le gonflement que le resserrement devait produire (1).

(1) On ne peut se fier aux formules hydrauliques, et elles ne sont vraies, taines limites et pour certaines rivières.

que dans cer

Pour calculer le gonflement d'amont dans le cas actuel, si l'on a recours à la formule de

2

D'Aubuisson qui répond à un barrage de toute la largeur de la rivière, h=0,64

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a h=0,40, valeur évidemment trop forte; et néanmoins la formule que M. Poirée, inspec

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teur divisionnaire des ponts et chaussées, a employée sur la Seine, D

qui

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répond à un barrage partiel, et dans laquelle D=40m3, b = 1", 10, L=80, 7=40 mèt., donne

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A l'île de Dave, un barrage de 144 mèt. de longueur ferme le bras de droite et ramène toutes les eaux d'étiage dans le bras de gauche. Là, la pente n'étant que de 0m,385 pour 1,200 mèt., ou de 0,00032 par mètre, il est vraisemblable que la passe se perfectionnera dans le bras conservé et qu'il ne sera pas nécessaire de le rétrécir. Quoique la largeur moyenne de ce bras soit de 50 à 60 mèt., il n'y en a pas moins dans le thalweg 1m,50, 1m,60 et plus de tirant d'eau, sa moindre profondeur étant de 1,20.

Le fond de la Meuse offrant en général une grande résistance, j'ai profité de celle qui a été reconnue en ces deux points pour établir la jetée sur le gravier sans aucune fondation au-dessous du lit actuel.

Ce travail devra donc être surveillé avec soin: il est d'un extrême intérêt de s'assurer si les hautes eaux creuseront le chenal sans affouiller la jetée.

C'est, j'espère, ce qui arrivera.

Si la jetée était transversale, il n'y aurait point d'épreuve à faire et l'affouillement serait infaillible; mais elle est longitudinale, et c'est un cas tout diffé

rent.

On sait, en effet, d'après les observations de Venturi, que les anfractuosités de la rive provoquent des tourbillons à axes verticaux, et que des tourbillons à axes horizontaux naissent des excavations ou des ressauts brusques du fond du lit (1). Il en résulte que si, après un coude, la rive se prolonge en ligne droite, avec un talus régulier, le tourbillon vertical disparaît: la section horizontale étant évidemment une spirale hyperbolique dont l'asymptote est parallèle à la rive, ce tourbillon se développe en une longue spirale dont le rayon de courbure augmente rapidement, et qui se termine en un courant régulier dans la direction de l'asymptote. Par la même analogie, l'exhaussement du fond qui occasionne un tourbillon horizontal, s'il a quelque étendue en longueur, engendre un courant qui l'enveloppe parallèlement à ses faces, et il n'y a plus de roulement dans aucun sens le haut-fond est entouré d'un courant longitudinal qui ne sera interrompu et ne cessera que par un changement brusque dans la direction qu'il suit. Des courbes d'un grand rayon ne le détruiront pas.

Ces conséquences me paraissent découler directement des observations de Venturi (2).

un résultat plus fort que la formule de D'Aubuisson, déjà trop élevé. La jetée cependant ne forme pas un barrage transversal de 40 mèt.; mais, à partir de son raccordement avec la rive droite, elle décrit une courbe adoucie qui diminue de beaucoup le gonflement, lequel serait, d'après la formule de M. Poirée, h' 0,58.

(1) Recherches expérimentales sur le principe, etc.; par J.-B. VENTURI.

(2) Certains tourbillons qui se manifestent dans le mouvement des fluides avaient été décrits antérieurement; mais personne n'a traité ce sujet d'une manière aussi complète que Venturi. Hydrodynamique de BENOUILLI; Traité d'hydrodynamique, par Bossur, Paris, 1786; etc.

Si donc une jetée submersible est bien dans la direction des hautes eaux et qu'elle soit établie sur un sol résistant, quoique d'ailleurs la résistance du fond soit la même dans la passe artificielle, il y aura approfondissement du plafond de la passe sans affouillement de la jetée.

C'est un point sur lequel il ne peut être qu'avantageux de s'éclairer par l'expérience.

Une importante réparation au chemin de halage est le complément du barrage de Dave.

A l'aval de l'île, au Péribonier, les eaux ont précédemment emporté une partie de la rive gauche; elles y ont formé un coude de 19 mèt. de flèche, dans lequel un courant de 1m,56 par seconde, plus rapide lors des premières crues, a creusé le fond du lit le long de cette rive, qui est celle du halage : les bateaux sont obligés d'y passer, au risquc de périr en descendant, et avec de longs retards, des difficultés extrêmes et à force de chevaux, en remontant. Un attérissement très élevé, partant du milieu de la rivière et s'étendant vers les deux rives, interdit tout autre chemin (1).

Il fallait donc reconstruire la partie coupée du halage, en redressant le coude, et enlever l'attérissement pour ne point intercepter la circulation des bateaux.

Ces deux opérations devaient être successives, et, afin de laisser un passage libre à la navigation, il fallait d'abord faire le draguage. En commençant au mois d'octobre, à l'entrée de la mauvaise saison, le travail était hasardeux et le succès fort incertain. Aussi dès le 9 du mois, les pieux enfoncés pour établir un batardeau étaient à peu près submergés; mais cette circonstance d'une crue hâtive, si nuisible sur d'autres points, n'a pas empêché ici le travail essentiel : elle a donné le moyen de se passer du draguage. La hauteur des eaux a favorisé l'enrochement nécessaire au rétablissement du halage, et, après le coude détruit, l'attérissement n'est plus un obstacle à la navigation. Il reste dans le chenal, sur une largeur de 10 à 12 mèt., et sur 90 mèt. de longueur, un tirant d'eau de 0,55 à 0m,60. Ce mouillage, en outre de l'approfondissement qu'effectueront les hautes eaux, s'augmentera par le gonflement que doivent produire le redressement de la rive gauche, la jetée en amont de l'île de Dave et le barrage de l'îlot, à l'aval de l'île.

Les devis, pour les travaux de Tailfer, montent à fr. 18,562-12; pour l'ile de Dave à fr. 3,194-65.

(1) Un propriétaire du Péribonier, pour défendre sa rive contre les érosions, a fait échouer au pied de la berge un bateau chargé de pierres; mais, aux premières crues de l'hiver suivant, les eaux gênées dans leur cours par un débouché trop étroit, se sont ouvert un chemin par la rive gauche, moins résistante que les pierres déposées dans leur lit. De là le coude du Péribonier et l'attérissement au droit de ce coude.

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