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ma manière de voir. L'observation a appris aux chimistes que lorsqu'une liqueur alcoholique, le mucilage et l'air atmosphérique, ou mieux encore le gaz oxigène, se trouvent réunis à un certain degré de témpérature dans des préparations qui peuvent varier, il en résulte, après quelque tems, du vinaigre d'autant plus fort, que l'acétification a été plus avancée, et que le fluidé aqueux y domine moins. Le sénateur Chaptal rapporte, dans ses Elémens de Chimie, avoir obtenu du vinaigre au bout de quelques mois en imprégnant d'eau distillée de l'acide carbonique mêlé d'alcohol qui se dégage de la vendange en fermentation. Ce savant attribue cette métamorphose chimique au principe muqueux (2) qu'entraîne l'acide carbonique mêlé d'alcohol. Plusieurs fois j'ai eu la curiosité de vérifier cette découverte dans nos celliers, et j'ai cru y avoir trouvé le moyen d'expliquer la formation du vinaigre et de l'éther acétique dans les cas suivans:

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1o. Dans les eaux aromatiques préparées en brassant dans l'eau distillée l'alcohol tenant en solution des huiles essentielles et plantes liliacées qu'on ne peut obtenir par distil

tes les fois que ce vaisseau a été débouché. Je pourrais ajouter que le concours du calorique et de la lumière, que la vaporisation et la condensation successives de la liqueur, sont autant de circonstances qui ont dù favoriser la combinaison des trois élémens de l'acide, et, par suite, l'éthérification. Au surplus, je tiens peu à mon opinion, et je suis disposé à l'abandonner aussitôt que M. Magnes, dont les lumières me sont connues, m'aura prouvé par des expériences positives que je suis dans l'erreur.

(2) M. Chaptal et plusieurs autres chimistes ont effectivement avancé que le mucilage était nécessaire à l'acétification. Cela est vrai en thèse générale; mais on sait aujourd'hui qu'il se forme du vinaigre dans une infinité de circonstances où la présence du mucilage ne peut être soupçonnée. C'est ainsi qu'on l'a trouvé dans la sueur, dans le lait, dans la décoction de la chair musculaire du boeuf, etc. J'ai même l'espoir de pouvoir annoncer dans peu qu'il se forme dans l'éther sulfurique le plus pur et le mieux rectifié.

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lation, à raison de leur propriété fugace; c'est pourquoi on est obligé de faire macérer ces plantes ou leurs fleurs dans l'huile d'olives, qui se charge de l'huile essentielle, pour la transmettre à l'alcohol et celui-ci à l'eau. L'eau de menthe poivrée, préparée de cette manière avec l'alcohol de ce nom, s'acétifie en peu de tems,

2o. Dans l'eau de cerises noires, préparée selon le Codex de Paris, lorsque le fruit a été distillé étant bien mûr et ayant subi un premier degré de fermentation par le transport.

3o. Dans les derniers produits (de couleur laiteuse) des eaux alcoholiques où l'odeur de l'éther acétique se développe d'une manière très-manifeste, sur-tout dans celui de l'eau yulnéraire et dans celui de l'eau de cannelle spiritueuse, etc.

On aurait été moins étonné de la formation de l'éther acétique dans le marc de raisin, dont une bonne partie du moût avait été extrait pour la confection du sucre indigène, si on avait été à même d'observer qu'une livre environ d'eau-de-vie à 22 degrés de l'aréomètre de Beaumé produisit demi-once d'éther acétique après avoir séjourné pendant quarante jours dans un fût qui avait contenu depuis peu, et pendant deux ans, d'excellent vin, n'ayant d'ailleurs aucun caractère de vinaigre. Quoique ces deux circonstances different entr'elles par quelques points, elles concourent également à prouver ce que vous avez avancé, monsieur, que l'acide acétique et l'éther de ce nom se forment avec beaucoup de facilité.

De même que le vinaigre ordinaire contient presque toujours quelque peu d'alcohol, qui lui donne cette odeur agréable qui le fait rechercher pour l'usage alimentaire, et qui, dans le vinaigre distillé depuis quelques mois, développe une odeur éthérée de même celui-ci (l'alcohol), s'il n'est rectifié avec beaucoup de précaution au bain-marie, contient aussi de l'acide acétique, qui, dans des mixtures semblables à celles dont il est question, peut, sans le concours d'autres agens, former une petite portion d'éther

acétique; pour en acquérir la conviction, il suffit d'examiner chimiquement le résidu d'une distillation de cette espèce faite au bain-marie. On peut également séparer le vinaigre de l'alcohol, en substituant au serpentin ordinaire, qu'on aurait adapté à un alambic privé de réfrigé– rant, un autre serpentin composé d'un nombre plus considérable de circonvolutions dont les tuyaux doivent être très-amples. Si par les moyens connus de tous les distillateurs, on entretient l'eau dans laquelle baigne ce serpentin à une température qui n'excède jamais dix degrés, et que, par le moyen de trois robinets placés à trois distances à-peu-près égales, depuis le fond jusqu'à la partie moyenne de la hauteur, on fractionne les produits de l'opération; on obtient du premier de l'alcohol rectifié, du second un alcohol beaucoup plus faible, et enfin du dernier, qui se trouve à la partie inférieure, du vinaigre un peu éthéré, mais en petite quantité. C'est dans le laboratoire de M. Dispan, professeur de chimie à Toulouse, que j'ai eu occasion de faire cette observation. Et enfin, pour dernière réflexion, qu'il me soit permis de vous rappeler combien de fois dans nos laboratoires de pharmacie n'avons-nous pas eu occasion d'observer que l'acide acétique se forme dans les résidus de l'analyse plus ou moins compliquée d'une infinité de substances végétales ou animales.

L. A. P.

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les

Le Livre de tous les Ménages, ou l'Art de conserver pendant plusieurs années toutes substances animales et végétales (1). Avec cette épigraphe :

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« J'ai pensé que votre découverte méritait un témoignage particulier de la bienveillance du Gouvernement. » (Extrait d'une lettre de S. Exc. le Ministre de l'intérieur.)

PAR M. APPERT, Propriétaire à Massy, département de Seine et Oise.

(EXTRAIT PAR M. J. P. BOUDet. )

Dans le premier volume du Bulletin de pharmacie, pages 168 et 327, nous avons examiné plusieurs objets, tels que petit-lait, fruits et sucs de fruits, conservés par M. Appert. L'état de ces substances, et leur manière d'être enfermées dans des vases de verre, nous fit soupçonner dès cette époque, ainsi que nous l'annonçâmes alors, qu'il employait une méthode déjà usitée dans plusieurs dépar'temens de l'Empire. L'ouvrage qu'il vient de publier, dans -lequel il donne la description de son procédé avec tous ses détails, tout en confirmant nos soupçons, prouve qu'il a beaucoup perfectionné cette branche d'industrie et imaginé une infinité de précautions, sans lesquelles il est impossible de réussir aussi complettement que

lui.

Ila, dé plus, le mérite d'avoir cherché et d'être parvenu par ce même moyen à conserver les préparations végétales et animales les plus susceptibles d'altération, ce qui n'avait pas été fait ou du moins publié avant lui.

Nous nous empressons de faire connaître son mode

(1) Ouvrage soumis au bureau consultatif des arts et manufactures, revêtu de son approbation, et publié sur l'invitation de Son Excellence le Ministre de l'Intérieur. - Prix, 3 fr., et 3 fr. 50 c., franc de port. Chez Patris et compagnie, imprimeurs - libraires, quai Napoléon, au coin de la rue de la Colombe, no 4.

d'opérations, en suivant sur-tout l'auteur dans ses applications aux objets qui intéressent plus particulièrement la pharmacie, renvoyant pour le reste à l'ouvrage même.

Idée générale, ou Théorie du procédé de M. Appert; exemple de son application à la conservation du petit-lait.

Les procédés de M. Appert consistent principalement : 1o. A renfermer dans des bouteilles ou bocaux les substances que l'on veut conserver;

2o. A boucher ces différens vases avec la plus grande attention; car c'est principalement de l'opération du bouchage que dépend le succès;

3o. A soumettre ces substances ainsi renfermées à l'action de l'eau bouillante d'un bain-marie pendant plus ou moins long-temps, suivant leur nature, et de la manière qu'il l'indique pour chaque espèce de comestible;

4°. A retirer les bouteilles du bain-marie au tems prescrit.

Préparation du petit-lait.

On prend du lait de bonne qualité, on le fait coaguler à une douce chaleur après y avoir ajouté suffisante quantité de présure délayée dans une partie du lait et mêlée ensuite à la masse; on verse sur un tamis, et lorsque le fromage est suffisamment égoutté, on clarifie le sérum à l'aide du blanc d'œuf, et de suffisante quantité de crême de tartre, puis on filtre.

La liqueur bien claire et complètement refroidie se met dans des bouteilles bien propres, que l'on remplit jusqu'à trois pouces de la cordeline ou bague, afin d'éviter la fracture des vaisseaux, qui serait la suite nécessaire du gonflement produit par la chaleur du bain-marie, si les bouteilles étaient trop pleines; on bouche avec le plus grand soin et avec les précautions que nous indiquerons plus bas. On place les bouteilles dans des sacs de treillis ou de grosse toile faits exprès, assez grands pour enve

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