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TRAITÉ D'AMITIÉ

DE COMMERCE ET DE NAVIGATION

ENTRE

la France et les îles Sandwich

CONCLU LE 29 OCTOBRE 1857

Ratifié le 8 septembre 1858.

ART. 1er. Il y aura paix constante et amitié perpétuelle entre Sa Majesté l'Empereur des Français, ses héritiers et successeurs, d'une part, et Sa Majesté le roi des îles Sandwich, ses héritiers et successeurs, d'autre part, et entre les sujets de l'un et de l'autre État, sans exception de personnes ni de lieux.

ART. 2. 11 y aura entre tous les territoires de l'Empire français en Europe et ceux des îles Sandwich une liberté réciproque de commerce. Les sujets respectifs pourront entrer en toute liberté, avec leurs navires et cargaisons, dans tous les lieux, ports et rivières des deux États qui sont ou seront ouverts au conimerce étranger.

Ils pourront y faire le commerce d'échelle, conformément aux lois, pour y décharger en tout ou partie les cargaisons par eux apportées de l'étranger, et pour former successivement leurs cargaisons de retour; mais ils n'auront pas la faculté d'y décharger les marchandises qu'ils auraient reçues dans un autre port du même État, ou, trement, de faire le cabotage, qui demeure exclusivement réservé aux nationaux.

au

Ils pourront, sur les territoires respectifs, voyager ou séjourner, commercer tant en gros qu'en détail, comme les nationaux; s'établir partout où ils le jugeront convenable à leurs intérêts; louer et occuper les maisons, magasins et boutiques qui leur seront nécessaires; effectuer des transports de marchandises et d'argent, et recevoir des consignations; être admis comme caution aux douanes, quand il y aura

plus d'un an qu'ils seront établis sur les lieux et que les biens fonciers qu'ils y posséderont présenteront une garantie suffisante.

Ils seront entièrement libres de faire leurs affaires eux-mêmes et notamment de présenter en douane leurs propres déclarations ou de se faire suppléer par qui bon leur semblera, facteur, agent, consignataire ou interprète, sans avoir, comme étrangers, à payer aucun surcroît de salaire ou de rétribution. Ils auront la faculté d'acheter et de vendre à qui bon leur semblera, sans qu'aucun monopole, contrat ou privilége exclusif de vente ou d'achat, puisse leur porter préjudice ou restreindre en quoi que ce soit leur liberté à cet égard. Ils seront également libres, dans tous leurs achats comme dans toutes leurs ventes, de fixer le prix des effets, marchandises et objets quelconques tant importés que destinés à l'exportation, sauf à se conformer aux lois et règlements du pays.

Enfin, ils ne seront assujettis, dans aucun des cas ci-dessus, à d'autres charges, taxes ou impôts en matière de douanes, que ceux auxquels sont soumis les nationaux.

ART. 3. Il est convenu que les documents présentés par des Français dans leur propre langue seront admis dans tous les cas où des documents en langue anglaise le seraient, et que les affaires auxquelles se rapporteront les pièces rédigées dans ces deux langues seront expédiées avec la même bonne foi et le même soin. Toutes les fois que l'exactitude de la traduction de l'une des pièces susénoncées sera mise en question, ladite traduction sera soumise au consul de France qui, après examen, la certifiera conforme.

ART. 4. Les sujets respectifs jouiront, dans l'un et l'autre État, d'une constante et complète protection pour leurs personnes et leurs propriétés. Ils auront, en conséquence, un libre et facile accès auprès des tribunaux de justice, pour la poursuite et la défense de leurs droits en toute instance et dans tous les degrés de juridiction établis par les lois. Ils seront libres d'employer, dans toutes les circonstances, les avocats, avoués ou agents de toute classe qu'ils jugeront à propos; enfin, ils jouiront, sous ce rapport, des mêmes droits et priviléges que ceux qui sont ou seront accordés aux nationaux.

Ils seront, d'ailleurs, exempts de tout service personnel, soit dans les armées de terre ou de mer, soit dans les gardes ou milices nationales, ainsi que de toutes contributions de guerre, emprunts forcés, réquisitions ou services militaires quels qu'ils soient, et, dans tous les autres cas, ils ne pourront pas être assujettis pour leurs propriétés, soit mobilières, soit immobilières, à d'autres charges ou impôts que ceux auxquels seraient soumis les nationaux eux-mêmes ou les sujets ou citoyens de la nation la plus favorisée, sans exception.

Les sujets hawaïens jouiront, dans toutes les possessions et colonies françaises, des mêmes droits, priviléges et de la même liberté de commerce et de navigation dont jouit actuellement ou jouira la nation la plus favorisée, et réciproquement, les Français habitants des possessions des colonies de la France, jouiront, dans toute leur extension, des mêmes droits, priviléges et de la même liberté de commerce et de navigation qui, par ce Traité, sont accordés, aux iles Sandwich, aux Français, à leur commerce et à leur navigation.

ART. 5. Les Français ne seront inquiétés en aucune manière aux îles Sandwich pour cause de religion; ils jouiront, au contraire, dans l'exercice public ou privé de leur culte, d'une entière liberté de conscience et de toutes les garanties, droits et protection assurés aujourd'hui, ou qui seraient accordés par la suite aux sujets indigènes et aux sujets ou citoyens de la nation la plus favorisée.

Les sujets hawaïens jouiront en France, en matière de religion, des mêmes droits, garanties, liberté et protection.

ART. 6. Les sujets des deux pays seront libres d'acquérir et de posséder des immeubles, et de disposer comme il leur conviendra, par vente, donation, échange, testament, ou de quelque autre manière que ce soit, de tous les biens qu'ils posséderaient sur les territoires respectifs. De même, les sujets de l'un des deux États qui seraient héritiers de biens situés dans l'autre, pourront succéder, sans empêchement, à ceux desdits biens qui leur seraient dévolus même ab intestat, et en disposer selon leur volonté, et lesdits héritiers ou légataires ne seront assujettis à aucun droit d'aubaine ou de détractation, et ne seront pas tenus à acquitter des droits de succession ou autres plus élevés que ceux qui seraient supportés, dans des cas semblables, par les nationaux eux-mêmes.

ART. 7. Si (ce qu'à Dieu ne plaise!) la paix entre les deux Parties contractantes venait à être rompue, il sera accordé, de part et d'autre, aux sujets de chacune des deux Parties contractantes, un terme d'une année pour régler leurs affaires et pour disposer de leurs propriétés, et, en outre, un sauf-conduit leur sera délivré pour s'embarquer dans tels ports qu'ils indiqueront de leur propre gré.

Tous les autres Français ou Hawaïens ayant un établissement fixe et permanent dans les États respectifs, pour l'exercice de quelque profession ou occupation que ce soit, pourront conserver leur établissement et continuer leur profession sans être inquiétés en aucune manière, et la possession pleine et entière de leur liberté et de leurs biens leur sera laissée tant qu'ils ne commettront aucune offense contre les lois du pays. Enfin leurs propriétés ou biens, de quelque nature qu'ils soient, ne seront assujettis à aucune saisie ou séquestre, ni à d'autres

charges et impositions que celles exigées des nationaux. De même, les deniers qui leur seraient dus par des particuliers, ou qu'ils posséderaient dans les fonds publics, dans les banques et compagnies industrielles ou commerciales, ne pourront jamais être saisis, séquestrés ou confisqués.

ART. 8. Le commerce français dans les îles Sandwich et le commerce hawaïen en France seront traités, sous le rapport des droits de douane, tant à l'importation qu'à l'exportation, comme celui de la nation étrangère la plus favorisée.

Dans aucun cas, les droits d'importation imposés en France sur les produits du sol ou de l'industrie des îles Sandwich, et, dans ces îles, sur les produits du sol ou de l'industrie de la France, ne pourront être autres ou plus élevés que ceux auxquels sont ou seront soumis les mêmes produits de la nation la plus favorisée. Il en sera de même pour les droits d'exportation.

Aucune prohibition ou restriction d'importation ou d'exportation n'aura lieu dans le commerce réciproque des deux pays qu'elle ne soit également étendue à toutes les autres nations, et les formalités qui pourraient être requises pour justifier de l'origine ou de la provenance des marchandises respectivement importées dans l'un des deux États, seront également communes à toutes les autres nations.

ART. 9. Tous les produits du sol et de l'industrie de l'un des deux pays dont l'importation n'est pas expressément prohibée payeront dans les ports de l'autre les mêmes droits d'importation, qu'ils soient chargés sur navires français ou hawaïens. De même, les produits exportés acquitteront les mêmes droits et jouiront des mêmes franchises, allocations et restitutions de droits qui sont ou pourraient être réservées aux exportations faites sur bâtiments nationaux. Toutefois, il est fait exception à ce qui précède en ce qui concerne les avantages et encouragements particuliers dont la pêche nationale est ou pourra être l'objet dans l'un ou l'autre pays.

ART. 10. Il est convenu :

1o Que l'importation et la vente des vins et eaux-de-vie d'origine française ne pourront être prohibées dans les îles Sandwich;

2o Que le taux des droits imposés, dans les ports hawaïens, à l'importation des vins d'origine française, dits de cargaison, en barriques et en caisses, n'excédera pas, pendant la durée du présent Traité, le taux de cinq pour cent de la valeur, les prix de facture devant servir de base d'évaluation, conformément à la loi hawaïenne du 27 avril 1846;

3o Que le taux des droits sur les vins français de qualité supérieure, mais qui ne contiendront pas plus de dix-huit pour cent d'alcool

n'excédera pas, pendant la même période, quinze pour cent de la valeur ;

40 Que le taux des droits imposés sur les eaux-de-vie d'origine française n'excédera pas, pendant la même période, trois piastres au maximum par gallon, tel qu'il est défini par la loi hawaïenne du 27 avril 1846, troisième partie, chapitre Iv, article 2, page 187.

Il ne sera ajouté, dans aucun cas, aux droits sur les vins et eauxde-vie ci-dessus spécifiés, aucune surtaxe de douane ou de navigation, ou autre charge quelconque, à quelque titre que ce soit.

Il est entendu que rien, dans cet article, ne s'opposera au rétablissement du droit de tonnage par le gouvernement hawaïen, et sur l'ensemble de sa navigation nationale et étrangère.

ART. 11. Les navires français arrivant dans les ports des îles Sandwich ou en sortant, et les navires hawaïens, à leur entrée dans les ports de France, ou à leur sortie desdits ports, ne seront assujettis ni à d'autres ni à de plus forts droits de tonnage, de phare, d'ancrage, de port, de quai, de pilotage, de quarantaine ou autres, sous quelque dénomination que ce soit, affectant le corps du bâtiment, que ceux auxquels sont ou seront assujettis les navires de la nation la plus favorisée.

ART. 12. Les bâtiments français aux îles Sandwich, et les bâtiments hawaïens en France, pourront décharger une partie de leur cargaison dans le port de prime abord, et se rendre ensuite, avec le reste de cette cargaison, dans d'autres ports du même État, soit pour y achever de débarquer leur chargement d'arrivée, soit pour y compléter leur chargement de retour, en ne payant, dans chaque port, d'autres ou de plus forts droits que ceux que payent les bâtiments nationaux dans des circonstances semblables.

ART. 13. Lorsque, par suite de relâche forcée ou d'avarie constatée, les navires de l'une des deux puissances contractantes entreront dans les ports de l'autre ou toucheront sur les côtes, ils ne seront assujettis à aucun droit de navigation, sous quelque dénomination que ces droits soient respectivement établis, sauf les droits de pilotage et autres, représentant le salaire de services rendus par des industries privées, pourvu que ces navires n'effectuent aucune opération de commerce, soit en chargeant, soit en déchargeant des marchandises. Il leur sera permis de déposer à terre les marchandises composant leur chargement, pour empêcher qu'elles ne dépérissent, et il ne sera exigé d'eux d'autres droits que ceux relatifs aux loyers des magasins et chantiers publics qui seraient nécessaires pour déposer les marchandises et pour réparer les avaries du bâtiment.

ART. 14. Seront considérés comme français les bâtiments construits

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