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Le 51 mars 1825, sentence arbitrale qui remet les parties au même et semblable état qu'avant la convention primitive, et condamne Daret à restituer au sieur Pinard ro,goo fr. que celui-ci lui avait avancés.

Appel; et, le 11 mai suivant, arrêt de la cour royale de Paris qui infirme le jugement des arbitres, et statue sur la contestation dans les termes que voici: « Attendu que, par les conventions verbales arrêtées entre les parties le 1er février 1823, Pinard a dérogé au mode primitivement adopté entre elles pour l'établissement de la machine, et qu'il a consenti substituer à l'arbre à rayon qui devait faire marcher la presse une chaîne sans fin, mue par quatre roues d'engrenage; qu'en conséquence de ce consentement, il a annoté de sa mam les nouveaux plans qui ont été dressés par Daret, pour effectuer la machine dans le nouveau système de la chaîne sans fin ; qu'il résulte en outre des faits et circonstances de la cause que Pinard a surveillé la confection de la machine, et qu'il n'a pu ignorer par conséquent les changements que Daret avait apportés au mode d'exécution qu'il avait d'abord proposé; décharge Daret des condamnations contre lai prononcées, et déclare Pinard non recevable; le condamne à prendre livraison de la machine dont est question dans l'état où elle est aujourd'hui; - Et attendu qu'il résulte desdites conventions verbales ci-dessus énoncées que le prix de la machine ne devait, en aucun cas, excéder la somme de 15,000 fr., condamne Pinard à payer cette somme, non compris les frais de maçonnerie, etc.; Si mieux n'aime Daret reprendre ladite machine, en restituant les sommes qu'il a reçues, etc. »

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Pourvoi du sieur Pinard pour violation de l'art. 1793 du cod. civ. et des lois sur les brevets d'invention.

Le traité primitif, a dit le demandeur, fixe à 14,000 fr. le prix de la machine, sous la condition toutefois que l'exécution sera conforme au plan donné par l'inventeur. Daret ne s'est point conformé au modèle; il a de son propre mouvement fait des changements notables au plan primitif. Sous ce premier rapport il n'avait pas droit à la totalité du prix 'convenu, c'est-à-dire aux 14,000 fr. En second lieu, et dans l'hypothèse même où il eût été fondé à réclamer cette somme, toujours est-il qu'il ne pouvait prétendre aucun sup

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plément de prix pour les changements, qui n'avaient point été autorisés ni convenus par écrit. L'art. 1793 du cod. civ. est positif à cet égard. Cependant, au mépris de cette disposition formelle, l'arrêt attaqué accorde à Daret le maximum de la somme portée au traité de décembre 1822, et cela sur le prétexte que les changements avaient été verbalement approuvés. On ne peut pas violer plus ouvertement la loi, qui veut une autorisation par écrit.

La contravention aux lois sur les brevets d'invention n'est pas moins évidente. En effet le brevet obtenu par Pinard lui garantissait la propriété exclusive de sa machine, et le privilége de l'exécution et de la vente. C'est donc avoir méconnu tout à la fois le droit de propriété et le privilége que d'avoir laissé au simple ouvrier chargé de la confection l'initiative de conserver la machine ou d'en recevoir le prix.

Du 16 août 1826, ARRÊT de la section des requêtes, M. Voisin de Gartempe faisant fonction de président, M. Chilhaud de la Rigaudie rapporteur, M. Isambert avocat, par Jequel:

LA COUR, Sur les conclusions de M. Joubert, avocat-général; Sur le premier moyen, pris de la prétendue violation de l'art. 1793 du cod. civ., qui ne permet aucune augmentation de prix dans les entreprises et constructions sur un plan convenu, sous le prétexte des changements ou additions qui auraient pu y être faits, qu'autant qu'une pareille convention aurait été rédigée par écrit,—Attendu que, dans l'hypothèse actuelle, l'arrêt attaqué constate, en fait, que le demandeur en cassation a dérogé au mode primitivement adopté pour l'établissement de la machine à imprimer qui a fait la matière du litige, et qu'il a consenti que l'entrepreneur, le sieur Daret, substituât à l'arbre à rayon qui devait faire marcher la presse une chaîne sans' fin mue par quatre roues d'engrenage; qu'en conséquence de ce consentement, il a annoté de sa main les nouveaux plans qui avaient été donnés par ledit sieur Daret pour construire la machine dans le nouveau système de la chaîne sans fin; Qu'il résulte, en outre, des faits et circonstances de la cause que le demandeur a surveillé la confection de cette machine, et n'a pu ignorer, par conséquent, les changements que l'entrepreneur avait apportés au mode d'exécution qu'il avait d'abord proposé;

» Attendu que l'arrêt a restreint la condamnation qu'il a prononcée contre le demandeur à la somme de 15,000 fr. et aux frais de pose.

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maximum du prix reconnu avoir été ainsi stipulé lors des premières conventions, et a rejeté la demande formée par l'entrepreneur de la somme de 34,393 fr. 88 c., pour le prix originaire et les prétendues augmentations qu'il soutenait avoir faites à cette machine; — D'où il suit que l'arrêt attaqué, loin d'avoir violé les dispositions de l'art. 1793 que le demandeur invoquait, s'y est, au contraire, exactement conformé;

que

» Sur le second chef ou moyen proposé seulement à l'audience et pris de la violation prétendue des lois sur les brevets d'invention, en ce · ledit arrêt a déféré à l'entrepreneur l'option de conserver la machine ou d'en recevoir le prix, -Considérant que, cette disposition de l'arrêt étant purement facultative et comminatoire, elle ne peut donner aucune ouverture à la cassation; — Rejette. »

B.

COUR DE CASSATION.

Les membres d'un conseil municipal, cités comme témoins dans une enquête intéressant leur commune, peuvent-ils étre reprochés pour avoir pris part à la délibération en vertu de laquelle la commune est en instance? — Peuton les assimiler à des témoins QUI AURAIENT donné des CERTIFICATS SUR DES FAITS RELATIFS A DES PROCÈS? (Rés. nég.) Cod. de proc. civ., art. 283.

En droit, l'énumération faite par l'art. 283 du cod. de proc. civ. des causes de reproche des témoins est-elle limitutive? (Rés. aff.)

LA COMMUNE DE MONTCAUT, C. DE LAURIÈRE.

Dans la commune de Montcaut, département de Lot-etGaronne, existe une espèce de terrain élevé ou tertre nommé les Coustous du château.. En 1816, le sieur de Laurière, prétendant que ce terrain lui appartenait, entreprit de le faire clore de murs. Le conseil municipal de Montcaut, convoqué les 10 décembre 1816 et 13 juillet 1817, prit une délibération par laquelle il autorisa la commune à revendiquer le terrain dont il s'agit devant les tribunaux.- Le 18 août 1817, arrêté du préfet du département, qui ordonne au sieur de Laurière de rétablir le terrain dans son état primitif, sauf à lui à se pourvoir devant les tribunaux. Celui-ci assigue en effet la commune pour voir dire que défense lui sera faite

de le troubler dans sa propriété et possession dudit terrain.

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Le 11 janvier 1820, jugement du tribunal civil de Nérác qui rejette sa demande.-De Laurière interjette appel devant la cour royale d'Agen, qui rend un interlocutoire par laquelle elle ordonne que de Laurière prouvera qu'il a joui pendant le temps suffisant pour prescrire, la preuve contraire réservée à la commune.

En vertu de cet arrêt, la commune fait assigner un grand nombre de témoins, parmi lesquels s'en trouvent six qui avaient, en qualité de membres du conseil municipal, pris part aux délibérations relatives à l'autorisation de suivre le procès. — Le sieur de Laurière crut devoir reprocher ces six témoins. Il prétendit qu'ils devaient être assimilés à des témoins qui auraient donné des certificats sur les faits relatifs au procès, et qu'il y avait lieu de leur appliquer les dispositions de l'art. 283 du cod. de proc. civ.

Le 3 juin 1823, la cour d'Agen rendit un arrêt par lequel elle admit ces reproches, et infirma le jugement sur le fond. Ses motifs, quant aux reproches, étaient « que, l'art. 283 du cod. de proc. voulant que ceux qui ont donné des certificats sur des faits relatifs au procès puissent être reprochés comme témoins, il était d'une conséquence nécessaire que les membres d'un conseil de commune qui, par leur délibération, ont provoqué ou autorisé les poursuites d'une action judiciaire, ne puissent être admis comme témoins dans la solution d'une question qu'ils ont déjà jugée ».

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Pourvoi en cassation de la part de la commune de Montcaut. On avait, suivant elle, fait une fausse application de l'art. 283 du cod. de proc. civ., et violé les art. 256 et 291 du même code. Les dispositions de l'art. 283 étaient limitatives. Il s'agissait de la privation d'un droit acquis à tous les citoyens, celui de déposer en justice. Or on ne pouvait pas, par des analogies ou des similitudes, le leur enlever. L'analogie, d'ailleurs, était complétement inexacte dans l'espèce. Lorsqu'un simple particulier donne spontanément et librement un certificat dans une affaire, il manifeste, sans y être appelé, une opinion qui peut reposer soit sur des affections, soit sur des liaisons antérieures. De pareilles dispositions doivent faire naître des craintes qu'il ne méconnaisse, même à son insu, la vérité, qu'il doit tout entière à la justice.

'Il n'en est pas de même du fonctionnaire public, appelé par les devoirs de son emploi à concourir à une délibération qui intéresse sa commune. Ses affections sont étrangères à cet acte, qui n'est plus qu'une nécessité pour lui. On avait, en

outre, violé les art. 256 et 291 du cod. de proc. En rejetant le témoignage des membres reprochés du conseil municipal, on avait évidemment dénié à la commune la preuve contraire, qui lui était garantie par la loi, puisque par là cette preuve était devenu incomplète. Enfin, il résultait, par argument a contrario, de l'art. 291, que les reproches dont il s'agit, n'étant pas écrits dans la loi, et ne pouvant pas par conséquent être admis, on ne pouvait se dispenser de lire les dépositions de ces membres du conseil.

Le 25 juillet 1826, ARRÊT de la cour de cassation, section civile, M. Brisson président, M. Ruperou rapporteur, MM. Guillemin, Sirey et Lassis avocats, par lequel:

l'énumération que

que

• LA COUR,- Sur les conclusions de M. de Vatimesnil, avocat-général; Vu les art. 256, 283 et 291 du cod. de proc. civ.; Attendu que les membres du conseil municipal de Montcaut qui ont pris part aux délibérations des 10 décembre 1816 et 13 juillet 1817, n'ayant en cela que rempli un ministère avoué, et même commandé par la loi, ne peuvent, pour avoir concouru à ces délibérations, être assimilés à ceux qui, dans le sens et l'objet de l'art. 283 du cod. de proc. civ., auraient donné des certificats sur des faits relatifs à des procès; » Attendu fait cet article des causes qui peuvent faire reprocher un témoin est limitative, puisque le droit qu'a tout citoyen de déposer en justice ne saurait lui être enlevé qu'en verlu d'une disposition expresse de la loi : :- De tout quoi il résulte qu en rejetant (et en fondant ce rejet sur une conséquence nécessaire dudit art. 283) les dépositions de ces membres du conseil municipal, sans ordonner qu'elles seraient lues pour y avoir tel égard que de raison, la cour royale a créé un reproche non autorisé par la loi, et, par suite, rejeté des dépositions régulièrement faites, ce qui est à la fois une fausse application de l'art, 283, et une violation des art. 256 et 291 du cod. de proc. civ.; Par ces motifs, sans qu'il soit besoin d'examiner le mérite du second moyen, Casse, etc. » A. M. C.

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COUR DE CASSATION.

Pour qu'il y ait ESCALADE, dans le sens de l'art. 397 du cod.

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