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« à la chambre par Sa Majesté), le président ordonne, sans qu'il soit besoin de consulter la « Chambre, que la loi proposée sera imprimée et « distribuée aux bureaux."

La commission propose d'ajouter à cet article le paragraphe suivant:

((

"il ordonne également que les propositions << envoyées à la Chambre des pairs par la Cham«bre des députés, en vertu de l'article 20 de la « Charte constitutionnelle, seront distribuées aux « bureaux, après que ces propositions auront été «lues à la Chambre par un des secrétaires. >>

L'assemblée arrête que ces articles seront imprimés et distribués. Elle adopte, sur le rapport de la même commission, la rédaction définitive des articles 54 et 56 du projet de règlement, renvoyé à la commission dans la précédente séance, et qui, d'après les décisions de la Chambre, ont été modifiés ainsi qu'il suit :

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Art. 54. Surles questions d'ordre ou de priorité, « sur la question préalable ou l'ajournement, sur « la proposition de délibérer ou de prendre en « considération, sur la clôture de la discussion, « et sur toutes autres questions qui ne seront que préparatoires ou incidentes à la question principale, les pairs expriment leur vote en levant « la main. »>

་་

Art. 56. Si le doute subsiste, le président « ordonne que les membres pour se lèvent, et « ils sont comptés; quand ils sont assis, les mem«bres contre se lèvent et ils sont pareillement « comptés.

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L'ordre du jour appelle la suite de la discussion qui a eu lieu dans la dernière séance, sur les articles du projet de règlement présenté le 21 juin.

La discussion est reprise au point où elle s'était arrêtée, c'est-à-dire à l'article 63 de ce projet. En voici les termes :

Art. 63. « La majorité des votes est comptée d'a«près le nombre des bulletins valables, et non « d'après celui des membres présents. »

Un membre, sans attaquer la disposition de cet article, propose de regarder les bulletins blancs comme valables, et comme une déclaration tacite faite par les opinants dont ils émanent qu'ils s'en rapportent aux lumières et au vou de la majorité. Il observe que le bulletin blanc exprime d'une manière très-convenable la situation d'un membre à qui la discussion n'a pas fourni les moyens de se décider; que ce vote répond au non liquet en usage chez les Romains dans les matières criminelles; qu'il répond également à ce qui arrive dans nos assemblées, lorsque, dans une épreuve par assis et levé, une partie des membres ne prend point de part à la délibération. L'opinant ajoute que, pour faire accroître les bulletins blancs à la majorité, il n'est pas besoin d'une disposition expresse: mais qu'il suffit, ainsi qu'on l'a observé jusqu'à ce jour, de ne pas frapper de nullité ces bulletins. Il demande qu'on régularise de cette manière un vo'e licite et qu'il est impossible d'empêcher, quelles que soient à cet égard les dispositions du règlement.

Cette opinion est appuyée de quelques membres et combattue par plusieurs autres, qui voient avec peine établir en principe qu'un membre de la Chambre pourra se dispenser de voter d'une manière explicite. Il pense au contraire qu'il est du devoir de chaque membre d'éme.tre up mel, soit d'après sa propre convictio trouve suffisamment éclat 'n dise a lieu, soit d'art

dans quelques

'or

dent qu'en adoptant l'article 63, on déclare que les bulletins blancs ne font point partie du nombre des bulletins valables.

Un membre observe qu'il est impossible de séparer dans la discussion l'article 63 de l'article 64 et même de l'article 60, adopté dans la dernière séance. En effet, si l'article 63 fixe la majorité d'après le nombre des bulletins valables, l'article 64 veut que dans le cas où le nombre de ces bulletins sera inférieur au nombre fixé par l'article 20, il n'y ait pas de délibération. C'est là sans contredit la plus importante des questions relatives à la validité des votes, et c'est évidemment de l'article 64, et non de l'article 63, qu'elle résulte. Mais quels sont les bulletins valables ou non valables? C'est ce que devrait dire et ne dit qu'en partie l'article 60. Il se borne, en effet, à déclarer nul tout bulletin qui porte autre chose que l'un des deux mots oui ou non. Il faut donc, si l'on veut frapper de nullité les bulletins blancs, ajouter quelque chose à la disposition de cet article. Quant aux articles 63 et 64, ils tendent à faire considérer comme absents les membres présents à la séance et qui ont usé de leur droit, ce qui paraît inadmissible. L'opinant propose, en supprimant l'article 64, de modifier conformément à son opinion l'article 63, et d'ajouter à l'article 60 une disposition concernant les bulletins blancs.

Plusieurs membres appuient la suppression demandée de l'article 64; ils voient dans le principe établi par cet article un moyen d'entraver les opérations de l'assemblée, puisqu'il suffira d'un petit nombre de bulletins blancs pour mettre, dans certains cas, la Chambre hors d'état de délibérer. Ils demandent que la séance une fois ouverte, au nombre des membres prescrits par l'article 20, rien ne puisse arrêter le cours des délibérations; et qu'en fixant, aux termes de l'article 63, la majorité des votes d'après le nombre des bulletins valables, la Chambre prenne toujours cette majorité pour base de ses déterminations, sans aucun égard au nombre, quel qu'il soit, de bulletins nuls et non valables.

Quelques membres proposent de fixer la majorité des voles d'après le nombre des membres présents au moment du scrutin, et qui seraient alors comptés par le bureau. Cette proposition n'a pas de suite.

On réclame la priorité de l'article 63, tel qu'il est présenté par la commission. La Chambre, consultée, accorde la priorité à cet article.

L'article 63 est mis aux voix et adopté dans les termes du projet.

L'amendement proposé à l'article 60 sera en conséquence modifié ainsi qu'il suit :

«< Tout bulletin blanc, ou qui porte autre chose « que ces deux mots oui ou non, est rejeté comme

<< nul. »>

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de personnes à élire. Un bulletin qui porte un « plus grand nombre de noms n'est valable que « pour les premiers noms, jusqu'à concurrence « du nombre requis. »

Art. 67. Lorsque le résultat a été proclamé, « les bulletins sont détruits. »

Art. 68. Toute protestation contre une décision de la majorité est interdite. »>

TITRE IX.

FORMATION ET PROCÉDÉS DES BUREAUX. Art. 69. « Chaque bureau se choisit par la voie « du scrutin, à la majorité absolue, un président « et un secrétaire. »

Art. 70. « Les membres du bureau qui ont obtenu le plus de suffrages après ceux nommés « pour président et secrétaire, remplissent tem"porairement les fonctions de ceux-ci en cas <d'absence. »

Art. 71. « Les bureaux sont renouvelés en entier, par la voie du sort, après un mois. » Art. 72. «Tous les articles du présent règlement, relatifs aux formes et à l'ordre des disa cussions, sont applicables aux opérations qui « ont lieu dans les bureaux. »

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Art. 73. « Les secrétaires des bureaux tiennent de simples notes, sans rédiger de procès-verbal; « ces notes servent de renseignements quand le a bureau juge à propos d'y avoir recours. »

La discussion est ouverte sur l'article 74, ainsi conçu :

Art. 74. « Au jour indiqué par la Chambre pour « la discussion en assemblée générale, confor"mément à l'article 9 du présent règlement, l'un « des secrétaires de la Chambre fait lecture de la proposition soumise à l'examen des bureaux, « et l'assemblée est consultée pour savoir si elle « veut ouvrir la discussion ou nommer une com"mission spéciale pour lui faire son rapport. »>

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Un membre, à l'occasion des commissions spéciales dont il s'agit dans cet article, reproduit la proposition qu'il a faite à la Chambre, lors de la discussion de l'article 26 et qui fut alors ajournée comme pouvant être discutée avec plus d'avantage lorsqu'il s'agirait de la formation des bureaux. Cette proposition avait pour objet de porter à la connaissance de l'assemblée générale les résultats de la discussion qui aura lieu dans ces mêmes bureaux; on demandait, à cet effet, que chaque bureau fút autorisé à nommer dans son sein un rapporteur qui, réuni aux rapporteurs des autres bureaux, formerait avec eux un comité central dont les membres nommeraient pareillement entre eux un rapporteur chargé de Soumettre leur travail à l'assemblée. L'opinant insiste sur les avantages qui résulteraient de cet établissement, et dont les principaux sont l'économie de temps, une meilleure discussion et un utile encouragement au travail des bureaux, surtout pour les nouveaux membres qui, peu connus dans l'assemblée, ne pourraient guère espérer de fixer son suffrage, et d'être appelés à faire partie des commissions spéciales. I observe qu'aux termes de l'article 10, la Chambre restant maitresse de donner de semblables commissions toutes les fois qu'elle le juge convenable, on sera toujours à même de recourir à ce moyen quand le rapport du comité central n'aura pas suffisamment éclairé la discussion.

Plusieurs membres appuient par de nouveaux développements la proposition faite à l'assemblée, d'autres combattent cette proposition, en présentant l'établissement d'un comité central des bureaux comme dangereux pour l'indépendance de

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la Chambre. Ils montrent par des calculs positifs comment, au moyen de cette institution, la minorité d'une assemblée pourrait influencer les délibérations de la majorité. Ils observent que le comité central est inutile pour faire parvenir à l'assemblée le résultat du travail des bureaux; que ce résultat y parviendra naturellement par la discussion à laquelle chacun des membres pourra prendre part. Si la Chambre se trouve assez éclairée par cette discussion, elle pourra délibérer de suite, et ne perdra point de temps à nommer une commission spéciale. Si elle juge à propos d'en nommer une, cette commission sera nommée en connaissance de cause, et formée sans doute de membres qui, dans la discussion, auront montré le plus de lumières sur la question débattue. Ils proposent en conséquence de s'en tenir à l'avis de la commission.

Après de longs débats, on demande la clôture de la discussion. Elle est mise aux voix et adoptée.

On demande alors la priorité pour l'avis de la commission; le résultat douteux d'une première épreuve donne lieu à une seconde par assis et levé, qui accorde la priorité à cet avis.

Il est mis aux voix et adopté après une épreuve pareillement renouvelée. L'article 74 est en conséquence adopté dans les termes du projet. On fait lecture de l'article 75, formant le 1er du titre X ainsi conçu :

TITRE X.

PROCÈS-VERBAL DE LA CHAMBRE.

Art. 75. « Le procès-verbal des séances de la « Chambre contient l'exposé sommaire des opé«rations de la chambre pendant chaque séance.»

Cet article est adopté sans réclamation. Il en est d'abord ainsi dù suivant, dont voici les termes :

Art. 76. Aucuns motifs ou développements d'opinion n'y sont insérés. »><

L'article 77 est pareillement adopté pour la teneur ci-après. >>

Art. 77. « Les rappels à l'ordre, qui auraient eu << lieu dans la séance, n'y seront insérés qu'au<< tant que la Chambre l'a expressément décidé et « que sa décision n'a point été révoquée dans le « cours de la séance. »

L'article 78 donne lieu à une réclamation qui bientôt est étendue à l'article 76 précédemment adopté. Les termes de cet article sont les suivants :

Art. 78. « Aucun des discours prononcés dans la << séance, ni aucune des pièces qui y ont été lues <«< ne seront insérés au procès-verbal. Il indique << seulement le titre ainsi que le numéro d'enregistrement et renvoi, pour les actes et les pièces « dont la Chambre a pu ordonner le dépôt aux << archives. >>

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Un membre observe que l'article 76 ayant retranché du procès-verbal tous motifs ou développements d'opinions, et celui-ci en retranchant à son tour et les discours prononcés et les pièces lues en séance, le procès-verbal n'offrira plus qu'un protocole sans intérêt, incapable de fournir aucuns renseignements utiles. Il pense que pour assurer la jurisprudence de la Chambre, en conservant la trace des motifs qui ont déterminé ses décisions, il convient d'insérer au procès-verbal au moins un exposé sommaire de ces mopièces les plus importantes qui auront été lues tifs; qu'il convient d'insérer pareillement les en séance, et quelquefois, lorsque la Chambre le jugera convenable, un extrait des discours qui

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auront été prononcés. Il propose de charger la commission du règlement de modifier dans ce sens les articles 76 et 78.

Cette proposition, appuyée par plusieurs membres, est mise aux voix et adoptée.

La chambre passe à la discussion de l'article 79 ainsi conçu:

Art. 79. « Les procès-verbeaux de la Chambre des << pairs ne peuvent être imprimés. Les pairs peu« vent, en tout temps, prendre communication « des procès-verbaux de la chambre, ainsi que « des pièces déposées aux archives: »

Plusieurs membres réclament contre la défense absolue d'imprimer, contenue dans cet article. Ils proposent d'y substituer par amendement que les procès-verbaux ne pourront être imprimés sans l'ordre exprès de la Chambre. Quelques-uns demandent au contraire l'impression générale et absolue de tous les procès-verbaux. Leur demande est combattue par d'autres membres, qui invoquent, en faveur de l'article proposé, la disposition constitutionnelle relative au secret des

séances.

La demande de l'impression absolue est appuyée, nonobstant cette considération, à laquelle on oppose l'intérêt et le droit qu'a chaque membre de la Chambre de suivre le cours des opérations, et de pouvoir, d'une année à l'autre, s'en rendre compte, la possibilité de limiter l'impression au nombre d'exemplaires suffisant pour la distribution; enfin l'esprit même de la disposition invoquée, et dont l'objet est sans doute de moins soustraire à la connaissance qu'à l'influence du public les déterminations de la Chambre. On demande qu'en adoptant en principe l'impression des procès-verbaux, l'assemblée renvoie à la commission du règlement pour le mode d'exécution.

La priorité est réclamée pour l'avis de la commission. Elle est réclamée pour la demande de l'impression absolue.

La Chambre, consultée, refuse la priorité à l'avis de la commission; consultée de nouveau, elle adopte en principe l'impression absolue des procès-verbaux, et renvoie à la commission du règlement pour le mode d'exécution. L'article 79 sera modifié en conséquence.

Les articles 80, 81 et 82, formant le complément du titre 10, sont adoptés sans débat et dans les termes suivants :

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Art. 82. Lorsque la Chambre a adopté, soit « une addition au règlement, soit une suppres«sion ou modification de quelques-uns des articles « qui le composent, il est fait une nouvelle édition « de ce règlement, dont les exemplaires sont « aussitôt distribués à chacun des pairs. »>

Un membre demande qu'il soit ajouté au règlement deux nouveaux articles dont il présente le projet, et qui sont relatifs. l'un à la police du palais où siége la Chambre des pairs, l'autre aux congés et aux passe-ports dont les membres de cette Chambre pourraient avoir besoin.

L'assemblée renvoie à sa commission du règlement les nouveaux articles proposés.

Au nom de cette commission même, un de ses membres propose l'addition d'un second paragraphe à l'article 24, adopté dans l'avant-dernière séance.

L'assemblée autorise la commission à faire imprimer ce paragraphe additionnel à la suite des nouveaux articles présentés à l'ouverture de la séance de ce jour.

Elle fixe à jeudi prochain la discussion de ces articles, ainsi que la formation des bureaux et la nomination des secrétaires de la Chambre.

M. le Président lève la séance, après avoir ajourné l'assemblée au jeudi 30 de ce mois, à deux heures après midi.

CHAMBRE DES DÉPUTÉS.
PRÉSIDENCE DE M. LAINÉ.
Séance du 28 juin 1814.

MM. Desaux, Cherrier, Goulard et Dufougerais (Ladouëpe), secrétaires définitifs, prennent place au bureau.

Le procès-verbal de la séance d'hier est lu et approuvé.

M. le Président. L'ordre du jour appelle le rapport de la commission des pétitions, relatif à la vérification des pouvoirs des députés de la Chambre; mais le règlement exige qu'immédiatement après l'adoption du procès-verbal, la parole soit donnée aux membres qui se sont fait inscrire pour soumettre des propositions à la Chambre. En conséquence, j'appelle à la tribune MM. Leveneur et Dumolard.

Un membre se présente et lit, pour M. Leveneur, la proposition dont voici le texte :

Le membre de la chambre soussigné, lui soumet la proposition suivante; c'est à savoir que le Roi soit humblement supplié par la Chambre des pairs et par celle des députés, de rendre, d'après le vœu de la nation française présenté à Sa Majesté par les deux Chambres, une ordonnance royale qui établisse :

« 1° Que tous les ans, au jour anniversaire de la mort du feu Roi Louis XVI, de glorieuse mémoire, il soit célébré dans toutes les églises catholiques du royaume, ainsi que dans tous les temples des différents cultes qui seraient susceptibles d'une pareille cérémonie, un service solennel et expiatoire pour le Roi Louis XVI, la Reine son épouse, et tous les princes et princesses de son sang, qui ont péri durant la Révolution sous le fer des assassins et des bourreaux, à laquelle cérémonie toutes les autorités civiles et militaires seront tenues d'assister en costume de deuil; sans que toutefois aucun orateur sacré ni profane puisse y prononcer aucun discours relatif à l'objet de cette pieuse cérémonie.

« 2o Que le même jour, dans toute l'étendue du royaume, tout spectacle, de quelque nature que ce soit, ainsi que toute réunion publique, même de littérature ou d'instruction, ne puisse avoir lieu. Signé LE COMTe Leveneur.

Sur la demande qui lui est faite par M. le président, M. Leveneur exprime le désir d'être entendu le 2 juillet, pour le développement de sa proposition.

M. Dumolard propose qu'il soit fait une humble adresse au Roi, à l'effet d'obtenir que les ministres mettent incessamment sous les yeux de la Chambre le tableau de la situation du royaume sous tous les rapports qui intéressent le gouvernement et la prospérité générale.

L'orateur demande à être entendu dans la séance du 3 juillet.

M. Boirot, organe de la commission chargée de l'examen des pouvoirs de MM. les députés, se

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[28 juin 1814.]

France, mais dont la France conserve une partie 73 par le traité du 30 mai.

présente à la tribune d'après l'invitation de M. le
PREMIÈRE RESTAURATION.
président, et fait le rapport dont elle a été char-
gée :

Messieurs, le traité du 30 mai, en donnant la paix à l'Europe, a rendu à leurs anciens souverains un grand nombre de départements qui avaient été réunis à la France.

La plupart de ces départements en ont été distraits en totalité; mais quelques autres, limitrophes de l'ancienne France, n'en ont été distraits qu'en partie, et la France conserve une portion plus ou moins considérable de leur territoire.

Tous ces départements avaient des députés au
Corps législatif.

:

La plupart ont cessé leurs fonctions depuis le 4 juin, époque du changement d'organisation de ce Corps, soit parce qu'ils s'en sont crus exclus par la Charte constitutionnelle, soit parce que cette exclusion leur a paru prononcée d'une manière encore plus formelle, par l'ordonnance du même jour, 4 juin, qui porte que « conformément aux ana ciennes constitutions françaises, aucun étranger « ne pourra siéger, à compter de ce jour, ni dans « la Chambre des pairs, ni dans celle des députés, « à moins que, par d'importants services rendus « à l'Etat, il n'ait obtenu du Roi des lettres de naturalisation, vérifiées par les deux Cham« bres. >>

Mais plusieurs d'entre eux ont pensé que ces lois ne leur étaient pas applicables, et vous ont demandé à être autorisés à continuer de siéger parmi vous.

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La Chambre ayant été partagée en bureaux, conformément à la charté constitutionnelle et, en exécution de votre règlement, vous avez cru devoir renvoyer ces réclamations à l'examen des bureaux.

Elles ont été examinées et discutées dans les différents bureaux avec toute l'attention dont la matière était susceptible.

Après ce premier examen, la Chambre a renvoyé ces réclamations à la commission des pétitions.

La commission a soumis à une nouvelle discussion les différentes questions auxquelles donnait lieu la position particulière dans laquelle se trouvait chacun des réclamants. Et c'est le résultat de ce double travail que la commission a l'honneur de vous présenter par mon organe.

La commission ne s'est pas dissimulé qu'elle avait une tâche pénible à remplir. Les réclamants sont des collègues, tous également recommandables par leurs lumières et par leurs qualités personnelles, qui leur ont concilié l'estime et l'attachement de tous les membres de la Chambre.

Mais toutes ces considérations ont dû disparaître devant la loi; chacun de nous n'a vu que son devoir, et n'a cherché qu'à répondre dignement à la confiance dont vous nous avez honorés.

La commission, pour mettre plus d'impartialité dans son travail, a fait abstraction des individus; elle a commencé par établir des principes, par fixer les bases de ses opinions, et elle en a fait ensuite l'application à chacun des réclamants. Elle a cru devoir diviser les réclamations qui ont été faites à la Chambre en plusieurs classes. La première a été composée des députés qui sont nés dans l'ancienne France, qui ont été nommés députés au Corps législatif par des départements dont la totalité a été distraite de la France par le traité du 30 mai.

La seconde a été composée des députés nés dans l'ancienne France, nommés députés au Corps législatif par des départements distraits de la

La troisième comprend les députés nés dans française. les départements dont une partie appartient encore à la France, mais dans la partie qui n'est plus

Enfin, il a été formé une quatrième classe des députés nés dans des parties des départements restées françaises, et ayant leur domicile acquis dans ces mêmes parties.

Votre commission a pensé que les députés compris dans la première classe, c'est-à-dire ceux qui sont nés dans l'ancienne France, mais dont les départements ont été distraits en totalité par le traité du 30 mai, ne peuvent être admis à continuer de siéger parmi vous.

La cause qui à déterminé la commission à le penser ainsi, est que leurs pouvoirs ont cessé par le seul fait que les départements qu'ils représentent ont cessé d'appartenir à la France; qu'il n'y a point de pouvoir sans commettants, point de représentation sans représentés.

Cette idée, qui paraît si simple, si évidente au premier abord, a cependant trouvé des contradic

teurs.

On a dit, pour les réclamants, qu'à la vérité ils ont été nommés au Corps législatif pour représenter des départements qui n'existent plus; mais que, dès l'instant qu'il ont fait partie du Corps législatif, ils ont cessé d'être les représentants de tel ou tel département, pour ne former avec leurs collègues qu'une seule masse de représentation, qu'ils ont été les représentants de la nation française prise collectivement, et qu'étant nés français, ils doivent conserver cette qualité de député pour tout le temps déterminé par la loi, jusqu'au renouvellement de la Chambre des députés.

Et on invoque à l'appui de ce raisonnement la disposition de l'article 1er de la quatrième ordonnance du Roi, rendue le 4 juin, dans lequel on lit que « Le traitement dont les anciens députés « au Corps législatif, nés français, ont joui jusqu'à présent en cette qualité, leur sera continué "pendant le temps qui reste à écouler de leurs «< fonctions à la chambre des députés.

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Nous sommes nés français, disent les réclamants, nous sommes d'anciens députés au Corps législatif, nous devons donc être maintenus dans nos fonctions.

On ne peut se dissimuler, Messieurs, que ce raisonnement a quelque chose de spécieux, et il aurait peut-être fait quelque impression à votre commission si elle avait pu isoler cette ordonnance de la Charte constitutionnelle.

Mais ces deux lois sont inséparables, elles sont du même jour, du même instant, du même jet; elles forment un seul tout.

Or nous lisons dans l'article 75 de la Charte constitutionnelle, qui est le premier des articles transitoires, que « les députés des départements « de France qui siégeaient au Corps législatif lors « du dernier ajournement, continueront à siéger à «la Chambre des députés jusqu'à remplacement. »

Il n'y a, Messieurs, d'après ce texte, que les députés des départements de France qui puissent continuer de siéger à la Chambre des députés.

Or, par ces expressions, départements de France, on ne peut entendre que les départements qui formaient le Royaume de France le 4 juin, jour où la Charte constitutionnelle a été présentée au Corps législatif; car on ne pouvait pas alors appeler départements de France les départements qui n'en faisaient plus partie, et qui en avaient été distraits par le traité du 30 mai.

74

[Chambre des Députés.]

PREMIÈRE RESTAURATION.

Remarquons d'ailleurs, Messieurs, que cet article de la Charte constitutionnelle nous dit que ces députés des départements de France continueront de siéger jusqu'à remplacement; qu'il ne peut y avoir de remplacement pour les députés des départements devenus étrangers à la France; que dès lors il est évident que cette disposition ne leur est pas applicable, et qu'elle se borne aux députés des départements qui composent la France au moment où la loi a été rendue.

Cependant on insiste encore, et on dit que cet article n'est que transitoire; qu'il ne fait pas partie de la Charte constitutionnelle; que cette charte se termine par l'article 74, qui porte que « le Roi et ses successeurs jureront, dans la solennité de leur sacre, d'observer fidèlement la « présente Charte constitutionnelle »; que dès lors on ne doit pas considérer cet article comme une autorité imposante dont il ne soit pas permis à la Chambre de s'écarter.

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Mais, Messieurs, c'est une erreur de prétendre que cet article ne fait pas partie de la Charte constitutionnelle; à la vérité, il n'est, dans l'ordre de la rédaction, qu'après l'article du serment que le Roi promet de faire à son sacre, parce que tout ce qui précède était fait pour les siècles, et que cette partie n'était au contraire que passagère et momentanée; mais ces dispositions transitoires ont la même force que tout ce qui précède; elles constituent également le droit public de la France, avec la seule difference, que ces dispositions transitoires ne sont faites que pour organiser le passage d'une constitution précédente à une constitution nouvelle, tandis que les autres sont faites pour régler l'avenir et demeurer immuables.

Mais ce qui ne laisse d'ailleurs aucun doute à cet égard, c'est la formule qui termine cette Charte, et qui est postérieure aux articles transitoires.

«Nous ordonnons que la présente Charte consti«lutionnelle, mise sous les yeux du Sénat et du « Corps législatif, conformément à notre procla«<mation du 2 mai, sera envoyée incontinent à << la Chambre des pairs et à celle des députés.

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L'article 75, quoique purement transitoire, fait donc partie de la Charte constitutionnelle comme tout ce qui précède. Il n'a pas paru à votre commission qu'il pût rester le plus léger doute à cet égard.

Le principe une fois posé, la commission en a fait l'application à M. de Septenville, né à Amiens, député du département de la Dyle;

A M. Brumeau-Beauregard, né à Poitiers, nommé député du département du Taro;

A M. Petitot-Montlouis, né à Lyon, nommé député du département de la Lys;

A.-M. Herwyn, à né Hoscote, nommé député de la Lys.

Ce principe s'applique à plus forte raison à M. Bavous, né à Chambéry, pays réuni, nommé député par le département de la Sézia, qui a été distrait de la France en totalité par le traité du 30 mai, comme les départements de la Dyle, de la Lys et du Taro.

Votre commission croit donc devoir vous proposer de décider que MM. de Septenville, Brumeau-Beauregard, Petitot-Montlouis, Herwin et Bavous ne peuvent être admis à continuer de siéger à la Chambre des députés.

La commission s'est ensuite occupée des députés compris dans la seconde classe, c'est-à-dire de ceux qui, nés dans l'ancienne France, ont été nommés députés par des départements qui ont été en partie distraits de la France et en partie conservés par le traité du 30 mai.

[28 juin 1814.]

Il a paru à votre commission que ces députés devaient continuer de siéger parmi vous, parce qu'ils sont nés Français, et que leurs commettants sont Français.

Votre commission a même pensé qu'on ne devait pas examiner si la population du territoire conservé était plus ou moins considérable.

Il ne s'agit pas ici de nommer des députés, mais de maintenir des députés déjà nommés, et de savoir s'ils peuvent ou non continuer leurs fonctions.

Or, Messieurs, il a paru à votre commission que les pouvoirs de ces députés n'ont pas dû cesser par la diminution du nombre de leurs com

mettants.

Ces portions de territoire, demeurées réunies à la France, n'ont été jusqu'ici incorporées dans aucun autre département; elles avaient leurs représentants au Corps législatif; ces représentants y siégeaient lors du dernier ajournement; on ne voit pas de motifs pour les priver de l'exercice de leurs fonctions jusqu'au renouvellement de la Chambre des députés.

Alors la population des territoires réunis se
trouvera fondue dans les départements environ-
nants: cette population contribuera à la nomina-
tion des députés de ces départements, et elle sera
représentée par eux; mais jusque-là il est dans
l'ordre qu'elle le soit par ceux qu'elle a nommés,
et auxquels elle a donné sa confiance.

Remarquez d'ailleurs, Messieurs, que les limites
de ces départements, dont une partie a été dis-
traite de la France et partie conservée, ne sont
pas encore fixées; qu'elles ne peuvent l'être que
par des jugements et des commissaires nommés
par le Roi et par les autres puissances qui y sont
intéressées; qu'elles ne le seront peut-être pas
de plusieurs années; que dès lors il est impossi-
ble de connaître d'une manière exacte la popula-
tion de la partie conservée de tel ou tel départe-
ment, et que jusque-là il ne serait pas juste de
ments sous prétexte qu'il est dans l'ordre des choses
rejeter de votre sein les députés de ces départe-
possibles que la population qui restera à la France
ne sera que de tel ou tel nombre d'individus.

Il n'y a, Messieurs, qu'un seul des députés ré-
clamants qui soit dans cette classe: c'est M. Riquet
de Caraman, nommé député au Corps législatif
par le département de Jemmapes.

On assure que la partie de ce département conservée à la France est de cinquante à soixante mille ames; mais que cette population soit plus ou moins considérable, la commission a pensé qu'étant né Français, domicilié en France, et député de commettants français, il devait continuer de siéger parmi vous.

Il n'y a encore qu'un seul de nos collègues dans la troisième classe: c'est M. Pictet-Deodati, nommé député au Corps législatif par le département du Léman.

La France conserve sept cantons de ce département, que M. Pictet assure contenir une population de cinquante à soixante mille ames.

Mais M. Pictet est né à Genève, dans la partie de ce département qui a été distraite de la France par le traité du 30 mai; il a son domicile à Genève; il semble dès lors qu'il est étranger à la France dans toute la force du terme, et que dès lors il lui est interdit, par l'ordonnance du 4 juin, de siéger à la Chambre des députés.

Cependant M. Pictet insiste, il se prétend dans un cas d'exception; et pour justifier cette excep tion il rapporte différentes pièces qui ont été soumises à l'examen de la commission.

Il justifie ensuite de lettres patentes de Louis XVI,

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