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fanctifier, & les canaux par lefquels il fait couler vers eux fes graces les plus abondantes. Ils doivent y venir pour y offrir un facrifice de loiianges, pour y chanter des Cantiques fpirituels, & pour y répandre leurs coeurs en préfence de la fouveraine Majefté de Dieu. Ils doivent enfin, y venir avec joie & avec empreffement, parce qu'ils font comme af feurez que fe joignant aux vœux & aux prieres des autres fideles qui s'y trou vent, ils obtiendront facilement une infinité de graces & de faveurs, qui peutêtre leur feroient refufées s'ils prioien feuls & en leur particulier.

Il eft bon d'observer avant que de finir ce verfet, que le texte Hebreu porte : Demeurez fur la terre,& nourriffez-vous de la verité. Car c'eft là la veritable occupation des chrétiens qui vivent ici bas. comme des étrangers. Les mond..ins courent aux theâtres & aux fpectacles, goû tent toutes fortes de plaifirs, & ne tra vaillent que pour amaffer des richeffes, & pour monter aux honneurs. Mais pour eux, ils ne pensent qu'à la loi de Dieu qui eft la fouveraine verité, ils en font leurs chaftes délices, & ils en nourriffent continuellement leur ame. C'est ce qui les rend fi intelligens & fi fpirituels, qut les fait

peherrer fi avant dans tous les mysteres les plus profonds, & qui les garantit d'une infinité de fautes & d'imperfec. tions. Car comment ne feroient-ils pas éclairez, eux qui fe nourriffent de la lumiere même ? Comment ne comprendroient-ils pas tout ce qu'il y a de plus fublime,eux qui ne voïent que par les yeux de la verité & comment pourroient-ils tomber & fe laiffer aller à l'erreur, eux qui ne marchent qu'à la lueur de la loi de Dieu, & qui l'ont continuellement devant les yeux ?

Verlet 4. Mettez votre joie dans le Seigneur, & il vous accordera les demandes de voire cœur.

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Mettez are joie dans le Seigneur. Les avares, les voluptueux, les ambitieux, les gens du fiecle ne mettent point leur joie dans le Seigneur, mais dans leurs richeffes, dans leurs plaifirs, dans leurs grandeurs, & dans les objets qui flattent leurs paffions. Propofez-leur de vaquer à la priere, de méditer les veritez chrétiennes, & de faire des lectures fpirituelles; ils vous répondront qu'ils ne trouvent point de goût dans toutes ces chofes,& qu'ils s'ennuient dès qu'ils s'y appliquent & cependant ils n'éprou vent que de la douceur dans la conver

fation des gens du monde, ils fe plaifent dans les affaires temporelles, & ils ne fe fatiguent point, lorsqu'il s'agit d'acquerir de la gloire & de la reputation dans le public. D'où vient cela? Il eft facile d'en découvrir la caufe. C'est qu'étant pleins d'orgueil & dominez par l'amour des plaifirs & des biens de la terre, ils se plaifent à y penfer & à s'en occuper ; & que fe laiffant aller à une joie vaine, & quelquefois même charnelle, ils ne font plus fufceptibles de la veritable joïe qui accompagne le fervice de Dieu & la pratique de la vertu. Leur cœur eft trop petit & trop étroit pour recevoir deux amours; & comme il fe trouve plein de celui du monde, il rejette celui de Dieu. Il faut, dit S. Auguftin, avoir appris à n'aimer plus rien, afin d'être capable d'aimer celui qui merite tout nôtre amour. Il faut s'être détourné de tout ce qui n'eft que temporel, avant que de fe porter à ce qui eft éternel; il faut avoir renoncé à tous les plaifirs charnels pour en goûIn Pf.30. ter de fpirituels. C'eft pourquoi il n'y a Cont.3. proprement que ceux qui font détachez de toutes les chofes de la terre, qui n'aiment rien ici-bas, & qui vivent dans le monde comme des étrangers, qui foient en état de mettre leur joie dans le Sei

gneur.

Il vous accordera les demandes de vôtre cœur. Les Saints Peres examinant ces

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paroles, nous avertiffent qu'il y a deux fortes de demandes, qui répondent aux deux parties dont nous fommes compofez. Nous avons une chair & un efprit, & ils forment chacun leurs demandes. La chair ne s'attache qu'à des chofes temporelles, & ne recherche que ce qui regarde la vie prefente. L'efprit au contraire prie pour Ibid. les biens qui contribuent à l'édification de l'homme interieur & au falut éternel. Ainfi, dit Saint Auguftin il arrive fouvent qu'un homme qui a perdu la veuë & qui eft affligé d'une grande maladie, prie Dieu de lui rendre la fanté & del i guerir les yeux; & quoique ce foit à fa fouveraine Majefté qu'il s'adreffe, il ne fait neanmoins qu'une demande de la chair, parce que ce qu'il defire ne fe rapporte qu'à la vie prefente. Mais fi quelqu'un demande à Dieu la deftruction de fes paffions, & les lumieres dont il a befoin pour marcher dans la voie de fes commandemens, on peut dire que c'eft fon cœur qui prie, & qui fait une demande qui eft fpirituelle & digne d'un chrétien.

Si l'on jugeoit par ce principe des prieres de la plupart des fideles, on recon

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noîtroit qu'ils ne font ordinairement que
des demandes de la chair: car fouvent ils
ne prient, ils ne viennent dans nos Egli-
fes & ils n'invoquent les Saints que pour
des chofes purement temporelles, com-
me pour être delivrez d'une infirmité
corporelle,
, pour gagner un procés, pour
réüffir & pour s'avancer dans le monde,
& il n'arrive prefque jamais qu'ils aïent
recours à Dieu pour obtenir des biens fpi-
rituels, furmonter les vices aufquels
ils font fujets, & pour faire quelque pro-
grés dans la vertu.

pour

Et quand on parle ainfi & qu'on rapporte cette Doctrine des Saints Peres, on ne pretend pas condamner tous ceux qui prient pour des biens temporels, & qui les demandent à Dieu : car puifqu'ils viennent de lui, il eft certain qu'on doit le prier pour les obtenir ; & l'on voit Matth 6. même dans l'Evangile qu'il nous oblige de lui demander inceffamment notre pain de chaque jour. Mais on veut feulement leur faire entendre que ceux-là font charnels, qui ne demandent que des biens temporels, & qui les deficent pour euxmêmes & fans aucun rapport aux éternels. Cette maxime eft trop certaine pour avoir befoin d'être prouvée:,, Pourquoi, in pfal. » dit S. Auguftin s'adreffant à un avare, in

Conc. 1

30.

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