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LOIS ÉLECTORALES

EXPLIQUÉES.

HISTORIQUE.

219. A peine la Constitution qui assurait à la Belgique les libertés qu'elle devait recueillir de sa révolution, avait-elle été promulguée par le congrès, qu'il parut utile de mettre en action, par les dispositions législatives les plus larges, les principes de notre pacte fondamental, organiques de la représen

tation nationale.

Un projet soumis au congrès par M. de Theux, au nom d'une commission spéciale, fut l'objet de longues et laborieuses discussions. Renvoyé à cette commission, qui lui fit subir quelques légères modifications, l'adoption en eut lieu le 5 mars 1831.

Il ne nous appartient pas de juger de cette loi, qui, il faut le reconnaitre, paraît généralement, surtout depuis que diverses améliorations y ont été introduites, satisfaire aux vœux et aux besoins du pays.

Plusieurs lois sont venues compléter notre système électoral: celle du 25 juillet 1834 a pour but de réparer une omission évidente à l'article 7 de la loi du 3 mars 1831; celle du 10 avril 1855 règle le mode de sortie des membres de la chambre des représentants et du sénat.

Une loi sur les fraudes électorales, applicable à tout notre corps politique, met un terme aux abus nombreux et graves que la tribune législative avait

déclaré exister dans notre système électif, dont elle achève l'ensemble; la loi du 31 mars 1847, sans modifier le système adopté en 1831, a mis le nombre des représentants et des sénateurs en harmonie avec le chiffre de la population, constaté par le dernier recensement officiel.

Enfin une loi du 12 mars 1848, a réduit le cens électoral au taux uniforme de 20 florins, pour tout le royaume, et mis, ainsi, en pratique l'égalité devant la loi, égalité depuis si longtemps proclamée par l'art. vi de la Constitution.

LOI ÉLECTORALE

DU 5 MARS 1831, RECTIFIÉE ET COMPLÉTÉE PAR LES LOIS DES 25 JUILLET 1854, 10 AVRIL 1835, 3 juin 1839, 1o Avril 1843, 31 MARS 1847 et 12 MARS 1848.

N. B. Les passages retranchés de la loi sont placés entre des [] et les passages ajoutés

entre des a

TITRE PREMIER,

DES ÉLECTEURS.

Art. Ier. Pour être électeur, il faut :

1° Etre Belge de naissance ou avoir obtenu la grande naturalisation; 2o Etre âgé de 25 ans accomplis;

5 Verser au trésor de l'Etat la quotité de contributions directes, patentes comprises, déterminée dans le tableau annexé à la présente loi.

« Les centimes additionnels perçus sur les contributions directes, au profit des provinces ou des communes, ne sont point comptés pour former le cens électoral (1). »

220. Électeur. L'électeur est le citoyen qui, réunissant les qualités requises par la loi, concourt à la nomination des représentants de la nation, de la province ou de la commune. V. les lois provinciale et com-. munale.

Belge ou assimilé au Belge par la loi : les articles 8 et 9 de la loi fondamentale des Pays-Bas ont autorisé le souverain à accorder l'indigénat pendant un an, à partir de sa promulgation. Divers arrêts récents de la cour de cassation ont décidé que les personnes nées en Belgique avant ou pendant la loi fondamentale, et qui ont habité la Belgique sous l'empire de cette loi, conservent leur qualité de Belge, nonobstant l'abrogation de ladite loi. L'article cxxxIII de

(1) Ajouté par la loi du 1er avril 1843.

la Constitution assimile au Belge les étrangers qui, domiciliés en Belgique avant 1844, ont continué à y résider, pourvu qu'ils en fassent la déclaration dans un délai de six mois, soit à partir du jour de la promulgation de la Constitution, soit à partir de leur majorité. V. Instruction du ministre de l'intérieur du 8 mars 1854, et la loi du 4 juin 1839.

221. Grande naturalisation. La grande naturalisation seule assimile l'étranger au Belge. (Constit., art. v.)

Mais quel est l'effet des naturalisations. accordées par le gouvernement provisoire, pendant qu'il exerçait tous les pouvoirs? Equivalent-elles à la grande naturalisation? La négative a semblé prévaloir, mais la

cour de cassation a décidé, le 22 juin 1833, qu'elles renfermaient la grande naturalisation.

222. Accomplis. A quelle époque doivent être accomplis les 25 ans, pour pouvoir être électeur? Il suffit qu'ils le soient avant l'époque de la clôture de la liste électorale pour pouvoir y être inscrit. Mais ce serait à tort, selon nous, si on admettait, comme le fait M. Bivort, p. 10, qu'il faut seulement être entré dans sa vingt-cinquième année pour pouvoir être électeur.

:

223. Verser. Il suffit, avons-nous dit dans une précédente édition, de verser au trésor la quotité de contributions déterminée pour former le cens, sans qu'il soit nécessaire de posséder les bases de cette contribution aussi) on peut déclarer et payer contribution pour des chevaux de luxe sans en posséder. Cette opinion était basée sur une déclaration du ministre des finances, dans la discussion de la loi communale. Depuis lors on a reconnu que cette manière d'interpréter la loi aurait pour résultat de légaliser en quelque sorte la fraude; c'est ce qui a motivé la disposition ajoutée à l'article i de la loi.

224. Au trésor de l'État. D'où la consé quence que les centimes additionnels, payés entre les mains des receveurs de l'Etat, mais au profit dela province ou de la commune, ne peuvent être comptés pour parfaire le cens électoral, et cette opinion a été consacrée par arrêts de cassation en date du 12 juillet 1842; nous ne connaissons pas l'arrêt du 13 juillet 1856 dont parle un des commentateurs de la loi électorale. Mais toutes les contributions payées au trésor de l'Etat, n'importe dans quelle localité, lors

qu'il en est suffisamment justifié, doivent entrer dans la somme fixée pour le cens.

225. Contributions directes. Par contributions directes, il faut entendre:

1° La contribution foncière;

2o La contribution personnelle, comprenant la valeur locative, le mobilier, les portes et fenêtres, les foyers, les domestiques, les chevaux;

3o La patente;

4° Les redevances fixes et proportionnelles sur les mines.

La loi du 12 mars 1858 a formellement décidé que le droit de consommation qu'elle établit n'entre point dans le cens électoral.

226. Déterminée. Ce cens a été gradué en rapport avec la population des communes, et diminué de manière à appeler aux élections le plus grand nombre d'électeurs présentant des garanties d'ordre et de stabilité.

227. Tableau annexé à la présente loi. Ce tableau est annulé par l'art. 1er de la loi du 12 mars 1848, qui fixe un cens uniforme pour tout le royaume. V. l'art. LII et les modifications y apportées par la même loi.

228. Centimes additionnels. En excluant de la formation du cens les centimes additionnels au profit des communes et des provinces, le pouvoir législatif a sanctionné la jurisprudence adoptée par la cour de cassation. Arr. du 12 juillet 1842. — Telle était aussi l'opinion que nous avions émise dès l'année 1836, en publiant notre première édition. L'intention du congrès national en portant la loi électorale n'était d'ailleurs pas douteuse cela résulte des discussions qui eurent lieu dans son sein. (V. le Journal de la Belgique du 4 mars 183!.)

II. Seront comptées au mari les contributions de la femme commune en biens, et au père celles de ses enfants mineurs dont il aura la jouissance. Ces contributions pourront être jointes à celles que le mari et le père payent de leur chef.

229. Commune en biens. Ainsi, contrairement à ce qui a lieu pour les élections communales, le mari ne peut joindre à ses contributions celles de sa femme mariée sous tout autre régime que celui de la communauté.

testamentaire, il ne pourrait se prévaloir de ces contributions.

Puisqu'on s'occupait de réviser la loi, on aurait bien dû rectifier le 4°r § de cet article dont les derniers mots sont inintelligibles.

251. Pourront. Cette faculté est tout entière dans l'intérêt de l'électeur, et l'administration ne pourrait s'opposer à son exercice. V. l'art. vi de la Loi communale.

250. Dont il aura la jouissance. D'où la conséquence que si ses enfants étaient possesseurs par testament, mais que la jouissance cût été interdite au père, par l'acte III. [Les contributions et patentes ne sont comptées à l'électeur, que pour

autant qu'il a été imposé ou patenté pour l'année antérieure à celle dans laquelle l'élection a licu.

Le possesseur à titre successif est seul excepté de cette condition (1).]

Les contributions et patentes ne sont comptées à l'électeur qu'autant qu'il a payé le cens en impôt foncier, l'année antérieure, ou bien en impôts directs de quelque nature que ce soit, pendant chacune des deux années antérieures. Les redevances sur les mines sont assimilées à l'impôt foncier. Le possesseur à titre successif est seul excepté de ces conditions.

En cas de mutation d'immeubles, les contributions dues à partir du jour où la mutation a acquis date certaine, sont comptées à l'acquéreur pour la formation du cens électoral. »

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252. Imposé pour l'année antérieure. Les électeurs doivent produire : « La preuve qu'ils étaient imposés ou patentés à pareille somme, pour l'année précédente, à défaut de quoi les contributions ou patentes ne compteraient point, d'après l'article m du décret. Instruction du départ. de l'intérieur, du 21 mars 1851. — On m'a fait observer que la circulaire de mon prédécesseur prescrit aux électeurs de justifier, indépendamment du cens électoral de l'année courante, d'avoir payé une parcille somme, pour l'année antérieure, tandis que, d'après l'art. I du décret, la justification de la quotité du cens électoral ne paraît devoir être exigée que pour l'année courante, et qu'il suffit, quant à l'année précédente, de prouver qu'on a été imposé, n'importe à quelle somme. Cette observation, reposant sur les termes mêmes de la loi, me semble être d'un grand poids, et je vous pric, M. le gouverneur, de vouloir bien la communiquer aux autorités locales, pour qu'elles y aient tel égard qu'elles le jugeront convenable. » -Instruction du départ. de l'intérieur, du 27 avril 1851. De ces deux interprétations, la première semble plus conforme à l'esprit de la loi. Cependant on pourrait dire que l'art. IV confirine la seconde en ce qu'il ne règle la justification du cens électoral que pour l'année courante.

La loi communale a levé la difficulté que pouvait faire naître une rédaction obscure: elle exige que le cens électoral ait été payé pour l'année antérieure, et en matière d'élections générales, la cour de cassation l'a également décidé par arrêts des 12 juillet et 16 août 1842; et la rédaction nouvelle de

la loi a fait disparaître tous les doutes qu' auraient pu encore exister.

On lit dans le rapport de la section centrale:

En présence du texte de la loi du 5 mars 1831, et surtout depuis les discussions qui ont eu lieu en 1856 (2), à l'occasion du vote de la loi communale, l'on a pu croire quc, pour être électeur, il suffisait de payer le cens, sans posséder les bases légales de l'impôt. Pour être juste, il faut donc se garder de confondre dans une réprobation commune et de frapper d'un blâme souvent immérité, un grand nombre de faits qui n'ont de contribuables ont pu poser par des mopas tous le même caractère et que beaucoup fraude et en s'opposant aux conséquences tifs différents; il faut, en prévenant la

d'erreurs commises de bonne foi, s'abstenir de considérer indistinctement comme frauduleuses toutes les déclarations indues faites avant les récentes discussions qui ont eu lieu à la chambre.

» Dans ces discussions, l'on a été unanime pour reconnaître que si la qualité d'électeur pouvait être acquise par le seul fait du payement du cens, nos institutions constitutionnelles seraient faussées, et que l'on pourrait voir se former, à l'abri de la légalité même, des majorités qui ne seraient point la représentation sincère du pays; mais, il faut bien le dire, les moyens pratiques de conjurer ce danger n'ont été indiqués ni d'une manière complète, ni d'une voix unanime.

>> Trois systèmes se sont produits depuis lors :

(1) Abrogé par la loi du 1er avril 1843 et remplacé par le texte qui suit. (2) Voir Moniteur du 17 février 1836.

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