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Une députation du Corps législatif a été ensuite présentée.

La députation était composée de MM. Aubert, le comte de Beaumont, de Béthune-Sully, le comte de Caraman, le chevalier Chappuis, Chirat, d'Armenouville, le chevalier de l'Horme, le baron Duhamel, le chevalier Dupont, Eméric-David, Faget de Baure, Faure, Fornier de Saint-Lary, Gallois, Haquin, Janod, le baron Jaubert, Aroux, Petit (du Cher), le baron Petit de Beauverger, RagonGillet, le chevalier Sartelon, le baron de Septenville, le comte de Trion-Montalembert.

M. LE CHEVALIER DE L'HORME, président de la députation, a adressé à Sa Majesté le discours suivant :

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« Le Corps législatif a le bonheur de se présenter une seconde fois devant Votre Majesté.

« Une foule de sentiments naturels aux cœurs des Français, l'impérieux besoin de revoir les descendants du bon Henri et l'impatience de lui exprimer notre amour, nous ont déjà fait chercher la présence de Votre Majesté avant même d'être appelés par elle. Représentants de la nation, il nous semblait, lorsque nous accourions sur votre passage, que la nation elle-même vous apparaîtrait avec nous, que nulle partie de son territoire n'aurait plus rien à envier aux autres, et qu'elle s'offrirait ainsi tout entière aux regards satisfaits de son Roi.

« Les paroles de Votre Majesté que déjà nous avons recueillies, ont récompensé notre zèle; elles ont retenti au milieu de nous; oui, SIRE, « l'union la plus parfaite existera toujours entre «<le souverain et les représentants de la nation, et, « de cette union, vont renaître la stabilité du gouvernement et la félicité publique, unique « objet de vos vœux et des nôtres. >>

«La nation comprendra toute l'étendue de nos espérances, en apprenant que les sentiments de Votre Majesté sont partagés par les princes de sa famille et par cette auguste fille des rois dont les vertus trouveraient à peine un modèle, et que la France a tant de raisons de chérir. »

Sa Majesté a répondu par les mêmes expressions de bienveillance et par les marques de satisfaction qu'elle avait données à la députation du Sénat.

SÉNAT.

Séance du lundi 2 mai 1814.

On lit une lettre, datée de Paris le 1er mai, et par laquelle M. le comte Spada donne sa démission des fonctions de sénateur.

Le Sénat ordonne la mention de cette lettre au procès-verbal, et arrête que la démission de M. le comte Spada sera notifiée à S. A. R. MONSIEUR, lieutenant général du royaume.

Signé BARTHÉLEMY, président; LE COMTE
DE VALENCE et PASTORET, secrétaires.
Pour extrait conforme :

Le secrétaire-archiviste du Sénat,
Chevalier CAUCHY.

Paris, le 3 mai 1814. Aujourd'hui Sa Majesté est partie de Saint-Ouen, accompagnée des membres du conseil d'Etat provisoire, des commissaires aux départements ministériels, des maréchaux de France, des généraux qui étaient allés lui rendre leurs hommages, et des personnes qui composent sa maison. Un nombre immense d'habitants de Paris, des cam

pagnes voisines et des départements environnants s'étaient réunis sur le passage de Sa Majesté et préludaient au concert d'acclamations et d'hommages qu'elle allait entendre s'élever de tous les points de sa capitale.

Le cortége s'est formé dans l'ordre prescrit par le cérémonial arrêté par M. le grand maître.

Un détachement de la garde nationale à cheval et un détachement de troupes de ligne à cheval ouvraient la marche. Suivaient deux voitures pour les ministres provisoires.

M. l'archevêque de Reims, grand aumônier de France; M. le duc de Duras, premier gentilhomme de la chambre du Roi; M. le comte de Blacas, grand maître de la garde-robe du Roi, et le grand maître des cérémonies de France dans la même voiture.

La voiture du Roi, dans laquelle Sa Majesté et madame la duchesse d'Angoulême, M. le prince de Condé et M. le duc de Bourbon.

S. A. R. MONSIEUR, à cheval à la portière de droite de la voiture du Roi, était accompagné d'une partie de MM. les maréchaux de France et colonels généraux.

S. A. R. Monseigneur le duc de Berry était égalément à cheval à la portière de gauche, accompagné d'une partie de MM. les maréchaux de France et colonels généraux.

M. le duc de Grammont et M. le duc d'Havré, comme capitaines des gardes de Sa Majesté, se tenaient également aux portières de la voiture du Roi.

M. le ministre provisoire de la guerre et M. le général en chef de la garde nationale étaient dans le groupe de MM. les maréchaux de France, à portée de S. A. R. MONSIEUR et de S. A. R. Monseigneur le duc de Berry.

M. le maréchal Berthier marchait en avant de la voiture du Roi, avec une partie de MM. les officiers généraux.

M. le maréchal Moncey, premier inspecteur général de la gendarmerie, marchait derrière la voiture de Sa Majesté avec une partie de MM. les officiers généraux.

Suivaient une nombreuse file de voitures pour les dames de madame la duchesse, les officiers de la maison du Roi et des princes; des détachements de troupes de ligne, de gardes nationales et de gendarmerie fermaient la marche.

Le préfet de la Seine, à la tête du corps municipal, et M. le préfet de police, étaient placés à la barrière; les clefs étaient portées par le doyen des maires de Paris.

M. le baron de Chabrol, préfet de la Seine, a prononcé le discours suivant :

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"Le corps municipal de votre bonne ville de Paris dépose aux pieds de Votre Majesté les clefs de la capitale du royaume de saint Louis. Le ciel, dans sa clémence, nous rend enfin nos Rois et accorde un père aux vœux des Français. Il environne le trône de tout ce que la dignité, le malheur et la vertu eurent jamais de plus auguste, et le souvenir des maux passés vient s'y joindre encore, pour l'entourer plus étroitement de l'amour et de la vénération des peuples.

«La France, sous l'antique bannière des lis, voit combler toutes ses espérances, et pour premier bienfait, la paix du monde signale le retour des BOURBONS. SIRE, amour, respect, fidélité inviolable au sang de nos Rois, voilà le sentiment unanime des habitants de votre bonne ville. Repos, conciliation et bonheur, tel est le besoin

et le vœu de leur cœur que les discours paternels de Votre Majesté ont déjà réalisés. Que n'attendent-ils pas d'un prince, renommé par sa naute sagesse, par sa tendresse inaltérable pour ses sujets, admiré pour ses rares vertus et sa noble constance!

« L'image d'Henri IV, dérobée si longtemps à nos regards, reparaît dans ce jour solennel : elle nous rappelle des temps d'orage, auxquels succédèrent bientôt ceux de la félicité publique ; son règne recommence aujourd'hui. La France entière, heureuse par sa confiance et son amour, tourne aussi ses regards sur ses princes chéris, sur une princesse auguste dont le nom réveillé tant de sentiments et d'émotions, et s'écrie dans des transports de joie et d'attendrissement: vive le Roi! vivent les Bourbons! »

Après ce discours, M. le baron de Chabrol, prófet de la Seine, a présenté les clefs de la ville à Sa Majesté.

Elle a daigné répondre avec une bonté touchante :

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« Je touche ces clefs et je vous les remets; « elles ne peuvent être en meilleures mains, ni « confiées à des magistrats plus dignes de les garder.

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Le cortége s'est rendu à la cathédrale dans l'ordre et par les routes indiquées à l'entrée du Roi, qui a été reçu avec le cérémonial d'usage. Le Domine salvum fac Regem a été entonné et soutenu par l'immense réunion de spectateurs qui remplissait les bas-côtés, la nef, le chœur et les tribunes de cette vaste basilique. Le Te Deum a ensuite été chanté on avait choisi pour cette auguste cérémonie, celui de Neuckomm, qui a été exécuté par un corps nombreux de musiciens.

Après la cérémonie religieuse, le cortége s'est remis en marche, et s'est rendu au palais des Tuileries.

Nous n'essayerons pas de décrire l'effet de cette entrée du Roi dans sa capitale, l'immense affluence de spectateurs qui se pressaient sur son passage, celle qui garnissait les fenêtres et tous les lieux élevés. Dans le cours de cette longue marche, magistrats, généraux, officiers, soldats, citoyens, officiers et soldats des troupes alliées, tous ont prouvé qu'ils n'avaient qu'un même sentiment, qu'ils ne formaient qu'un vou, qu'ils ne se livraient qu'à une seule espérance, le bonheur du Roi par le bonheur des Français. L'élan de l'enthousiasme, l'acclamation unanime et sans cesse renouvelée de vive le Roi! vivent les Bourbons! se communiquait alternativement des troupes aux habitants et des habitants à nos braves soldats, auxquels Paris, dans cette grande journée, s'est plu à rendre un touchant hommage d'admiration et de reconnaissance, pour ces longs et glorieux travaux qu'une paix solide va enfin couronner. Ces troupes, détachées des divers corps d'armée pour assister à la cérémonie, avaient été hier passées en revue par S. A. R. le duc de Berry, en vertu des ordres de MONSIEUR, lieutenant général du royaume, et avaient manifesté aux yeux du prince le plus vif enthousiasme pour son auguste maison pendant la marche du cortége.

Aux cris de vive le Roi! se joignaient sur le passage de ces corps des acclamations qui les dési

gnaient avec éloges; officiers et soldats répondaient avec encore plus d'énergie par le cri de vive le Roi! vive la garde nationale! vivent les habitants de Paris! Jamais un sentiment plus naturel ne s'était si vivement manifesté; jamais l'amour et le repos du souverain, l'honneur du nom français et l'attachement à la patrie ne s'étaient confondus dans une expression si touchante et si unanime.

C'est surtout au moment où le cortège s'est approché du lieu où venait d'être relevée la statue d'Henri IV, que l'enthousiasme s'est porté à un degré vraiment inexprimable. Le Conservatoire, réuni au pied de la statue, faisait entendre l'air national consacré à la mémoire et à l'éloge du bon Roi; le peuple et les soldats le répétaient en choeur. La voiture de Sa Majesté s'est arrêtée quelque temps à cette place. Sa Majesté a paru lire avec une vive émotion cette belle et simple inscription mise sur le piedestal :

Ludovico reduce Henricus redivivus.

et celles des deux temples élevés près de la statue A la Concorde des Français ! A la Paix des Nations!

Le Roi est arrivé aux Tuileries vers six heures. Une foule immense remplissait le Carrousel, la cour du Palais, le jardin et les terrasses. Le Roi, madame la duchesse d'Angoulême et les princes ont cédé aux vœux empressés dont ils entendaient les signes éclatants; ils se sont montrés à plusieurs reprises aux balcons des grands appartements, et ont répondu aux témoignages de l'allégresse publique par ceux de la plus touchante bienveillance et de la plus profonde sensibilité.

A la nuit, la ville entière s'est trouvée illuminée; les édifices publics l'étaient très-richement, et les maisons particulières, sans exception, même dans les quartiers les plus éloignés du centre; des inscriptions, des devises, des transparents, offraient de toutes parts l'expression ingénieuse des sentiments publics.

A neuf heures, un beau feu d'artifice a été tiré sur le pont Louis XVI; et ce n'est qu'après avoir répondu aux acclamations qui la saluaient de nouveau, que Sa Majesté est rentrée dans ses appartements.

La journée avait été d'une beauté parfaite; la nuit était calme, le temps pur et serein. Paris est demeuré longtemps comme une vaste promenade, livrée sans le moindre désordre à toutes les démonstrations de la satisfaction publique et de l'allégresse populaire.

CORPS LÉGISLATIF.

Liste supplémentaire des membres du Corps législatif qui ont adhéré, soit par leurs signatures aux procès-verbaux, soit par écrit, à la déchéance, et au rétablissement de la famille des Bourbons.

MM. le chevalier Martin-Saint-Jean, Boyer, le chevalier Faurie de Saint-Vincent, le chevalier Lemoro de Lafaye, Anglès, le baron Bouvier, Mathieu (Bas-Rhin), le chevalier Delzons, Chilhaud de Larigaudie, le baron Vialette de Mortarieux, de Trenqualie, le baron Dubouchet, le comte de Harchies, Willmar, Bavouz, le chevalier Macké, Capelli, Barbier de Saligny."

Certifié véritable et conforme au procès-verbal : Paris, le 5 mai, 1814.

FÉLIX FAULCON, vice-président.

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«Tous les membres du Sénat étaient impatients d'offrir leur hommage à Votre Majesté. Leur organe aujourd'hui, SIRE, j'ose vous supplier d'agréer l'expression de leur respect, de leur amour et de leur fidélité.

« La confiance du Sénat dans la bonté paternelle de Votre Majesté pour le peuple français est sans bornes: quelle confiance fut jamais plus légitime, puisque nous l'exprimons au digne fils d'Henri IV, à l'héritier de la noble et antique race des Bourbons qui, depuis tant de siècles, a fait la gloire et le bonheur de la France? >>

Sa Majesté a répondu :

་་

Messieurs, je vous remercie des sentiments « que vous m'exprimez. Je tiendrai la promesse « que je vous ai faite, et je me concerterai yo«lontiers avec les grands corps de l'Etat sur les « moyens les plus propres à rétablir le bonheur « de la France. >>

Sa Majesté a également reçu aujourd'hui, au château des Tuileries, le Corps législatif, qui a été présenté par M. le marquis de Dreux-Brézé, grand maître des cérémonies de France. M. FELIX FAULCON, vice-président, a porté la parole en ces termes :

«< SIRE,

« Des députés pris parmi nous ont été admis à l'honneur de vous complimenter; aujourd'hui, pénétrés des douces espérances que la déclaration de Votre Majesté a fait naître dans tous les cœurs, nous venons en corps vous offrir l'hommage dé nos respects. »>

Le Roi a répondu, avec une extrême bienveillance, « qu'il était satisfait des sentiments du « Corps législatif, et qu'il ne doutait pas qu'il ne « méritât toujours sa confiance. »

LOUIS, PAR LA GRACEDE DIEU, ROI DE FRANCE ET DE NAVARRE.

Nous avons ordonné et ordonnons ce qui suit : Le Sénat et le Corps législatif sont convoqués pour le trente et unième jour du présent mois de mai.

En conséquence, la disposition de notre déclaration du 2 de ce mois par laquelle nous avions fixé cette convocation au 10 juin prochain, est rapportée,

Les présentes seront insérées au Bulletin des lois. Donné au château des Tuileries, le 6 mai 1814. Signe LOUIS.

Par le Roi:

Le secrétaire d'Etat provisoire,
Signé LE BARON DE VITROLLES.

LOUIS, PAR LA GRACE ET DE NAVARRE, à tous lettres verront, salut.

Paris, le 9 mai 1814. DE DIEU, ROI DE FRANCE ceux qui ces présentes

En remontant sur le trône de nos ancêtres, nous avons retrouvé nos droits dans votre amour, et notre cœur s'est ouvert tout entier aux sentiments que Louis XII, le père du peuple, et Henri IV, le bon roi, ont jadis manifestés. Leur application constante au bonheur de la France marquera aussi notre règne, et nos vœux les plus intimes sont qu'il laisse, à son tour, des souvenirs dignes de s'associer à la mémoire de ces rois,

dont une bonté paternelle fut la première et la plus noble vertu."

Au milieu des acclamations unanimes et si touchantes pour notre coeur, dont nous avons été accompagné des frontières de notre royaume jusqu'au sein de notre capitale, nous n'avons cessé de porter nos regards sur la situation de nos provinces et de nos braves armées : l'oppression sous laquelle la France était accablée a laissé après elle bien des maux, et nous en sommes vivement touché; notre peine en est profonde, mais leur poids va chaque jour s'alléger; tous nos soins y sont consacrés, et notre plus douce satisfaction ¦ croîtra avec le bonheur de nos peuples. Déjà un armistice, conclu dans les vues d'une politique sage et modérée, fait sentir ses avantages précur seurs de la paix; et le traité qui la fixerà d'une manière durable, est l'objet le plus assidu, comme le plus important, de nos pensées. Dans un court intervalle, l'olivier, gage du repos de l'Europe, paraîtra aux yeux de tous les peuples qui le demandent. La marche des armées alliées commence à s'opérer vers nos frontières, et les augustes souverains dont les principes ont été si généreux à notre égard, veulent resserrer noblement, entre eux et nous, les liens d'une amitié et d'une confiance mutuelle qui ne pourra jamais recevoir d'atteinte.

Nous savons que quelques abus particuliers ont été commis, et que des contributions ont frappé les départeinents de notre royaume, depuis la conclusion de l'armistice; mais les déclarations justes et libérales que les souverains alliés nous ont faites à l'égard de ces abus, nous autorisent à défendre à nos sujets d'obtempérer à des réquisitions illégales et contraires au traité qui a stipulé la suspension générale des hostilités.

Toutefois, notre reconnaissance et les usages de la guerre exigent que nous ordonnions à toutes les autorités civiles et militaires de nos Etats, de redoubler de soins et de zèle pour que les vaillantes armées des souverains alliés reçoivent avec exactitude et abondance tout ce qui leur est nécessaire en objets de subsistances et besoins des troupes. Toutes demandes étrangères à ces objets demeureront ainsi de nul effet, et les sacrifices seront adoucis.

Français vous entendez votre Roi, et il veut à son tour que votre voix lui parvienne et lui expose vos besoins et vos voeux la sienne sera toujours celle de l'amour qu'il porte à ses peuples. Les cités les plus vastes et les hameaux les plus ignorés, tous les points de son royaume sont également sous ses yeux, et il rapproche en même temps tous ses sujets de son cœur.

Il ne croit pas qu'il puisse avoir des sentiments trop paternels pour des peuples dont la valeur, la loyauté et le dévouement à ses rois, ont fait, durant de longs siècles, la gloire et la prospérité. Signé LOUIS.

CORPS LEGISLATIF.

Liste supplémentaire des membres du Corps légis latif qui ont adhéré, soit par leurs signatures aur procès-verbaux, soit par écrit, à la déchéance, et au rétablissement de la famille des Bourbons.

MM. Lainé, Dufort, le chevalier Lahary, LegrixLasalle, le baron Duranteau, le général baron de Lauberdière, Pascal.

Certifié véritable:

FÉLIX FAULCON, vice-président. Paris, le 14 mai 1814.

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La séance du Corps législatif est fixée au samedi 4 juin. Sa Majesté se rendra à deux heures au palais du Corps législatif.

Le cortége du Roi passera par le Pont-Royal et le quai d'Orsay.

Les portes du palais du Corps législatif seront ouvertes à onze heures. On pourra se présenter avec des billets jusqu'à une heure et demie; passé cette heure les portes seront fermées, excepté pour les personnes qui composent le cortége de Sa Majesté.

Le grand maître des cérémonies de France,
LE MARQUIS DE DREUX-BRÉZÉ.

TRAITE DE PAIX.

AU NOM DE LA TRÈS-SAINTE ET INDIVISIBLE TRINITÉ,

S. M. le Roi de France et de Navarre, d'une part, et S. M. l'Empereur d'Autriche, Roi de Hongrie et de Bohème et ses alliés, d'autre part, étant animés d'un égal désir de mettre fin aux longues agitations de l'Europe et aux malheurs des peuples, par une paix solide, fondée sur une juste répartition de forces entre les puissances, et portant dans ses stipulations la garantie de sa durée; et S. M. l'Empereur d'Autriche, Roi de Hongrie et de Bohème et ses alliés ne voulant plus exiger de la France, aujourd'hui que, s'étant replacée sous le gouvernement paternel de ses Rois, elle offre ainsi à l'Europe un gage de sécurité et de stabilité, des conditions et garanties qu'ils lui avaient à regret demandées sous son dernier gouvernement, leursdites Majestés ont nommé des plénipotentiaires pour discuter, arrêter et signer un traité de paix et d'amitié, savoir:

S. M. le Roi de France et de Navarre, M. CharlesMaurice Talleyrand-Périgord, prince de Bénévent, grand aigle de la Légion-d'honneur, grand-croix de l'ordre de Léopold d'Autriche, chevalier de l'ordre de Saint-André de Russie, des ordres de l'Aigle-Noir et de l'Aigle-Rouge de Prusse, etc., son ministre et secrétaire d'Etat des affaires étrangères ;

Et S. M. l'Empereur d'Autriche, roi de Hongrie et de Bohême, MM. le prince Clément-Venceslas-Lothaire de Metternich-Vinnebourg-Ochsenhausen, chevalier de la Toison d'Or, grand-croix de l'ordre de Saint-Etienne, grand-aigle de la Légion d'honneur, chevalier des ordres de Saint-André, de Saint-Alexandre- Newsky et de SainteAnne de la première classe de Russie, chevalier grandcroix des ordres de l'Aigle-Noir et de l'Aigle-Rouge de Prusse, grand-croix de l'ordre de Saint-Joseph de Wurtzbourg, chevalier de l'ordre de Saint-Hubert de Bavière, de celui de l'Aigle-d'Or de Wurtemberg et de plusieurs autres; chambellan, conseiller intime actuel, ministre d'Etat, des conférences et des affaires étrangères de Sa Majesté Impériale et Royale Apostolique;

Et le comte Jean-Philippe de Stadion Tannhausen et Warthausen, chevalier de la Toison-d'Or, grand-croix de l'ordre de Saint-Etienne, chevalier des ordres de SaintAndré, de Saint-Alexandre-Newski et de Sainte-Anne de la première classe, chevalier grand-croix des ordres de l'Aigle-Noir et de l'Aigle-Rouge de Prusse; chambellan, conseiller intime actuel, ministre d'Etat et des conférences de Sa Majesté Impériale et Royale Apostolique;

Lesquels, après avoir échangé leurs pleins pouvoirs trouves en bonne et due forme, sont convenus des articles suivants :

Art. 1er. Il y aura, à compter de ce jour, paix et amitié entre S. M. le roi de France et de Navarre, d'une part et S. M. l'Empereur d'Autriche, Roi de Hongrie et de

Bohême, et ses alliés, de l'autre part, leurs héritiers et successeurs, leurs Etats et sujets respectifs à perpétuité. Les hautes parties contractantes apporteront tous leurs soins à maintenir, non-seulement entre elles, mais encore, autant qu'il dépend d'elles,entre tous les Etats de l'Europe, la bonne harmonie et intelligence si nécessaires à son repos.

Art. 2. Le royaume de France conserve l'intégrité de ses limites, telles qu'elles existaient à l'époque du 1er janvier 1792. Il recevra en outre une augmentation de territoire comprise dans la ligne de démarcation fixée par l'article suivant,

Art. 3. Du côté de la Belgique, de l'Allemagne et de l'Italie, l'ancienne frontière, ainsi qu'elle existait le 1er janvier de l'année 1792, sera rétablie, en commençant de la mer du Nord, entre Dunkerque et Nieuport, jusqu'à la Méditerrannée entre Cagnes et Nice, avec les rectifications suivantes :

1o Dans le département de Jemmapes, les cantons de Dour, Merbes-le-Château, Beaumont et Chimay resteront à la France; la ligne de démarcation passera, là où elle touche le canton de Dour, entre ce canton et ceux de Boussu et Pâturage, ainsi que, plus loin, entre celui de Merbes-le-Château et ceux de Binch et de Thuin.

20 Dans le département de Sambre-et-Meuse, les cantons de Valcourt, Florennes, Beauraing et Gedinne appartiendront à la France; la démarcation, quand elle atteint ce département, suivra la ligne qui sépare les cantons précités, du département de Jemmapes et du reste de celui de Sambre-et-Meuse.

30 Dans le département de la Moselle, la nouvelle démarcation, là où elle s'écarte de l'ancienne, sera formée par une ligne à tirer depuis Perle jusqu'à Fremersdorf et par celle qui sépare le canton de Tholey du reste du département de la Moselle.

4o Dans le département de la Sarie, les cantons de Saarbruck et d'Arneval resteront à la France, ainsi que la partie de celui de Lebach, qui est située au midi d'une ligne à tirer le long des confins des villages de Herchenbach, Ueberhofen, Hilsbach et Hall (en laissant ces différents endroits hors de la frontière française), jusqu'au point où, pris de Querselle (qui appartient à la France), la ligne qui sépare les cantons d'Arneval et d'Ottweiler atteint celle qui sépare ceux d'Arneval et de Lebach; la frontière de ce côté sera formée par la ligne ci-dessus désignée, et ensuite par celle qui sépare le canton d'Arneval de celui de Bliescastel.

50 La forteresse de Landau, ayant formé, avant l'année 1792, un point isolé dans l'Allemagne, la France conserve au delà de ses frontières une partie des départements du Mont-Tonnerre et du Bas-Rhin, pour joindre la forteresse de Landau et son rayon au reste du royaume. La nouvelle démarcation, en partant du point où, pres d'Obersteinbach (qui reste hors des limites de la France), la frontière entre le département de la Moselle et celui du Mont-Tonnerre atteint le département du Bas-Rhin, suivra la ligne qui sépare les cantons de Weissenbourg et de Bergzabern (du côté de la France), des cantons de Pirmasens, Dahn et Anweiler (du côté de l'Allemagne, jusqu'au point où ces limites près du village de Wolmersheim, touchent l'ancien rayon de la forteresse de Landau. De ce rayon, qui reste ainsi qu'il était en 1792, la nouvelle frontière suivra le bras de la rivière de la Queich qui, en quittant ce rayon, pres de Queichheim (qui reste à la France), passe près des villages de Merlenheim, Knittelsheim et Belheim (demeurant également français), jusqu'au Rhin, qui continuera ensuite à former la limite de la France et de l'Allemagne.

Quant au Rhin, le Thalveg constituera la limite, de manière cependant que les changements que subira par la suite le cours de ce fleuve n'auront à l'avenir aucun effet sur la propriété des îles qui s'y trouvent. L'état de possession de ces les sera rétabli tel qu'il existait à l'époque de la signature du traité de Lunéville.

6o Dans le département du Doubs, la frontière sera rectifiée de manière à ce qu'elle commence au-dessus de la Rançonnière, près du Locle, et suive la crête du Jura entre le Cerneux-Péquignot et le village de Fontenelles, jusqu'à une cime du Jura située à environ sept ou huit mille pieds au nord-ouest du village de la Brevine, où elle retombera dans l'ancienne limite de la France.

7o Dans le département du Léman, les frontières entre le territoire français, le pays de Vaud et les différentes portions du territoire de la république de Genève (qui

fera partie de la Suisse), restent les mêmes qu'elles étaient avant l'incorporation de Genève à la France. Mais le canton de Frangy, celui de Saint-Julien (à l'exception de la partie située au nord d'une ligne à tirer du point où la rivière de la Laire entre près de Chancy dans le territoire genevois, le long des confins de Seseguin, Lacouex et Seseneuve, qui resteront hors des limites de la France), le canton de Reignier (à l'exception de la portion qui se trouve à l'est d'une ligne qui suit les confins de la Muraz, Bussy, Pers et Cornier, qui seront hors des limites françaises) et le canton de la Roche (à l'exception des endroits nommés la Roche et Armanoy avec leurs districts), resteront à la France. La frontière suivra les limites de ces différents cantons et les lignes qui séparent les portions qui demeurent à la France de celles qu'elle ne conserve pas.

80 Dans le département du Mont-Blanc, la France acquiert la sous-préfecture de Chambéry (à l'exception des cantons de l'Hôpital, de Saint-Pierre d'Albigny, de la Rocette et de Montmélian), et la sous-préfecture d'Annecy (à l'exception de la partie du canton de Faverges, située à l'est d'une ligne qui passe entre Ourechaise et Marlens du côté de la France, et Marthold et Ugine du côté opposé, et qui suit après la crête des montagnes jusqu'à la frontière du canton de Thoues): c'est cette ligne qui, avec la limite des cantons mentionnés, formera de ce côté la nouvelle frontière.

Du côté des Pyrénées, les frontières restent telles qu'elles étaient entre les deux royaumes de France et d'Espagne à l'époque du 1er janvier 1792, et il sera de suite nommé une commission mixte de la part des deux couronnes, pour en fixer la démarcation finale.

La France renonce à tous droits de souveraineté, de suzeraineté et de possession sur tous les pays et districts, villes et endroits quelconques situés hors de la frontière ci-dessus désignée, la principauté de Monaco étant toutefois replacée dans les rapports où elle se trouvait avant le 1er janvier 1792.

Les cours alliées assurent à la France la possession de la principauté d'Avignon, du comtat Venaissin, du comté de Montbéliard et de toutes les enclaves qui ont appartenu autrefois à l'Allemagne, comprises dans la frontière ci-dessus indiquée, qu'elles aient été incorporées à la France avant ou après le 1er janvier 1792.

Les puissances se réservent réciproquement la faculté entière de fortifier tel point de leurs Etats qu'elles jugeront convenable pour leur sûreté.

Pour éviter toute lésion de propriétés particulières et mettre à couvert, d'après les principes les plus libéraux, les biens d'individus domiciliés sur les frontières, il sera nommé, par chacun des Etats limitrophes de la France, des commissaires pour procéder, conjointement avec des commissaires français, à la délimitation des pays respectifs.

Aussitôt que le travail des commissaires sera terminé, il sera dressé des cartes signées par les commissaires respectifs, et placé des poteaux qui constateront les limites réciproques.

Art. 4. Pour assurer les communications de la ville de Genève avec d'autres parties du territoire de la Suisse situé sur le lac, la France consent à ce que l'usage de la route par Versoy soit commun aux deux pays. Les gouvernements respectifs s'entendront à l'amiable sur les moyens de prévenir la contrebande et de régler le cours des postes et l'entretien de la route.

Art. 5. La navigation sur le Rhin, du point où il devient navigable jusqu'à la mer et réciproquement, sera libre de telle sorte qu'elle ne puisse être interdite à personne, et l'on s'occupera au futur congrès des principes d'après lesquels on pourra régler les droits à lever par les Etats riverains, de la manière la plus égale et la plus favorable au commerce de toutes les nations.

Il sera examiné et décidé de même dans le futur congrès, de quelle manière, pour faciliter les communications entre les peuples et les rendre toujours moins étrangers les uns aux autres, la disposition ci-dessus pourra être également étendue à tous les autres fleuves qui, dans leur cours navigable, séparent ou traversent différents Etats.

Art. 6. La Hollande, placée sous la souveraineté de la maison d'Orange, recevra un accroissement de territoire. Le titre et l'exercice de la souveraineté n'y pourront, dans aucun cas, appartenir à aucun prince portant ou appelé à porter une couronne étrangère.

Les Etats d'Allemagne seront indépendants et unis par un lien fédératif.

La Suisse indépendante continuera de se gouverner par elle-même.

L'Italie, hors des limites des pays qui reviendront à l'Autriche, sera composée d'Etats souverains.

Art. 7. L'île de Malte et ses dépendances appartiendront en toute propriété et souveraineté à Sa Majeste britannique.

Art. 8. Sa Majesté britannique, stipulant pour elle et ses alliés, s'engage à restituer à Sa Majesté Très-Chrétienne, dans les délais qui seront ci-après fixés, les colonies, pêcheries, comptoirs et établissements de tout genre que la France possédait au 1er janvier 1792 dans les mers et sur les continents de l'Amérique, de l'Afrique et de l'Asie, à l'exception toutefois des îles de Tabago et de Sainte-Lucie, et de l'île de France et de ses dépendances, nommément Rodrigue et les Séchelles, lesquelles Sa Majesté Très-Chrétienne cède en toute propriété et souveraineté à Sa Majesté britannique, comme aussi de la partie de Saint-Domingue cédée à la France par la paix de Bâle et que Sa Majesté Très-Chrétienne rétrocède à Sa Majesté Catholique en toute propriété et souveraineté.

Art. 9. Sa Majesté le roi de Suède et de Norvége, en conséquence d'arrangements pris avec ses alliés, et pour l'exécution de l'article précédent, consent à ce que l'ile de la Guadeloupe soit restituée à Sa Majesté Très-Chrétienne, et cède tous les droits qu'il peut avoir sur cette île. Art. 10. Sa Majesté Très-Fidèle, en conséquence d'arrangements pris avec ses alliés, et pour l'exécution de l'article 8, s'engage à restituer à Sa Majesté Très-Chrétienne, dans le délai ci-après fixé, la Guyane française, telle qu'elle existait au 1er janvier 1792.

L'effet de la stipulation ci-dessus étant de faire revivre la contestation existante à cette époque au sujet des limites, il est convenu que cette contestation sera terminée par un arrangement amiable entre les deux cours, sous la médiation de Sa Majesté britannique.

Art. 11. Les places et forts existants dans les colonies et établissements qui doivent être rendus à Sa Majesté Très-Chrétienne, en vertu des articles 8, 9 et 10, seront remis dans l'état où ils se trouveront au moment de la signature du présent traité.

Art. 12. Sa Majesté britannique s'engage à faire jouir les sujets de Sa Majesté Très-Chrétienne relativement au commerce et à la sûreté de leurs personnes et propriétés dans les limites de la souveraineté britannique sur le continent des Indes, des mêmes facilités, priviléges et protection qui sont à présent ou seront accordés aux nations le plus favorisées. De son côté, Sa Majesté TrèsChrétienne n'ayant rien plus à cœur que la perpétuité de la paix entre les deux couronnes de France et d'Angleterre, et voulant contribuer autant qu'il est en elle à écarter dès à présent des rapports des deux peuples ce qui pourrait un jour altérer la bonne intelligence mutuelle, s'engage à ne faire aucun ouvrage de fortification dans les établissements qui lui doivent être restitués et qui sont situés dans les limites de la souveraineté britannique sur le continent des Indes, et à ne mettre dans ces établissements que le nombre de troupes nécessaire pour le maintien de la police.

Art. 13. Quant au droit de pêche des Français sur le grand banc de Terre-Neuve, sur les côtes de l'ile de ce nom et des iles adjacentes, et dans le golfe de SaintLaurent, tout sera remis sur le même pied qu'en 1792. Art. 14 Les colonies, comptoirs et établissements qui doivent être restitués à Sa Majesté Très-Chrétienne par Sa Majesté britannique ou ses alliés, seront remis, savoir: ceux qui sont dans les mers du Nord ou dans les mers et sur les continents de l'Amérique et de l'Afrique, dans les trois mois, et ceux qui sont au delà du cap de BonneEspérance, dans les six mois qui suivront la ratification du présent traité.

Art. 15. Les hautes parties contractantes s'étant réservé par l'article 4 de la convention du 23 avril dernier, de régler dans le présent traité de paix définitive le sort des arsenaux etdes vaisseaux de guerre armés et non armés qui se trouvent dans les places maritimes remises par la France en exécution de l'article 2 de ladite convention, il est convenu que lesdits vaisseaux et bâtiments de guerre armés et non armés, comme aussi l'artillerie navale et les munitions navales et tous les matériaux de construction et d'armement, seront partagés entre la

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