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TROYES. IMPRIMERIE DE CARDON

DU BARREAU FRANÇAIS,

OU

CHOIX

DES PLAIDOYERS ET MÉMOIRES

LES PLUS REMARQUABLES,

TANT EN MATIÈRE CIVILE QU'EN MATIÈRE CRIMINELLE,
DEPUIS LE MAISTRE ET PATRU JUSQU'A NOS JOURS,

AVEC UNE NOTICE SUR LA VIE ET LES OUVRAGES DE CHAQUE ORATEUR.

PAR UNE SOCIÉTÉ DE JURISCONSULTES ET DE GENS DE LETTRES.

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B. WARÉE AINÉ, LIBRAIRE DE LA COUR ROYALE

ET DE L'ORDRE DES AVOCATS;

M DCCC XXXVII.

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NOTICE

SUR M. CHAIX D'EST-ANGE.

En 1820, le Barreau de Paris brillait d'un vif éclat. Les Bonnet, les Berryer père, les Delacroix-Frainville se faisaient encore quelquefois entendre; les Tripier, les Dupin aîné, les Mauguin, les Persil, les Hennequin occupaient les premiers emplois du Palais; tout près d'eux apparaissaient des talens un peu plus nouveaux, mais comme eux pleins d'avenir, Berryer fils, Mérilhou; enfin Dupin jeune, Barthe, débutaient avec honneur dans une carrière qui leur préparait de si beaux triomphes. La ferveur des luttes politiques, le choc des opinions, d'illustres proscrits à défendre, de grands principes à proclamer, la liberté de la défense à conquérir, un pouvoir impopulaire à combattre et à réfréner, toutes ces choses, en agrandissant la mission de l'orateur, ajoutaient à l'éloquence un stimulant nouveau; plus d'une fois les combats judiciaires parurent égaler en grandeur, en énergie, en solennité les combats de la tribune.

C'est à cette époque qu'un jour, à la troisième chambre de la Cour royale, un jeune, un tout jeune

TOM. XV.

avocat, au visage candide, au menton encore imberbe, se présenta pour plaider une cause de peu d'importance. Sa voix juste et sonore, son élocution facile et animée, ses grâces presque enfantines, une sorte de naïveté légèrement malicieuse dans son action et dans son langage le firent remarquer des magistrats. On s'informa de lui; les détails de sa position ajoutèrent à l'intérêt qu'avait excité sa plaidoierie.

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Victor-Charles Chaix d'Est-Ange était né à Rheims le 11 avril 1800. Son père, homme recommandable, y avait exercé avec distinction des fonctions de magistrature; d'abord commissaire du gouvernement, plus tard procureur-général près la Cour de justice criminelle. En 1811, cette Cour fut supprimée ; M. Chaix d'Est-Ange vint à Paris avec sa famille. Il se fit avocat, mais avec peu de succès : l'absence avait détruit ses relations, l'âge avait décoloré son talent. Il éleva péniblement son fils, dont aucun succès de collége ne signala les études. A seize ans, le jeune homme commença son droit; à dix-neuf il prêta le serment d'avocat. Peu de semaines après, sa mère, dès long-temps languissante, mourut; son père, au bout de deux mois, la suivit au tombeau. Il resta seul, avec une jeune sœur à soutenir, et, pour tout bien, une bourse où se trouvait, en toutes sortes de monnaies, une somme de six cents francs, humble et unique fruit des économies journalières de la famille.

Il reconnut alors la sagesse des conseils de son père. «< Hâtez-vous, ne cessait de lui répéter le vieillard << pendant ses études de droit, hâtez-vous de vous «< faire recevoir avocat on ne sait pas ce qui peut << arriver. >>

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