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naître que de l'obéissance? A qui faut-il qu'elle soit rendue en matière de religion? Est-ce à Pie VII, ou à l'abbé Grégoire ?

Je sais qu'on ne doit pas livrer la France à la cour de Rome; mais nous sommes si loin du siècle d'Hildebrand! Mais les idées des abus d'autrefois sont si étrangères à toute possibilité d'en voir renaître aujourd'hui de semblables !

Il s'agit de contenter en France les bonnes ames catholiques, de faire renaître une hiérarchie bienfaisante dans la main du gouvernement.

Bonaparte a marché une fois sur Rome bien malgré lui. Il ne fera jamais la guerre à des chasubles. Il est arrivé à un accord avec le Pape. Vos grandes lumières lui suggéreront les expédiens qu'il préférera toujours aux moyens de force, et ce qui reste en litige s'arrangera. Je le souhaite ardemment. Il s'agit d'un point où la gloire du gouvernement est intéressée à accomplir ce qui est annoncé, sans bruit ni violence, d'autant plus que tout a été fait par les moyens et les motifs les plus purs. Agréez, etc.

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Malgré ces observations si remplies de sens et de justesse, le parti constitutionnel fit résistance, et le cardinal Caprara disposa les choses dans sa sagesse, et d'après ses instructions, de manière qu'il y eut quelques explications satisfaisantes à travers des refus obstinés au total on crut avoir évité des scandales publics.

CHAPITRE XVII.

NOTES DU MINISTRE D'ESPAGNE AU CARDINAL CONSALVI, sur DES RÉFORMES ECCLÉSIASTIQUES. RÉPONSES DE SON ÉMI

NENCE.

La grande affaire de la France avec le Saint Siége n'étoit pas le seul souci qui troublât le sommeil du Pontife.

Dès le 9 octobre précédent, le chevalier de Vargas, ministre d'Espagne à Rome, avoit entretenu le cardinal Consalvi de quelques réclamations nouvelles.

Il demandoit que le nonce n'eût aucune juridiction à Madrid, et que sa représentation se bornât aux fonctions d'un ambassadeur de Sa Sainteté prince temporel, ou à celles d'un légat du primat et du chef de l'Église, envoyé en Espagne, pour que sa présence y montrât la communion de l'Église Espagnole avec le centre de l'unité qui est l'Église Romaine.

Dans la note remise à ce sujet, M. le chevalier de Vargas s'exprimoit ainsi :

«Les séculiers jouissent de l'avantage de terminer leurs différends, pourquoi un sort semblable ne seroit-il pas réservé au clergé?

» Faut-il que la portion du peuple choisie par le Seigneur pour instruire la nation dans la religion, se mêle au tumulte du barreau, et laisse douter les séculiers de l'esprit de paix, d'amour et de charité qui doit régner dans son sein?

» Un prince aussi pieux que le roi d'Espagne ne peut voir avec indifférence ce mal dangereux par l'exemple, et encore plus par ses conséquences.

» Il sait que ceux qui dans ses États sont ecclésiastiques, ne s'en trouvent pas moins ses sujets. Il sait qu'exiger dans quelques affaires trois, sentences conformes, dans quelques autres cinq sentences, c'est étendre la durée des procès au-delà de la vie des plaideurs, fomenter les haines, encourager l'impunité, et affecter une incohérence dans la manière de distribuer la justice à la même nation.

» Si un prélat Espagnol préside comme délégué de Sa Sainteté le tribunal de l'inquisition, pourquoi n'en seroitil pas de même dans la juridiction contentieuse, qui est d'un moindre intérêt que la religion?

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Un juge national connoît la législation de la patrie, les coutumes, le mérite, les opinions du plaideur, du coupable, des témoins. Un juge étranger s'adjoint un auditeur Espagnol, et dépose donc indirectement son autorité. Peut-il même avec cet auditeur, prononcer, comme le feroit un corps national dont les connoissances sont si étendues?

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Le Pape, quand on lui avoit communiqué cette note, s'étoit empressé de dire en riant au cardinal: << Tâchez d'arranger cette affaire, nous ne voulons pas de guerre avec les Espagnols. » Il faisoit allusion aux querelles de son couvent dans lesquelles il savoit qu'un espagnol avoit eu la plus grande part. Mais les affaires de France absor

boient l'attention du cardinal; il ne put répondre à M. de Vargas que le 9 janvier 1802. Il lui disoit :

« Sans remonter à des époques plus reculées, on peut remettre, sous les yeux de Sa Majesté, les ordonnances concernant le tribunal de la nonciature, publiées à Madrid en 1640, 1641, du consentement de l'immortel Philippe IV, qui les a concertées avec le Pape Urbain VIII.

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» Il fut ensuite signé un concordat, le 17 juin 1717, entre Clément XI et Philippe V, à la suite duquel le nonce fut réintégré dans toutes ses fonctions, comme par le passé.

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Un second concordat fut signé en 1737, et il confirma les mêmes dispositions.

» Enfin il parut un bref de Clément XIV, le 26 mars 1771, et il fut accordé à l'illustre père de Sa Majesté, le droit de créer une rote de juges Espagnols; mais on réserva au nonce apostolique la juridiction contentieuse.

» Tous les monarques d'Espagne ont apposé leur placet à ces différentes conventions.

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On n'entretiendra pas Votre Excellence des sacrifices sans nombre auxquels les papes ont consenti pour satisfaire les rois d'Espagne ; il leur a été fait plus de concessions qu'à aucune autre puissance.

» Le soussigné observe que les demandes faites par son Excellence, sont au nombre de trois.

» 1o Elle demande qu'on ôte au nonce la juridiction contentieuse, et l'autorité sur les ordres réguliers, et qu'à cet effet, le nonce soit considéré comme ambassadeur d'un prince temporel.

» 2o Que Sa Sainteté nomme un prélat Espagnol, sur la proposition que lui fait Sa Majesté, et qu'on attribue à ce prélat, uni au tribunal de la rote, la juridiction contentieuse indépendante du nonce.

» 3° Qu'on observe dans ies jugemens, les formes et l'ordre suivis dans les tribunaux ordinaires.

» La souveraineté temporelle de Sa Sainteté n'est que secondaire, à côté de son apostolat suprême. Sa Sainteté ne peut avoir que des nonces. Ce titre appartient à ses ambassadeurs. C'est ce caractère qui leur fait obtenir le premier rang. Les Papes ont toujours envoyé des légats ou des nonces, avec l'objet réel de veiller aux intérêts des catholiques éloignés, et n'ont jamais eu l'idée de croire par là, montrer parité de communion entre l'Eglise Romaine et les autres églises.

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Toute autre manière d'envisager les choses est contraire à la discipline ecclésiastique, et absurde en elle-même

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Quant à la nomination du prélat Espagnol, il faudroit donc que Sa Sainteté eût à Madrid deux légats; un de nom, absolument sans utilité, l'autre d'effet, mais étranger. Sa Sainteté retireroit à son ministre les facultés qui lui appartiennent! Voit-on l'inconvenance d'un tel système? Voit-on la lésion évidente des droits du Saint Siége?

» A l'égard de l'introduction, dans les jugemens ecclésiastiques, de la pratique des formes usitées dans les tribunaux espagnols, s'il s'agit de discuter le point important, on sait que c'est du droit canon que mille facilités pour juger, pour obtenir des avantages, ont été transportées dans les tribunaux civils. Les causes ecclésiastiques sont d'ailleurs d'une nature si différente! Et l'histoire nous apprend que jamais les juges civils n'ont mérité tant d'éloges, que lorsqu'ils se sont modelés sur la forme des jugemens religieux.

» Sa Sainteté ne doute pas que la piété de Sa Majesté n'accueille ces raisons. Elle désire que les choses restent au point où les ont laissées ses prédécesseurs. »

Dans une autre note, en date également du 9 octobre, M. de Vargas avoit demandé que les évêques eussent le droit de prononcer sur toutes

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