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les sujets d'une Puissance amie, dès qu'ils justifient d'une manière régulière de leur individualité. Elle ne peut, après les avoir reçus, les renvoyer de son territoire sans des motifs qui doivent être communiqués à leurs Gouvernements respectifs. Dans tous les cas le renvoi ne peut s'effectuer avec des formes blessantes, si la conduite de l'individu renvoyé ne les justifie pas. C'est une conséquence du droit au respect."

(iii.) Vattel," Le Droit des Gens," Liv. ii, Chap. 8, § 108:

"L'État qui doit respecter les droits des autres nations, et généralement ceux de tout homme, quelqu'il soit, ne peut donc s'arroger aucun droit sur la personne d'un étranger qui, pour être entré dans son territoire, ne s'est point rendu son sujet. L'étranger ne peut prétendre la liberté de vivre dans le pays sans en respecter les lois; s'il les viole, il est punissable, comme perturbateur du repos public, et coupable envers la société; mais il n'est point soumis, comme les sujets, à tous les commandements du Souverain; et si l'on exige de lui des choses qu'il ne veut point faire, il peut quitter le pays. Libre en tout temps de s'en aller, on n'est point en droit de le retenir, si ce n'est pour un temps et pour des raisons très particulières, comme serait, en temps de guerre, la crainte qu'étant instruit de l'état du pays et des places fortes un étranger ne portât ses lumières à l'ennemi."

(iv.) In 1888 the Institute of International Law ("l'Institut de Droit International ") discussed at Lausanne the question of the right of a State to, and the methods whereby a State ought to, expel foreigners (cf. "Annuaire de l'Institut," Tome X, 1888-1889, pages 239-246, and "Revue de Droit International," Tome XX, pages 498-607, &c.), and having considered the various authorities on the point, concluded, inter alia, that

"La décision prononçant une expulsion ordinaire et indiquant les dispositions sur lesquelles elle se fonde devra être signifiée à l'intéressé avant d'être mise à exécution."

(v.) This question formed the subject of exhaustive discussions at subsequent meetings of the Institute, both at Hamburg in 1891 and at Geneva in 1892 (cf. Annuaire," Tome XI, page 273, and Tome XII, pages 17 and 218). On the latter occasion the following amongst other rules were agreed to:

"Article 17. L'expulsion n'étant pas une peine, doit être exécutée avec tous les ménagements possibles, en tenant compte de la situation particulière de la personne."

"Article 19. Les expulsions, soit individuelles, soit extraordinaires, doivent être portées aussitôt que possible à la connaissance des Gouvernements dont elles concernent les ressortissants."

"Article 30. L'acte ordonnant l'expulsion est notifiée à l'expulsé. Il doit être motivé en fait et en droit."

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"Article 32. L'acte mentionne de même le délai dans lequel l'étranger devra quitter le pays. Ce délai ne peut être de moins d'un jour franc. Si l'expulsé est en liberté, on ne doit pas user de contrainte envers lui pendant ce délai."

No. 3.-Mémorandum du Gouvernement de Sa Majesté le Roi des Belges en réponse au Mémorandum produit par le Gouvernement de Sa Majesté Britannique à l'appui de sa réclamation relative à l'Expulsion de Belgique de Ben Tillett.

I.

AVANT d'aborder l'examen des griefs articulés dans le Mémorandum de Sa Majesté Britannique, il est indispensable de faire connaître certains événements auxquels Ben Tillett a été mêlé en Belgique, et dont ceux du mois d'Août 1896 n'ont été que la suite.

Au mois de Juin 1896 le Sieur Wilson, Député ouvrier de Middlesborough au Parlement et Secrétaire de l'Union des Marins et Chauffeurs Anglais, et le Sieur Tom Mann, Secrétaire du Parti Ouvrier Indépendant, arrivèrent à Anvers dans le but de créer une Union Internationale de marins et d'ouvriers des ports. Tous les deux avaient été les promoteurs et les organisateurs d'importantes grèves de dockers qui s'étaient produites en Angleterre, notamment à Londres en 1889, et à Hull en 1893.

Dans les assemblées auxquelles ils convièrent les marins et ouvriers du port d'Anvers, ils préconisaient non seulement la création de cette Union, mais encore le boycottage des ouvriers et des marins qui refuseraient de s'y affilier. D'autres sujets Anglais leur succédèrent dans le même but. Les armateurs et les agents maritimes du port d'Anvers, ainsi que les commerçants, s'alarmèrent des excitations auxquelles se livraient ces étrangers. Le Gouvernement, préoccupé non moins des intérêts du port d'Anvers que du maintien de la tranquillité publique, décida de les empêcher de continuer leur œuvre. Ses préoccupations n'étaient pas sans fondement, ainsi que le prouvent les paroles que Wilson prononçait dans un meeting tenu à Bootle, près de Liverpool, le 3 Juillet, 1896:

"La Fédération est internationale parce que les dockers d'Anvers, Rotterdam, Hambourg, Stockholm, et autres places sont de la même opinion que ceux d'Angleterre. Ils sont mûrs pour la révolte et la révolution." (Voir aux Annexes, farde No. 1.)

Les appréhensions du Gouvernement Belge furent également justifiées plus tard par l'expulsion de Tom Mann du territoire Allemand d'abord, et ensuite du territoire Français.

La police d'Anvers fut donc invitée à assurer le renvoi des agitateurs Anglais qui se représenteraient en cette ville.

Le 22 Juillet arrivèrent à Anvers le Sieur Leslie Morton John. son, domicilié à Londres, journaliste, et le Sieur Ben Tillett.

A l'insu de la police ils organisèrent un meeting au local du cercle Socialiste-Anarchiste "Werker." Ils y arrivèrent à 11 heures du soir, à la tête d'un grand nombre d'ouvriers du port, et prirent place au bureau, assistés d'un traducteur, le Sieur Janssens.

L'un et l'autre critiquèrent les mesures de police prises pour empêcher leur propagande, ajoutant que les Délégués Anglais se succéderaient à Anvers malgré le Gouvernement Belge, et que tous les jours auraient lieu des meetings dans divers locaux de la ville. La police n'apprit leurs noms que vers la fa du meeting, mais elle ne put, à ce moment, comme elle se le proposait, leur donner connaissance des ordres qu'elle avait reçus, parce qu'ils usèrent des stratagèmes pour échapper à son attention: pour sortir du local ils se déguisèrent en ouvriers boulangers. L'un d'eux feignit d'être en état prononcé d'ivresse, et simula en même temps une altercation, accompagnée de légères voies de fait, avec une femme, à laquelle il donnait le bras.

La police, ainsi jouée, dut se résoudre à communiquer les instructions Ministérielles au traducteur Janssens et au Sieur Mortelmans, Président du " Werker," afin qu'ils en fissent part à Johnson et à Ben Tillett. Ils consentirent à le faire, tout en refusant de révéler où ceux-ci étaient logés. (Voir farde II.)

Johnson, ayant voulu donner un nouveau meeting le 25 Juillet, fut mis en état d'arrestation et détenu à la disposition du Gouvernement jusqu'au moment de son embarquement pour l'Angleterre, qui eut lieu le même jour.

Quant à Ben Tillett, on ne le découvrit pas. Il est à présumer qu'il s'était empressé cette fois de quitter secrètement la ville. (Voir farde III.)

Un Sieur Kernes, André-Jean, également sujet Anglais et marin, qui résidait à Anvers depuis plusieurs années et qui avait été délégué par Wilson et Tom Mann pour y continuer l'agitation, fut expulsé quelques jours après, en vertu d'un Arrêté Royal. C'est sous cette forme qu'a lieu l'expulsion des étrangers qui ont une résidence fixe dans le pays.

Il résulte de ces faits que, lorsque Ben Tillett est revenu en Belgique en Août 1896, dans le but de reprendre l'agitation commencée en Juin précédent, il savait que le Gouvernement Belge considérait cette agitation comme contraire à l'ordre public, et qu'en venant y prendre part de nouveau il s'exposait à être arrêté, détenu et expulsé.

II.

Les griefs articulés dans le Mémorandum du Gouvernement de Sa Majesté Britannique vont maintenant être rencontrés.

1. Il est vrai que, comme il est dit au début du Mémorandum, Ben Tillett arriva de nouveau à Anvers, dans la matinée du Jeudi, 20 Août, 1896, par le bateau de Harwich, mais il est inexact qu'il eut l'intention de repartir d'Anvers pour Harwich dans la soirée du lendemain. Voici, en effet, les circonstances de l'arrivée de Ben Tillett, telles qu'elles sont établies par des procès-verbaux dressés le jour même par la police. (Voir farde IV.)

Le 20 Août, un groupe d'environ 300 ouvriers des bassins, précédé d'un cartel portant l'inscription: "Place pour les ouvriers des docks sans travail," se rendit au port pour y recevoir Ben Tillett. Ils étaient accompagnés du Sieur Pile (Georges-Edouard), sujet Anglais, Secrétaire désigné, paraît-il, pour Anvers, du Syndicat International des Marins en voie de formation.

M. le Commissaire Adjoint Bucan fit inviter Ben Tillett et son compagnon Pile, dès l'arrivée du bateau, à se rendre dans son bureau, situé en face du débarcadère, ce qu'ils firent de très bonne grâce. Interrogé sur ce qu'il comptait faire à Anvers, Ben Tillett déclara "y être venu pour quelques jours; il comptait s'y occuper d'abord de cyclisme et ensuite donner une et peut-être deux conférences."

S'inspirant des instructions générales données par le Gouvernement, le Commissaire de Police Bucan fit connaître à Ben Tillett qu'il était interdit aux étrangers, en vertu de ces instructions, de fomenter le mouvement inauguré par Wilson et consorts, et l'avertit des mesures de rigueur auxquelles il s'exposerait en contrevenant à cette défense.

Le Mémorandum du Gouvernement Britannique ne fait pas la moindre allusion à ces premiers rapports de Ben Tillett avec la police d'Anvers, non plus qu'à l'avertissement formel qui lui fut donné alors.

2. Sous le No. 2 du Mémorandum se trouvent très inexactement rapportées les circonstances dans lesquelles Ben Tillett fut arrêté. Voici les faits:

Le 21 Août, dans l'après-midi, la police fut informée qu'une bande assez nombreuse d'ouvriers des docks, dont l'un portait un écriteau, avait pénétré dans un établissement public, situé rue Élisabeth, 55, et qu'un sujet Anglais-c'était Ben Tillett-les haranguait dans la cour. Le Commissaire-Adjoint Winne se rendit en cet établissement, et, constatant que Ben Tillett contrevenait manifestement à la défense qui lui avait été faite, il l'invita à le suivra au bureau de police.

Il est inexacte que Ben Tillett ait protesté coutre son arrestation et demandé "à connaître sur quelle accusation il était arrêté."

Ben Tillett, dûment averti la veille, ne pouvait ignorer les raisons pour lesquelles il se trouvait à la disposition de la police. D'après le rapport officiel du Commissaire Winne, il ne protesta pas et se borna à déclarer qu'il ne savait pas que la cour de l'aubergiste Schramme était considérée comme un lieu public, et que s'il l'avait su, il n'y aurait pas tenu le meeting.

3. Ben Tillett fut déposé, selon l'usage constamment suivi en ce qui concerne les étrangers retenus à la disposition du Gouvernement, dans la maison de dépôt de la prison d'Anvers. (Voir farde IV, Règlement de la Maison de Sûreté à Anvers.)

La police eût méconnu les instructions du Gouvernement, en remettant provisoirement en liberté un étranger que tout devait faire considérer comme un fauteur de désordres.

Il est allégué dans le Mémorandum du Gouvernement Anglais "qu'à son arrivée à la prison, et bien qu'aucune accusation ou charge criminelle ne fût portée contre lui, Ben Tillett fut à tous égards traité comme un criminel ou comme une personne arrêtée sous une charge criminelle."

Toutes les articulations de Ben Tillett au sujet de son séjour à la prison d'Anvers sont contredites par les déclarations précises, formelles, et unanimes du personnel de la prison, qui est prêt à les appuyer de son serment.

A son arrivée à la prison, Ben Tillett avait l'aspect d'un vulgaire vagabond; ses vêtements étaient malpropres, et rien dans son extérieur ne pouvait révéler sa qualité d'Alderman de la ville de Londres.

Après la formalité ordinaire de l'écrou, il fut soumis aux mesures réglementaires qui sont prises dans un but d'hygiène et de sécurité à l'égard de toutes les personnes incarcérées dans un établissement pénitentiaire pour une durée quelconque. (Voir farde VI, Article 81 du Règlement de la Prison.)

Il fut invité par le surveillant de service à lui remettre la sacoche et les allumettes dont il était porteur, et conduit ensuite à la salle de bain, où il se déshabilla lui-même. Il est inexact qu'il ait été soumis à une exploration corporelle.

Il fut ensuite, selon la règle, placé dans une cellule-celle portant le No. 6.

Ben Tillett allègue que "cette cellule était humide, pleine de mauvaise odeurs; que les murs, le sol, et le lit étaient couverts d'ordures." Il ajoute que, "sur sa plainte, il fut mis dans une autre cellule, se trouvant, sauf en ce qui regarde le lit, dans les mêmes conditions malpropres, répugnantes, et nuisibles à la santé."

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