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TRAITÉ D'AMITIÉ

DE COMMERCE ET DE NAVIGATION

ENTRE

la France et la République de Honduras

CONCLU A PARIS, LE 22 FÉVRIER 1856.

ART. 1er. Il y aura paix constante et amitié perpétuelle et sincère entre Sa Majesté l'Empereur des Français, ses héritiers et successeurs, d'une part, et la République de Honduras, d'autre part, et les citoyens des deux États, sans exception de personnes ni de lieux.

ART. 2. Il y aura entre tous les territoires de Sa Majesté l'Empereur des Français en Europe, et ceux de la République de Honduras, une liberté réciproque de commerce. Les citoyens des deux États pourront entrer en toute liberté, avec leurs navires et cargaisons, dans tous les lieux, ports et rivières des deux États qui sont ou seront ouverts au commerce étranger.

Ils pourront y faire le commerce d'échelle pour y décharger, en tout ou en partie, les cargaisons apportées par eux de l'étranger, et pour former successivement leur cargaison de retour; mais ils n'auront pas faculté d'y décharger les marchandises qu'ils auraient reçues dans un autre port du même État, ou autrement de faire le cabotage, qui demeure exclusivement réservé aux nationaux.

Ils pourront, sur les territoires respectifs, voyager ou séjourner, commercer, tant en gros qu'en détail, comme les nationaux; louer et occuper les maisons, magasins et boutiques qui leur seront nécessaires; effectuer des transports de marchandises et d'argent, et recevoir des consignations; être admis comme caution aux douanes, quand il y aura plus d'un an qu'ils seront établis sur les lieux, et que les biens fonciers qu'ils y posséderont présenteront une garantie suffisante. ART. 3. Sa Majesté l'Empereur des Français s'oblige, en outre, à ce

que les citoyens de Honduras jouissent de la même liberté de commerce et de navigation stipulée dans l'article précédent, dans les domaines de Sa Majesté situés hors d'Europe, qui sont ou seront ouverts au commerce et à la navigation de la nation la plus favorisée, et, réciproquement, les droits établis par le présent Traité en faveur des Français seront communs aux habitants des colonies françaises.

ART. 4. Les citoyens respectifs jouiront, dans les deux États, d'une constante et complète protection pour leurs personnes et leurs propriétés; ils auront un libre et facile accès auprès des tribunaux de justice pour la poursuite et la défense de leurs droits; et ce, aux mêmes conditions qui seront en usage pour les citoyens du pays dans lequel ils résideront.

Ils seront maîtres, à cet effet, d'employer, dans toutes les circonstances, les avocats, avoués ou agents de toute classe qu'ils jugeront à propos; enfin ils auront la faculté d'être présents aux décisions et sentences des tribunaux dans les causes qui les intéressent, comme aussi à toutes les requêtes et dépositions de témoins qui pourront avoir lieu à l'occasion des jugements, toutes les fois que les lois des pays respectifs permettront la publicité de ces actes.

Ils seront, d'ailleurs, exempts de tout service personnel, soit dans les armées de terre ou de mer, soit dans les gardes ou milices nationales, ainsi que de toutes les contributions de guerre, emprunts forcés, réquisitions militaires, et, dans tous les autres cas, ils ne pourront être assujettis, pour leurs propriétés; soit mobilières, soit immobilières, ni à aucun autre titre quelconque, à d'autres charges, réquisitions et impôts que ceux payés par les nationaux eux-mêmes.

Ils ne pourront être arrêtés, ni expulsés, ni même envoyés d'un point à un autre du pays, par mesure de police ou gouvernementale, sans indices ou motifs graves et de nature à troubler la tranquillité publique, et avant que ces motifs et les documents qui en feront foi aient été communiqués aux agents diplomatiques ou consulaires de leur nation respective. Dans tous les cas, il sera accordé aux inculpés le temps nécessaire pour présenter ou faire présenter au Gouvernement du pays leurs moyens de justification. Ce temps sera d'une durée plus ou moins grande, suivant les circonstances.

Il est bien entendu que les dispositions de cet article ne seront point applicables aux condamnations à la déportation ou au bannissement, d'un point à un autre du territoire, qui pourraient être prononcées conformément aux lois et aux formes établies par les tribunaux des pays respectifs contre les citoyens de l'un d'eux. Ces condamnations continueront à être exécutables dans les formes établies par les législations respectives.

ART. 5. Les Français catholiques jouiront dans la République de Honduras, sous le rapport de la religion et du culte, de toutes les libertés, garanties et protection dont les nationaux y jouissent; et les Honduriens jouiront également, en France, des mêmes garanties, libertés et protection que les nationaux.

Les Français professant un autre culte, qui se trouveront dans la République de Honduras, n'y seront inquiétés ni gênés en aucune manière pour cause de religion; bien entendu qu'ils respecteront la religion, le culte du pays, et les lois qui y sont relatives.

ART. 6. Les citoyens des deux nations seront libres de disposer, comme il leur conviendra, par vente, donation, échange, testament ou de quelque autre manière que ce soit, de tous les biens qu'ils posséderaient sur les territoires respectifs. De même, les citoyens de l'un des deux États qui seraient héritiers des biens situés dans l'autre pourront succéder, sans empêchement, à ceux desdits biens qui leur seraient dévolus ab intestat, et les héritiers ou légataires ne seront pas tenus à acquitter des droits de succession autres ou plus élevés que ceux qui seraient supportés, dans des cas semblables, par les nationaux eux-mêmes.

Et, dans le cas où lesdits héritiers seraient, comme étrangers ou pour autre motif, privés d'entrer en possession de l'héritage, il leur sera accordé trois ans pour en disposer comme il leur conviendra, et pour en extraire le produit, sans payer d'autres impôts que ceux établis par les lois de chaque pays.

ART. 7. Les citoyens de l'un et l'autre État ne pourront être respectivement soumis à aucun embargo, ni être retenus avec leurs navires, équipages ou cargaisons, ou effets de commerce, pour une expédition militaire quelconque, ni pour quelque usage public ou particulier que ce soit, sans qu'il soit immédiatement accordé aux intéressés une indemnité suffisante pour cet usage, et pour les torts et les dommages qui, n'étant pas purement fortuits, naîtront du service auquel ils seront obligés.

ART. 8. Si, ce qu'à Dieu ne plaise, la paix, entre les deux Hautes Parties contractantes, venait à être rompue, il sera accordé, de part et d'autre, un délai de six mois aux commerçants qui se trouveront sur les côtes, et d'une année entière à ceux qui se trouveront dans l'intérieur du pays, pour régler leurs affaires et pour disposer de leurs propriétés; et, en outre, un sauf-conduit leur sera délivré pour s'embarquer dans un port qu'ils désigneront de leur propre gré.

Tous les autres citoyens ayant un établissement fixe et permanent dans les États respectifs, pour l'exercice de quelque profession ou occupation particulière, pourront conserver leur établissement et

continuer leur profession sans être inquiétés en aucune manière; et ceux-ci, aussi bien que les négociants, conserveront la pleine possession de leur liberté et de leurs biens, tant qu'ils ne commettront aucune offense contre les lois du pays. Enfin, leurs propriétés ou biens, de quelque nature qu'ils puissent être, comme aussi les deniers dus par des particuliers ou par l'État, et les actions de banques et de compagnies ne seront assujettis à d'autres embargos, séquestres, ni aucune autre réclamation, que ceux qui pourraient avoir lieu à l'égard des mêmes effets ou propriétés appartenant à des nationaux.

ART. 9. Le commerce français dans le Honduras et le commerce hondurien en France seront traités, sous le rapport des droits de douane, tant à l'importation qu'à l'exportation, comme celui de la nation la plus favorisée.

Dans aucun cas, les droits d'importation imposés en France sur les produits du sol ou de l'industrie de Honduras, et dans le Honduras sur les produits du sol ou de l'industrie de la France, ne pourront être autres ou plus élevés que ceux auxquels sont ou seront soumis les mêmes produits importés par la nation la plus favorisée.

Aucune prohibition d'importation ou d'exportation n'aura lieu dans le commerce réciproque des deux pays, qu'elle ne soit également étendue à toutes les autres nations.

Les formalités qui pourraient être requises pour justifier de l'origine et de la provenance des marchandises, respectivement importées dans l'un des deux États, seront également communes à toutes les autres nations.

ART. 10. Les produits du sol et de l'industrie de l'un des deux pays paieront, dans les ports de l'autre, les mêmes droits d'importation, qu'ils soient chargés sur navires français ou honduriens.

De même, les produits exportés acquitteront les mêmes droits et jouiront des mêmes franchises, allocations et restitutions qui sont qu seront réservées aux exportations faites sur bâtiments nationaux.

ART. 11. Les navires français arrivant dans les ports de Honduras ou en sortant, et les navires honduriens, à leur entrée en France ou à leur sortie, ne seront assujettis à d'autres ni de plus forts droits de tonnage, de phare, de port, de pilotage, de quarantaine ou autres, affectant le corps du bâtiment, que ceux auxquels sont ou seront respectivement assujettis les navires nationaux dans les deux pays.

Les droits de tonnage et autres, qui se prélèvent en raison de la capacité des navires, seront d'ailleurs perçus en France, pour les navires honduriens, d'après le registre hondurien du navire, et pour les navires français dans le Honduras, d'après le passeport ou congé français du navire.

ART. 12. Les navires respectifs qui relâcheront dans les ports ou sur les côtes de l'un ou de l'autre État ne seront assujettis à aucun droit de navigation, sous quelque dénomination que ces droits soient respectivement établis, sauf les droits de pilotage, phare et autres de même nature représentant le salaire de services rendus par des industries privées, pourvu que ces navires n'effectuent aucun chargement ni déchargement de marchandises.

Toutes les fois que les citoyens des deux Hautes Parties contractantes seront forcés de chercher un refuge ou un asile dans les rivières, baies, ports ou territoires de l'autre, avec leur navires, tant de guerre que marchands, publics ou particuliers, par l'effet du mauvais temps on de la poursuite des pirates ou des ennemis, il leur sera donné toute protection pour qu'ils puissent réparer leurs navires, se procurer des vivres, et se mettre en état de continuer leur voyage sans aucun empêchement, et même, dans le cas ou, à raison de relâche forcée, les navires respectifs seraient obligés de déposer à terre les marchandises composant leurs chargements, ou de les transborder sur d'autres navires, pour éviter qu'elles ne dépérissent, il ne sera exigé d'eux d'autres droits que ceux relatifs au loyer de magasins, cours et chantiers qui seraient nécessaires pour déposer les marchan¬ dises et pour réparer les avaries des bâtiments.

De plus, les citoyens des deux États qui navigueront sur des bâtiments de guerre ou marchands, ou sur des paquebots, se prêteront, en haute mer et sur les côtes, toute espèce de secours, en vertu de l'amitié qui existe entre les deux États.

ART. 13. Seront considérés comme français les bâtiments construits en France, ou ceux qui, capturés sur l'ennemi par des armements français, auront été déclarés de bonne prise, ou enfin ceux qui auront été condamnés par des tribunaux français pour infraction aux lois, pourvu, d'ailleurs, que les propriétaires, les capitaines et les trois quarts de l'équipage soient Français.

De même, devront être considérés comme honduriens tous les bâtiments construits dans le territoire de Honduras, ou ceux capturés sur l'ennemi par des bâtiments de guerre de la République et déclarés de bonne prise, ou ceux enfin qui auront été condamnés par les tribunaux de Honduras pour infraction aux lois, pourvu, toutefois, que les propriétaires, les capitaines et la moitié de l'équipage soient Honduriens.

Les deux Parties contractantes se réservent, d'ailleurs, le droit, si les intérêts de leur navigation venaient à souffrir de la teneur de cet article, d'y apporter, quand elles le jugeraient opportun, telles modifications qui leur paraîtraient convenables aux termes de leur législation respective.

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