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(Oh, oh! Murmures dans l'extrémité gauche). Mais à moins d'avoir approfondi très sérieusement dans les résultats l'effet de la base que vous avez décrétée pour la contribution mobihère dans les campagnes, on ne pouvait pas soupçonner qu'un fermier, avec 4, 5 ou 6000 livres d'exploitation, avec un capital de 30 ou 40,000 livres, ne paierait pas à la chose publique une contribution égale à la contribution infiniment modique pour être électeur... ( Murmures.) Nous, messieurs, qui, renfermés dans la partie constitutionnelle que vous nous avez confiée, n'avions pu avoir ce soupçon, nous n'avions pas envisagé que tel pût être à l'égard des fermiers le résultat de la proposition, et quoique plusieurs membres d'autres comités aient pu donner plus de soin à cette partie du tratail, il est cependant juste de dire que les résultats échappaient à un très grand nombre. Nous avons été obligés de reprendre hier en considération ce résultat dénoncé; effectivement il se trouve que d'après le système des contributions mobi lières dans les campagnes un fermier infiniment riche, ayant une grande exploitation, peut bien ne pas payer même 20 livres. (Murmures.) Cela devient infiniment grave, je ne dis pas sous le rapport de la finance, parce que je n'en suis pas instruit, et j'espère, par la sagesse que messieurs du comité des contributions publiques ont dû mettre dans leur travail, que leur produit n'en sera pas altéré; mais cela devient infiniment important au moins quant à l'application de la base de la contribution aux droits politiques des fer miers; il devient indispensable de réformer quant à eux les bases actuelles, et de mettre leurs droits politiques à Fabrí des systèmes de finance.

Ainsi, messieurs, nous avons été obligés de faire un autre travail que celui qui nous avait d'abord para nécessaire, et nous vous annonçons que pour mettre ces droits politiques des agriculteurs fermiers à l'abri dans la Constitution ce n'est plus par la base de la contribution que vous pouvez régler leurs droits de citoyen, mais par la valeur des loyers de la chose qu'ils exploitent; car il n'y a quant à eux aucun autre nioyen certain de régler leurs droits politiques. (Applaudissemens.) Nous croyons donc, en insistant sur la

considération majeure qui nous a déterminés à vous faire la proposition de reporter du degré de représentant au degré d'électeur le mode de garantie dont la société a besoin contre les erreurs des choix, en insistant pour que cette garantie. soit établie d'une manière tellement solide qu'elle préserve et la liberté publique, et la Constitution, et le gouvernement de toutes les secousses qui arriveraient si les corps électoraux n'étaient pas d'une composition meilleure qu'on ne les a présentés jusqu'ici; nous croyons qu'il faut dans cette occasion concilier autant qu'il est possible avec la sûreté générale la latitude qu'on peut donner à l'exercice des droits politiques. On ne peut pas aller trop avant dans cette latitude, parce qu'on détruirait l'intérêt prédominant de la sûreté générale ; mais en prenant les combinaisons qui peuvent accorder ces deux objections je ne doute pas que l'Assemblée fera ce qu'elle a de plus intéressant à faire dans la révision de la Constitution, car elles touchent au ressort fondamental de l'organisation politique et de tout le mouvement que recevront par la suite l'administration, les tribunaux, la législature, Ainsi, messieurs, nous pensons que dans les villes au-dessus de six mille âmes la cote à exiger pour être électeur doit être celle que nous vous avons proposée, quarante journées de travail, modifiables par les législatures, qui détermineront de six ans en six ans la valeur de la journée de travail, ce qui se modifie encore entre le maximum et le minimum, dans les départemens moins aisés et dans ceux qui le sont davantage, par les administrateurs locaux. Nous croyons que dans les petites villes au-dessous de six mille âmes, par conséquent dans les bourgs et dans les campagnes, il n'y a aucune espèce de raison à se refuser à ce que la contribution exigée pour être électeur soit de trente journées de travail; et sur cela je fais une distinction : quant au propriétaire cela doit être sans inconvénient; mais quant au fermier cela prend une nouvelle face, car les trente journées de travail n'atteindraient pas même les fermiers les plus opulens dans beaucoup de contrées : il faut donc abandonner ici dans les campagnes, quant aux fermiers, la base de la contribution; nous proposons de régler que dans la classe des fermiers la

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condition d'éligibilité sera celle d'exploiter par ferme une terre de revenu du 400 livres. ( Une voix : S'il n'y en a pas?)

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Dans les pays de petite culture beaucoup de fermiers n'ont pas une ferme de 400 livres de revenu; mais, suivant tous les éclaircissemens qui nous ont été donnés par des députés des pays de petite culture, le plus grand nombre des fermiers a aussi de petites propriétés, et pour peu que le fermier ait une petite propriété, avec la contribution mobilière qu'il être paiera pour sa ferme, il paiera suffisamment pour électeur.

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Je fais une seconde observation; c'est qu'il y a d'ailleurs un intérêt à ce que ces petits fermiers ne puissent pas toujours être électeurs dans les pays de petite culture un propriétaire de 20,000 livres de rente aura quarante ou cinquante fermiers dépendans absolument de lui; par conséquent il aurait autant de voix à lui acquises dans les assemblées électorales, et la société ne peut permettre que dans les élections qui se font pour elle et en son nom il s'introduise des groupes de trente ou quarante hommes à la dépendance d'un seul.

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» Dans les pays de grande culture, au contraire, toutes les exploitations étant en grandes masses, comme les fermes de 4, 5 ou 6,000 livres, un fermier de 400 livres est évidemment dans la dernière classe de cette espèce. Or, messieurs, comme la justice vous oblige à abandonner à l'égard des fermiers la base de contribution, et qu'il faut rentrer nécessairement par rapport à eux dans la valeur du loyer dont ils sont chargés, qui dépose par conséquent des moyens de garantie que vous devez exiger pour la société, il est indispensable d'admettre ce mode; et en le fixant ainsi que les comités le proposent il me semble que nous avons atteint la proportion qui dans l'Etat antérieurement aurait donné pour cette classe l'éligibilité. De cette manière, nessieurs, il n'y aura plus d'exclus de la faculté d'être électeur que ceux à qui l'exercice de cette fonction ne peut convenir; et en examinant à quoi se trouve réduite cette portion exclue de l'éligibilité s'évanouit complétement la crainte d'une secousse dans les campagnes et dans les

villes par le mécontenteinent de ceux qui auraient précédemment joui de l'éligibilité à cette fonction d'électeur, et qui ne l'auraient plus.

» Par les mémoires qui nous ont été envoyés aux comités, et par les faits que chacun de nous connaît, il est certain que vous ne porterez paint de mécontentement en rendant un peu plus difficile la faculté de l'électorat. Dans cette classe ceux qui sont nommés, et c'est un fait indubitable, on ne se rendent pas aux assemblées électorales, ou les abandonnent dès le premier ou le sécond jour, et il est arrivé que les intrigans, qui s'attendent à ce dégoût prochain, font perdre ces deux ou quatre journées des élections par des incidens; après quoi l'élection reste abandonnée à coux qui veulent s'en emparer. » ( Applaudissemens. )

M. Salles. «. Allons donc, vous calomniez les Français!

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M. Thouret. Non, je ne calomnie point; la majorité de cette Assemblée, pour ne pas dire l'universalité, a cette connaissance que les corps électoraux ont été fort, travaillés jusqu'à présent de cette manière. (C'est vrai! » Applau dissemens.)

M. Thouret met en délibération la proposition redigée des comités; nouveaux débats. M. l'évêque Grégoire obtient le premier la parole.

M. Grégoire. « J'aurai je crois rempli mon but si je parviens à établir que l'Assemblée nationale ne doit pas transiger avec les décrets qu'elle a rendus, et qu'elle ne doit pas se permettre d'en réformer aucun. (Applaudissemens et murmures.)

» J'ai été le premier à combattre le décret du marc d'argent avant qu'il fût rendu, mais, messieurs, rappelez-vous les principes que vous avez établis dans cette: Assemblée; c'est que vos décrets ne devaient pas être réformés, et toutes les fois qu'à cette tribune un opinant s'est permis de parler sur un objet qui de loin même paraissait porter quelque atteinte aux décrets rendus on n'a pas manqué de le rappeler à l'ordre. Je prie l'Assemblée de considérer dans quelle étonnante con

tradiction on veut la jeter! Quand M. Malouet a demandé la parole contre un décret constitutionnel..... » ( Murmures. }

M. Malquet, « Toutes les fois qu'on proposera de changer un mauvais décret j'applaudirai, et je serai de cet avis. »

M. Grégoire. « Lundi dernier, quand M. Malouet parla sur le fond même des décrets, un membre du comité de Constitution, M. Chapelier, s'empressa de lui dire, et l'Assem blée y applaudit, qu'il n'était pas question de réformer un décret, qu'il s'agissait seulement d'examiner le classement, et non de changer des dispositions constitutionnelles. (Murmures au centre; plusieurs voix du fond de la gauche : Silence donc !)

M. Dandré. « Monsieur le président, maintenez la liberté des opinions, et imposez silence à ces messieurs (montrant le fond du côté gauche), qui font un bruit épouvantable.

M. Robespierre. « M. Dandré veut devenir despote.

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M. le président. Messieurs, c'est avec juste raison que de tous les côtés on se plaint et l'on murmure. Lorsque M. Thouret était à la tribune du bout de la salle partaient des murmures: M. Gregoire y est maintenant; l'autre partie de la salle murmure à son tour. Je demande à tous les membres individuellement de l'Assemblée le plus profond silence, et de ne pas oublier d'une part l'importance de l'objet qui nous occupe, et de l'autre le caractère imposant dont ils sont revêtus.

M. Grégoire, « Messieurs.... ( Nouveaux murmures au centre.) Il est aussi facile de murmurer qu'il est impossible de détruire l'évidence d'un bon raisonnement. Si l'on peut revenir contre un seul de vos décrets, messieurs, il en résulte donc que vous aviez non pas des décrets, mais des projets de décrets; il en résulte que vous pourrez revenir sur tous les articles constitutionnels; je ne dis pas seulement sur ceux qui ne sont pas revisés, mais sur ceux mêmes que vous avez déjà classes dans l'acte constitutionnel! Eh! qui peut prévoir le terme de tous les changemens qu'on pourra encore proposer!!

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