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Il est imité du chemin du Mount-Washington (État de New-Hampshire), qui monte de 1,100 mètres sur une longueur de 4,000 mètres.

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Système Fell. — On saisira nettement le mérite du système Fell lorsque l'on aura lu les lignes suivantes, extraites du rapport de M. Conche sur les locomotives à l'Exposition de 1867:

La locomotive, ce moteur si simple, si docile, cesse cependant de faire un bon service:

« 1° Quand la vitesse s'abaisse au-dessous d'une certaine limite; 2° Quand l'inclinaison des rampes dépasse un certain point.

Premier cas. L'effort de traction proportionnel à la surface des pistons, à leur course, et inversement proportionnel au diamètre des roues motrices, varie évidemment aussi, à égalité de vaporisation ou de production de travail, en raison inverse de la vitesse de translation. Cet effort est transmis par l'intermédiaire de l'adhérence, et il est clair que la vitesse diminuant, l'adhérence finit par devenir inférieure à l'effort de traction qui croît corrélativement. La machine est alors hors d'état d'utiliser toute sa puissance mécanique.

En palier ou sur de faibles rampes, il n'y aurait pas, dans certaines limites, beaucoup d'inconvénients à augmenter le poids de la machine, pour rétablir l'équilibre, mais il en serait tout autrement sur les fortes inclinaisons.

Heureusement, la limite de vitesse au-dessous de laquelle l'adhérence fait défaut est très-peu élevée, même avec des machines aussi légères que possible, eu égard à leur force (et pourvu, bien entendu, que toutes leurs roues soient couplées). Sur la ligne de Pontarlier, par exemple (réseau de Lyon), la vitesse des trains de marchandises a été réglée à 15 kilomètres, et le patinage ne crée pas de difficultés. Cette vitesse réduite permet de profiter, pour augmenter la charge remorquée, de l'accroissement qui en résulte pour l'effort de traction; il est évident que, si l'on se contentait d'une vitesse moitié moindre, par exemple, inadmissible sur les grandes lignes, mais suffisante pour certains chemins industriels, l'adhérence ferait complètement défaut, et cela, aussi bien sur palier que sur de fortes rampes. C'est uniquement une question de vitesse.

« Deuxième cas.—- S'il y a une assertion souvent reproduite, c'est assurément celle-ci : « Le défaut d'adhérence est le seul obstacle à l'emploi de la locomotive sur les rampes trés-inclinées, de sorte que la difficulté disparaitrait en remplaçant l'adhérence due au poids seul par une autre force indépendante de ce poids. » Sans doute il y a une lЯnite d'inclinaison à partir de laquelle les rampes deviennent inaccessibles à la locomotive agissant par simple adhérence, quels que soient son poids et sa puissance: c'est l'angle du frottement. Mais, fût-on affranchi de la condition de l'adhérence sur une telle rampe, on n'y gagnerait rien, attendu que la locomotive, même la plus légère, ne remorquerait qu'un poids presque nul, sa propre remorque absorbant toute sa puissance.

« On a prétendu, il est vrai, que n'ayant plus à se préoccuper de la condition de l'adhérence, on pourrait faire les machines spécifiquement plus légères. Mais c'est le contraire qui est exact, parce que, d'une part, la locomotive agissant par l'adhérence, est aussi légère que possible, et que, d'un autre côté, on ne peut, jusqu'à présent du moins, remplacer ou compléter l'adhérence qu'en appliquant à cette même machine, identique d'ailleurs, des organes nouveaux, c'est-à-dire en augmentant son poids.

«Il importe de bien définir les conditions dans lesquelles on peut être conduit à recourir à un tel artifice.

«En réalité, une machine supposée développer toute sa puissance et marcher à

sa vitesse ne manque pas plus d'adhérence en rampe qu'en palier, car elle n'en perd que la fraction insignifiante, même sur les plus fortes inclinaisons pratiques, due à l'excès de son poids sur la composante de ce poids normale au profil. L'inconvénient des rampes, au point de vue de l'adhérence, ne surgit donc que quand on réduit la vitesse au-dessous de cette limite, citée tout à l'heure, de 15 kilomètres environ, plus ou moins, selon le climat.

« Jusque-là leur seul inconvénient, capital d'ailleurs, est la grandeur croissante du poids de la locomotive, relativement au poids qu'elle traîne. Avec une vitesse très-réduite, l'effort de traction croit corrélativement; le poids remorqué pourrait être augmenté aussi, si l'adhérence, qui est toujours la même, ne faisait alors défaut.

<«< On conçoit donc comment on peut être conduit, pour franchir les fortes rampes avec une vitesse réduite, à suppléer à l'insuffisance de l'adhérence ordinaire. M. Fell y arrive par un artifice dont il revendique, non l'idée première, mais seulement la réalisation. Il est juste de rappeler que cette idée, en admettant qu'elle ait été conçue d'abord en Angleterre, l'a été également en France par M. le baron Séguier. Son but était moins, il est vrai, de servir dans un cas spécial, que de prévenir, en général, les déraillements (assez fréquents autrefois, mais très-rares aujourd'hui), en rattachant la tête du train, c'est-à-dire le moteur à la voie.

«M. Fell a arrêté, après plusieurs essais, le type de machines qui est aujour d'hui, avec quelques modifications, en construction dans les ateliers de M. Gouin. On s'en fera une idée sommaire, mais exacte, en concevant une locomotive à huit roues couplées, dont quatre verticales et porteuses, et quatre horizontales, commandées par les mêmes pistons au moyen de bielles motrices distinctes, et pinçant entre elles un rail central. On a donc, d'une part, l'adhérence ordinaire due au poids entier de l'appareil; et, de l'autre, l'adhérence facultative, en quelque sorte illimitée, due à la pression exercée par des ressorts, et que le mécanicien règle à volonté.

Ce système subit, comme tout autre, l'inconvénient irréparable de l'emploi de la locomotive sur les rampes très-fortes, c'est-à-dire la faiblesse relative des poids qu'elle remorque. Cet inconvénient peut toutefois être atténué; la vitesse de translation pouvant être réduite autant qu'on le veut par suite de la source d'adhérence dont on dispose, le poids remorqué augmente en conséquence. Mais, s'il s'agit d'un passage de montagne et d'un grand trafic, les exigences mêmes du tonnage quotidien peuvent exclure une marche par trop lente. Il convient, d'ailleurs, d'ajouter que le rail central et les roues horizontales offrent des garanties de sécurité très-réelles, tant au point de vue de la circulation dans des courbes très-roides, bordées de précipices, qu'au point de vue des moyens d'arrêt, sur des rampes d'une inclinaison inusitée.

La voie du système Fell (figure 3, planche XIV) avait été établie au mont Cenis pour relier la ligne de Savoie à la ligne italienne, entre Saint-Michel et Suze; elle reposait sur la route nationale du mont Cenis, dont elle empruntait les accotements, en laissant pour la circulation ordinaire une largeur franche de 6 mètres.

Les courbes de raccordement que présentait l'axe de la voie descendaient jusqu'à 38 mètres de rayon; la rampe maxima était de 0,084 et la rampe moyenne de 0,05 à 0,06.

La voie est formée de rails extérieurs destinés à supporter l'action des roues verticales de la machine et d'un rail central destiné à supporter celle des roues horizontales qui le laminent entre elles.

Les rails extérieurs, espacés de 1m,10 d'axe en axe, sont à patin et posés avec des crampons sur des traverses en bois. Le rail central est boulonné à plat sur des coussinets de forme spéciale fixés sur une longrine en bois, laquelle est posée sur les traverses et leur est reliée par de fortes broches.

Par suite de cette disposition, le rail central se trouve à 0,19 au-dessus des rails extérieurs. Les coussinets sont en fer, ils sont posés à l'espacement de 1,80 dans les alignements droits.

La présence du rail central entraîne plusieurs questions secondaires : 1o les changements de voie n'étaient guère possibles qu'en supprimant le rail central, et c'est à ce parti qu'on s'est arrêté ; 2o aux passages à niveau, on a rendu le rail central mobile autour de deux axes transversaux à la voie et, au moyen d'un levier à contre-poids, on peut le coucher dans une rainure ménagée pour le recevoir.

Dans les parties hautes du mont Cenis, la gelée et les amoncellements de neige étaient à craindre, et il a fallu enfermer la voie dans une galerie continue; cette galerie a été construite avec des fermes en charpente supportant une couverture en tôle ondulée et des parois latérales en planches, avec volets mobiles convenablement espacés pour donner de l'air et de la lumière.

La machine, employée en 1866 et représentée par les figures 4 et 5 de la planche XVI, n'a qu'une paire de cylindres moteurs intérieurs placés à l'avant sous la boîte à fumée et commandant à la fois les roues horizontales et les roues verticales. L'axe des cylindres est à la hauteur des roues horizontales qui reçoivent ainsi une impulsion directe au moyen de bielles et manivelles et de bielles d'accouplement; la tige du piston se prolonge de l'autre côté du cylindre et vient, par l'intermédiaire d'une bielle oscillante, imprimer un mouvement alternatif de rotation à un arbre horizontal ou faux essieu, placé tout à fait à l'avant de la machine. Cet arbre, à son tour, porte à ses extrémités et extérieurement au châssis deux manivelles dont l'oscillation sert à transmettre le mouvement aux roues verticales d'arrière; celles-ci sont accouplées avec celles d'avant.

On est frappé de la complication de ce mécanisme; la transmission était en effet très-dure et fatiguait beaucoup les pièces.

Les nouvelles machines Fell sont à quatre cylindres : deux pour les roues verticales et deux pour les roues horizontales.

Ce système ingénieux ne devra évidemment être mis en œuvre que dans les cas exceptionnels, et il est susceptible alors de rendre de précieux services. Voici, pour terminer, quelques renseignements donnés par M. Fell lui-même à l'association britannique :

Depuis l'ouverture de la ligne du Mont-Cenis, en juin 1868, plusieurs autres lignes de montagne à rail central ont été étudiées dans diverses parties du monde. L'une de ces lignes est maintenant construite au Brésil, elle commence à l'extrémité du chemin de fer de Canto Gallo, traverse la montagne à 914,37 au-dessus du niveau de la ligne principale et se termine à la ville de Novo Friburgo après un parcours de 32,186 mètres. Sous certains rapports cette ligne ressemble à celle du mont Cenis; sur une longueur de 16,093 mètres, les pentes sont comprises entre et et l'on rencontre des courbes de 40 à 100 mètres de rayon, on a également adopté l'écartement de 1,10. Sous d'autres rapports, il existe entre les deux lignes de notables différences. La ligne du mont Cenis était concédée temporairement et établie sur le sol de l'ancienne route, au contraire la ligne de Canto Gallo sera établie d'une manière définitive, elle n'aura pas à lutter contre les difficultés du climat des Alpes, et elle profitera de l'expérience

acquise dans la construction des machines par deux années d'exploitation. La ligne du mont Cenis, pendant deux ans et trois mois d'exploitation, a transporté plus de cent mille voyageurs et une grande quantité de marchandises, les trains ont parcouru plus de cent mille kilomètres sans aucun accident. Depuis le mois de septembre 1869, elle a donné passage à la malle des Indes et au service des postes entre la France et l'Italie. Bien que cette ligne soit encore un essai, elle a montré ce que l'on peut attendre de l'emploi d'un rail central pour les chemins de fer à établir dans des montagnes inaccessibles aux locomotives ordinaires.

Au mont Cenis, le prix de la traction par train et par kilomètre a été environ de 3 francs. L'auteur estime que, par suite des perfectionnements apportés à ses machines, ce prix ne dépassera pas 1 fr. 50 sur la ligne du Brésil et sur les autres lignes qu'il espère entreprendre.

« Les nouvelles machines de M. Fell ont quatre rouleaux de pression au lieu de deux, elles peuvent marcher à une vitesse de 32 à 48 kilomètres par heure sur les pentes ordinaires de la ligne et traîner leur chargement dans les passages les plus difficiles de la montagne avec une vitesse de 13 à 16 kilomètres par heure. »

Système Agudio.

Le système Agudio, tel qu'il fonctionne aujourd'hui, est une combinaison du plan incliné à machine fixe avec le câble télodynamique et le rail central.

Lorsqu'il s'agit de remorquer un train pesant sur un plan incliné de forte pente et de grande longueur, il faut un câble de gros diamètre et de poids énorme; c'est donc un poids mort considérable. Mais il y a un autre inconvénient plus grave encore, c'est que ce câble doit être soutenu par des poulies rapprochées et il en résulte des frottements considérables; sa roideur ou résistance à l'enroulement absorbe aussi beaucoup de travail; enfin il est nécessaire de placer le câble en alignement droit, ce qui entraîne une grande sujétion de tracé et par suite de fortes dépenses.

Le système ordinaire des plans inclinés à machine fixe ne saurait donc convenir à un tracé accidenté avec fortes rampes et trafic important.

Le locomoteur de M. Agudio a pour objet de corriger tous les inconvénients de ce système.

C'est, avons-nous dit, une application du câble télodynamique, que nous avons étudié dans notre cours de machines et dont nous rappellerons le principe :

La puissance dynamique ou travail est le produit de la force par la vitesse avec laquelle cette force se déplace; si l'on conserve le produit constant, on pourra à volonté transformer la force en vitesse ou la vitesse en force et l'on obtiendra toujours la même quantité de travail. D'après cela, une poulie de grand diamètre étant actionnée directement par une machine motrice et animée d'une grande vitesse, si on la réunit par un câble métallique à une autre poulie de même diamètre, celle-ci prendra la même vitesse que la première; quelle que soit la quantité de travail à transmettre, si on adopte une vitesse de rotation assez grande, on pourra obtenir une tension du câble aussi faible que possible, et par conséquent ce câble sera léger et de petit diamètre. Ayant reçu le travail sur la seconde poulie, on dispose sur son arbre une série d'engrenages qui réduisent la vitesse dans telle mesure que l'on veut et augmentent en sens inverse les efforts transmis.

Passons maintenant à l'explication du système Agudio, système que représente la figure 4 de la planche XIV :

Au lieu du moteur unique placé au sommet du plan incliné de Liège, on a deux moteurs, l'un A placé au sommet du plan, l'autre B placé en bas; le travail, produit en A, est transmis au câble montant (ab) qui est animé d'une grande vitesse et conserve une tension modérée; le travail produit en B est transmis au câble descendant (cd), dans les mêmes conditions. Les deux câbles se continuent au delà des moteurs et se rejoignent sur des tambours tendeurs avec contre-poids, de sorte qu'ils forment un câble sans fin. Si le brin montant et le brin descendant étaient simplement attachés à un véhicule, leurs efforts, égaux et de sens contraire, s'annuleraient, ou, du moins, comme ils ne sont pas dans le prolongement l'un de l'autre, produiraient un couple horizontal de rotation. Ce couple existe bien dans le moteur Agudio, mais il est sans inconvénient à cause du faible bras de levier.

Il s'agit donc maintenant de trouver un système pour transformer le travail des deux brins du câble; l'appareil de transformation est le locomoteur qui tient lieu de locomotive et lui ressemble par ses fonctions.

Considérons le câble montant (ab), il vient s'engager dans la gorge de la poulie (e) à son point le plus bas, remonte dans cette gorge sur une demi-circonférence, revient en arrière sur la poulie f, égale à la première, la contourne sur une demi-circonférence, puis redescend vers le point (b). Sur les axes des poulies (e) et (f) sont montés des pignons dentés i et k, qui engrènent avec la roue dentée (1) comprise entre eux; la tension du câble est donc transmise à cette roue t, mais elle est amplifiée par les pignons, tandis que la vitesse est réduite au tiers ou au quart de ce qu'elle était.

Le câble descendant, tiré par le moteur B, va de (c) sur la poulie f' revient sur la poulie égale e' et remonte vers le sommet (d) du plan; sur les arbres des poulies (e' et f') sont calės les pignons i et k' qui engrènent avec la roue dentée t'; les arbres ii', kk', tt' sont en deux moitiés séparées, et ces deux moitiés tournent en sens contraire.

Ainsi, tout le travail moteur est transporté sur les deux demi-arbres t, t'; ceuxci le transmettent au faux essieu (ss') au moyen de bielles et de manivelles dirigées en sens inverse l'une de l'autre. L'arbre oscillant (ss') actionne au moyen de bielles et manivelles extérieures placées dans des plans verticaux les quatre roues porteuses u du locomoteur; il actionne en outre, au moyen de deux bielles inclinées et de bielles d'accouplement les six roues horizontales v entre lesquelles est pincé le rail central.

La voie est identique à la voie Fell représentée par la figure 3 planche XIV. Ainsi, l'adhérence comprend celle qui est due au poids même du locomoteur (environ 12 tonnes), et l'adhérence variable dépendant de la force avec laquelle les roues horizontales sont pressées contre le rail central.

Ainsi on peut, théoriquement, produire avec un locomoteur de faible poids, une adhérence égale et même supérieure à celle des plus grosses locomotives; pour utiliser cette adhérence et traîner des trains pesants, il suffit de transmettre par l'intermédiaire des deux câbles un travail suffisant.

Le brin descendant est moteur comme le brin montant, ce qui permet déjà de réduire de moitié la section du câble qu'aurait exigée la traction directe; en outre, la vitesse est réduite par les engrenages, et on arrive facilement à produire le même travail que dans la traction directe avec une tension du câble dix fois moindre seulement la vitesse de ce câble est dix fois plus grande.

Le câble a une section dix fois moindre, il est donc léger et flexible et passe facilement dans les courbes, où on le dirige au moyen de poulies horizon

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