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vernement ottoman non seulement vis-à-vis du nouvel accord mais, d'une manière générale, à l'égard de la réglementation sanitaire moderne. a retenu l'attention des plénipotentiaires. Il faut bien reconnaitre que, sans la participation de la Turquie, non seulement une part importante du programine prophylactique demeure lettre morte, ce qui, en raison même de la situation géographique de l'Empire ottoman, voisin des foyers d'infection, est un danger constant pour ce pays et par conséquent pour l'Europe, mais encore certains États comme la Grèce sont obligés, tout en reconnaissant le bien fondé du libéralisme sanitaire moderne, de maintenir certaines dispositions rigoureuses sans lesquelles ses communications constantes avec les ports turcs seraient frappées d'interdit. C'est pourquoi la Conférence de Paris a, par une résolution spéciale qui a été adoptée à l'unanimité (sauf l'abstention naturelle de la Turquie) et appuyée expressément par la plupart des délégations, décidé que les gouvernements signataires interviendraient auprès de la Sublime Porte pour obtenir d'elle son adhésion aux actes de la nouvelle et des anciennes conventions sanitaires. C'est là un complément nécessaire à l'œuvre si patiemment élaborée depuis plus d'un demi-siècle pour la défense de l'humanité contre l'envahissement des épidémies exoliques.

COLOMBIE.Union postale. - Echange des colis postaux. Trailé de Washington. Adhésion. Le ministre des relations extérieures à Bogota a notifié le 19 septembre 1903 au Conseil fédéral suisse l'accession du gouvernement de Colombie à la convention internationale, signée à Washington le 15 juin 1897, concernant l'échange des colis postaux.

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ESPAGNE ET FRANCE. Convention d'arbitrage permanent du 26 février 1904. A la date du 26 février 1904, M. Delcassé, ministre des affaires étrangères, au nom de la France, et M.Leon Y Castillo Marquis del Muni, ambassadeur d'Espagne à Paris, au nom de l'Espagne, ont signé un traité d'arbitrage permanent, dont les termes sont identiques à ceux des conventions conclues le 14 octobre 1903 entre la France et la Grande-Bretagne (1) et le 25 décembre 1903 entre la France et l'Italie (2). Ce traité est en effet ainsi conçu :

« Le gouvernement de la République française et le gouvernement de Sa Majesté le Roi d'Espagne, signataires de la convention pour le règlement pacifique des conflits internationaux conclue à la Haye, le 29 juillet 1899; considérant que, par l'article 19 de cette convention, les Hautes Parties Contractantes se sont réservé de conclure des accords en vue du recours à l'arbitrage dans tous les cas qu'elles jugeront possible de

(1) V. cette Revue, t. X (1903), p. 799 et suiv.

(2) V. cette Revue, t. XI (1904), p. 93.

lui soumettre; ont autorisé les soussignés à arrêter les dispositions suivantes :

« Article 1er. Les différends d'ordre juridique ou relatifs à l'interprétation des traités existant entre les deux Parties Contractantes, qui viendraient à se produire entre elles et qui n'auraient pu être réglés par la voie diplomatique, seront soumis à la Cour permanente d'arbitrage établie par la convention du 29 juillet 1899, à la Haye, à la condition toutefois qu'ils ne mettent en cause ni les intérêts vitaux, ni l'indépendance ou l'honneur des deux États contractants, et qu'ils ne touchent pas aux intérêts de tierces puissances.

« Art. 2. Dans chaque cas particulier, les Hautes Parties Contractantes, avant de s'adresser à la Cour permanente d'arbitrage, signeront un compromis spécial, déterminant nettement l'objet du litige, l'étendue des pouvoirs des arbitres et les délais à observer, en ce qui concerne la constitution du tribunal arbitral et la procédure.

« Art. 3. Le présent arrangement est conclu pour une durée de cinq années, à partir du jour de la signature.

« Fait à Paris, en double exemplaire, le 26 février 1904.

DELCASSÉ. LEON Y CASTILlo, Marquis del Muni ».

ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE ET GRANDE-BRETAGNE (DOMINION DU CANADA). Conflit de limites. - Frontière de l'Alaska.

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Sentence arbitrale du

20 octobre 1903 (1). Le 20 octobre 1903, a été rendue à Londres, par une Commission constituée à cet effet par les gouvernements de Londres et de Washington, la sentence destinée à trancher le litige existant depuis quelques années entre les États-Unis et le Canada pour leur frontière de l'Alaska. Utile à mentionner parce qu'elle résout un différend déjà long, la sentence du 20 octobre mérite encore d'attirer l'attention à raison et de l'organe dont elle émane, et de la règle de droit qu'elle semble adopter à propos des frontières maritimes d'un État.

I. De l'origine et de la cause du différend l'histoire est facile à résumer. On sait comment les États-Unis se trouvent voisins du Canada par leurs possessions de l'Alaska (2). La frontière entre les deux États comprend deux parties bien distinctes: 1° une ligne constituée par le 141° méridien, allant du Mont Saint-Elie à l'Océan glacial, séparant le territoire américain de l'Alaska du territoire canadien du Yukon ; 2o une

(1) Communication de M. Louis Rolland, chargé de conférences à la Faculté de droit de Paris.

(2) V. sur la situation géographique de cette frontière, Marc-Bel, Le contesté de l'Alaska dans les Annales coloniales de janvier 1904, p. 9; V. Huot, La nouvelle frontière de l'Alaska dans la Géographie du 5 novembre 1903, p. 325; les Annales de géographie du 5 janvier 1904, p. 94; J. H. Franklin, Le contesté de l'Alaska dans les Questions diplo matiques et coloniales du 1er novembre 1903, p. 664.

ligne allant du Mont Saint-Elie au Portland-Canal au 56° degré de latitude nord, parallèle aux sinuosités de la côte. Depuis le Portland-Canal le Canada gagne l'Océan Pacifique et suit le littoral jusqu'au 49° degré de latitudé nord. De toute cette frontière la seule partie incertaine était celle allant du Mont Saint-Elie au Portland-Canal, et la cause de cette incertitude se trouvait dans la différence d'interprétation donnée par les deux États voisins au traité anglo-russe du 16/28 février 1825.

A cette date en effet, et après d'assez longues négociations, était intervenu entre l'Angleterre et la Russie, alors propriétaire de l'Alaska, un accord précisant celte frontière. De cet accord les articles 3 et 4 (1) fixaient la frontière du Mont Saint-Elie au Portland-Canal, comme devant suivre, depuis le 56° degré, la chaîne de montagnes parallèle à la côte, et, au cas où celles-ci seraient distantes l'une de l'autre de plus de 10 lieues marines, une ligne parallèle aux sinuosités de la côte à 10 lieues marines de cette dernière (2). La délimitation ainsi établie n'amena point de difficultés en 1825, ni plus tard en 1867 lors de la cession de l'Alaska aux États-Unis par la Russie. Au surplus, l'intérêt était médiocre pour le Canada d'atteindre de ce côté l'Océan Pacifique, et la question ne se posa point de l'interprétation exacte des articles 3 et 4 du traité de 1825 (3). Avec les découvertes, dans ces dernières années, de gisements auri

(1) Art. 3. - «La ligne de démarcation entre les possessions des II. P. C. sur la côte du continent et les Iles de l'Amérique Nord-Ouest sera tracée ainsi qu'il suit: A partir du point le plus méridional de l'Ile dite Prince of Wales, lequel point se trouve sous la parallèle du 54° degré, 40 minutes de latitude Nord et entre le 131° et le 133° degrés de longitude ouest (méridien de Greenwich), ladite ligne remontera au Nord le long de la passe dite Portland-Channel jusqu'au point de la terre ferme où elle atteint le 56° degré de latitude nord; de ce dernier point la ligne de démarcation suivra la crête des montagnes situées parallèlement à la côte jusqu'au point d'intersection du 141° degré de longitude ouest (même méridien), et, finalement, dudit point d'intersection la même ligne méridienne du 141° degré formera, dans son prolongement jusqu'à la mer glaciale, la limite entre les possessions russes et britanniques sur le continent de l'Amérique Nord-Ouest.

Art. 4. Il est entendu par rapport à la ligne de démarcation déterminée dans l'article précédent : 1° que l'Ile dite Prince of Wales appartiendra tout entière à la Russie; 2° que partout où la crête des montagnes qui s'étendent dans une direction parallèle à la côte depuis le 56° degré de latitude nord au point d'intersection du 141° degré de longitude ouest, se trouverait à la distance de plus de 10 lieues marines de l'Océan, la limite entre les possessions britanniques et la lisière de côte mentionnée ci-dessus comme devant appartenir à la Russie sera formée par une ligne parallèle aux sinuosités de la côte et qui ne pourra jamais en être éloignée que de 10 lieues marines.

(2) V. sur la négociation de ce traité de 1825, Balch, La frontière alasko-canadienne, dans la Revue de droit international et de législation comparée, t. IV, 2o série (1902), p. 5-11.

(3) En fait d'ailleurs, en 1839, la Compagnie anglaise de la baie de l'Hudson prit à bail de la Russie une partie du territoire compris entre le Canada et la mer, entre le fort Simpson et le détroit de Cross. V. Balch, op. et loc. cit., p. 18 et 19.

fères au Klondyke, les choses devaient changer d'aspect. Posséder dans ces parages un débouché sur le Pacifique devenait intéressant pour le Canada. Il devait dès lors être amené à se poser la question de savoir si l'accord de 1825 lui en donnait la faculté. Par ailleurs, l'aspect géographique des côtes entre les 49° et 56° degrés est très particulier. Le littoral y est découpé en fjords ou en chenaux très profonds et comme déchiqueté en un grand nombre d'iles côtières. Que faut-il dans ces conditions entendre par l'expression de « sinuosités de la côte»? Celles-ci pénètrent-elles dans l'intérieur avec des chenaux parfois très longs comme le canal de Lynn ? Répondre affirmativement c'était éloigner le Canada du Pacifique; soutenir la négative c'était dire que la ligne frontière entre les deux pays passait en deçà de l'extrémité du canal de Lynn donnant ainsi à Skagway et à Oyea des ports au Canada, faciles à mettre en communication avec les gisements aurifères. Si à cette première difficulté on ajoute que l'on ne s'entendait point non plus sur ce que désignaient les mots : « la chaîne côtière», que enfin la propriété de certaines îles était disputée, on comprendra facilement la gravité du différend.

Dès 1899 on essaya de résoudre la difficulté d'interprétation et de fixer définitivement la frontière. Le gouvernement anglais proposait de s'en remettre à la décision d'une Commission de six membres choisis par moitié par chaque litigant. A supposer qu'une majorité ne pût se former dans la Commission, les Commissaires désigneraient un surarbitre pour les départager. L'opposition des États-Unis fit échouer le projet. On dut se contenter de constituer une Commission d'examen composée d'Anglais et d'Américains et chargée de procurer une solution amiable. De cette dernière les efforts furent complètement vains (1). Le gouvernement de Londres reprit alors son premier projet, mais de nouveau le Cabinet de Washington repoussa la nomination ou d'un surarbitre ou d'un septième arbitre (2). On finit cependant par s'entendre. C'était l'époque des incidents du Vénézuéla: le gouvernement de Londres cherchait à se concilier celui de Washington; il admit ses prétentions pour la constitution de la Commission chargée de trancher le conflit de l'Alaska. C'est ainsi que fut signé le traité du 24 janvier 1903 (3). Nous reviendrons sur la nature et la portée de cet acte. Disons seulement dès maintenant qu'il soumettait la fixation de la frontière contestée à une Commission de six membres choisis par moitié pour chaque gouvernement.

(1) V. le Temps du 26 janvier 1903.

(2) V. le Temps des 17 et 28 janvier 1903.

(3) V. le texte de ce traité dans les Archives diplomatiques, 3o série, t. LXXXV, p. 268.

Très vite les Commissaires furent désignés par l'Angleterre, deux Canadiens sir Louis Jeté et l'honorable Allan Aylesworth et un Anglais le Lordchief-justice lord Alverstone; pour les États-Unis, le ministre de la guerre M. Elihu Root et deux sénateurs MM. Henry Cabot-Loddge et Turner. Ce sont ces Commissaires qui ont rendu la sentence du 20 octobre (1).

(1) Voici le texte de la sentence prononcée :

« Attendu que par une convention signée à Washington, le 24 janvier 1903, par les plénipotentiaires de S. M. le Roi du Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande et des puissances britanniques d'outre-mer, Empereur des Indes, et des États-Unis d'Amérique ; il a été convenu qu'un tribunal serait constitué pour examiner et trancher la question ci-après exposée, ce tribunal devant se composer de six jurisconsultes impartiaux et réputés, qui examineraient juridiquement les questions à eux soumises, et dont chacun devrait d'abord souscrire au serment d'examiner avec impartialité les arguments et témoignages présentés au dit tribunal et que, là dessus, il se déciderait conformément à son véritable jugement, et que trois membres du dit tribunal seraient nommés par S. M. britannique, et trois par le Président des États-Unis ; Et attendu qu'il a été, de plus, convenu que le dit tribunal examinerait, pour le règlement desdites questions, soumises à sa décision, les traités respectivement conclus entre S. M. britannique et l'empereur de toutes les Russies à la date du 28 (16) février 1825, et entre les États-Unis d'Amérique et l'empereur de toutes les Russies à la date du 18 (30) mars 1867, et, en particulier, les articles 3, 4 et 5 du traité (de 1825), et qu'il prendrait également en considération toute action des divers gouvernements ou de leurs représentants respectifs, préliminaire ou subséquente à la conclusion desdits traités, autant qu'elle tendrait à démontrer l'intention première et effective des parties, eu égard aux limites de leurs diverses juridictions territoriales, par l'effet et en vertu des prévisions desdits traités. Et attendu qu'il a été, de plus, convenu, par ladite convention, en se rapportant aux articles 3, 4 et 5 dudit traité de 1825, que ledit tribunal fournirait réponse et décision aux questions suivantes : 1° Qu'entend-on par point initial de la ligne ? 2o Quel détroit est le détroit de Portland ?- 3o Quelle direction la ligne devrait-elle suivre à partir du point initial jusqu'à l'entrée du détroit de Portland? 4o Jusqu'à quel point de la 56o parallèle la ligne doit-elle être tirée, depuis la tête du détroit de Portland et quelle direction doit-elle suivre entre ces deux points? 5o En étendant la ligne de démarcation vers le Nord, dudit point sur le parallèle du 56° degré de latitude nord, en suivant la crête des montagnes situées parallèlement à la côte jusqu'à son intersection avec le 141° degré de longitude ouest de Greenwich, avec cette condition que, si pareille ligne, où que ce soit, excédait la distance de 10 lieues marines de l'Océan, la frontière entre les territoires britannique et russe serait alors formée par une ligne parallèle aux sinuosités de la côte et ne devant pas s'en éloigner de 10 lieues marines, est-ce l'intention et le sens de ladite convention de 1825, que la Russie conserverait la possession exclusive d'une bordure ou lisière de côte continue, sur le continent, ne dépassant pas 10 lieues marines en largeur, séparant les possessions britanniques des baies, ports, échancrures, havres et eaux de l'Océan, et s'étendant dudit point sur le 56 degré de latitude nord, jusqu'à un point où cette ligne de démarcation coupera le 141° degré de longitude ouest du méridien de Greenwich? — 6o Si, à la question précédente, il était répondu par la négative, et au cas où les sommets des montagnes se trouveraient en des endroits éloignés de plus de 10 lieues marines de la côte, la largeur de la lisière qui devait appartenir à la Russie devrait-elle être mesurée: 1° à partir de la côte continentale de l'Océan, strictement ainsi dénommée, suivant une ligne qui y serait perpendiculaire : ou 2o est-ce l'intention et le sens de ladite convention que, là où la côte continentale est échancrée par des endentures profondes, faisant partie des eaux territoriales de la Russie, la largeur de la lisière dût être mesurée : a/ à partir de la ligne de direction générale de la côte continentale ou b/ à partir de la ligne séparant les eaux de l'Océan des eaux territo

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