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pairs ou députés, l'offense qu'on préten en cassation ne sont-ils pas toujours recedrait faire résulter d'un compte rendu ne vables respectivement (6)? 4° L'interdicdoit-elle pas, pour pouvoir donner lieu à tion relative au compte des débats judides poursuites, être appuyée de l'alléga- ciaires n'est-elle pas restreinte au ressort tien d'infidélité et de mauvaise foi ? 6o Le du tribunal ou de la Cour qui prononce? prévenu ne doit-il pas être cité? Ne doit-on 5o Le compte exacte des faits qui ont pas lui faire connaître, avant sa compa- eu lieu à l'audience peut-il jamais être rution, le motif de la mesure dont il est injurieux ? 6° Enfin, le mot témoin peutl'objet ? 7o Le prévenu appelé devant une il avoir, dans la loi du 25 mars, une Chambre ne doit-il pas être accompagné acception différente de celle que les lois d'un défenseur (1)? 8° Enfin, la publicité criminelles lui donnent en général; et étant sauf les exceptions déterminées, une celui qui n'a pas prêté le serment de dire règle commune à tous les débats judiciai- toute la vérité, rien que la vérité, et qui, res, lorsque la Chambre des pairs procède à raison de cette circonstance, ne pouren vertu de la loi du 25 mars 1822, ses rait pas être poursuivi pour faux témoiséances ne doivent-elles pas être publi- gnage, peut-il et doit-il néanmoins être ques comme lorsqu'elles se forme en considéré comme témoin, et protégé, à ce cour de justice, en vertu de la Charte (2)? titre, par la juridiction extraordinaire Ce sont là des questions graves (3) sur qu'a établie la loi nouvelle (7)? Les oblesquelles la loi ne s'explique point du servations que le prévenu et le défenseur tout ou ne s'explique pas suffisamment, sont autorisés par le code à faire contre le et dont plusieurs déjà très controversées témoin et contre sa déposition, peuventont donné lieu dans le sein de la Chambre elles jamais devenir contre lui, par l'effet des pairs à des décisions sur la régularité de la nouvelle loi, l'objet d'une mesure desquelles tout le monde n'est assurément extraordinaire de répression (8) ? pas d'accord (4). Outre ces difficultés et une foule d'autres qu'offre la législation nouvelle en ce qui concerne seulement la juridiction des Chambres, la juridiction extraordinaire qui a été conférée aux Cours et tribunaux par la mème loi, en fait naître aussi de très importantes (5). 1° Tous les tribunaux, sans exception, sont-ils investis de la juridiction établie par la loi du 25 mars 1822?

2o L'opposition ne doit-elle pas toujours être admise en cette matière comme en toute autre, dans les cas de condamnation par défaut? 3° L'appel et le pourvoi

(1) L'affirmative a été décidée par la Cour des pairs dans le procès relatif à M. Martainville, quoique la loi pût autoriser jusqu'à un certain point l'opinion contraire.

(2) La négative a été décidée par la Chambre des pairs dans le procès relatif à M. Martainville, quoique tout portât à croire que l'affirinative ne pouvait pas ètre douteuse. (5) J'ai examiné ces questions avec soin dans mon Traité de la Législation criminelle. (Voyez cet ouvrage, tome II, pages 201 et suiv.)

(4) Voyez les arrèts ou les décisions de la Cour des pairs relativement à M. Martainville, éditeur du Drapeau-Blanc.

On voit, par cette analyse succincte de quelques points de la loi du 25 mars 1822, tout ce qu'il y a de vague, d'incertain et d'arbitraire dans une matière dont le premier besoin est d'être clairement réglée, sous peine de laisser au pouvoir des armes à deux tranchans, dont personne ne peut éviter les atteintes.

Mais si je passe de la législation commune sur la liberté de la presse ordinaire à la législation spéciale sur la presse périodique, combien les ténèbres ne deviennent-elles pas plus épaisses! combien la difficulté, ou, pour mieux dire, l'impos

(5) Voyez à cet égard mon Traité de Législation criminelle, deuxième édition, tome II, chapitre des Délits contraires au respect dû aux autorités. Voyez aussi tome III, les chapitres des Tribunaux correctionnels et des Cours royales..

(6) Voyez Traité de Législation criminelle, l. c. (7) Voyez l'arrêt rendu contre M. Benjamin Constant pour fait d'offense envers M. le souspréfet de Saumur, considéré comme témoin, quoiqu'il n'eût été cité devant la Cour qu'en vertu du pouvoir discrétionnaire, et qu'il n'eût été ainsi appelé qu'à donner des renseignemens, et non à fournir un véritable témoignage.

(8) Voyez l'art. 319 du Code d'inst. crim.

sibilité absolue de savoir et d'indiquer ce qui est, ce qui doit être, ne devient-elle pas plus palpable!

1o Faut-il considérer comme une participation à l'administration de la justice criminelle, l'attribution extraordinaire conférée aux Cours royales par la loi du 17 mars 1822 (1), relativement à la police des journaux et écrits périodiques? ou bien, le pouvoir dont il s'agit étant vague, de sa nature, suivant le texte de la loi, comme d'après la discussion qui l'a précédée, ne doit-on pas plutôt y voir une attribution de haute police, ou, si l'on veut, de haute administration, une espèce de pouvoir censorial analogue à celui qu'exerçaient autrefois les anciens parlemens (2)?

2o De quelle procédure doit être précédé l'exercice du droit conféré aux Cours royales par la loi du 17 mars 1822 ?

3° Quelles sont les deux chambres de la Cour royale qui doivent se réunir pour prononcer en pareil cas?

4o Comment les décisions doivent-elles être motivées ?

Mais ce qui est bien clair et bien démontré par les faits, c'est que, d'après cette étrange loi, une Cour de justice se trouve appelée à s'immiscer dans la politique et à prescrire des mesures de haute administration. L'auteur d'une série d'articles de journaux dont chacun est très innocent particulièrement et ne peut don ner lieu à des poursuites, est néanmoins condamné pour ces mêmes articles, parce qu'ils présentent, dans leur série, une tendance dangereuse; en sorte qu'une suite de valeurs négatives produit ainsi une valeur positive. La défense, en cette matière, devient illusoire, parce que la justification de chaque article incriminé n'est pas, dans le système de la loi, la justification de l'ensemble; la décision fatale est portée, sans qu'il y ait lieu de la motiver, si ce n'est par un considérant faits résultans du procès, formule si jusanalogue à l'ancienne formule: pour les tement proscrite par la loi et par la raison. Une Cour royale prononce, sans savoir elle-même et sans qu'on sache si c'est civilement ou criminellement qu'elle juge. La Cour de cassation repousse les

5° Enfin, le recours en cassation est-il admissible? Et, dans le cas de l'affirma- pourvois par des fins de non-recevoir tive, comment doit-il être formé? Son effet est-il suspensif?

Toutes ces questions, que j'avais prévues et discutées pour la plupart dans mon Traité de Législation criminelle, presqu'à l'instant où la loi fut portée, sont restées incertaines, même depuis que des procès ont été jugés en vertu de la loi; et indiquent assez combien les dispositions en sont obscures.

(1) Voyez ce que j'ai dit à cet égard dans mon Traité de Législation criminelle, deuxième éd., tome IV, page 77 et suiv.

(2) Voyez Traité de la Législation criminelle, loc. cit.

(3) Cela me rappelle deux jugemens qui ont passé sous mes yeux, et qui, rendus dans des espèces absolument différentes, se rapportent néanmoins tous deux aux formes dont il est ici question.

Le premier de ces jugemens, antérieur à la révolution, et rendu par une juridiction inferieure, avait prononcé la peine de mort contre un orfèvre pour contrefaçon du marteau ou poinçon royal destiné à la marque des matières

qu'il a été impossible de prévoir ou d'éviter; et l'arrêt s'exécute provisoirement, malgré le recours en cassation; c'est-àdire qu'un journal, dont la publication est la vie, est frappé de mort par provision et sans préjudicier à ses droits d'existence (3).

résultats de la loi, pour peu que l'on füt Certes, en considérant ces effets et ces disposé à ajouter foi à l'influence jésuiti

d'or et d'argent ; et le jugement, qui condamnait ▲ MORT, ordonnait l'exécution provisoire, nonobstant l'appel et sans y préjudicier.

Le second jugement, rendu dans une affaire la première fois le divorce en France. moins sérieuse, est celui qui a prononcé pour

cipe du divorce, n'avait point réglé le mode de L'Assemblée nationale, en décrétant le prinprocédure ni déterminé la compétence. Des rompre leurs liens, se présentent devant un juge époux, empressés de profiter de la faculté de de paix, et le requièrent de déclarer leur divorce: le juge obtempère à la demande, et ordonne que les parties scront remises au même et pareil état où elles étaient AVANT LE MARIAGE.

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que, dont on a tant parlé dans ces der- le cas où le roi changerait spontanément niers temps, on serait tenté de croire que son ministère, et que les ministres exisl'esprit de cette secte célèbre s'est intro- tans (2), qui ne peuvent guère être écarduit dans la rédaction de la loi dont il tés que par l'influence des Chambres ass'agit, puisque, grâce au vague qui s'y semblées ou par celle de l'opinion publirencontre, et dont on a fait un juste éloge que, dont les journaux libres sont réputés dans le cours de la discussion (1), on y les interprètes, seraient beaucoup plus trouve tout ce qu'on veut, on l'exécute disposés à chercher dans une élection parcomme il plait, et personne n'en connaît tielle, faite sous l'empire de la censure encore exactement la portée. qu'ils auraient rétablie, les moyens de 87 Ce n'est pas là, au reste, le seul repro- conserver le pouvoir, que dans un renouqu'on ait à faire à cette loi. Si elle n'a pas vellement intégral, qui, sous l'influence maintenu la censure, elle en a permis le de journaux affranchis, leur offrirait des rétablissement dans l'intervalle des ses- chances beaucoup moins favorables? Et si sions; et il suffit, pour l'opérer, d'une or- ces raisonnemens sont exacts et justes donnance royale contre-signée par trois n'est-il pas évident aussi que la disposition ministres de S. M. dont il s'agit (le 3o alinéa de l'art. 4 de la loi du 17 mars 1822) peut bien être une disposition ministérielle, en tant qu'elle favorise la permanence des ministres, mais qu'elle n'est pas du tout une disposition royale, puisqu'elle peut mettre obstacle à l'exercice d'une des plus importantes prérogatives de la couronne?

Cette mesure doit à la vérité cesser de plein droit un mois après l'ouverture de la session des Chambres, si, pendant cet intervalle, elle n'a pas été convertie en loi; et l'on voit que la possibilité et la légalité même de la censure se trouve ainsi con sacrée et proclamée.

La censure rétablie par le gouvernement Mais, envisagée sous un autre point de doit aussi cesser de plein droit le jour où vue non moins élevé, cette législation serait publiée une ordonnance qui pro- n'offre-t-elle pas encore un inconvénient noncerait la dissolution de la Chambre des grave? et au milieu des incertitudes dont députés. Mais loin que cette seconde dis- elle est hérissée dans son application, si position me paraisse offrir un remède ou la loi du 17 mars a conféré aux Cours seulement un palliatif contre le mal, je la royales une attribution extrajudiciaire, regarde comme pouvant porter une véri- n'est-ce pas un très grand mal que cette table atteinte à la prérogative royale con- confusion de pouvoirs, par suite de lacernant la dissolution de la Chambre élec- quelle la haute administration se trouve tive. Comment supposer, en effet, que les en quelque sorte remise aux tribunaux et ministres qui voudraient recouvrer une transportée dans le sanctuaire de la jusmajorité ou une prépondérance qu'ils au- tice? A-t-on prévu tous les dangers auxraient perdue, conseilleraient à S. M. de quels cette innovation pourrait donner faire un appel à la nation en affrontant la lieu, toutes les atteintes qui pourraient en liberté des journaux, et oseraient se pré- résulter au préjudice de l'autorité du roi senter au combat devant des adversaires et de celle de son gouvernement, si les armés de toutes pièces, qu'ils n'auraient Cours royales, marchant quelque jour pu vaincre précédemment lorsque ces ad- dans un esprit d'opposition, s'obstinaient versaires étaient désarmés ou privés d'ar- à repousser les dénonciations qui leur semes égales par l'effet de la censure? N'est-il pas évident dès lors que la dissolution des Chambres ne pourrait avoir lieu que dans

(1) Voyez dans le Moniteur ( déc. 1822, janvier et février 1823) l'exposé des motifs et les discours prononcés à l'occasion de cette loi.

(2) Cette expression s'applique, comme il est

raient portées par les gens du roi contre des journaux vraiment hostiles? A-t-on envisagé, dans l'intérêt des droits du peu

aisé de le voir, à tous les ministres en fonctions, à quelque époque que ce soit; mais je le remarque pour que personne ne puisse m'imputer des personnalités aussi étrangères à ma pensée qu'au but évident de cet ouvrage.

ple, et peut-être même aussi dans l'inté- se montrer, les amendes excessives seront rêt de l'autorité royale, à quel état de dé- modérées, les dispositions législatives setresse la liberté publique serait réduite, ront coordonnées entre elles; et, j'en ai et combien elle serait désarmée contre les pour garant les vœux et les besoins de la entreprises et les usurpations possibles du société, ainsi que la promesse même du pouvoir, si, tous les journaux de l'oppo- président du conseil actuel des minissition successivement dénoncés par le mi- tres (3), le jury, seul juge compétent, nistère public, suspendus, et enfin sup- seul juge raisonnable, seul juge vraiment primés, par suite de décisions de Cours utile des délits de la presse (4), nous sera royales, ne pouvant se faire remplacer rendu pour ne plus nous être ravi. par d'autres journaux auxquels l'autorisation de paraître serait refusée en vertu de la loi (1), ce silence général des voix consacrées à la défense des intérêts populaires, laissait absolument sans contradicteurs et sans opposition tous les actes réguliers ou irréguliers auxquels les agens de l'autorité pourraient se livrer, ou de fixité, convient seul à la monarchie donnait naissance à une opposition de tempérée, et les intérêts particuliers doicommande, arrangée, convenue et calcu- vent disparaître devant celte pensée dolée à l'avance; mille fois pire que le silence absolu (2)?

Et de quelle utilité pourrait-il être en effet de rester à cet égard sous l'empire du vague et du provisoire? A qui cet état de choses pourrait-il être profitable? par qui pourrait-il être défendu?

Ce qui est stable, ce qui a un caractère

minante. D'ailleurs, parce que la preuve testimoniale aura été prohibée relativeNon, j'en suis convaincu, le défaut de ment aux faits imputés à des fonctiongaranties qui ressort de toutes parts de la naires publics; parce qu'il n'aura pas été législation actuelle sur la presse, ne peut permis de contredire comme fausses, manquer de frapper tous les yeux; déjà inexactes ou dictées par un esprit de par. de nombreuses procédures et des plai- tialité, les relations officielles; parce que doyers pleins d'éloquence et de raison en tel ou tel avocat justement estimé aura ont signalé les vices sans nombre; cette été privé de son état pour avoir cédé à législation incompréhensible, essentielle- l'entraînement de la conviction et à la ment provisoire, fera place à un état de choses qui pourra être enfin considéré comme une véritable institution sur la liberté de la presse, et les lois de 1819 serviront de type aux lois à faire. Le vague et l'arbitraire disparaîtront pour ne plus

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voix de l'honneur et du devoir en défendant son client, etc., etc.; espère-t-on aussi imposer silence à l'histoire et comprimer l'élan de la vérité dans les écrits contemporains, dans les mémoires particuliers, annales si redoutables pour

les

et dans le système constitutionnel, il importe que les citoyens interviennent dans ces sortes de jugemens, comme ils interviennent dans le gouvernement et l'administration, s'associant, se formant ainsi à la défense des intérêts publics.

nom

Voyez l'exposé des motifs de la loi fait par M. le garde des sceaux de Serre dans la séance de la Chambre des députésd du 3 décembre 1821. (Moniteur du 4 décembre.) Voyez aussi le discours prononcé par M. Froc de la Boullaie, an de M. de Serre, dans la séance du 4 fèvrier 1822, sur le jury appliqué au jugement des délits de la presse. (Moniteur du 5 fevrier.) Voyez enfin les discours prononcés à ce sujet dans la Chambre des députés et dans celle des pairs, par MM. de Saint-Aulaire, Daunou, etc.

jongleries politiques et les réputations atteste l'expérience (1), il s'élèvera des usurpées?... voix accusatrices qui dévoileront leur C'est en vain que le doux espoir d'une conduite. Les manœuvres, les intrigues, déception transmise à la postérité viendrait bercer mollement l'amour-propre irritable de certains hommes publics qui, semblables à ces prudes surannées qui se croient fortes parce que personne ne les attaque, se regardent comme des génies supérieurs parce qu'ils ont concouru à faire proscrire la controverse et à exiler moImentanément la vérité.

Du milieu même des courtisans, j'en

(1) Voyez tous les mémoires publiés sur les événemens des différens règnes.

*Une grande partie des abus signalés dans ce chapitre n'est pas possible en Belgique : l'art. 18 de la Constitution déclare que la censure ne peut jamais être établie, qu'on ne peut exiger de cautionnement des écrivains, des éditeurs

les abus de toute espèce seront mis au grand jour; et, un peu plus tôt, un peu plus tard, la liberté de la presse, recouvrant ses droits, déshabillera tous les personnages qui ne doivent qu'à leur costume une célébrité éphémère, les montrera dans un état de nudité repoussante, et, proclamant avec honneur quelques noms épars dans la foule, signalera le reste au plus triste des sentimens *.

ou imprimeurs, et l'art. 98 établit le jury pour délits politiques et de la presse.

Le décret du 20 juillet 1831 avait été rédigé sur des bases très-libérales, sa durée avait été limitée jusqu'au 1er mai 1833; il n'a pas été remplacé de manière que dans ce moment nous nous trouvons sans loi sur la presse.

TOME V.

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