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qu'aucune loi spéciale n'a attribué aux juges de paix la connaissance des contestations relatives à la taxe dont il s'agit dans l'espèce ; →→→ Attendu, en conséquence, que le jugement attaqué, en rejetant l'exception d'incompétence proposée par le demandeur en cassation, à faussement appliqué l'art. 1er de la loi du 2 vendémiaire an 8; qu'il a, par suite, violé ledit article, méconnu les règles de sa compétence et commis un excès de pouvoirs; Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres griefs de cassation; - CASSE.

Du 24 juin 1840. - Ch. Civ.

COUR ROYALE DE MONTPELLIER.

Saisie immobilière.

Moyens de nullité.- Adjudication préparatoire. Le créancier poursuivant à qui la partie saisie a fait signifier par requête ses moyens de nullité contre la procédure antérieure à l'adju dication préparatoire, doit, avant de procéder à cette adjudication, faire statuer par le tribunal sur les moyens de nullité proposés par le saisi, sinon l'adjudication préparatoire est nulle. (Art. 733 C. P. C.) (1).

(Caisse hypothécaire C. dame Lawless, veuve de Bausset.)

ARRÊT.

LA COUR; - Attendu qu'il existe dans la procédure de saisie immobilière deux phases principales, que le législateur a soigneusement distinguées, et qui embrassent, l'une, tous les actes de la poursuite antérieure à l'adjudication préparatoire; l'autre, tous les actes compris entre cette adjudication et l'adjudication définitive; Attendu que le législateur a voulu assurer irrévocablement la validité de la première partie de la procédure ainsi divisée avant qu'il pût être procédé aux actes compris dans la seconde; comme aussi des précautions ont été prises par lui, pour qué cette seconde partie de la procédure elle-même se trouvât irrévocablement validée, et mise à l'abri de toute attaque, avant que l'adjudication définitive à laquelle tendent tous les actes de la poursuite fût prononcée; — Qu'à cet effet, d'une part, l'art. 733 C. P. C. a exigé que les moyens de nullité contre la procédure antérieure à l'adjudication préparatoire fussent proposés et jugés avant ladite adjudication; et, d'autre part, l'art. 735 dudit code et l'art. 2 du décret du 2 février1811 ont assujetti la partie saisie à l'obligation de proposer les moyens de nullité contre la procédure postérieure à l'adjudication provisoire, quarante jours avant celui indiqué pour l'adjudication définitive; - Attendu que la sagesse du législateur a ainsi rendu impossible l'annulation rétroactive d'une procédure longue et dispendieuse, qui aurait

(1) On peut consulter, sur cette question, MERLIN, Répert., Vo Saisie immobilière, § 5, art. 2; CARRE, 1. 2, p. 775, no 8 (2o édit.), et le DicTIONN, GÉNÉR. PROCED., Vo Saisie immobilière, no 526.

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pu sans cela être renversée après que tout aurait été consommé; Qu'il
importe de maintenir et d'appliquer, conformément à cet esprit général de
la loi, les dispositions précitées;—Attendu qu'en exigeant impérieusement
que les moyens de nullité proposés contre la procédure antérieure à l'aðju-
dication préparatoire fussent jugés avant ladite adjudication, et en dispo-
sant que ladite adjudication serait prononcée par le même jugement qui
rejetterait les moyens, l'art. 733 C. C. a frappé de nullité le jugement
qui prononcerait l'adjudication, sans statuer préalablement sur lesdits
moyens proposés, et non abandonnés; Attendu qu'il résulterait du sys-
tème contraire que les dispositions impératives de la loi pourraient être élu-
dées, et que les moyens de nullité pourraient être encore jugés et accueillis
après l'adjudication préparatoire prononcée, de manière à faire annuler cette
adjudication; par où le texte et l'esprit de la loi se trouveraient également
violés ;
Qu'il en résulterait encore que le juge de qui serait émané le ju-
gement d'adjudication définitive pourrait accueillir postérieurement les
moyens de nullité qui feraient tomber ledit jugement, et se réformer ainsi
lui-même ; Attendu, en fait, que la dame Lawless fit signifier, le 4 no-
vembre 1835, veille du jour fixé alors pour l'adjudication préparatoire de
l'étang de Marseillette, une requête contenant ses moyens de nullité contre
la procédure antérieure; ·Attendu que la requête étant le mode régulier
et légal de former les incidents, en matière de saisie immobilière, les moyens
ainsi signifiés se sont trouvés dès lors valablement proposés;
Attendu que

si la dame Lawless demanda, par sa susdite requête, le sursis aux poursuites jusqu'après le jugement d'un appel alors pendant devant la Cour; et si, par un acte de conclusions du lendemain 5 novembre, elle motiva, de plus, ce sursis sur la nécessité d'opérer une división préalable en divers lots par elle demandée, elle ne forma ces demandes, et ne prit ces conclusions en sursis, que sous la réserve très-expresse de ses moyens de nullité contre la procé dure dont il est dès-lors impossible de prétendre qu'elle ait voula faire l'abandon ;-Attendu d'ailleurs que, dans les conclusions par elle prises à l'au dience ledit jour 5 novembre 1855, elle déclara, de plus fort, se faire la réserve très-expresse de ses moyens de nullité contre la procédure, et que, par son jugement rendu sur les conclusions ainsi prises, le tribunal, après avoir prononcé un sursis, non-seulement déclara lui réserver sesdits moyens et toutes exceptions au fond, mais renvoya pour y être fait droit au jour qui serait ultérieurement fixé par l'adjudication préparatoire; ce qui écarte, de plus fort, toute idée d'abandon des moyens proposés ; — Attendu qu'en cet état les intimés poursuivants devaient faire juger lesdits moyens avant de provoquer l'adjudication préparatoire; Que, cependant, l'adjudication préparatoire a été requise par eux, et prononcée par le tribunal, sans qu'il ait même été question desdits moyens proposés et réservés; de tout quoi il suit qu'il y a lieu d'annuler le jugement ainsi rendu;

Par ces motifs, disant droit à l'appel, anuule le jugement d'adjudication préparatoire dont il s'agit.

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AVOCAT A LA COUR DE CASSATION (1).

Au quinzième siècle, on n'avait pas encore cru devoir attacher au Conseil un corps d'avocats spécialement chargés de représenter les parties devant cette juridiction suprême.

Les avocats du Parlement de Paris d'abord, et plus tard ceux des autres Cours du royaume, se mirent tous en possession du droit d'instruire et de plaider les affaires portées au Conseil; mais on s'aperçut bientôt des inconvénients qu'entraînait cette multitude d'avocats qui travaillaient pour la même juridiction.

On commença par exiger que les avocats, de quelque Parlement qu'ils fussent, obtinssent une matricule de M. le chancelier, et prêtassent serment entre ses mains, s'ils voulaient exercer leur ministère au Conseil; mais il paraît que le nombre des matriculaires n'avait pas été limité, et bientôt l'on retomba dans un inconvénient semblable à celui que l'on avait voulu éviter.

Un règlement de 1585, en laissant à tous les avocats la faculté de plaider au Conseil, réduisit à dix le nombre de ceux qui auraient le droit d'instruire les affaires, et les assujettit à suivre toujours ce Conseil.

Enfin, le 2 septembre 1643, un édit créa 160 avocats au Conseil du roi, pour occuper et plaider à l'exclusion de tous procureurs, sans néanmoins que les avocats du Parlement de Paris soient exclus de plaider les causes des parties. Ce nombre fut porté à 200 par un édit de 1644, et à 230 par édit d'août et de novembre 1646; il fut réduit à 200 par l'édit de septembre 1650, et à 160 par un autre édit de 1672, et enfin porté à 170 par un édit de 1673.

L'édit de septembre 1738 supprima ces 170 charges et en créa 70 nouvelles, auxquelles 3 autres furent bientôt ajoutées, et ce nombre fut considéré comme nécessaire et suffisant pour que cette profession honorable pût être exercée par des personnes de mérite et de probité. (Tolozan.)

La compétence des juridictions diverses commençant à se régler d'une manière plus stable, les attributions du Conseil devenaient moins considérables; aussi le nombre de ces offices put être diminué sans inconvénient. Des lettres patentes du 20 juin 1775 et un arrêt du Conseil du 20 septembre 1783 avaient préparé cette réforme.`

(1) Ce chapitre est extrait de l'ouvrage sur la Cour de cassation que M. Tarbé, avocat général, va bientôt publier et qui était attendu avec une bien légitime impatience. Ce livre paraîtra dans le courant de novembre chez Joubert, rue des Grés, no 14,

LIX.

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La loi du 14-27 avril 1791 supprima le titre d'avocat, mais conserva les anciens titulaires comme avoués, à la condition qui leur fut imposée par une nouvelle loi du 20 septembre 1791, 15 avril 1792, de n'exercer leurs fonctions qu'auprès du Tribunal de cassation.

Provisoirement, les procureurs au grand Conseil et les avoués près les tribunaux de district avaient été admis à exercer aussi près du Tribunal de cassation; mais avant que cette institution ait pu être réglée d'une manière définitive, la loi du 3 brumaire an 2 vint supprimer les avoués, et décider que, même au Tribunal de cassation, il n'y aurait plus de requêtes, qu'il y serait suppléé par de simples mémoires, et que les parties pourraient se faire représenter par de simples fondés de pouvoir, auxquels on supposait la capacité suffisante, pourvu qu'ils justifiassent d'un certificat de civisme. Mais le Tribunal de cassation regretta bientôt la suppression des officiers chargés spécialement de lui faire connaître les moyens de droit qui pouvaient être présentés contre les jugements, et, le 15 messidor an 5, il prit une délibération pour demander expressément le rétablissement d'avocats ou d'avoués auprès de sa juridiction (1).

Ce vœu ne fut accompli que par la loi du 27 ventôse an 8,

(1) Les avocats sont les intermédiaires entre le juge et le plaideur. Devant la Cour de cassation, où le droit seul est en question, c'est une déplorable chose que l'usage où sont les parties de faire des visites et des sollicitations extrajudiciaires. Le 9 mai 1791, le Tribunal assemblé s'en était expliqué, et sa délibération constate que ses membres avaient pris l'engagement de ne pas recevoir les plaideurs et de ne rien écouter en dehors de l'instruction écrite ou contradictoire. Il fut arrêté qu'aucun juge ne pourrait admettre chez lui personne pour lui parler d'affaires pendantes au Tribunal, et qu'on rejetterait toute communication particulière.

Ainsi l'ordonnance du 28 octobre 1446 défendait aux magistrats de prendre ou recevoir des enformements (informations) à part.

La délibération du 9 mai tomba bientôt en désuétude. L'abus scandaleux que la discussion de 1790 signalait dès lors avec une grande énergie, s'est renouvelé avec plus de force que jamais.

Les sollicitations à domicile, les recommandations, les influences de toutes sortes sont chaque jour présentées, invoquées, essayées,

Cependant celui qui sollicite son juge ne lui fait pas honneur; car, ou il se défie de ses lumières et de sa probité, ou il cherche à le prévenir, ou il lui demande une injustice.» (La Bruyère.) Aussi, dans quelques pays étrangers, est-il défendu aux juges de recevoir les plaideurs (audiendi extrajudicialiter). Vous venez demander mon attention; avez-vous donc si mauvaise opinion de la manière dont je remplis mes devoirs ? Vous sollicitez ma justice? Est-ce à dire que vous en doutez? Mon humanité ? quid hoc ad edictum prætoris? Les cheveux blancs d'un vieillard, les larmes d'une jolie femme, les souvenirs d'un ami, les prières du pauvre, la fortune du riche, les sympa. thies politiques, les caresses du pouvoir, tout cela ne peut changer la loi; mon devoir est de dire; lex dixit.

Si j'écoute les personnes et leur passion, et ceux qui me les recomm andent; și je lis les lettres que l'importunité arrache à leurs amis, à le urs

dont les art. 93 et 94 ordonnèrent qu'un nombre fixe d'avoués, réglé par le gouvernement sur l'avis du Tribunal de cassation, aurait exclusivement le droit de postuler devant ce Tribunal. Ces avoués devaient être nommés par le premier consul, sur la présentation du Tribunal. Ils prêtèrent serment devant la Cour à l'audience de la chambre civile, le 1er octobre 1791 : il avait été décidé que ce serait aux chambres réunies.

Les différents décrets ou arrêtés qui furent rendus postérieurement à cette loi sur l'établissement et la discipline des avoués, sont applicables à ceux qui avaient été nommés pour exercer auprès du Tribunal de cassation. C'est ainsi que l'arrêté du 13 frimaire an 9 organise leur chambre de discipline, que l'arrêté du 2 nivôse an 11 détermine leur costume, qui consistait alors, comme aujourd'hui (1), dans une toge de laine noire fermée par devant, à manches larges, une toque noire, une cravate tombante de batiste blanche, plissée. Cette cravate se compose de deux parties: la cravate proprement dite, qui se noue autour du cou, et le rabat, composé d'une ou deux bandes de batiste plissée, et qui doit paraître ne faire qu'un avec la cravate (2).

Le décret du 25 juin 1806 a rendu à ces officiers le titre d'avocats à la Cour de cassation, sans rien changer à ce qui avait été précédemment réglé pour leur discipline et pour l'exercice de leurs fonctions.

Cependant, à cette époque, les fonctions d'avocats au Conseil d'Etat et celles d'avocats à la Cour de cassation étaient distinctes, ! et cette division n'offrait point à ces officiers la possibilité de tenir un état convenable...

D'un autre côté, les fonctions que ces deux classes exerçaient avaient été primitivement réunies à l'ancien Conseil du roi.. Pour préparer les voies d'une réunion semblable, l'ordonnance du 10 juillet 1824 nomma 60 avocats au Conseil et les choisit presque tous dans les avocats à la Cour de cassation. Cette ordonnance les soumit aux règles de discipline établies par le règlement de 1738, et par les arrêts du Conseil intervenus en conformité dudit règlement.

protecteurs; si je fais quelque état des circonstances étrangères à l'instruction du procès, et qui ne m'ont pas été révélées contradictoirement, j'entre dans les voies funestes d'une prévarication prochaine; je n'exposé à souhaiter de faire plier la règle, à désirer de trouver les lois favorables à tel ou tel intérêt, à les interpréter suivant ce désir, et, par suite, à introduire in loco judicii impietatem, et in loco justitia iniquitatem. Eccles., 11, 16. (1) Sur leur ancien costume, V. Bouchel, édit. 1626, p. 94.

(2) Cependant beaucoup d'avocats portent la cravate noire et le rabat blanc, ce qui est tout à fait contraire au décret et produit un singulier con- f traste. Je sais bien qu'il a été dit: « La cravate noire est une conquête de la révolution de juillet. Mais je n'ai pas compris ce que la révolution de juillet avait à voir dans une question de costume, et pourquoi il lui convenait qu'on portât une cravate tombanté, moitié noire et moitié blanche.

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