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cas contraire, elles sont ou meubles ou cateux meubles, lorsqu'elles sont mobiles; cateux, lorsqu'elles sont immeubles. A cet égard, il n'y a aucune difficulté.

3° Immobilière.

Il n'y a pas de meuble qui soit catel au sens restreint du mot. Avant l'introduction, dans le droit du Nord, coutumier, de la classe des meubles, nous avons vu qu'on désignait sous le terme générique de catel les meubles et les immeubles qui n'étaient pas héritages. Depuis cette introduction, le meuble cantonné dans sa classe spéciale a disparu de celle de catel.

Quelques commentateurs des coutumes qui copient Brodeau réputent cependant cateux des meubles par nature. Nous avons vu, en effet, que Brodeau tenait pour cateux des choses « mobiliaires » qui étaient véritablement meubles », mais qui étaient « réputées immeubles par divers rapports et divers temps ». Charles Dumoulin dit également que les cateux sont «mera et vera mobilia sive » mobilium jure censetur quasi caduca, vel cadentia, » quamvis hæreant solo ædificio ». Enfin Le Roy, dans la Coutume de Boulenois (art. 73), réédite la même opinion. << Il y a trois sortes de biens dans cette coutume. Les uns >> sont meubles, les autres immeubles et une troisième >> espèce entre les meubles et les immeubles qui participe » de la nature de l'un et de l'autre qui étant véritablement > meubles sont néanmoins réputez immeubles par divers >> respects et en divers tants, comme l'explique parfaite>>ment Jean Bouteiller en sa Somme rurale... où il parle » de la différence qu'il y a entre les meubles, catteux et >> héritages ».

Brodeau, Charles Dumoulin et Le Roy ont commis une

Codet-Boisse

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erreur. Les cateux sont des choses adhérentes au sol et qui ne sont considérées comme telles qu'au moment de leur adhérence. Ce sont donc des biens essentiellement immobiliers. L'immobilité est leur caractère le plus apparent. Aussi, à part les dissidences que nous venons de relever, tous les auteurs disent-ils invariablement, prenant la proposition inverse de celle de Le Roy, que les cateux sont des immeubles réputés meubles.

Seules les choses adhérentes à un fonds sont catels; celles qui adhèrent à une maison n'entrent pas dans cette classe de biens. C'est l'incorporation à la terre qui leur donne leur couleur juridique.

Mais il y a une restriction à apporter à notre formule; toutes les choses adhérentes à un fonds ne sont pas cateux, il faut en outre, comme on le sait déjà, qu'elles ne soient pas productives de revenus périodiques.

4° Frugifère.

Merlin (1) a très bien aperçu ce caractère. « Tout ce qui >pend sur un fonds par racines, ne doit point être indis>> tinctement rangé dans la classe des catteux verts ». En s'appuyant sur le titre de Beaumanoir que nous avons déjà analysé, il ajoute : « Ainsi, suivant cet auteur, pour qu'une >> chose soit réputée immeuble, il ne suffit pas qu'elle ne >> puisse pas être transportée d'un lieu à un autre, il faut >> encore qu'elle rapporte un revenu annuel et ordinaire. >> C'est d'après cette idée, que les coutumes citées ont établi >> une distinction entre les meubles et les immeubles. Elles » ont réputé immeubles tous les bois taillis, les arbres frui>> tiers et les chênes qui portent des glands dont se nourris

(1) Répertoire, v° Catteux.

>> sent les porcs, et elles ont réputé catteux ou meubles tous >> les arbres qui ne portent point de fruits ».

Nous avons fini de préciser la notion des cateux et de justifier la définition que nous en avons donnée. On sait ce qu'ils représentent; mais n'en posséder qu'une idée théorique n'est pas suffisant.

Il y eut en effet des variétés dans l'application des principes, et on ne peut les saisir qu'en montrant leur manifestation concrète. Nous donnerons donc la liste, d'après les coutumes, des choses réputées catels. Mais, auparavant, il est nécessaire de rechercher et de savoir dans quelles coutumes il y en avait.

CHAPITRE II

COUTUMES OU EXISTE LA CLASSE DES CATEUX

La classe des cateux n'est pas générale, elle n'existe pas dans la très grande majorité des coutumes rédigées.

Les pays de droit écrit ne la connaissent pas.

Parmi ceux de droit coutumier, il n'y a que les provinces de l'extrême Nord qui l'ont adoptée, ou plutôt chez lesquelles elle n'a pas disparu.

Cette rareté tient à son origine et s'explique par elle.

Tel que paraît le catel dans les coutumes, il est, comme nous l'avons montré, un débris, une survivance de l'ancienne division des biens barbares. Il s'est conservé dans l'extrême Nord, parce que l'influence romaine s'y fit sentir moins. qu'ailleurs.

Cette région septentrionale était celle de la Belgique qu'habitaient les Morins, les Ménapiens, les Bellovaques, les Vermandois et les Nerviens, rebelles au joug romain, quand survinrent les Francs. Ceux-ci, dans la violence de leur envahissement, repoussèrent ces indigènes au-delà de la Silva carbonaria et des Ardennes. Avec eux disparut tout ce qu'il y avait de Romains dans cette province, hommes et mœurs; villes (1) et institutions; le christianisme même ne résista pas devant le paganisme barbare: on n'en trouve,

Excepté Tournay et Tongres, Britz, Code de l'ancien droit belge, p. 22.

en effet, aucune trace au VI et au début du VII° siècle. En 630, saint Arnaud et saint Eloi durent réévangéliser les barbares, fidèles au culte d'Odin. L'établissement des Francs se fit sur un sol désert, terra incognita; leurs institutions n'eurent pas à lutter, pour se maintenir, contre celles de Romains plus civilisés, comme dans les pays conquis peu après par Clovis. La formation de l'empire franc, sous la tutelle de l'Eglise, sacrant et titrant Clovis, modifia sans doute les conditions de résistance du droit germanique mais ne les fit pas disparaître complètement; la formation des coutumes s'en ressentit.

Alors qu'aux x et XI° siècles la prépondérance du christianisme et la fusion des races précipitaient la romanisation. dans le Midi romain et les duchés d'Aquitaine et de Bourgogne, toujours restés mi-Romains, les comtés de Flandre et de Vermandois, les duchés de Normandie et de France, le nord de la Champagne, presque tout le pays entre l'Escaut et la Loire résistaient avec plus d'efficacité, bien qu'à des degrés divers, à l'érosion latine.

Aussi c'est dans la Somme rurale, les Coutumes de Beauvoisis et celles anglo-normandes, les Etablissements de saint Louis, les Usages d'Anjou et d'Orlenois, que nous avons trouvé aux XIII et XIV° siècles, sous une forme tripartite nouvelle, les vestiges, ailleurs disparus, de la division des biens franque. Mais ce ne sont déjà plus, dans les coutumes les moins septentrionales, que des débris à la veille de disparaître.

Les progrès de la civilisation, la territorialité des lois, succédant à la confusion des nationalités, la renaissance du droit romain, sous le rayonnement de la Lucerna juris et l'éloquence diserte des Commentateurs, les Universités, le droit canon et les tribunaux ecclésiastiques; enfin la

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