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leur faire d'autres reproches que d'avoir quelquefois, par des analyses trop subtiles, élevé de l'incertitude dans la recherche de l'équité. Mais ce reproche doit s'adresser à quelques jurisconsultes romains, dont les opinions particulières ont été mises au rang des lois; cependant, c'est cette partie de la législation romaine qui, même avec ce défaut, a mérité l'admiration générale et qui a le plus contribué à la civilisation de l'Europe.

L'Empereur a voulu que l'on conservât dans leur pureté ces règles d'équité qui, de leur nature, et sur-tout après les avoir dégagées des subtilités scholastiques, ne sont plus que l'expression des sentimens mis par Dieu même dans le cœur des hommes, et doivent, par ce motif, être immuables.

A l'égard des deux autres parties du Code civil, ayant pour objet l'organisation des familles et la transmission de propriété, ni le droit romain, ni la législation civile d'aucune contrée de l'Europe, ne portoient sur des principes qui la missent à l'abri de toutes les vicissitudes des gouver

nemens.

L'Empereur a considéré que les institutions les moins éloignées de l'ordre naturel, seroient aussi, dans l'ordre politique, les moins variables et qu'elles seroient plus difficilement anéanties, même par les bouleversemens révolutionnaires.

Ne chercher dans l'organisation des familles que leur plus grand bien et l'union la plus intime des membres qui la composent; se conformer à l'affection présumée du chef de famille dans la transmission des biens: tels sont les principes naturels auxquels l'Empereur n'a fait éprouver que très-peu de modifications exigées par la constitution même de l'Empire, dans lequel il est le père commun et le conservateur de toutes les familles.

Dans les lois romaines, dans toutes celles qui, postérieurement, avoient été faites sur cette partie du Code civil, le systême politique étoit la base, et ce n'étoit que par quelques modifications que l'on se rapprochoit de l'ordre naturel : dans le Code Napoléon, l'ordre naturel est la règle commune qui ne reçoit que des modifications indispensables.

C'est avec cette méthode que toutes les idées ont pu se simplifier et être mises à la portée du peuple; c'est avec cette méthode qu'on a pu lui inspirer le plus profond attachement pour ses lois, et ne laisser dans son souvenir des lois anciennes que la preuve de leur imperfection et de leurs abus. C'est sur-tout avec cette méthode que l'on a fait naître chez les peuples civilisés le désir de participer au même bonheur.

Vous observerez, Messieurs, que c'est par une semblable communication que les peuples divers peuvent le plus se rapprocher. La diversité des lois civiles est, comme la diversité de religion ou de langage, une barrière qui rend étrangers - l'un à l'autre les peuples les plus voisins, et qui les empêche de multiplier entr'eux des transactions de tout genre, et de concourir ainsi mutuellement à l'accroissement de leur prospérité.

Lorsque des lois civiles sont devenues la loi commune de plusieurs peuples, elles sont chez chacun d'eux l'objet de la méditation des sages; s'ils peuvent l'élever à un nouveau degré de perfection, les autres peuples sont portés d'inclination comme d'intérêt, à profiter de ces avantages.

Admirez içi, Messieurs, avec quelle profondeur sont liées ensemble toutes les conceptions de sa Majesté pour parvenir au but d'améliorer le sort des hommes, et sur-tout de fixer entr'eux la paix !

sont

Des confédérations, des balancemens de puissances, la fois pour les chefs des gouvernemens la plus forte garantie de la paix qu'ils voudront conserver, et contre ces chefs la plus forte garantie de la paix qu'ils voudroient troubler; il a donc, à cet égard, étouffé, autant qu'il étoit possible, les germes de guerre, qui, jusqu'ici, se sont presque sans cesse développés pour embraser les diverses parties de l'Enrope. Mais il ne se borne pas à former ainsi entre les souverains, le pacte le plus solemnel et le lien le plus fort qui ait jamais existé; il veut encore que les mœurs des divers peuples s'améliorent et se rapprochent par des institutions qui leur soient communes ;, il veut que la crainte de voir troubler les transactions que ces lois communes à deux peuples

auront multipliées, donne à tous les esprits une tendance vers la paix, et retienne les premiers ressentimens du souverain, qui devra au moins mettre en balance le préjudice én orme que la guerre causeroit à son propre pays.

Autant les conceptions de l'Empereur sont vastes, autant il met de prudence et de mesure dans leur exécution.

Il a d'abord voulu que la sagesse des vues qu'il avoit développées dans la composition du Code civil, fût consacrée par une expérience suffisante.

Il s'est assuré que, d'un bout à l'autre de son Empire, ses peuples ont mis leurs nouvelles lois civiles au rang des plus grands bienfaits qu'ils en aient reçus il s'est assuré qu'au lieu de cette foule de procès qui naissent du régime féodal, et de l'obscurité, de la multiplicité, de la diversité des lois anciennes, il s'élevoit dans les tribunaux très-peu de difficultés sur l'application des nouvelles lois civiles, et qu'il n'étoit aucune de ces difficultés que l'on ne pût applanir sans porter la moindre atteinte aux principes: il s'est assuré que les citoyens de tous les rangs s'étoient empressés de faire l'étude de ces lois,qu'ils les connoissoient assez pour discuter et régler eux-mêmes leurs droits, sans avoir besoin du recours aux tribunaux: il s'est assuré que déjà les lois avoient rétabli dans l'exercice du droit de propriété, comme dans l'harmonie des familles, un ordre qui ne peut que se perfectionner.

Il a vu en même temps que si le Code avoit été composé pendant le gouvernement consulaire, ses principes n'avoient rien qui ne s'accordât avec la puissance et avec la dignité impériale: c'est ainsi qu'il s'est convaincu que ce Code produiroit chez les peuples où il seroit mis en vigueur, d'aussi heureux effets.

Cette vérité se trouve consacrée par l'expérience qu'il en a faite dans le royaume d'Italie, où le Code Napoléon a été accueilli avec le même empressement, et où il a eu le même succès qu'en France.

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Déjà un autre roi au delà des Alpes a cru ne pouvoir mieux signaler son avènement au trône, ni donner une plus grande preuve de son amour pour les peuples qu'il adoptoit qu'en les faisant jouir des avantages de ce Code. "

C'est dans les mêmes vues qu'il est encore destiné à divers peuples d'Allemagne; et déjà, si l'on considère l'étendue des pays où il est, où il sera en vigueur, on peut le regarder comme le droit commun de l'Europe.

Combien n'est-il pas satisfaisant pour vous, Messieurs, de voir votre nom attaché à ce beau monument ? Députés par tous les départemens, vous connoissez et les besoins et les vœux de tous les habitans de l'Empire: ils vous avoient choisis avec la certitude que vos délibérations, sur les lois proposées, deviendroient autant de preuves de vos lumières, de votre sagesse, de votre dévoûment à votre pays. C'est avec des talens aussi distingués, et avec des sentimens aussi purs, que vous avez examiné, apprécié et adopté le Code Napoléon, et que vous allez peser les motifs des rectifications qui vous sont proposées, et dont il me reste à vous rendre compte.

Le titre de Code civil des Français suffisoit lorsque son exécution a été bornée aux limites de l'Empire; mais lorsqu'il s'est propagé chez plusieurs autres peuples, il a été nécessaire qu'il portât le titre propre à caractériser la loi de chaque pays. Déjà ce Code a été publié en plusieurs contrées sous un titre dont le choix auroit été inspiré par la seule reconnoissance, si ce n'étoit pas d'ailleurs un hommage rendu par la vérité à celui à qui ce grand ouvrage doit sa naissance, à celui qui, dans le plan général, comme dans ses principales dispositions, y a imprimé les traits impérissables de son génie prévoyant et créateur. Par tous ces motifs, et par les sentimens qui animent plus particulièrement les Français pour leur Empereur, le Code civil sera pour eux, plus que pour tout autre peuple, le Code Napoléon, et on ne sauroit douter qu'il ne soit contre leur vou de lui laisser plus long-temps un autre nom.

La différence des temps où le Code Napoléon a été publié en France et chez d'autres peuples, a aussi entraîné des changemens de dénominations. C'est ainsi qu'il a été publié dans deux grands Etats d'Italie, en substituant les expressions propres à la forme de leur Gouvernement. Il convient également qu'une loi destinée à être chaque jour, et pen

dant des siècles, citée dans les tribunaux et dans toutes les transactions sociales, commande la soumission et le respect au nom de l'Empereur, et avec les formes du gouvernement actuel. Ainsi, ces dénominations Empereur, Empire, Etat, y ont été substituées à celles de Premier Consul, Gouver nement, République, Nation.

Le tribunal de cassation, les tribunaux d'appel y sont nommés cour de cassation, cour d'appel; les tribunaux criminels, cour de justice criminelle; leurs jugemens arrêts.

Le titre de commissaire du Gouvernement près le tribunal d'appel, ou de commissaire du Gouvernement près du tribunal de première instance, sera remplacé par celui de procureur général impérial en la cour d'appel, ou de procureur impérial au tribunal de première instance.

Le titre de commissaire des relations commerciales par celui de consul, et l'expression de commissariat des mêmes relations, par celui de consulat.

Les armées de la République, les vaisseaux ou bâtimens de l'Etat y sont nommés les armées de l'Empereur, les vaisseaux ou bâtimens de l'Empereur..

Suivant l'une des dispositions du Code sur la privation des droits civils par la perte de la qualité de Français, cette qualité seroit perdue par l'affiliation à toute corporation étrangère qui exigeroit des distinctions de naissance.

Les affiliations à une corporation étrangère ne peuvent avoir lieu qu'avec l'autorisation de l'Empereur; elles doivent désormais être mises dans la classe des rapports politiques d'une puissance à l'autre; et d'ailleurs, dans ces espèces d'affiliations, les règles et les usages de chaque pays ne reçoivent aucune atteinte; ce ne peut donc être à l'avenir la matière d'une disposition du Code civil. Elle doit être supprimée.

Le § 1er de l'ar. 427 contient une énumération des personnes, auxquelles, à raison de leurs grandes fonctions, on ne peut pas imposer la charge de la tutelle des mineurs ou des interdits.

Ces grands fonctionnaires étoient ceux dont il est mention dans les titres II, III et IV de l'acte constitutionnel dit

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