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gouvernement représentatif, et fondé se hâter de corriger les vices de son orgachez nous la monarchie constitutionnelle, nisation, de réprimer les abus existans autour de laquelle on a pu croire un in- et d'en prévenir de nouveaux ? stant que l'Europe entière allait se rallier dans l'intérêt commun des peuples et des rois, la Charte a tracé la sphère d'activité des différens pouvoirs et fixé les limites qu'ils ne peuvent franchir.

Certes, je tiens trop à honneur d'appartenir au conseil d'Etat, et j'attache trop de prix aux leçons que j'ai puisées dans son sein en partipant pendant plusieurs années à des travaux importans (1), pour Le conseil d'État n'est point au nombre ne pas rendre un hommage respectueux de ces pouvoirs constitués; et pour peu à la masse des lumières que j'y ai vues réuqu'on réfléchisse sur la forme du gouver- nies, à la profondeur des discussions que nement que la France doit à la haute sa- j'y ai entendues, à l'esprit de justice que gesse du roi, et sur les élémens dont il se j'y ai remarqué; mais les qualités et les compose, il est facile de reconnaître qu'il vertus des hommes tempèrent les abus ne devait point y être compris*. inhérens à une institution, et ne les font pas disparaître; et si jusqu'à ce jour on n'a point séparé l'Administration de la solution des questions administratives, en tant qu'elles touchent à des droits privés; ni la solution de ces questions de celle des questions contentieuses qui ne peuvent jamais engager la responsabilité ministérielle; si l'on n'a point tracé la ligne de démarcation entre l'Administration proprement dite et la justice administrative, entre l'administrateur et le juge administratif, entre les droits et le pouvoir de l'un, les devoirs et les attributions de l'autre; si l'on a laissé incomplète la division indiquée, entre les fonctions des préfets et celles des conseils de préfecture; si l'on a négligé de donner à ces conseils comme au comité contentieux du conseil d'Etat, une organisation régulière, des formes protectrices de procéder, telles, par exemple, que la publicité pour obvier à l'erreur ou même à la prévarication possible d'un rapporteur négligent ou prévenu (2); s'il est vrai de dire par

Cependant, le conseil d'Etat était un corps puissant sous le gouvernement impérial; il excerçait une grande autorité, ou, pour parler avec plus d'exactitude, il était associé à un grand nombre d'actes de l'autorité absolue, qui résidait alors tout entière dans la main du chef; et il coopérait fréquemment, sous la direction de ce chef, au contrôle des actes et des opérations des ministres. Le silence de la Charte pouvait-il être considéré comme ayant anéanti le conseil d'Etat ? de bons esprits l'ont pensé ainsi. Cette opinion a a été combattue avec énergie et talent dans la Chambre des députés; et c'est une question résolue négativement par le fait, comme elle devait l'être, à mon avis par la raison et la réflexion.

Mais si le conseil d'Etat n'est point incompatible avec la Charte, a-t-il dans l'état actuel des choses une organisation légale, une marche régulière, une allure constitutionnelle ? C'est une question qui n'est certainement pas résolue le fait de son existence; et si le conseil d'Etat n'était pas en harmonie avec nos institutions, qui pourrait nier qu'on ne dût

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que

rien

n'est moins rassurant qu'un tribunal secret composé de juges amovibles, dont la compétence est universelle et indétermi

*Il n'y a plus de conseil d'État en Belgique. jet de loi relatif à la peine du bannissement. Depuis la révolution de juillet plusieurs (2) La publicité qui paraîtrait nécessaire en changemens ont été portés à l'institution du ce cas n'est pas celle des audiences; mais la conseil d'État en France et tout récemment encore le garde des sceaux a présenté un projet de loi sur cet objet. L'indication de ces modifications serait sans utilité réelle pour nos lecteurs Belges.

(1) La discussion et la préparation des nouveaux Codes militaires et la rédaction d'un pro

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présence des avocats des parties et des parties elles-mêmes au rapport de l'affaire, semblerait n'ètre qu'une justice rigoureuse; et j'ai vu l'un des ministres de la justice si bien pénétré de la nécessité de cette mesure, qu'il n'attendait que l'occasion de l'introduire dans une ordonnance d'organisation du conseil d'État.

née, qui statue sur les droits les plus pré- d'Etat (3); et qu'à côté des lacunes de la cieux comme sur les questions de propriété législation, la circonspection et la réserve les plus importantes; qui, n'ayant point du conseil d'Etat, qui laisse souvent des de règles fixes de procédure, exerce un contestations sans jugemens, nous révèle pouvoir discrétionnaire pour prononcer la facilité qu'il aurait à exercer un poudes déchéances ou des fins de non-rece- voir immense sur des faits non prévus, voir (1), pour admettre ou rejeter des in- et à s'emparer, comme par droit de désterventions, des oppositions ordinaires hérence et de premier occupant, du jugeou des tierces-oppositions; qui, au lieu ment de ces nombreuses réclamations d'examiner une demande dans toutes ses que les parties ne savent où porter; si, parties, se dispense de statuer sur les di- comme l'a si bien dit et si fortement étavers chefs des conclusions prises devant bli l'auteur du Conseil d'Etat selon la Charte lui (2); s'il est démontré, par des exemples constitutionnelle (4), le mot conflit (5), dans répétés, que les droits des citoyens peu- l'état actuel, indique un état scandaleux vent sans cesse être exposés et compromis, de vague et d'incertitude, qui peut soit par l'effet de décisions qu'ils ne peu- rendre tous les jours la justice impuisvent éluder ni prévoir, soit par des refus sante, selon le caprice de tel agent de de décider, qui repoussent leurs réclama- l'administration, ou les intrigues du plus tions par la force d'inertie, soit même obscur subalterne; si cet état de choses par la substitution de la simple volonté fait regretter jusqu'aux évocations qui exministérielle, au résultat des délibérations citèrent jadis tant de réclamations et de de la majorité des membres du conseil plaintes (6); si la mise en jugement des

(1) Le conseil d'État, s'appropriant, par par lui-même au préjudice des tiers? et lorsque exemple, une disposition du Code de procé- le pouvoir, lorsque le roi plaide devant les tridure, n'admet point d'opposition aux décisions, bunaux, le ministre ou le mandataire qui le reaprès un délai de trois mois, lorsqu'elles ont été présente n'est-il pas astreint à toutes les formes signifiées aux parties, ou seulement notifiées ordinaires instituées pour la protection compar l'autorité administrative; et cependant mune? quelle similitude entre la faiblesse et l'insuffisance de cette garantie de la connaissance officielle des décisions administratives ou de la justice administrative, et celle qui, dans les matières judiciaires, résulte de la double signification par huissier à la partie et à son avoué !

« Il est passé en jurisprudence, dit M. de Cor» menin dans ses Prolégomènes, page 27, que » les notifications administratives ont la même >> force que les significations régulières, et font, >> comme celles-ci, courir les délais du pour» voi. (Voyez Délai du Recours, tome 1.) Tou»tefois, la notification administrative n'a de >> force qu'au nom et dans l'intérêt de l'Etat: >> car si les décisions ont été rendues entre deux » particuliers, les délais du pourvoi au conseil >> d'Etat ne courent qu'à partir de la significa» tion extrajudiciaire desdites décisions faite à >> personne ou à domicile, à la requête de la par» tie qui les a obtenues. >>

Mais pourquoi cette faveur au profit du pouvoir devant la justice administrative, lorsque les droits ou les intérêts des tiers sont en contact, en contention avec les siens? N'est-ce donc pas déjà assez et beaucoup trop qu'il puisse être ainsi juge dans sa propre cause, sans que des fins de non-recevoir puissent encore être créées

(2) Voyez entre autres ordonnances celle du per mai 1822, sur les demandes relatives au Bulletin officiel de cassation.

(3) Voy. plus bas dans ce chapitre la page 1 52. (4) Voyez l'ouvrage remarquable publié sous ce titre, en 1818, par M. J.-B. Sirey, 1 vol. in-4o.

(5) Voyez plus bas dans cet ouvrage le chapitre relatif au droit de propriété.

(6) Certes, jamais l'abus possible du conflit ne s'est manifesté d'une manière plus grave que dans ces derniers temps, où l'on a vu un administrateur élever un conflit hors de sa juridiction territoriale à l'occasion de la plus précieuse des propriétés, et où, par suite de cette mesure, une ordonnance rendue sur l'avis du conseil d'Etat, a annulé, sous prétexte d'un fait de police, tant sur la question de propriété que sur des trois arrêts rendus par la Cour royale de Paris,

mesures d'exécution.

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agens de l'administration, ou du moins déterminer et de régler les attributions l'extension de cette prérogative et le du conseil d'Etat, dont l'origine, à peine mode suivant lequel l'autorisation est ac- apercue, quelquefois fort équivoque et cordée ou refusée, offrent les plus graves presque toujours ou le plus souvent déterinconvéniens (1); n'est-il pas évident minée par les circonstances, par les évéqu'un tel ordre de choses réclame impé- nemens, par les besoins du moment rieusement et de la manière la plus ur- par l'esprit du gouvernement du jour, gente des garanties dont la nécessité est par les craintes ou les espérances des si bien sentie, et qu'en donnant au pou- hommes revêtus du pouvoir, n'ont point voir les moyens de protéger l'autorité lé- été suffisamment méditées, calculées, gale contre l'anarchie, il est indispensable appropriées aux besoins journaliers et aux de garantir la liberté, la propriété, les intérêts constans de la société et n'ont pu droits acquis, contre les envahissemens former ainsi qu'un ensemble bizarre, et les abus de l'autorité ?

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Des attributions du conseil d'Etat.

térogène et tout-à-fait disparate avec les notions communes et générales sur la justice distributive.

C'est dans ces ouvrages qu'après avoir vu les articles de la Charte portant que TOUTE justice émane du roi, qu'elle s'administre en son nom par des juges qu'il Si l'on veut se former une idée exacte nomme et qu'il institue, et que les juges de l'immensité des attributions du conseil nommés par le roi sont inamovibles, on d'Etat, telles qu'elles existent dans la pra- sera tout étonné de voir qu'il y a une tique, c'est dans les ouvrages qui traitent justice déléguée et une justice retenue; spécialement de cet objet, tels que le Conseil que la délégation ne s'entend que de la d'Etat selon la Charte, et la Jurisprudence justice civile, commerciale et criminelle; du conseil d'Etat par M. Sirey, le Recueil que la distribution de la justice adminisdes arrêts du Conseil, ainsi que les Élé-trative ne s'y trouve point comprise (2); mens de jurisprudence administrative par que le roi s'est réservé l'exercice de celleM. Macarel, les Questions de droit adminis- ci (3); que « le roi, qui ne lit aucune tratif par M. le baron de Cormenin, maî- » pièce du procès, qui ne connaît pas les tre des requêtes, et surtout les Prolégo- » élémens de l'instruction, qui n'assiste mènes qui forment le complément de » jamais à aucune délibération du conce dernier ouvrage, que l'on trouvera » seil d'Etat, qui ne signe pas même la des faits précieux et une analyse complète » minute des arrêts du Conseil, mais seuqui ne laissent rien à désirer sous le rapport des documens que l'on peut être jaloux de recueillir et de comparer.

Mais c'est aussi en remontant à ces sources fécondes que l'on se convaincra de plus en plus de l'impérieuse nécessité de

On lit dans les Prolégomènes de M. de Cormenin, page 93 :

a Le conflit positif ne peut être élevé, soit » d'office, soit sur l'invitation des ministres, que >> par les préfets des départemens......

» Ou à Paris, par le préfet de police, dans les

» limites de ses attributions. »

L'ordonnance dont il s'agit lui fournira un erratum pour sa prochaine édition.

• (1) Voyez mon Traité de Législation criminelle, tom. II, chap. XV.

» lement le bordereau de leurs extraits, » est cependant le seul juge; que le juge>>>ment tout entier réside dans la signa»ture du roi, apposée au projet d'ordon»> nance » (lequel peut être préparé et rédigé définitivement par le ministre

(2) Cette exception n'est ni exprimée ni indiquée dans la Charte.

(3) Les faits justifient sans doute cette assertion; mais on ne peut citer aucune disposition de la Charte sur laquelle elle s'appuie, et l'on ne voit pas pourquoi la justice administrative, en tant qu'elle touche aux droits et aux intérêts des tiers, ne serait pas également déléguée, et pourquoi les juges administratifs ne seraient pas inamovibles comme les membres des autres tribunaux.

sans que le conseil d'Etat y concoure, et » du conseil d'Etat, et ne trouvent d'exest présenté par son excellence à la signa-»cuse que dans les tristes mais impérieuture de Sa Majesté ); « qu'aussitôt signés » ses nécessités de la politique ou du » par le roi, les ordonnances ou arrêts » salut financier de l'Etat (4). » » du Conseil ont le même caractère, la » même autorité et les mêmes effets que » les jugemens des tribunaux, dont ils » ont aussi emprunté la forme, etc., » etc. (1). »

C'est là que l'on peut essayer de saisir la ligne de démarcation tracée par les auteurs, d'après les règles générales et spéciales qu'ils puisent dans les lois et surtout dans les décisions portées sur chaque espèce (2) entre la compétence respective des préfets, des conseils de préfecture et des ministres, entre la compétence de chacune de ces autorités qui constituent le premier degré de la juridiction administrative, et la compétence du conseil d'Etat qui en forme le second et dernier degré (3).

C'est là que l'on peut se convaincre que « la morale, l'équité, la conscience, » l'humanité même, réprouvent plusieurs >> des règles consacrées dans la pratique >> par les décisions et la jurisprudence

:

C'est là qu'on apprendra que dans une foule de cas spécifiés et d'affaires d'un genre indéterminé, les ministres rendent des décisions qui, d'abord n'étant qu'administratives, peuvent prendre ensuite le caractère contentieux et devenir même inattaquables après le délai du recours, soit par la voie d'opposition quoique rendues par défaut, soit par tierce-opposition si elles sont définitives (5); en sorte que l'on peut être jugé sans avoir été entendu ou appelé, et subir des condamnations sans avoir été informé, ni après ni avant la décision administrative, qu'il y eût une instance engagée.

C'est là enfin qu'au milieu d'un dédale presqu'inextricable de matières susceptibles de ressentir de près ou de loin, directement ou indirectement, médiatement ou immédiatement, l'influence d'une des branches ou des degrés quelconques de la juridiction administrative (6), on sera frappé de surprise et

(1) Voyez les Prolégomènes de M. le baron de prouve que rien n'est plus difficile que la conCormenin, pages 50 et 31. L'auteur ajoute naissance exacte de l'étendue et des limites de la juridiction administrative, ainsi que des formes de procéder devant chacune des autorités qui l'exercent. (Voyez plus bas la note 1 de la page 153.)

« Le roi s'est réservé l'exercice de la justice >> administrative; il peut donc la dispenser >>> comme il lui plaît. Peut-être y aurait-il de >> grands avantages pour ses sujets, sans aucun >> affaiblissement de la prérogative de la cou>> ronne et sans aucun détriment des intérêts de >> l'Etat, à ce que le roi déléguât avec mesure la » justice administrative; mais ce n'est pas de >> ce qui pourrait ou devrait être que nous trai>>tons ici, c'est de ce qui est. »>

Cette dernière réflexion, très juste et très bien placée dans l'ouvrage de doctrine qu'a publié l'auteur et dans des questions de droit administratif, n'atténue en rien la force et la justesse des observations dont elle est précédée, et ces observations sont d'un grand poids lorsqu'elles émanent d'un homme aussi instruit que laborieux, qui, associé depuis long-temps à l'action du pouvoir et à la distribution de la justice administrative, a pu en peser le fort et le faible dans la théorie, comme dans la pratique, avec une disposition d'esprit que l'on ne peut pas supposer contraire à l'exercice régulier de l'au

torité.

(1) C'est avec raison que je dis essayer de saisir, car l'ouvrage entier de M. de Cormenin

(2) Voyez les Prolégomènes de M. de Cormenin, pages 13 à 45.

Voyez aussi les ouvrages de M. Sirey et de M. Macarel sur le conseil d'État, et les Élémens de Jurisprudence administrative de ce dernier.

(3) Voyez Prolegomènes de M. le baron de Cormenin, pages 12 et 13.

(4) Voyez ibid., page 27, note 1; voyez aussi dans la suite de ce chapitre une note sur la jurisprudence du conseil d'Etat relative aux notifications administratives.

(5) Les préfets, les conseils de préfecture et les ministres constituent (à l'image de la juridiction civile) le premier degré de la juridiction administrative.

Le conseil d'Etat forme le second et dernier degré. (Voyez Prolégomènes, p. 13 et suiv.)

M. le baron de Cormenin explique avec beaucoup de méthode et de clarté les règles concernant la nature, l'étendue et les limites de la juridiction des préfets, des conseils de préfecture, des ministres, et de celle du conseil d'Etat.

d'anxiété en recevant de la bouche même des hommes les plus versés dans la science du droit administratif, et les plus susceptibles de répandre autour d'eux les lumières d'une vaste et profonde instruction, cette confidence si triste et si affligeante que, malgré les lois et les réglemens, ou plutôt à cause de leur variété et des contradictions qu'on y remarque, malgré les précédens formés par vingt-cinq ou trente années de distribution de la justice administrative, on ne peut rien présenter à cet égard de certain, de fixe, d'incontestable, soit pour les principes, soit pour les règles, soit pour la jurisprudence en général, et que tout se fondant sur des faits, chaque fait doit être vérifié pour prévenir les conséquences erronées, les conséquences générales ou seulement trop étendues qu'on pourrait en tirer (1); et l'on gémira en s'assurant par soi-même qu'à côté de cet aveu dicté par le talent, par la bonne foi et par un jugement éclairé, des exemples répétés en démon

trent l'exactitude et proclament partout le besoin de garanties contre le vague et l'arbitraire (2).

§ III.

De l'influence du conseil d'Etat sur l'interprétation des lois et leur application.

Mais si, envisagé seulement sous ce premier rapport et dans les points de con. tact avec les intérêts individuels, le conseil d'Etat n'offre point, quant à son organisation et à sa compétence, ces règles fixes qui sont la sauvegarde commune; si l'on ne peut voir qu'avec inquiétude le mot ordonnance et les effets qu'il comporte étendus à des actes de justice contentieuse; si l'on doit être surpris que, malgré le principe fondamental qui attri bue l'interprétation des lois au pouvoir législatif (3), et qui par conséquent sem

Mais comme l'auteur déclare lui-même » infinie des circonstances, la diversité des faits, (p. 13) que « la variété infinie des circonstan- » la position singulière des parties litigantes, >>ces doit souvent modifier dans chaque affaire » la date, le caractère, la forme, la spécialité » les axiomes généralisés de la jurisprudence,»» et la rédaction même des décisions, des venet (page 30), « qu'aujourd'hui le jugement » tes, des marchés et des actes de toute espèce, >> tout entier réside dans la signature du roi, » apposée au projet d'ordonnance, »>

Il est évident que la ligne qui sépare la juridiction de première instance de la juridiction souveraine en matière administrative, est purement idéale, et qu'indépendamment des attributions particulières des ministres comme gouvernans, comme administrateurs supérieurs, et comme exerçant en première instance la juridiction administrative, leur pouvoir ou leur droit-pratique comme exerçant uniquement et souverainement cette juridiction, est incontestable, puisque le conseil d'Etat n'est plus, comme sous le gouvernement précédent, présidé par le chef de l'Etat, et que les ministres ont seuls le droit et les moyens de soumettre à la signature du roi les projets d'ordonnances qu'il leur plait de présenter à Sa Majesté, et qu'ils peuvent, à leur gré, ou s'abstenir de soumettre ces projets à l'examen du conseil d'Etat, toujours réuni sous leur présidence, ou les rédiger d'une manière étrangère à l'opinion manifestée par la majorité du Conseil.

(1) « Je dois avertir, pour n'induire personne > en erreur (dit M. le baron de Cormenin, » page 13 des Prolegomènes), que la variété

TOME V.

» doivent souvent modifier, dans chaque affaire, » l'application des axiomes généralisés de la ju» risprudence. On ne doit donc jamais se dis» penser de recourir aux textes, et c'est afin » que les administrateurs et les juges, les avo» cats et les parties puissent se garder de mes >> inadvertances, et vérifier sur chaque point la » lettre mème des fois, des réglemens, des dé» crets et ordonnances, que j'ai pris soin d'en » faire l'annotation. >>

(2) Voyez les ouvrages déjà cités de M. Sirey sur le conseil d'Etat, ceux de M. Macarel sur la mème matière, et ceux de M. le baron de Cormenin.

Voyez entre autres, dans ce dernier ouvrage, la note 1, page 27 des Prolégomènes, relative à l'incertitude de la jurisprudence sur une question de procédure de la plus haute importance.

Voyez aussi mes observations sur les conflits, soit dans ce chapitre, soit dans celui qui concerne le droit de propriété.

(3) Ejus est interpretari legem cujus est condere. (Voyez le Traité de Législation criminelle, 2e édition, tome IV, page 45.)

Un avis du conseil d'Etat, du 27 nov. 1823,

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