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déclare abrogés les art. 1-3 de la loi du 16 juin 1885, et rétablit la règle suivante de l'art. 14 de la loi du 30 novembre 1875. Chaque arrondissement administratif dans les départements et chaque arrondissement municipal à Paris et à Lyon nomme un député, quelle que soit sa population. Mais les arrondissements dont la population dépasse 100.000 habitants nomment un député de plus par 100.000 ou fraction de 100.000 habitants. En pareil cas l'arrondissement est divisé par une loi en un certain nombre de circonscriptions; ces circonscriptions ne peuvent être modifiées que par une loi; et il ne peut être formé de circonscriptions comprenant des cantons appartenant à des arrondissements différents. A la fin de chaque législature, quand il y a eu un nouveau recensement de la population, il est fait une loi qui apporte aux circonscriptions les modifications rendues nécessaires par le mouvement de la population. En donnant au parlement compétence exclusive pour tracer les limites des circonscriptions électorales dans les limites de chaque arrondissement, on a voulu éviter le retour des abus du second empire, pendant lequel le gouvernement taillait dans un département à son gré les circonscriptions électorales pour contre-balancer autant que possible les majorités antigouvernementales existant en certaines villes.

La dernière loi qui fixe le tableau des circonscriptions électorales est du 26 mars 1910. Ce tableau est établi d'après le recensement de 1906; le nombre des circonscriptions est de 597 (J. off., 27 mars 1910).

Ce système est évidemment très simple et très commode; mais s'il est vrai que le nombre des députés doit être proportionnel à la population, il n'assure point cette proportionnalité. Il suffit, en effet, de supposer deux arrondissements dont l'un compte 100.000 habitants et dont l'autre compte 100.002 habitants; le premier nommera un député, le second en nommera deux; le député nommé par le premier représentera 100.000 habitants, les deux députés nommés par le second représenteront chacun 50.001 habitants. On ne saurait justifier ce système en disant que la base de la représentation doit être non seulement la population, mais les unités sociales. En effet,

les arrondissements sont des divisions tout à fait artificielles et ne peuvent point servir de base à une représentation électorale.

Sur la question du scrutin de liste ou du scrutin uninominal et les variations de notre législation sur ce point, cf. p. 171.

Durée du mandat. Les députés sont élus pour quatre ans et la chambre se renouvelle intégralement tous les quatre ans (L. 30 novembre 1873, art. 15).

Convocation du corps électoral. Le corps électoral est convoqué par un décret du président de la République. L'intervalle entre le jour de la promulgation du décret et celui de l'élection doit être au moins de 20 jours (D. org. 2 février 1852, art. 4, et L. 30 novembre 1875, art. 5, § 1). Cette durée de 20 jours forme ce qu'on appelle la période électorale, pendant laquelle certaines exceptions sont faites au droit commun de l'affichage et du colportage.

Si le président de la République a seul pouvoir pour convoquer les électeurs à l'effet de nommer les députés, il n'a point toute liberté pour déterminer l'époque où il doit faire cette convocation, et le législateur a fixé certains délais dans lesquels doivent avoir lieu les élections et par conséquent par là même des délais dans lesquels doit être faite la convocation. Il faut distinguer les élections générales et les élections partielles.

Les élections générales, faites pour le renouvellement de la chambre à l'expiration de la législature, doivent avoir lieu dans les 60 jours qui précèdent l'expiration des pouvoirs de la chambre des députés. La loi du 30 novembre 1875 n'avait pas statué sur ce point et la règle a été posée par la loi du 16 juin 1885, art. 6. Ainsi les élections générales pour le renouvellement intégral de la chambre, parvenue à l'expiration de son mandat, ne peuvent pas avoir lieu avant les 60 jours qui précèdent la date de l'expiration de ce mandat; mais dans ces 60 jours, le gouvernement fixe la date qu'il veut, à la condition cependant que le recensement des votes qui suit le deuxième tour de scrutin

puisse avoir lieu avant le jour de l'expiration des pouvoirs de la chambre renouvelée.

Au cas de dissolution, le délai dans lequel les collèges électoraux doivent être réunis est déterminé par l'art. 5, § 2 de la loi const. du 25 février 1875, modifié par la loi const. du 14 août 1884, art. 1 ainsi conçu: «En ce cas (au cas de dissolution), les collèges électoraux sont réunis pour de nouvelles élections dans le délai de deux mois et la chambre dans les 10 jours qui suivront la clôture des opérations électorales », c'est-à-dire le deuxième tour de scrutin.

Au cas d'élection partielle par suite d'une vacance par démission, décès ou autrement, l'élection doit être faite dans le délai de trois mois à partir du jour où la vacance s'est produite (L. 30 novembre 1875, art. 16). Mais il n'est point pourvu aux vacances qui surviennent dans les six mois qui précèdent le renouvellement de la chambre. Par exemple la chambre devant arriver à l'expiration de ses pouvoirs le 31 mai 1910, il n'a pas été pourvu aux vacances survenues postérieurement au 30 novembre 1909.

85. Prohibition des candidatures multiples. La règle seule conforme au principe démocratique et à la liberté électorale, c'est que tout citoyen puisse être candidat dans toutes les circonscriptions que bon lui semble, et que les électeurs puissent voter pour tout.citoyen qu'il leur plaît de choisir, alors même qu'il n'ait pas fait acte de candidature. Cependant la loi du 17 juillet 1889 prohibe les candidatures multiples, contrairement à ce principe.

Aux termes de l'art. 1er de cette loi du 17 juillet 1889, nul ne peut être candidat dans plus d'une circonscription. Malgré la généralité de cette disposition, il a été bien entendu au moment du vote de la loi, et il n'est pas contesté, qu'elle ne s'applique point aux élections sénatoriales, mais seulement aux élections des députés.

Pour garantir l'interdiction des candidatures multiples, la loi exige que tout citoyen qui se présente ou est présenté aux élections générales ou partielles fasse une déclaration de candidature signée ou visée par lui. Cette déclaration doit indiquer la circonscription dans laquelle la candidature est posée. Elle doit être faite le cinquième jour au plus tard avant l'ouverture du scrutin, à la préfecture du département où a lieu l'élection. Un récépissé provisoire doit être donné; et dans les vingt-quatre heures il doit être délivré un récépissé définitif. La déclaration peut, au reste, être libellée sur papier libre; elle n'est assujettie à aucun droit de timbre; elle peut être expédiée par lettre (L. 17 juillet 1889, art. 2 et circulaire du ministre de l'intérieur 29 août 1889). On décide que le candidat ne peut faire sa déclaration de candidature avant l'ouverture de la période électorale.

Puisque cette déclaration de candidature est exigée en vue d'éviter les candidatures multiples, on ne peut évidemment se déclarer candidat que dans une seule circonscription. Si des déclarations sont déposées par le même citoyen pour plus d'une circonscription, la première déclaration en date est seule valable, et si elles portent la même date, toutes sont nulles (L. 17 juillet 1889, art. 3).

Le législateur a voulu donner une sanction énergique aux obligations qu'il édicte. Pour cela, il décide que les bulletins qui seront au nom d'un citoyen qui n'aurait pas fait une déclaration de candidature ou qui aurait fait une déclaration nulle, non seulement ne lui sont pas attribués, mais doivent être considérés comme des bulletins blancs et n'entrent pas en compte dans le résultat du dépouillement (L. 17 juillet 1889, art. 5). C'est là une dérogation importante au droit commun électoral, d'après lequel les bulletins portant un nom, alors même que ces bulletins sont nuls, doivent être comptés pour le calcul de la majorité. Ici les bulletins sont nuls et sont traités comme bulleMANUEL DE DR. CONST. 11

tins blancs. Il résulte de cela qu'alors même qu'un candidat, n'ayant pas fait de déclaration de candidature ou ayant fait une déclaration nulle, a la majorité, il ne doit pas être proclamé élu par la commission de recensement, qui doit proclamer celui des candidats qui, ayant fait une déclaration régulière, réunit le plus de voix, à la condition toutefois, bien entendu, qu'au premier tour le nombre de ses voix soit au moins égal à la moitié plus un des suffrages valablement exprimés et au quart des inscrits, suivant la règle générale. Au contraire, si un candidat inéligible réunissait la majorité exigée, la commission de recensement devrait le proclamer élu, sauf à la chambre à l'invalider. Dans tous les cas, c'est à la chambre de juger s'il y a eu déclaration de candidature régulière et de statuer sur l'élection; elle fait office de commission supérieure de recensement (cf. § 94).

86. Election des sénateurs. Il y a eu à cet égard, en 1884, un changement important dans notre législation politique.

A la suite de nombreuses péripéties qu'il n'y a pas lieu de raconter ici (cf. Duguit et Monnier, Les constitutions de la France, 2e édit., 1908, Notices historiques, p. CXLIX et suiv.; Duguit, L'élection des sénaleurs, Revue politique et parlementaire, août 1895), l'Assemblée nationale de 1875 votait la loi constitutionnelle du 24 février 1875. Elle créait un sénat composé de 300 membres, dont 75 sénateurs inamovibles ou à vie et 225 sénateurs élus par les départements. Les 75 premiers sénateurs inamovibles devaient être élus par l'Assemblée nationale avant de se séparer, au scrutin de liste et à la majorité absolue des suffrages. Au cas de vacance d'un siège de sénateur inamovible, il devait être pourvu au remplacement par le sénat lui-même dans les deux mois de la vacance (cf. L. const. 24 février 1875, art. 1, 5 et 7). Les 225 sénateurs élus par les départements étaient répartis entre les départements et les colonies par la loi constitutionnelle elle-même, qui fixait le nombre des sénateurs que devaient élire chaque département et chaque colonie (L. const. 24 février 1875, art. 2). Les sénateurs des départements et des colonies étaient élus, à la majorité absolue et au scrutin de liste, par un collège réuni au chef-lieu du département ou de la colonie et composé: 1o des députés; 2o des conseillers généraux; 3° des conseillers d'arrondissement; 4o des délégués élus, un par chaque conseil municipal, parmi les électeurs de la commune. Dans l'Inde

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