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Par exemple, si l'un des voisins à qui les titres në donnent que dix hectares, en a possédé onze depuis trente ou quarante ans.

Mais il faut que la possession soit bien caractérisée, et qu'elle ne puisse être réputée clandestine. On réz puterait telle une légère anticipation faite en labou¬ rant la portion d'une pièce de terre où il n'y a pas de bornes (1), ou lorsque les bornes ne sont plus apparentes. Il est difficile d'apercevoir une pareille anticipation, à moins qu'elle ne soit considerable. Ainsi l'on doit toujours, nonobstant longtie possession, recourir aux titres, lorsqu'ils fixent l'étendue des deux portions contigues.

Si l'anticipation était assez considérable pour n'a voir pu raisonnablement être ignorée du voisin, où s'il y avait des bornes visibles, elle ne pourrait plus être réputée clandestine, et la possession constante pendant trente ans opérerait la prescription.

176. S'il n'y a de titres de part ni d'autre, la seule possession doit faire la règle.

S'il y a de la différence entre les titres des deux voisins, la règle melior est causa possidentis, donne l'avantage à ceux du possesseur.

Si l'un a des titres qui fixent l'étendue de sa por

Pothier, Appendice aú Contrat de société, no. 233′; le' Nouveau Denisart, vo. Bornage, pag. 65, L. ult. Cod. Finium regundorum. « De>> cernimus in finali quæstione, non longi temporis sed triginta anno » rum prescriptionem locum habere. »'

(1) Voy. la Coutume de Lille, chap. vi, art. 8.

tion, pendant que l'autre n'en représente pas, les titres doivent servir de règle.

Si les deux voisins ont des titres, mais qui ne fixent point l'étendue de leurs portions, il faut partager également et par moitié, toujours en supposant qu'il n'y ait pas de possession contraire bien caractérisée.

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Si les titres des deux voisins réunis donnaient une étendue plus ou moins grande que celle de tout le terrain, il faudrait faire une règle de proportion pour partager le profit ou la perte.

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Par exemple, le terrain étant de six hectares, les titres de l'un lui donnent trois hectares, ceux de l'autre ne lui en donnent que deux; il reste un hectare à partager dans la proportion de trois à deux. On divise cet hectare en cinq portions, pour en donner trois au premier et deux au second;

Et vice versa, dans le cas où il y aurait de la perte. Par exemple, si le terrain ne contient que six hectares, si les titres de l'un lui en donnent, six et les titrés de l'autre trois, le premier doit être réduit à quatre hectares et le second à deux.

177: Si les bornes avaient été placées en vertu d'un titre commun et non contesté, et que, par erreur, elles se trouvassent avoir été mal placées; par exemple, si un partage entre deux personnes accor→ dait à chacune six hectares dans une pièce de terre de douze hectares, et que, par la position des bornes l'une se trouvât jouir de sept hectares, l'autre de einq, l'erreur devrait être réformée, à moins que

le possesseur des sept hectares ne pût faire valoir la prescription de trente ans.

Après la vérification des titres et le mesurage des terres, on place les bornes, pour rapporter ensuite procès-verbal de l'opération.

178. Il arrive quelquefois que la demande de bornage entre deux personnes occasionne ou nécessite la même opération entre un plus grand nombre ; lorsqué, par exemple, le premier propriétaire d'une plaine demande le bornage à son voisin, et que ni l'un ni l'autre ne se trouvent avoir l'étendue de terrain portée dans leurs titres, on mesure le terrain du troisième, du quatrième propriétaire, et ainsi de suite, s'il est nécessaire, jusqu'à l'extrémité de la plaine.

1

S'il est reconnu par le mesurage que l'un des voisins a plus que l'étendue portée dans ses titres, et que l'autre en a moins, on doit parfaire ce qui manque à celui-ci parce que l'autre a de plus. Qui majorem locum in territorio habere dicitur, cæteris qui minùs possident, integrum locum assignare compellitur. L.7, ff. Finium regund.

179. En général, les bornes plantées aux extremités des héritages indiquent que, pour former la limite, il faut tirer une ligne droite d'une borne à

l'autre.

Si l'inégalité du terrain ou sa trop grande étendue empêchait que de l'une des bornes on pût apercevoir l'autre, on en placerait une troisième dans un point d'où l'on pût apercevoir les deux autres.

180. Quoiqué le bornage se fasse à frais communs, il peut, à son occasion, s'élever des incidents qui suivent le soft de tous les procés, dont les frais sont supportés par celui qui succombé.

181. L'action de bornage peut être intentée non seulement par le propriétaire, mais encore par toute personne qui possède pro suo, sans que le voisin puisse exiger la preuve de son droit de propriété! la possession le fait présumer propriétaire.

Elle peut l'être par l'usufruitier, qui a un droit réel sur la chose; mais il est alors de la prudence dé mettré le propriétaire en cause, afin que le borrage soit contradictoire avec lui; sans quoi il en pourrait demander un nouveau à l'expiration dé

l'usufruit.

M. Pardessus (1) pensé, contre l'avis de Pothier ét des auteurs qui ont écrit avant le Code, que l'usufruitier ne peut intenter l'action de bornage, par la raison que l'art. 646 ne lui donne pas ce droit: • Tout propriétaire peut obliger son voisin au * bornage. ».

Mais cette expression n'est point limitative. Tout propriétaire, c'est-à-dire tous ceux qui exercent un droit de propriété, tels que le possesseur pro suo, l'usufruitier qui a un droit réel, l'emphytéote', à la différence de ceux qui n'ont qu'un titre précaire, tels que les fermiers.

(1) Traité des Servitudes, pág. 166. L'auteur a change d'opinion. Voy. pag. 568 de sa 4o. édit., à Paris, chez Warée oncle.

Nous pensons donc qu'il faut s'en tenir à l'ancienne doctrine (1), à laquelle le Code n'a point dérogé.

Le fermier, qui n'a pas le droit d'intenter l'action de bornage, peut se pourvoir contre son bailleur, et conclure à ce qu'il soit tenu de faire cesser le trouble qu'il éprouve dans sa jouissance de la part du voisin, en faisant borner l'héritage tenu à ferme.

182. L'action de bornage ne tend qu'à conserver à chacune des parties l'intégrité de son héritage. C'est donc un acte d'administration qui peut être fait par le tuteur, sans consulter le conseil de famille, sauf à prendre son avis sur les incidents qui feraient naître une question de propriété.

SECTION III.

Droit de mitoyenneté des murs, haies et fossés, des arbres qui sont sur les confins des héritages.

Après avoir vu comment on détermine les limites de la propriété, lorsque les héritages n'en ont point de fixes, il faut voir comment on termine les contestations qui peuvent s'élever tant au sujet des limites, lorsque les héritages sont séparés par des murs, haies ou fossés, qu'au sujet des arbres qui sont sur leurs confins.

(1) Fondée sur la raison et sur la loi 4, § 9 ; ff. Finjum Regund. 10.

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