Page images
PDF
EPUB

CHAPITRE XXVIII.

Situation de la ville d'Auxerre fous le regne de François I. Ce Roi confirme les privileges des habitans. Les Magiftrats quittent la Ville à caufe de la pefte. Rouvrai revendiqué pour le Grenier à fel d'Auxerre. Police fur le fait de la Boucherie. Arrêt de l'an 1523. fur l'étendue du reffort du Bailliage d'Auxerre. Extraits de l'Acte de notification de l'Arrêt faite par un Commissaire du Parlement dans les lieux conteftés. Vains efforts des Officiers de Sens. Précautions contre la pefte en 1526. Elle recommence en 1531. Les petites Villes du Comté d'Auxerre, recherchent la protection de l'Amiral. Auxerre prête des fommes au Roi. Plan de la Ville envoyé à l'Amiral. Projet d'y ramener les eaux de Vallan. Maison achetée ( en conféquence d'un legs), pour y tenir le College. Le Roi & la Reine viennent à Auxerre en 1941. La guerre oblige les villages de l'Auxerrois à fe fermer de murs. Inventaire de l'artillerie d'Auxerre. Pefte de 1554. Grace accordée par le Roi aux habitans.

1514. juf

Uoique le regne de François premier ait été l'un des plus longs qu'on ait vu dans la Monarchie, l'hiftoire Depuis l'an particuliere du pays Auxerrois ne fournit pas un grand qu'en 1546.; nombre de faits; & il y en a peu d'intéressans, fi ce n'eft celui du reffort du Bailliage. La tranquillité qui regna au milieu du Royaume préfentoit moins d'occafions aux évenemens extraordinaires. Ce Prince étant informé de la réunion pleine & entiere du Comté d'Auxerre à la Couronne, auffibien que de la fidélité & obéiffance que les habitans avoient toujours gardé à la Couronne, leur accorda une confirmation de leurs privileges & de leur reffort, défendant à mois du Fétous les Magiftrats & Jufticiers de quelque Juftice ou Tri- vrier 15 14. bunal que ce fût, d'aller contre, ni de les enfraindre en aucune maniere.

[ocr errors]

Lettres du

Prefque dans le même temps la pefte commença à jetter la défolation dans Auxerre. Cette maladie fut fi violente, que les principaux Magiftrats ne fe crurent point en fûreté dans la Ville. Le Bailli & le Prevôt la quitterent avec leurs Lieutenans, & ils laifferent adminiftrer la Justice & les autres affaires par un feul affeffeur *. On voit par les *Simon Bercomptes combien les Chirurgiens eurent d'exercice depuis Z z

Tome II

thier.

1514. juf

le mois d'Avril jufqu'au mois de Janvier fuivant, & que la Depuis l'an Communauté fe chargea de payer leurs vacations auffi-bien qu'en 1546. que les peines de ceux qui donnerent la fépulture aux morts II. Compte durant l'efpace de neuf mois.Les Gouverneurs du Fait comde Jean Mar- mun pendant ces fâcheux temps, furent Henri Petit Prêtre Chanoine de l'Eglife Cathédrale, Jean Chacheré, &

tin.

compte & ce

Jean Petiot. Emard de la Clayette étoit toujours Gouverneur & Bailli. Il avoit deux Lieutenans. Celui qui le reLe même préfentoit en qualité de Gouverneur, étoit Louis de Gaillui de Ger- lard Ecuyer Sieur de Soleines. Son Lieutenant en qualité main Bar- de Bailli étoit Blanchet Davy. L'Avocat du Roi au Bailliage étoit Jean Ferroul. Je n'ai point trouvé le nom du Prevôt de ce temps-là. La difette qui eft une fuite ordinaire de l'abandon des héritages, mit les Auxerrois hors d'é

rault.

tat de payer leur cotte part des impofitions accordées par

les Etats de Bourgogne. Ils députerent à Dijon Jean le Seurre Procureur de leur Communauté, fur la fin de l'Automne pour remontrer que la maladie contagieufe duroit encore, & il fut écouté favorablement. On a déja vu plus haut que ce n'étoit pas un petit avantage pour la ville d'Auxerre de vendre elle-même le fel à fon profit. Il étoit de fon intérêt que le reffort de fon Grenier à fel fut étendu le plus qu'il étoit poffible. Les Officiers de celui de Saint Florentin entreprirent de foumettre au leur les gens Compte du du village de Rouvrai, & attaquerent pour cela deux des habitans de ce lieu. La Ville prit fait & caufe pour eux en Comptes de 1517. par la plume de Philippe le Briois Licentié ès Loix. Germ. Bar- Nicolas Johannis Abbé de Saint Marien, étoit alors premier Gouverneur avec Claude le Marchand Chevalier. Ce dernier eft le même à qui fut dédiée l'édition des poëfies de Jean Regnier ancien Bailli d'Auxerre, qui fut faite à Paris en 1524. Ce Chevalier y eft qualifié Seigneur du Bouchet & Elu d'Auxerre.

1. Février

1517.

rault.

[blocks in formation]

Il s'éleva un peu après, touchant le débit de la viande, une difficulté dont le même Sieur du Bouchet fut l'un des auteurs. J'ai déja fait remarquer que dès le treiziéme fiecle les boucheries d'Auxerre étoient fituées au-dehors de la Cité le long des anciens murs du côté du midi. Cette féparation des bouchers du refte des citoyens, paroiffoit fort judicieufe, & ils ne pûrent excéder leurs lunites fans que

Depuis l'an 1514. jufqu'en 1546.

cela causât du trouble. Prefque tous les étaux joints à leurs maifons dépendoient de quelque Eglife ou Monaftere, ou bien de quelques Gentilshommes & autres féculiers; le nombre en étoit tellement fixé, que perfonne ne pouvoit de fa propre autorité en élever un nouveau; il falloit. pour cela la permiffion des Magiftrats. Un boucher cependant entreprit de dreffer un étau hors l'enceinte ordinaire des boucheries. Les Communautés & les particuliers propriétaires des anciens étaux lui intenterent procès, l'Evêque à la tête, le Chapitre de la Cathédrale, celui de Notre-Dame de la Cité, Robert de Lux Prieur de Saint Amatre, Pierre Charpon Licentié ès Loix, Claude le Marchand Chevalier nommé ci-dessus, & Edme des Bordes. Le Défendeur fuccomba à Auxerre, & fut condamné par le Bailli à détruire fon étau. Il en appella au Parlement où la Sentence du Bailliage fut confirmée le 16. Avril 1521. avant Pâques. La Cour cependant prévoyant qu'il feroit peut-être néceffaire d'augmenter le nombre des étaux, réferva au Procureur du Roi & à celui de la Ville le pou-: voir de demander permiffion au Bailli d'en faire dreffer de nouveaux, s'ils le jugeoient à propos. Ceci fe paffa fous le Gouvernement de Philbert de Beaujeu, qui joignoit à fa qualité de Grand-Prieur de l'Abbaye de Saint Germain, celle d'Evêque de Bethleem, d'Edme Morlon Licentié ès loix & Avocat au Bailliage, & Hugues de la Faye marchand. Les grandes occupations du premier ne lui permi rent pas de l'être une feconde année. Pierre de Piles Chanoine & Licentié ès loix lui fuccédá. Ce fut de fon temps que les habitans, après s'être concilié le Sieur de SainteMême Bailli de Sens, prirent des moyens efficaces pour terminer irrévocablement l'affaire du reffort à Villeneuvele-Roy, que les Officiers de Sens tâchoient toujours de ré- Concl. Vrtablir. Denis Caffin Chanoine de la Cathédrale & Curé de Saint Bry fut envoyé à Paris pour faire finir cette affaire & il y prit de fi bonnes mesures avec Laurent Bretel aussi Chanoine, que l'année suivante mit fin à tous les vains prétextes des Officiers du Siége de Sens.

;

Après la mort de Germain Chaftelier Confeiller au Parlement, l'affaire fut diftribuée à Robert Thibouft neveu de l'Evêque Jean Baillet, qui avoit autrefois beaucoup agi en

bis 1520. 1. Januarii.

1514. jufqu'en 1546.

faveur des Officiers d'Auxerre. Il avoit dans la Ville deux Depuis l'an de fes cousins germains Archidiacres de la Cathédrale : sçavoir Jean Hennequin & Odoard Hennequin, neveux du Président Thibaud Baillet fon oncle, de l'intérêt defquels il étoit que les Diocéfains d'Auxerre ne fuffent pas attirés pour plaider hors de ce Diocèfe. Les follicitations des habitans jointes à leurs bonnes raisons obtinrent du Parlement un Arrêt en date du 23. Mars 1523. avant Pâques, par le moyen duquel tout fut terminé. Le préambule de cet Arrêt renferme l'Hiftoire des oppofitions faites anciennement à l'étendue du reffort d'Auxerre. On y voit que Philippe de Savoify Seigneur de Seignelay s'étoit oppofé à ce que fa Terre y fut comprife; que les pourfuites qu'il avoit commencées furent continuées par Claude de Savoify fon fils, & qu'enfin les habitans de Seignelay furent déclarés exempts de reffortir à Auxerre, mais non pas les habitans des autres lieux dépendans de la même Seigneurie. On y apprend encore, que le Comte de Nevers avoit fait les mêmes efforts pour quelques-unes de fes terres fituées dans le Comté d'Auxerre; mais que les habitans d'Auxerre avoient toujours oppofé à cela les termes de l'établissement du Bailliage de leur Ville, exprimés dans les Chartes des Rois, & qu'ils avoient regardé comme fubreptices toutes les exemptions prétendues par ceux de Seignelay & autres. Le Seigneur de Seignelay fut donc le feul qui perfifta à soutenir fon exemption du Bailliage d'Auxerre, quoique ce lieu foit la premiere Châtellenie du Comté, & qu'il ne foir éloigné de la Ville que de trois petites lieues. Les Savoify avoient toujours été oppofés à la maifon de Bourgogne à laquelle Auxerre étoit attaché, ou par néceffité ou par devoir, en conféquence des Traités d'Arras & autres. Ces Seigneurs objecterent toujours conftamment l'impoffibilité où ils étoient de reconnoître pour leurs Juges leurs propres ennemis : c'est ce qui leur fit accorder plufieurs Lettres de continuation dans leur premiere exemption, & qui fut caufe que François premier y donna les mains. Mais les Officiers de Sens eurent beau à relever par l'organe de Jean le Maître, l'antiquité de leur Bailliage & fa premiere étendue; le Roi ne voulut point infirmer ce que fes prédéceffeurs avoient fait depuis Charles V. qui ayant acheté le

[ocr errors]

Comté d'Auxerre, avoit illuftré la Ville par l'établissement d'un Siége Royal dont il avoit prefcrit très-fagement les Depuis l'an 1514. jufbornes: ce qui depuis avoit été approuvé par fes fuccef- qu'en 1546. feurs. Les habitans de Villeneuve-le-Roi avoient aussi pro duit tout ce qu'ils avoient trouvé d'avantageux en faveur de leur Ville : ils la difoient bâtie par Louis le Gros, & prétendirent qu'elle avoit été regardée pendant plufieurs fiécles comme une des frontieres de la France. Les gens d'Auxerre répondirent qu'Adam Coufinot autrefois Préfident au Parlement de Paris, étoit venu marquer les bornes de la jurifdiction d'Auxerre, fans oppofition de la part de ceux de Villeneuve-le-Roi, ou que s'ils en avoient appellé, ils n'avoient pas relevé leur appel. Par toutes les bonnes raifons qu'ils produifirent, jointes à un grand nombre de Lettres de fix ou fept Rois, & fur-tout une du 22. Janvier 1512. contre les prétentions des Religieux de Vezelay, ils parvinrent à obtenir des Lettres Patentes ou Arrêt du Parlement fur les Conclufions du Procureur Général : les Lettres obtenues de Louis XII. par Claude de Savoify, furent confirmées, & fur l'expofé De commodo & incommodo, tous les villages & Seigneuries fitués entre les rivieres de Loire & de Cure comprises dans le Diocèfe d'Auxerre, & autres plus proches d'Auxerre que de Villeneuve-leRoy, furent déclarées devoir reffortir au Bailliage d'Au

xerre.

mf. in Tabul

Vrbis.

Il fut queftion après cela de l'exécution d'un Arrêt fr folemnel. La Cour commit pour cet effet Maître Robert Cod. Special. Thibouft. Les Officiers du Siége d'Auxerre firent aussitôt députer à Paris François Lallemant chargé de la procuration de toute la Communauté. Ce Député muni de l'Arrêt obtint commiffion d'affigner Savinien Odoart Procureur du Roy de Sens, & les habitans de Villeneuvele-Roy, pour voir procéder à l'exécution. Le trentiéme de Mai, jour de l'affignation étant venu, on obtint que l'Arrêt fut publié dans les lieux fitués entre les rivieres de Loire & de Cure, & à Villeneuve-le-Roy. Le Commiffaire arriva à Auxerre le 19. Septembre. Dès le lendemain parurent à l'Audience Auguftin de Thou Avocat en Parlement, qui requit en présence d'Edmond Pufoye Procureur des habitans de Villeneuve-le-Roy, que Blanchet

Z z iij

« PreviousContinue »