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sortie (35 ou 40 m). Au milieu, une expansion assez grande sert de chapelle depuis le haut moyen âge.

Fouilles.

Presque tous nos archéologues locaux ont visité cet exceptionnel habitat préhistorique, et les Frères de la Doctrine chrétienne d'Uzès en ont extrait leurs plus remarquables échantillons de céramique. Cependant, jusqu'à aujourd'hui, aucune fouille complète n'avait été autorisée. Nous devons donc nos plus vifs remerciements aux propriétaires actuels pour la confiance qu'ils ont bien voulu nous témoigner.

Notre première campagne a été extrêmement fructueuse. Nous avons pu déblayer environ la moitié de la couche néolithique et faire quelques sondages dans le Quaternaire, qui nous font bien augurer de l'avenir. Le talus a été entamé à sa base, près de l'ouverture d'amont où nous avons creusé d'abord dans le Néolithique une tranchée de 2 m de large allant jusqu'au plancher quaternaire, très dur en cet endroit, et s'étendant sur toute la largeur de la galerie (5 m à 6 m). A partir de ce point, et en remontant vers l'intérieur, nous avons enlevé la terre, en la passant au crible, par tranches de 1 m. A chaque tranche, correspond une coupe à grande échelle sur laquelle nous avons indiqué jour par jour le niveau de chaque trouvaille importante.

L'épaisseur de la couche néolithique et moderne, d'abord de 0,80 m environ, va en s'atténuant peu à peu. A 40 m de l'entrée, elle se trouve réduite à quelques centimètres. C'est donc une masse d'environ 100 m3 que nous avons déplacée jusqu'à maintenant.

Nous allons donner un aperçu rapide des principales trouvailles, réservant pour plus tard l'exposé de nos conclusions générales.

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Nous avons exécuté trois sondages complets dans la partie située en amont et un seul près de la sortie.

Les premiers nous ont donné pour le quaternaire, une épaisseur variant de 1 m à 2 m. Les sables y sont fortement agglutinés et forment avec les ossements transformés en phosphates un magma d'une extrême dureté. Nous y avons recueilli un coup-de-poing en silex formé d'une partie arrondie ayant conservé sa gangue naturelle, et d'une pointe taillée. à grands éclats. Un autre fragment d'outil semblable a été recueilli dans la même tranchée.

Il est difficile de se prononcer sur le simple examen de deux pièces isolées; cependant notre impression générale est que nous sommes en présence de couches d'époque moustérienne.

Le dernier sondage, exécuté près de la sortie, a donné des résultats tout différents. Ici, la transition entre le Quaternaire et le Néolithique est moins brusque, les silex sont plus abondants, et nous avons pu recueillir quelques formes nettement magdaléniennes.

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Ces couches ont été de tout temps bouleversées et les lignes de foyers sont loin d'offrir la netteté de celles du Quaternaire. Nous avons pu cependant, sur un point favorable, relever trois lignes de foyers assez nettement différenciés : c'est dans celle du milieu que nous avons découvert le poinçon en cuivre signalé ci-dessous.

En somme, la grande phase de l'occupation nous paraît avoir été la fin du Néolithique et le début du métal, phase qui a laissé de si nombreuses traces dans la région et pour laquelle nos premiers chercheurs avaient créé le nom spécial d'époque durfortienne ou cébennienne.

Voici la rapide énumération des principaux objets recueillis :

Pierre. — 1o Plusieurs meules plus ou moins creusées, la plupart du temps en mollasse coquillère marine ou en grès rouge;

2o Un nombre considérable de gros broyeurs (cailloux roulés du Rhône en quartzite ou grès offrant une face usée par le frottement);

3o Un plus grand nombre de petits broyeurs ou molettes en silex, quartz blanc ou roche verdâtre, travaillés sur tout leur pourtour et plus ou moins arrondis;

4o Autres petits cailloux en schiste des Cévennes dont les uns sont allongés et usés par le frottement intentionnel, les autres aplatis et parfois doublement échancrés sur les côtés (pesons de filet?).

Il faut signaler, en outre, de nombreux cailloux calcaires plats, polis par une action mécanique naturelle, en tous points semblables à ceux que l'on trouve aux abords de certains évents ou sources de fond. Le gisement le plus rapproché de la Baume nous paraît être celui du Fouzeron, près de Saint-Gervasy (8 km environ).

5o Nous avons recueilli plus de quarante haches polies, la moitié environ de très petite dimension, les autres de grandeur moyenne. Elles sont généralement en roche verdâtre des Alpes. Un certain nombre étaient empruntées aux schistes durs des Cévennes, mais elles n'ont guère résisté aux premiers chocs. Deux sont en jadéite. Leurs formes variées pourront donner lieu à une étude spéciale. Nous en avons deux plates comme les premières haches en cuivre; d'autres sont à double tranchant; une d'elles est creusée en forme de gouge, etc.

6o Les billes polies paraissent encore plus abondantes que les haches. Les plus belles sont en une roche verdâtre de la Durance (euphotide) mouchetée de petits cristaux de nuance claire (diallage): nous en possédons dix spécimens dont les diamètres varient de 1 cm à 4 cm.

Presque toutes les autres sont en calcaire local, de couleur jaune ou rosée. Les plus petites ont o cm,5 de diamètre et les plus grosses 3 cm. Elles nous permettent de saisir toutes les phases de la fabrication, car on trouve tous les intermédiaires entre la véritable bille sphérique, admirablement polie, et la grossière ébauche encore, à peine usée par le frot

tement.

7o Les silex taillés se comptent par milliers. La matière première est d'origine locale silex lacustre du Crétacé supérieur ou du Tertiaire inférieur, de couleur blonde ou noire, quelquefois blanche.

a. Lames ordinaires droites, à arête médiane et surface plane en dessous, plus ou moins retouchées sur les bords, parfois pédonculées; b. Lames incurvées à extrémité pointue, rarement retouchées,. rappelant un peu les formes magdaléniennes. Un grand nombre sont de petite dimension (3 cm à 4.cm), et nous les avons principalement recueillies dans les couches les plus profondes;

c. Lames à un seul tranchant, généralement assez larges, avec gangue sur le dos;

d. Pointes en feuille de laurier, de dimensions moyennes, retouchées sur les bords, mais non taillées sur le milieu des faces;

e. Petites pointes de flèche, souvent pédonculées, mais d'un travail assez médiocre; quelques-unes sont à l'état de simples ébauches;

f. 6 pointes de flèches à tranchant transverse, dont 4 très petites finement retouchées sur les côtés;

g. Une trentaine de grattoirs généralement demi-circulaires;

h. Autres pièces en nombre infini plus ou moins retouchées intentionnellement.

80 Nous devons, enfin, signaler deux ou trois fragments de petits godets accompagnés de limonite ou minerai de fer oxydé, et un grand nombre de petits éclats de quartz blanc translucide utilisés comme grattoirs ou perçoirs.

Céramique. Celle-ci constitue une des particularités de la Baume; elle méritera une étude très détaillée.

En première ligne, nous devons placer la découverte d'un grand vase retiré intact d'une fosse creusée dans le Quaternaire. Sa pâte est rougeâtre et sa couverte lustrée d'un brun jaunâtre. Le fond est en forme de calotte hémisphérique et le côté orné de légères cannelures. Sa hauteur totale est de 33 cm, et sa largeur de 32 cm. L'épaisseur ne dépasse pas o cm,5. Malgré l'absence du tour, sa régularité est parfaite, et son exécution remarquable en fait une œuvre d'art.

Nous possédons les débris d'autres vases encore plus finement décorés. L'ornementation est, en effet, extrêmement variée: pastillages et cannelures légères; côtes saillantes formant lignes parallèles ou grand damier; impressions avec le doigt ou avec un instrument approprié; dessins géométriques gravés au trait, parfois avec une finesse extrême, et parfois très profondément incisés; impressions au cachet ou à la roulette; décor au champlevé; incrustation de couleur blanche et rouge au fond des traits gravés, ..., rien ne manque à notre belle série. Mais il faut surtout noter l'abondance extrême des anses horizontales uniou multiforées, sans oublier les « flûtes de Pan ».

Os travaillés.

- Toutes les formes connues d'outils en os ont été à peu près découvertes: lissoirs, poinçons, perçoirs, aiguilles, etc. Plusieurs

sont d'une très belle facture. A noter la présence de poinçons spéciaux munis à la base de deux fortes encoches et que nous supposons avoir dû servir de passe-fil.

D'autres outils en corne ou bois de cerf, très durs, à tranchant aiguisé ou à pointe effilée, ont dù jouer le rôle de ciseaux ou de petits pics. Un grand nombre de pièces ont été trouvées à l'état de simples ébauches et permettent de suivre les diverses phases de la fabrication.

Objets de parure. Ce sont presque uniquement des perles de colliers. ou des pendeloques.

Comme matière première, signalons la présence de petites coquilles roulées apportées de la mer, de défenses de sangliers intentionnellement fragmentées et de petits cristaux d'aragonite non encore perforés. Un petit bâtonnet d'ivoire se trouve dans les mêmes conditions de travail. Parmi les objets finis, il convient de noter :

Plusieurs perles en os, en test de coquillages et en pierre ollaire; des coquilles perforées près du crochet; de nombreuses dents canines également perforées à la racine, et notamment une dent d'ours; plusieurs humérus de lapins perforés, ainsi qu'un certain nombre de petites plaquettes en os ou en schiste; une pendeloque en aragonite; une perle en callaïs, etc.

Un très curieux anneau ou bague en os poli a été également trouvé dans les mêmes couches.

Métal. - Les objets de métal sont d'une rareté extrême. Nous n'avons guère pu retirer qu'une alène ou poinçon, très probablement en cuivre. et un autre fragment indéterminé (peut-être une fibule?). Le premier objet était en place près d'un foyer, au milieu de la tranchée; le second a été extrait de terres remaniées.

Époques postnéolithiques.

Les débris postérieurs à l'Énéolithique sont beaucoup plus rares. On trouve cependant quelques céramiques du bronze et de l'âge du fer. Notons d'une façon toute spéciale, la présence de plusieurs fragments de vases peints de style méditerranéen. Trois ou quatre d'entre eux sont ornés de peintures noires ou violettes sur fond blanc et rappellent les types de la fin du viIe siècle et du commencement du vie siècle avant J.-C. D'une époque peut-être postérieure datent les fragments d'un grand vase en terre grisâtre assez fine, orné d'empreintes à la roulette ou au cachet, et dont les deux anses verticales (pareillement ornées sur le dos) forment un triple pont mesurant 15 cm de long sur 4 cm de large. Nous n'avons jusqu'ici rien de semblable dans notre région et ne trouvons à leur comparer que les anses des vases découverts en Prusse par M. Brinkmann et récemment décrits par M. A. Guébhard (1).

(1) M. Adrien GUÉBHARD, Sur les anses verticales multiforées horizontalement (Bull. Soc. préhist. de France, t. VIII, p. 502, fig. 2, 3 et 4).

Il faut en outre, pour être complet, signaler quelques débris d'amphores en terre jaune micacée d'époque celtique, deux ou trois fragments de tuiles romaines et un bec de pégau du moyen-âge.

MM. A. DEBRUGE ET GUSTAVE MERCIER,

Constantine.

L'ESCARGOTIÈRE DE MECHTA-EL-ARBI PRÈS CHATEAUDUN-DU-RHUMEL.

571.93 (65)

26 Mars.

Au cours de l'année 1906, M. Gustave Mercier, désirant édifier une ferme dans sa propriété de Metcha-el-Arbi, près de Châteaudun-du-Rhumel, choisit comme emplacement une légère éminence qui dominait de 2 m à 3 m la grande plaine environnante.

Les fondations qu'il croyait asseoir sur le tuf rencontrèrent un terrain composé de cendres, d'hélix, d'ossements ou déchets de cuisine, sur une profondeur de plusieurs mètres à telles enseignes que l'on dut reporter plus loin les fondations de la ferme.

M. Mercier recueillit dans les rejets et dans quelques fouilles sommaires par lui pratiquées, divers ossements humains, dont un occipital à crête très caractéristique, des ossements d'animaux, la plupart fragmentés, divers silex et un os poli, et une grande quantité d'hélix.

Il en fit l'objet d'un compte rendu dans le recueil de la Société archéologique de Constantine (1).

La Société décida en 1912 sur la proposition de M. Debruge, de pratiquer de nouvelles fouilles plus importantes au même endroit. C'est donc un travail en collaboration que nous avons entrepris et que nous avons l'honneur de présenter au Congrès de Tunis.

Considérations générales. Nous renvoyons pour la description de l'escargotière et les détails relatifs à sa situation, ses dimensions, etc., à la relation ci-dessus mentionnée de M. Mercier.

Le pays est une immense plaine formée d'alluvions quaternaires anciennes, trouée çà et là par des montagnes calcaires émergeant comme des îlots. La plaine elle-même est plissée par quelques lignes de coteaux tuffeux élevés de 25 m à 30 m. Au pied d'une de ces lignes et à 300 m environ de l'escargotière, court l'oued. Ouskourt, qui s'est creusé un lit profond de quelques mètres. Ses eaux, alimentées par les sources qui émer

(1) La Station préhistorique de Châteaudun-du-Rhumel ( Recueil des Notices de la Société archéologique de Constantine, 1967, p. 171).

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