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pris l'interrogatoire du 24 août précédent;
Et, pour être procédé conformément a la loi
sur l'accusation portée contre Marie Goubin,
la renvoie en état de prise de corps, et les
pièces de la procédure, devant la Cour d'assi-
ses du département du Morbihan;

D

» Mais, vu l'art. 445 C. inst. crim.;-Attendu que les greffiers sont spécialement institués pour veiller à ce que les actes et procès-verbaux dressés en exécution des lois soient revêtus des signatures des fonctionnaires qui sont appelés à y concourir, et que c'est seulement lorsque ces signatures ont été apposées que les greffiers doivent signer eux-mêmes, attestant ainsi et complétant, par leur propre signature, l'accomplissement des prescriptions légales; qu'en omettant de faire signer l'interrogatoire par le juge qui l'avait reçu, et en signant lui-même avant que la signature de ce magistrat eût été apposée, le greflier de la Cour d'assises de la Loire-Inférieure a commis une faute grave qui oblige à recommencer la procédure, et qu'il y a lieu, conformément à l'art. 415 C. inst. crim., d'en mettre les frais à sa charge; ORDONNE que la procédure à recommencer, depuis et compris l'interrogatoire subi par Marie Goubin, le 24 août dernier, sera faite aux frais du greffier, etc. »

M.

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LA COUR; Attendu que l'art. 4 de la loi du 3 mai 1844, qui interdit de mettre en vente, de vendre, d'acheter, de transporter et de colporter du gibier dans chaque département pendant le temps où la chasse n'y est pas permise, n'a point été promulgué dans l'Algérie ; Qu'aucune ordonnance royale n'a donné au directeur général des affaires

civiles de ce pays réuni au territoire français
le droit de porter la même défense, et que les
arrêtés du gouverneur général en date des 5
déc. 1834 et 1er août 1842 ne lui confèrent
aucune attribution à cet égard; qu'il suit de
là que l'art. 2 de l'arrêté du 1er mars dernier,
par lequel le directeur a prohibé, dans l'ar-
rondissement d'Alger, à partir du 10 du même
mois, l'introduction, la vente et le colportage
du gibier, n'est pas légal, et ne peut, par sui-
Que les prévenus n'é-
te, être obligatoire;
taient dès lors passibles d'aucune peine pour y
avoir contrevenu, et que les jugements dénon-
cés, en déclarant que le tribunal de simple po-
lice qui les a rendus se trouvait incompétent
pour statuer sur la poursuite, n'ont fait que
se conformer aux principes de la matière;
Attendu que le renvoi de Aissa-Ben-Zouim,
Aissa ben-Toumi et Carrère devant le procu-
reur de la République près le tribunal correc-
tionuel d'Alger, prononcé par ces jugements,
ne saurait obliger ce magistrat à saisir ce tri-
bunal d'un fait qui ne constitue, dans l'état de
la cause, ni délit ni contravention;

JETTE. D

COUR DE CASSATION.
(29 novembre 1848.)

A. H.

TRANSCRIPTION (droit de), LICITATION
COHÉRITIER.

RE

L'adjudication sur licitation, au profit de plusieurs des cohéritiers, d'un immeuble indivis entre eux, donne lieu au droit de transcription (1). C. civ. 883; L. 28 avril 1816, art. 52 et 54.

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DU 29 NOVEMBRE 1848, arrêt C. cass. cn. civ., MM. Portalis ier prés., Simoneau rapp., Glandaz av. gén., Moutard-Martin av.

• LA COUR; Vu les art. 52 et 54 de la Attendu que l'art. loi du 28 avril 1816; 883 C. civ. forme une exception au droit commun, suivant lequel l'hypothèque subsiste sur tous les immeubles affectés et les suit dans quelques mains qu'ils passent, et que cette exception doit être restreinte aux seuls cas déterminés par la loi; Attendu qu'il résulte du texte et de l'esprit dudit art. 883 que cette exception ne s'applique qu'au cas où l'un des cohéritiers, devenu, par l'effet d'un partage ou d'une licitation, seul propriétaire d'un immeu ble possédé par indivis, est censé avoir succédé seul et immédiatement à cet immeuble; mais qu'elle ne s'applique pas au cas où, par l'effet - Que, de la licitation, ledit immeuble est resté indivis entre deux ou plusieurs cohéritiers ; dans ce dernier cas, les hypothèques créées par l'un des cohéritiers subsistent, et que, dès

(1) V. conf. Cass. 21 juin et 12 juil. 1848 (t. 2 1848, p. 672), et la note.

lors, le contrat d'adjudication est de nature à être transcrit ; — Attendu que l'immeuble possédé indivisément par les dames Brézillac et Arzac, et leurs autres cohéritiers, a été adjugé sur licitation aux dites dames Brézillac et Arzac conjointement; - Que, dès lors, l'indivision n'ayant pas cessé complétement, le contrat devait être transcrit, aux termes de l'art. 54 de la loi du 28 avril 1846; - Attendu que le jugement attaqué, en décidant le contraire, a faussement interprété l'art, 883 C. civ., et a violé les art. 52 et 54 de la loi du 28 avril 1816; CASSE, etc. › F. N.

COUR DE CASSATION. (21 février et 26 mars 1849.) TRANSCRIPTION (droit de), acte DE SOCIÉTÉ, APPORT D'IMmeuble.

• LA COUR; -Vu les art. 25 de la loi du 21 vent. an VII, et 54 de la loi du 28 avril 1816;-Attendu que la transcription de l'acte dont il s'agit a eu lieu au bureau des hypothèques de Bastia sur la réquisition des parties intéressées, le 19 juin 1845, vol. 58, ainsi que l'administration de l'enregistrement l'avait énoncé dans son mémoire, siguifié dans le cours de l'instance engagée devant le tribunal civil de la Seine, mémoire visé dans les qualités du jugement attaqué, lors duquel ce fait n'a pas été contredit par le défendeur;- Attendu que la présentation volontaire de l'acte à la formalité de la transcription, au mois de juill. 1845, rendait non recevable la demande formée ul. térieurement, en avril 1847, à fin de restitution d'un droit qui, aux termes de l'art. 61 de la loi du 28 avril 1816, devait être perçu lors de ladite présentation, s'il ne l'avait pas été au moment de l'enregistrement; D'où il suit qu'en condamnant l'administration de l'enre

Le droit proportionnel de transcription qui a gistrement à restituer au défendeur le montant du droit dont il s'agit, le jugement attaqué a été perçu par suite de la présentation volontaire d'un acte au bureau des hypothe-vent, an VII, 54 de la loi du 28 avril 1816;expressément violé les art. 25 de la loi du 21 ques, et spécialement d'un acte de société CASSE le jugement rendu par le tribunal civil constatant l'apport d'un immeuble, ne peut de la Seine le 9 fév. 1848. » étre l'objet d'une restitution ultérieure (1). LL. 21 vent. an VII, art. 25; 28 avril 1816, art. 54.

PREMIÈRE ESPÈCE.

ENREGISTREMENT C. BLANchet.

DU 24 FÉVRIER 1849, arrêt C. cass., ch. civ., MM. Portalis 4er prés., Miller rapp., NiciasGaillard av. gén. (concl. conf.), Moutard-Martin av.

LA COUR; - Vu les art. 25 de la loi du 21 vent. an VII, et 54 de celle du 28 avril 1816; - Attendu que le défendeur a reconnu que l'acte de société dont il s'agit était de nature à être transcrit, puisque la transcription a eu lieu sur sa réquisition au bureau des hypothèques de Niort, le 29 nov. 1845, vol. 201, n° 29; — Attendu qu'en réquérant cette transcription, ledit défendeur se reconnaissait passible du droit proportionnel qui avait été perçu, et était dès lors non recevable à en demander ultérieurement la restitution; d'où il suit qu'en condamnant l'administration de l'enregistrement et des domaines à cette restitution, le jugement attaqué a expressément violé les art. 25 de la loi du 21 vent, an VII, et 54 de celle du 28 avril 1816; Donnant défaut contre le défaillant; CASSE, elc.»

DEUXIÈME ESPÈCE.

ENREGISTREMENT C. PUYLAROQUE. Du 26 MARS 1849, arrêt C. cass., ch. civ., MM. Portalis 1er prés., Nicias-Gaillard av. gén. (concl. conf.), Moutard-Martin av.

(1) V. conf. Cass. 25 juil. 1827; 28 mai 1845 (t. 2 1845, p. 29), 23 juin 1846 (t. 2 1846, p. 407), et les notes.

COUR DE CASSATION. (25 avril 1849.)

F. N.

TRANSCRIPTION (droit de), TESTAMENT, SUBSTITUTION, ENREGISTREMENT.

Le legs d'immeuble fait à charge de substitution en faveur des enfants du légalaire esl passible du droit proportionnel de transcription lors de l'enregistrement du teslament (1), encore bien que la substitution ait été faite sous la condition que l'appelé survivra au grevé.

En modifiant les droits d'enregistrement relatifs aux libéralités, la loi du 21 mai 1832 n'a nullement dérogé aux dispositions de la loi du 28 avril 1816 sur le droit de transcription. L. 28 avril 1816, art. 54. ENREGISTREMENT C. DE COLBERT.

Le 4 déc. 1837, jugement du tribunal de Saint-Omer, qui décide le contraire en ces termes :

« Attendu que, par testament olographe, en date du 27 oct. 1845, la dame de Prudhommed'Hailly a fait un legs universel au profit de la dame Olympe de Sandelin, épouse Colbert, sa nièce, à charge de restitution aux enfants de celle-ci, au premier degré seulement; Attendu que le receveur de l'enregistrement a perçu, au moment de l'enregistrement de ce à raison de 1 fr. 50 c. pour 100 fr., au chiffre testament, un droit de transcription s'élevant, total de 6,319 fr. 50 c., principal et décime

(1) V., dans le même sens, Cass. 28 nov. 1848 (t. 1 1849, p. 120), et la note.

compris;-Attendu, en droit, que le droit de transcription est accessoire au droit proportionnel de mutation; que l'art. 54 de la loi du 28 avril 1816 s'applique aux actes dont on ne requiert pas la transcription lors de l'enregistrement, mais qui, contenant transmission de propriétés immobilières, doivent nécessairement être soumis à cette formalité, si l'on veut purger ces propriétés des charges hypothécaires antérieures, conformément aux dispositions des art. 2181 et suiv. C. civ. ; que l'on ne peut ranger dans cette catégorie la disposition secon daire du testament de la dame Prudhommed'Hailly, c'est-à-dire la substitution au profit des enfants de la dame Colbert; qu'en effet, il n'y aura mutation à leur égard qu'autant qu'ils survivront à leur mère; qu'il y a donc condition suspensive ; - Attendu qu'il est de principe qu'une disposition quelconque dont l'effet est subordonné à une condition suspensive n'est jamais passible actuellement d'un droit proportionnel; qu'il suit de là qu'un droit proportionnel de transcription perçu lors de l'enregistrement du testament doit être res. titué; Que ce serait, du reste, encore une question à examiner, que celle de savoir si le droit de transcription ne se trouve pas compris dans celui de mutation fixé par la loi de 1832.... D

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LA COUR; Vu l'art. 54 de la loi du 28 avril 1816; Attendu qu'il résulte du jugement attaqué que, par testament olographe du 27 oct. 1845, la dame veuve Prudhommed'Hailly a institué pour sa légataire universelle la dame de Colbert, sa nièce, à la charge de

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SÉPARATION DE BIENS, DOT, GARANTIES AC-
TUELLES, PÉRIL PROCHAIN, ENQUÊTE, RE-
VENUS, DETTES DU MARI, CAUSES HONO-
RABLES.

La séparation de biens peut être prononcée
alors même que la fortune du mari pré-
senterait des garanties actuelles suffisantes
pour le remboursement du capital de la dot
si la complication de ses affaires, la dif-
férence qui existe entre les intérêts des
sommes dues par lui et les revenus de ses
biens, les lenteurs et les difficultés d'une
liquidation, peuvent faire craindre un péril
prochain pour ce capital (1). C. civ. 1443.
Le soin de conserver le capital de la dot n'est
pas le seul motif qui puisse donner ouver-
ture à la séparation de biens; elle peut
aussi être prononcée lorsque les revenus,
absorbés par les dettes du mari, sont ainsi
détournés de leur destination légitime, l'en-
tretien de la famille (2).

Lorsqu'il ressort évidemment de la comparai

paration de biens pouvait être prononcée quand le (1-2) La novelle 97, cap. 6, portait que la sé

d'après cet article, la séparation de biens peut être prononcée même lorsqu'il n'y a lieu de craindre dans les biens du mari, dont les affaires sont en désordre, que de l'insuffisance pour remplir les droits et reprises de la femme. Si, en effet, celle-ci était obligée d'attendre, pour provoquer la séparation de biens, qu'une partie de sa dot fût déjà perdue, que le désordre des affaires du mari fût déjà voisin de la ruine, le remède arriverait évidemment trop tard. L'art. 1445 précité doit donc être entendu dans le même sens que la novelle 97. Malleville, Analyse raisonnée de la discussion du Code civil, sur l'art. 1443; Pont et Rodière, Du contrat de mariage, t. 2, n° 796; Troplong, Du contrat de mariage, t. 2, n° 1512.

rendre les biens meubles et immeubles commari s'acheminait vers la misère, si inchoaverit posant sa succession aux enfants de ladite male substantia uti. L'art. 1445 C. civ. n'indilégataire au premier degré seulement, lesque pas non plus comme cause unique de sépaguels lui sont substitués pour recueillir les-ration de biens le péril réalisé actuel, de la dot; dits biens après son décès, mais avec la clause que, dans le cas contraire, ladite legataire sera censée avoir toujours été libre propriétaire desdits biens; —Attendu que, aux termes de l'art. 1069 C. civ., la libéralité ci-dessus devait être rendue publique par la transcription; - Attendu que l'art. 54 de la loi du 28 avril 1816 soumet au droit de un et demi p. cent, lors de l'enregistrement, tout acte de nature à être transcrit, et que l'on ne peut contester ce caractère aux actes emportant soit mutation actuelle, soit mutation future, pour lesquels la loi, par une disposition spéciale, a prescrit cette formalité de la transcription; Attendu que la transcription prescrite par l'art. 1069 C. civ., ni, par conséquent, la perception du droit ci-dessus, ne sont point subordonnées à l'événement de la substitution: Attendu que l'art. 33 de la loi du 21 mai 1832, en modifiant les droits d'enregistrement dus pour les libéralités du genre de celle contenue dans l'acte litigieux, n'a nullement dérogé aux dispositions de l'art. 54 précité; Attendu

Aussi a-t-il été décidé avec raison qu'un désordre des affaires du mari assez grave pour donner de justes inquiétudes sur sa fortune constituait un péril sérieux pour la dot et suffisait pour justifier la séparation de biens. Paris, 5 mai 1849 (. 2 1849, p. 66). Dans l'espèce de cet arrêt, il Mais si le avait péril actuel pour la dot. y dérangement des affaires du mari ne fait craindre

-

son entre les ressources du mari et les charges contractées par lui, ainsi que de toutes les explications données par les parties, que les revenus des biens de la communauté ne suffisent pas pour payer les intérêts des dettes personnelles du mari, et qu'il lui est

son insolvabilité que pour l'avenir, n'inspire, pour la dot, que la crainte d'un péril futur, la séparation de biens devrait-elle également être prononcée ? La question ainsi posée a été résolue négativement par MM. Pont et Rodière (loc. cit.). Au contraire, l'arrêt que nous rapportons ici la résout affirmativement. Toutefois, ces deux solutions ne sont peut-être pas tout à fait inconciliables dans l'opinion de MM. Pont et Rodière, la crainte du péril n'est encore que vague, indéterminée, ne s'appuie sur aucun fait précis ; tandis que, dans l'espèce de l'arrêt que nous recueillons, la crainte était réelle, actuelle, le péril était prochain, imminent. On comprend donc, dès lors, que la Cour de Riom l'ait considéré comme suffisant pour motiver la séparation de biens.

Le mot désordre, dont s'est servi le législateur dans l'art. 1443, semblerait impliquer qu'il doit y avoir de la part du mari mauvaise administration. Cependant nous ne pensons pas qu'on doive s'arrêter à une acception aussi restreinte. Le législateur ne s'est préoccupé que d'une chose, le désordre des affaires du mari et le danger qu'il présente pour la dot, mais nullement des causes de ce désordre. Si, comme ledit un vieil adage, pauvreté n'est pas vice, l'intérêt qu'il y a pour la femme, pour les enfants, à conserver entière la dot constituée pour subvenir aux charges de la famille, exigeait néanmoius qu'on ne tint pas compte de la cause du désordre des affaires du mari, alors même qu'elle ne lui est pas imputable. Ainsi, dès qu'il est constant qu'il y a désordre, et que ce désordre est de nature à mettre la dot en péril, la séparation de biens doit être prononcée aussi bien lorsqu'il est le résultat de pertes et de malheurs indépendants de la gestion du mari que lorsqu'il provient d'une mauvaise administration, de fausses ou maladroites spéculations. Pothier, De la communauté, t. 2, no 499; Toullier, t. 15, no 55; Merlin, Rep., vo Séparation de biens, sect. 2, § 1, n° 5; Benoit, De la dol, l. 1, no 277; Cubain, Droits des femmes, n° 466; Zachariæ, Cours de dr. civ. franç., t. 3, p. 472; Pont et Rodière, t. 2, no 794; Troplong, t. 2, no 1525 et 1555.

Ila même été jugé que la séparation de biens pouvait être prononcée quoique le mari n'eût pas encore touché la dot, si ses désordres et ses dissipations faisaient craindre qu'elle ne fût pas en sûreté dans ses mains: Bordeaux, 1er mai 1848 (t. 2 1848, p. 320).

La circonstance que la restitution du capital de la dot est garantie par une caution hypothécaire fournie par le père du mari ne pourrait empêcher de prononcer la séparation de biens, si la dot constituée à la femme et comptée par elle à son mari avait été dissipée et avait péri dans les mains de ce dernier, et si, en outre, celui-ci était, par ses affaires personnelles, hors d'état de remplir les droits et reprises de la femme. Cass. 27 avril 1847 (t. 1 1847, p. 667).

Mais, en admettant même que la séparation de biens ne puisse être prononcée lorsque

devenu impossible de subvenir d'une manière suffisante aux besoins de sa famille, il n'y a pas lieu d'ordonner une enquête pour la constatation de ces fails (1). Bien que les dettes du mari proviennent de causes honorables, et qu'elles ne soient

le capital de la dot est suffisamment garanti, soit par l'hypothèque légale de la femme, soit par une hypothèque donnée par un tiers, il n'en serait plus de même, et cette garantie cesserait d'être un obstacle, si la mauvaise administration du mari, le désordre de ses affaires, les dettes qu'il a contractées, sont de nature à faire craindre que les revenus de la dot ne soient détournés de leur destination légale, l'entretien de la famille. Aussi, dès le moment où il est reconnu que le mari cesse de leur donner cette destination, où même seulement il y a lieu d'en concevoir la crainte, on ne saurait hésiter à lui retirer l'administration des biens dotaux. Ce principe a été constamment admis. V. Pau, 9 déc. 1820; Agen, 28 juin 1852, Montpellier, 22 janv. 1853; Cass. 28 fév. 1842 (t. 1 1842, p. 722), 17 mars 1847 (t. 1 1847, p. 665), et la note; Orléans, 7 août 1845 (t. 2 1845, p. 546).- Cochin, OEuvres completes, édit. de 1775, t. 5, p. 718; Merlin, loc. cit., n° 4; Toullier, t. 13, no 29; Bellot-des-Minières, Du contrat de mariage, t. 2, p. 100; Benoît, De la dot, t. 1, n° 275; Pont et Rodière, t. 2, n° 805; Troplong, t. 2, nos 1315 et 1526.-V. aussi Colmar, 24 mai 1848 (qui suit); Caen, 9 déc. 1848(inf., p. 40), et les

notes.

Au surplus, quant à la gravité des faits invoqués par la femme comme constituant le péril de la dot, soit relativement au capital, soit relativement aux revenus, l'appréciation en appartient souverainement aux juges du fond, qui peuvent puiser où bon leur semble les éléments de leur conviction. V. Cass. 6 janv. 1808; motifs de l'arrêt de Cass. du 17 mars 1847, cité plus haut. Duranton, t. 14, no 402; Zachariæ, t. 5, p. 472.

(1) Il n'est pas douteux que la femme qui poursuit sa séparation de biens ne soit tenue d'établir les faits sur lesquels elle fonde sa demande. C'est une conséquence du S 2 de l'art. 1445, qui prohibe toute séparation volontaire. Mais, souverains appréciateurs du point de savoir si les circon stances alléguées par la femme sont réellement de nature à mettre la dot en péril (V. la note qui précède, in fine), les juges ont aussi le pouvoir de décider d'une manière souveraine si la preuve de ces faits est ou non suffisante (motifs de l'arrêt de Cass. précité du 17 mars 1847); de même qu'ils ont le droit de suppléer, par tous les moyens qui leur paraissent convenables, au vague ou à l'insuffisance des preuves administrées par la femme (Chauveau sur Carré, Lois de la procédure, quest. 2940). La loi s'en est complétement rapportée, en ce qui concerne la preuve du péril de la dot ou du désordre des affaires du mari, à leur sagesse (Pont et Rodière, l. 2, no 795). En conséquence, lorsqu'une Cour d'appel a reconnu que la femme qui demande sa séparation de biens a prouvé le péril de la dot et l'insuffisance des biens de son mari pour la sûreté de ses droits et reprises, il n'entre pas dans les attributions de la Cour de cassation de critiquer cette décision: Cass. 6 janv. 1808.

pas de nature à le convaincre de dissipation ou même seulement de dépenses exagérées, les tribunaux ne doivent pas moins prononcer la separation de biens, s'il est établi que la dot de la femme est en péril el que ses revenus ne reçoivent pas l'emploi pour lequel elle a été constituée (1).

DAME GIRARD C. GIRARD.

Le 15 juin 1848, jugement du tribunal civil d'Issoire, ainsi conçu :

«En ce qui touche la question de savoir si Girard n'a pas mis la dot en péril en disposant de tous ses revenus ou à peu près dans son intérêt personnel, et non dans l'intérêt du ménage:— Attendu que, s'il résulte des chitires respectivement débattus, tant pour le passif que pour l'actif de la fortune du sieur Girard, que celui-ci doit employer la presque

totalité de ses revenus au service des intérêts de ses dettes personnelles; si, par exemple, il a été démontré qu'il n'avait pas communiqué à sa femme une notification qui lui était faite au moment de son absence pour purger son hypothèque légale pour une somme de 11,000 fr; que la purge se serait opérée à son insu; que, d'autre part, il aurait vendu des bois sans respecter l'autorité du séquestre, ce qui accuse évidemment une mauvaise administration et une excessive gêne; néanmoins, le tribunal, en présence des dénégations respectives, ne peut pas se trouver suflisamment éclairé sur le détournement des revenus de la dot;· Mais attendu que la demanderesse a mis en fait et offert de prouver que son mari la laissait manquer du nécessaire pour elle et pour ses enfants, qu'elle se voyait obligée de travailler manuellement pour pourvoir à ses besoins d'entretien; qu'elle aurait été forcée d'ap pliquer à son intérêt des valeurs qui avaient été déposées entre ses mains dans un but de charité publique; qu'eu un mot, il la laissait manquer, elle et ses enfants, des objets les plus nécessaires; — Attendu que cette preuve est admissible; - Par ces motifs, le tribunal,

jugeant en premier ressort, dit et ordonne, avant faire droit sur la demande en séparation de biens, que la demanderesse fera preuve des faits par elle ci-dessus articulés tant par titres que par témoins, sauf au sieur Girard à faire la preuve contraire, pour, sur les enquêtes rapportées, être par le tribunal statué..... » Appel par la dame Girard.

DU 29 AOUT 1848, arrêt C. Riom, MM. Godemel prés., Imberdis 1er av. gén., Dumiral et

Salveton av.

LA COUR; Attendu que, dans l'esprit de Part. 1443 C. civ., qui ne permet la demande en séparation de biens qu'à la femme dont la dot est mise en péril, la dot comprend tous les biens que la femme apporte au mari pour soutenir les charges du mariage; -Attendu que les reprises de toute nature exercées par la

(1) V., sur ce point, la note première qui précède.

dame Girard sur son mari paraissent, d'après les explications et pièces produites, s'élever environ à une somme de 36,000 fr.; — Attendu

que, déduction faite des dettes contractées par du sieur Girard, pourrait présenter des garanlui, la fortune, tant mobilière qu'immobilière ties actuelles sullisantes pour le remboursement de celle somme; - Attendu, toutefois, que la complication de ses affaires, la différence qui existe entre les intérêts des sommes dues par lui et le revenu de ses biens, les lenleurs et les difficultés d'une liquidation peuvent faire craindre un péril prochain même Attendu que le soin de conserver ce capital pour le capital de la dot qu'il a touchée; n'est pas le seul motif qui puisse donner ouaussi être poursuivie et prononcée lorsque les verture à la séparation de biens, qu'elle peut mari, sont ainsi détournés de leur destination revenus de la dot, absorbés par les dettes du légitime, l'entretien de la famille; - Attendu que telle est la position du sieur Girard, que les revenus des biens de la communauté ne suffisent pas évidemment à payer les intérêts de ses dettes personnelles, et qu'il lui est desuffisante aux besoins de sa famille; venu impossible de subvenir d'une manière - AltenGirard, rapprochées des charges contractées du que la comparaison des ressources du sieur par lui, rend ce fait évident; qu'il ressort également de toutes les explications données par les parties, et qu'il est, dès lors, superflu de recourir, pour le constater, à la preuve ordonnée par le tribunal de première instance de l'arrondissement d'Issoire ; Attendu que les dettes du sieur Girard proviennent toutes de meubles et constitutions de dot faites par lui causes honorables, telles qu'acquisitions d'imseul aux enfants nés du mariage commun; qu'ainsi elles ne sont pas de nature à le convaincre de dissipation, ou même seulement de dépenses exagérées; - Mais, attendu que cette considération ne doit exercer aucune influenbiens, et que les tribunaux ne doivent examice sur le sort des demandes en séparation de ner, dans ce sens, qu'une seule question,

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1

celle de savoir si la dot de la femme est en l'emploi pour lequel elle a été constituée; péril et si ses revenus reçoivent effectivement Attendu que, sous ce double rapport, la demande de la dame Girard se trouve suffisamment justifiée;- Déclare qu'il a été mal jugé par le jugement du tribunal d'Issoire, en ce qu'il ordonne la preuve des faits tendant à établir que les revenus de la dot de la dame Girard n'étaient pas employés à l'entretien de la famille; bien appelé à cet égard par ladite dame; émendant et faisant ce que les premiers juges auraient dû faire, PRONONCE immédiatement la séparation de biens entre les époux Girard, et ORDONNE qu'il sera procédé entre eux à la liquidation et au paiement réel des droits et reprises de ladite femme dans les délais et les formes prescrits par la loi, etc.. A. H.

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