Page images
PDF
EPUB

Le chimiste Abel a préparé du coton-poudre comprimé; il le réduit d'abord en pâte, puis le soumet à la presse hydraulique pour en faire des cartouches au centre desquelles on place une capsule fulminante: ces cartouches donnent une explosion violente; on s'en est servi, en 1869, pour déraser des roches à l'île de Bréha et à Portrieux; mais il ne paraît point qu'elles puissent faire concurrence à la dynamite, d'autant plus que l'usine où on les préparait en Angleterre a sauté en 1871, en causant la mort d'un grand nombre d'ouvriers.

L'officier prussien Schultze a cherché à fabriquer une poudre économique en substituant le bois au coton; mais, il faut faire subir aux bois des préparations qui détruisent l'économie apparente du procédė.

Nitroglycérine. Dynamite. La nitroglycérine, découverte en 1847 par Sobrero, n'entra dans la pratique industrielle qu'en 1864. C'est au Suédois Nobel qu'on en doit la fabrication en grand; mais elle ne tarda pas à se signaler par de terribles accidents, et on dut en réglementer le transport et l'usage. Néanmoins, elle donnait de si bons résultats pour les déblais de rochers qu'elle ne tarda pas à se propager.

1

Pour la préparer on verse goutte à goutte de la glycérine concentrée dans un mélange de 1 volume d'acide azotique et de 2 volumes d'acide sulfurique; lorsqu'on a mis un poids de glycérine égal au du poids des acides, on laisse la réaction se produire pendant quelques minutes, puis on jette le mélange dans l'eau froide et la nitro-glycérine se précipite sous la forme d'une substance blanche et huileuse.

Cette huile conserve toujours un aspect laiteux à cause de l'eau qu'elle renferme; elle renferme aussi des acides dont on la débarrasse en la lavant avec un carbonate alcalin. Elle est inodore et sa densité est de 1,60; elle bout à 185°, subit une déflagration violente à 217° et une détonation violente à 257°. Quelques gouttes de glycérine, placées sur une enclume ou sur une pierre dure, détonent avec énergie sous le choc d'un marteau; le même phénomène se produit sous l'action des étincelles de la bobine de Ruhmkorff, ou lorsqu'on fait éclater un pétard au milieu d'elle.

Au contact d'un corps enflammé, la nitroglycérine s'enflamme elle-même et brûle avec une flamme bleu verdâtre.

La nitroglycérine, qui renferme plus d'oxygène qu'il ne lui en faut pour brûler ses propres éléments, possède une force explosive considérable; elle n'est pas plus avantageuse qu'une poudre lente pour débiter les roches tendres, mais, s'il s'agit de roches dures, elle est précieuse, enlève en une seule fois des blocs énormes et réduit considérablement le nombre et la dimension des trous de mine par son action instantanée; la nitroglycérine est précieuse aussi pour les roches fissurées sur lesquelles les poudres lentes sont impuissantes.

La nitroglycerine est de cinq à dix fois plus forte que la poudre ordinaire ; mais il est nécessaire de déterminer l'explosion au moyen d'une amorce fulminante placée dans la masse.

La conservation et le transport de la nitroglycérine donnent lieu à de trop graves accidents, pour que l'on consente maintenant à l'employer pure; ce n'est plus que sous forme de dynamite qu'on y a recours.

Lorqu'on mélange la nitroglycérine avec une substance poreuse, qui l'absorbe et la retient même sous une certaine pression, on a ce qu'on appelle une dynamite.

La substance absorbante peut être une marne siliceuse (dynamite Nobel), de

la cendre de charbon, du tripoli, du sable siliceux, etc... Ainsi, la dynamite rouge comprend 67 p. 100 de nitroglycérine et 33 p. 100 de tripoli; la dynamite blanche. de Paulille renferme 75 p. 100 de nitroglycérine et 25 p. 100 de sable siliceux; c'est à peu près là la composition normale.

La puissance d'une dynamite est égale à celle du poids de nitroglycérine qu'elle contient.

Soumise à l'action de la chaleur, la dynamite ne produit pas d'explosion; ainsi, une cartouche placée sur une tôle rouge, s'enflamme et brûle lentement; on peut même la tenir à la main pendant qu'elle brûle; une boite en bois blanc, pleine de dynamite, placée dans un feu ardent, brûle sans explosion. Une étoupille Bickford n'enflamme pas toujours la dynamite, mais lorsqu'elle l'enflamme, la dynamite continue à brùler sans explosion. Sous ce rapport, la dynamite est donc moins dangereuse que la poudre ordinaire. La dynamite gelée s'enflamme encore moins facilement, mais elle conserve ses propriétés explosives. Soumise à l'action de la chaleur, dans un vase à parois résistantes, tel qu'une cartouche en métal, la dynamite subit une violente explosion.

L'action de la lumière sur la dynamite est nulle; cependant, la chaleur solaire vive peut amener un commencement de décomposition qui se propage, et la substance est alors susceptible de s'enflammer.

Le choc de fer sur fer détermine toujours l'explosion, celui de fer sur pierre quelquefois et celui de fer sur bois jamais. Il est nécessaire que l'intensité du choc soit assez considérable : le choc direct d'un projectile fait toujours éclater la dynamite.

L'étincelle de la bouteille de Leyde n'a pas d'action sur la dynamite; une série d'étincelles d'induction détermine dans la masse une petite explosion locale qui ne se propage pas.

Dans la dynamite, la nitroglycérine possède une stabilité chimique relativement grande. Elle est insoluble et l'eau ne la décompose pas; mais elle prend peu à peu la place de la nitroglycérine qu'elle expulse et il peut en résulter quelque danger.

Il n'y a donc pas de crainte à concevoir dans le transport de la dynamite, pourvu qu'elle soit placée dans des caisses de bois léger, et qu'on évite un excès d'humidité.

Les cartouches de dynamite se transportent en paquets de 2 à 3 kilogrammes; on les range dans des boites en sapin et on remplit les interstices avec de la sciure de bois; l'enveloppe des cartouches est un papier fort et mieux une toile goudronnée ou du caoutchouc.

L'inflammation de la dynamite exige des soins particuliers, qui sont nettement indiqués par MM. les ingénieurs Debize et Mérijot ; les lignes suivantes sont extraites de leur Chimie technologique :

Mode d'inflammation de la dynamite. On provoque l'explosion de la dynamite à l'aide de capsules fulminantes, contenant généralement 80 p. 100 de fulminate de mercure et 20 p. 100 de chlorate de potasse, ce dernier corps ayant simplement pour but de donner de la consistance au fulminate. Pour les applications industrielles, le poids de fulminate introduit dans une capsule est généralement de 5 à 6 décigrammes; pour les applications militaires, où il importe d'assurer l'explosion autant que possible, on va jusqu'à 1 gramme. M. Abel a même conseillé de porter le poids du fulminate à 2 grammes, afin d'être bien sûr de l'effet des capsules, même dans le cas où elles ne seraient pas en contact immédiat avec la dynamite.

La substance fulminante est introduite dans un tube métallique, en cuivre rouge, en laiton ou même en fer-blanc, qui est fermé par un bout, et qui a une longueur variable de 0,04 à 0,10. Pour l'empêcher d'être détériorée par l'humidité et déplacée pendant le transport, on la fixe en la recouvrant d'une goutte de collodion.

De la dynamite au coton-poudre, détonant sous l'influence d'une amorce qui contient 7 décigrammes de fulminate de mercure, produit l'explosion de la dynamite congelée. Quand l'amorce ne contient que 3 décigrammes, elle détone, mais sans produire un choc suffisant pour entrainer la détonation de la dynamite congelée.

Lorsqu'il doit s'écouler un certain temps entre le moment de la mise du feu et celui de la détonation, on se sert du cordon de sûreté, dit cordeau Bickford1, ou d'une composition fusante, brûlant d'une longueur déterminée dans un temps donné. Lorsque l'explosion doit coïncider avec la mise en feu, on a recours à divers cordeaux porte-feu instantanés ou à l'électricité.

Dans le premier cas, on coupe une mèche Bickford à la longueur nécessaire, et, après avoir rafraîchi l'un des bouts, on le plonge dans la capsule jusqu'au fulminate. La mèche est assurée dans cette position en serrant fortement le haut de la capsule avec une pince, de manière à ce que le cordeau ne puisse pas se mouvoir dans le tube; ce cordeau agit alors comme bourrage pour la petite charge fulminante de la capsule et augmente la violence de l'explosion.

Les cordeaux porte-feu instantanés se fixent à la capsule comme la mèche précédente.

Pour amorcer une cartouche à enveloppe de papier, on l'ouvre par une de ses extrémités et l'on introduit doucement, dans la dynamite, la capsule fulminante, munie de la mèche Bickford, du cordeau instantané ou de l'amorce électrique qui doit produire sa détonation. Cela fait, on rabat le papier de la cartouche autour de la mèche et l'on assure la solidité du système par une forte ligature. Il est indispensable que la capsule ne soit pas complétement noyée dans la dynamite ou, en d'autres termes, que le cordeau ne soit nulle part en contact avec la charge, car, dans ce cas, une défectuosité légère dans le cordeau suffirait pour enflammer la dynamite avant que la capsule ait détoné, et il en résulterait un raté presque certain; en ad nettant même qu'il y ait explosion, on n'en aurait moins perdu l'effet de la portion de la charge qui aurait brûlé. En outre, ce qui peut être un inconvénient grave pour les galeries de mine, on produirait les gaz délétères auxquels donne lieu la combustion de la dynamite, au lieu des gaz inoffensifs qui résultent de sa détonation.

pas

Quelquefois, lorsque les cartouches sont un peu fortes, on loge les capsules dans de petites cartouches spéciales, dites cartouches-amorces, où la dynamite doit être tassée aussi soigneusement que possible, et où la position de la capsule est invariable.

Quand un trou de mine est achevé et nettoyé, il suffit, pour le charger, d'y introduire, cartouche par cartouche, la quantité de dynamite que l'on veut y loger.

Les cartouches doivent être d'un diamètre peu inférieur à celui du trou; quand

1 Un cordeau Bickford se compose d'une âme remplie de pulvérin fixé autour d'un fil et recouverte de chanvre, qu'on entoure avec une corde en hélice; ces mèches sont plongées dans du goudron de gaz ou du coaltar; dans certains cas, le chanvre est recouvert d'une couche de gutta-percha.

la première est arrivée au fond, on la presse, sans frapper, avec un fouloir en bois, de manière que l'enveloppe de papier s'ouvre et que la dynamite, qui est plastique, vienne se serrer contre les parois du trou sans laisser aucun vide. On continue ainsi jusqu'à ce qu'on soit arrivé à une hauteur convenable, laquelle se trouve ordinairement comprise entre un cinquième et un tiers de la profondeur. La charge terminée, on pose simplement au-dessus la cartouche-amorce, munie de sa capsule, que l'on a soin, bien entendu, de ne pas écraser, et l'on termine par un bourrage en sable ou en argile, qui est généralement très-favorable à l'action de la charge, surtout lorsqu'il est serré avec un bourroir en bois ; mais cette dernière opération exige beaucoup de prudence, pour éviter les accidents que pourraient entrainer l'écrasement et la détonation prématurée de la capsule. Lorsque, à la suite d'un raté, on doit débourrer un trou de mine, pour placer une nouvelle cartouche-amorce, il faut également opérer avec beaucoup de précaution, car le choc de la barre à mine sur la capsule, si celle-ci n'a pas détoné, produirait infailliblement l'explosion. On doit donc cesser de débourrer, quand on est arrivé à une dizaine de centimètres de la charge, en plaçant une nouvelle cartouche-amorce plus forte que la précédente, et en lui donnant le feu, on a chance de produire l'explosion de toute la charge.

Maintenue quelque temps à une température inférieure à 8°, la dynamite, comme nous l'avons vue, gèle et durcit. Dans cet état, les capsules du commerce ne provoquent que rarement son explosion; de plus, cette dynamite n'étant plus plastique, on ne peut plus la serrer contre les trous de mine. Dans la pratique civile, s'il ne s'agit que de petites charges, ce qu'il y a de plus simple à faire, c'est de porter les cartouches dans la poche, de manière à les maintenir à l'état mou ou à les dégeler. Pour les fortes charges, on peut les réchauffer au bainmarie. On peut encore faire détoner les cartouches congelées en employant des cartouches-amorces de dynamite au coton-poudre, proposées par le lieutenant autrichien Trauzl.

Pour charger des trous de mine remplis d'eau, on procède de la même manière; seulement, dans ce cas, il devient d'autant plus nécessaire de bourrer les cartouches qu'une couche d'eau interposée pourrait gêner la propagation de l'explosion. Pour mettre le fulminate à l'abri de l'humidité, on enduit de cire, de poix ou de suif le bord supérieur de la capsule, après l'introduction de la mèche, qui doit alors être imperméable, c'est-à-dire, par exemple, recouverte de guttapercha.

Quand la charge doit séjourner dans l'eau plus d'une demi-heure, il est bon d'enfermer les cartouches dans des enveloppes en parchemin ou en métal et de bien protéger la cartouche-amorce.

Quand la charge doit rester sous l'eau pendant un temps très-long, il est nécessaire de la loger dans un vase étanche et clos ou dans un sac en caoutchouc. De même, lorsqu'une charge doit séjourner longtemps dans la terre, il est utile de la préserver contre l'action prolongée de l'humidité, en opérant comme si l'opération devait se faire sous l'eau. »

La dynamite blanche est à peu près seule usitée en France; le n° 1, qui contient environ 75 p. 100 de nitroglycérine, est vendu par la régie au prix de 9 fr. 50; les nos 2 et 3 se vendent 6 fr. 50 et 4 fr. 50. Le prix de la poudre de mine est de 2 fr. 25.

Signalons pour mémoire diverses dynamites à base active, tandis que la précé lente est à base inerte; la base active est une matière combustible. Avec du coke pulvérisé, on a la dynamite noire; le lithofracteur de Dentz, près Co

logne, paraît un mélange de poudre de mine et de nitroglycerine; on l'emploie au chargement des projectiles creux. La dynamite grise de Paulille renferme 25 parties de nitroglycérine et 75 parties d'une poudre commune. La dynamite fabriquée avec du coton-poudre en pâte est précieuse, parce qu'elle est inaltérable à l'eau et à l'humidité.

[ocr errors]

On a cherché à opposer à la dynamite la poudre au picrate de potasse; ce sel est aussi stable et aussi peu dangereux que la poudre ordinaire; mais, comme économie et puissance, il est inférieur à la dynamite.

Conclusion. La dynamite est une substance précieuse pour l'extraction des roches dures; elle est d'une fabrication et d'un transport faciles, ne présente guère plus de dangers que la poudre ordinaire et possède une puissance bien plus considérable. L'emploi doit en être généralisé.

PERFORATEURS MÉCANIQUES.

Bien que l'usage de la poudre ait fait faire un pas immense à l'exploitation des mines, on ne peut méconnaître que le travail du mineur est encore beaucoup trop pénible eu égard à celui qu'on demande aux ouvriers des autres industries. Partout, on tend à substituer le travail mécanique au travail manuel, et à se servir de l'ouvrier pour guider des machines et non pour créer de la force vive; il faut absolument que l'industrie minière se lance dans cette voie, car la consommation augmente sans cesse et la production reste stationnaire. Plusieurs essais heureux ont été faits dans ce sens, et l'on a mis en œuvre depuis quelques années les perforateurs mécaniques, qui creusent les trous de mine et que met en mouvement soit l'homme agissant sur une manivelle, soit un moteur inanimé.

Les perforateurs mécaniques sont susceptibles de rendre de grands services dans la construction des tunnels, ils fournissent un travail rapide et économique; sans eux, le percement du mont Cenis eût été presque impossible et on en a tiré, pour l'exécution de cette œuvre gigantesque, un merveilleux parti.

Tarière pour roches tendres. Avec les roches tendres, telles que le plâtre et un grand nombre de calcaires, on peut recourir aux tarières pour creuser les trous de mine et substituer à la percussion, qui absorbe toujours une certaine quantité de force vive, un effort continu exercé à la circonférence d'une manivelle. Le système des tarières a même été appliqué par M. Lisbet à la perforation des roches dures.

La figure 12, de la planche I, représente un appareil presque identique à celui de M. Lisbet. On en comprend la manoeuvre à première vue la tarière (a) est prolongée par une vis, qui traverse un écrou fixe o, et se termine par une manivelle bm. L'écrou fixe est compris entre deux montants ce, df, terminés chacun par une pointe qui s'appuie sur le rocher; à la partie supérieure, une vis à manette v permet d'exercer sur le plafond une press on suffisante pour rendre l'appareil bien immobile. Une série de crans ménagés sur la hauteur des supports, permet de placer l'appareil à differentes hauteurs, et un secteur à trous permet de faire prendre à la tarière diverses inclinaisons autour du point o.

Dans l'appareil Lisbet, la tarière est formée d'un ruban d'acier contourné en hélice; la première spire, d'un plus grand diamètre que les suivantes, attaque

« PreviousContinue »