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TUNNEL DU SAINT-GOTHARD.

La percée du Saint-Gothard, destinée à relier l'Allemagne et l'italie, s'exécute en ce moment par des moyens analogues à ceux qu'on a mis en œuvre au mont Cenis; la somme mise à la disposition du syndicat international pour ce travail s'élève à environ 37 millions.

Les moteurs hydrauliques sont des turbines et le perforateur François et Dubois a remplacé le perforateur Sommeiller; on a transporté au Gothard une grande partie du matériel du mont Cenis. La dynamite, substituée à la poudre ordinaire, produit des effets très-considérables.

Au 31 mai 1873, l'avancement était de 160 mètres à Goschenen (côté nord), et de 200 mètres à Airolo (côté sud).

TUNNELS DE CHICAGO.

M. l'ingénieur en chef Malézieux a rendu compte, dans son journal de mission aux États-Unis d'Amérique, de la construction des tunnels de Chicago.

La ville de Chicago construite sur la rive occidentale du lac Michigan, est entourée de toutes parts par la prairie, qu'aucune colline ne limite à l'horizon.

Deux rivières, venant l'une du nord, l'autre du sud, se réunissent pour former le port; les rives opposées avaient été réunies par des ponts tournants à double travée, mais cet expédient ne suffisait pas à satisfaire une circulation des plus actives.

La municipalité créa donc des passages à quelques mètres au-dessous de la rivière; le tunnel de Washington-street, de 60 mètres de long, présente trois voûtes accolées, deux de 3m,35 de large pour les voitures, et une de 3o,05 pour les piétons; le tunnel est précédé de voûtes et de tranchées à ciel ouvert. Les rampes d'accès sont assez fortes et atteignent 0,06, il eut fallu les limiter à 0,05; les eaux pluviales se réunissent à la partie centrale du tunnel dans un égoût, d'où on les extrait avec une pompe.

Pour construire le tunnel, on en isola l'emplacement sur la moitié de la rivière par nn batardeau, on creusa à la profondeur voulue, et on maçonna la voûte avec des briques et du bitume, puis on remblaya, on fit l'autre moitié et on livra le passage. Il parait que la maçonnerie de bitume ne laissa passer que des filtrations insignifiantes.

Mais le tunnel principal de Chicago est celui qui a été creusé pour aller chercher au lac Michigan les eaux nécessaires à la consommation de la ville; on en trouvera les détails à la page 58 de l'ouvrage de M. Malézieux: il nous suffira d'en faire une description sommaire.

En 1840, Chicago ne possédait que 4500 habitants et était alimenté par des puits et des citernes, puis une compagnie établit des pompes et une conduite qui allait prendre l'eau sur les bords du lac pour la déverser dans des tuyaux en bois. En 1851, la ville comptait 35,000 habitants, il fallut établir des conduites en fonte, des machines à vapeur et une tour d'eau carrée. La conduite alimentaire de 0,30

de diamètre débouchait à quelques pouces au-dessous du niveau du lac; elle était continuellement encombrée par les sables et les débris organiques; bientôt les égouts rendirent les eaux putrides et impropres à l'alimentation. En 1860, la population de Chicago atteignait le chiffre de 112,000 habitants et de 500,000 en 1870, et la consommation d'eau journalière arrivait à 50,000 mètres cubes. Il fallut augmenter la puissance des machines et en même temps on résolut de porter la prise d'eau à deux milles des bords du lac afin d'obtenir une onde pure.

Le puisard des pompes était une tour de 9m,50 de diamètre, que l'on fonça comme le puits du tunnel sous la Tamise, en la construisant sur un rouet er charpente terminé par un couteau annulaire; lorsque celui-ci, après avoir traversé les sables, se fut engagé dans la belle argile bleue, on arriva facilement à épuiser et on continua la fouille à sec. C'est la tour même du puisard qui sert de fondation à la machine. Celle-ci lance l'eau, par une conduite de 0,91 de diamètre, dans une tour de 47 mètres de hauteur.

Le puisard des pompes communique par une galerie avec le puits de rive de 25 mètres de profondeur, à la base duquel débouche le tunnel qui va chercher l'eau dans un puits foncé au large, à deux milles (3220 mètres de la rive).

Le tunnel offre une section sensiblement circulaire; elle a 1,52 en largeur et 1,60 en hauteur, ce qui permet de dégager facilement les cintres et la section peut fournir 190.000 mètres cubes par jour. Le percement, à travers l'argile bleue compacte, n'offrit pas de difficultés, et on rencontra fort peu de sources, bien qu'on ne fut qu'à 12 mètres sous le fond du lac; la voûte avait deux épaisseurs de briques de 0,10 et était maçonnée en ciment. On exécutait la partie inférieure avec un gabarit, et la partie supérieure exécutée avec un cintre en tôle peu encombrant, suivait à quelque distance. On rencontra plusieurs sources de gaz inflammables qu'on allumait et il n'en résulta pas d'accidents sérieux; l'aérage se faisait par un ventilateur avec tuyaux en fer-blanc. L'avancement maximum fut de 28 mètres par semaine.

A l'emplacement du puits du large, on échoua d'abord un coffre pentagonal qu'on remplit d'enrochements et qui possédait des parois jointives et calfatées, puis on descendit à l'intérieur une colonne creuse en fonte: cette colonne de prise d'eau créa pour le tunnel un second point d'attaque qui donna en moyenne un avancement de 2,85 par jour.

La galerie achevée fut visitée, puis remplie d'eau; on ferma les vannes et on épuisa l'intérieur pour en vérifier l'étanchéité; puis, elle fut mise en service au mois d'août 1870. On élevait alors 95,000 mètres cubes d'eau en vingt-quatre heures.

TUNNEL SOUS-MARIN ENTRE LA FRANCE ET L'ANGLETERRE.

Le propagateur infatigable de l'idée de la construction d'un tunnel sous-marin entre la France et l'Angleterre est M. l'ingénieur Thomé de Gamond, qui présenta à l'Exposition universelle de 1867 un projet définitif. On en trouvera tous les détails dans le mémoire à l'appui présenté par M. de Gamond.

Cet ingénieur avait commencé ses études en 1834 et son premier tunnel consistait en un tube de fer immergé par sections au fond du détroit et disposé de manière à recevoir un muraillement intérieur en maçonnerie : la dépense prévue était d'un demi-milliard. Il proposa ensuite un bouclier métallique, sorte de cham

bre de travail avec écluse à air, dont l'exécution, possible en théorie, parait difficilement réalisable dans la pratique.

En 1855 et 1836, M. de Gamond étudia divers projets de ponts en maçonnerie et en métal; mais il arrivait par là à une dépense de 4 milliards. Il examina ensuite un projet de bac flottant, faisant la navette entre les musoirs de deux digues faisant saillie de huit kilomètres sur chaque rivage; la dépense se trouvait réduite à 250 millions de francs, mais on ne faisait que diminuer l'obstacle inhérent à la présence du détroit sans le faire disparaitre. En 1840, nouveau projet consistant à réunir les deux côtes par un isthme artificiel laissant trois grandes passes à la navigation; évaluation de la dépense: 840 millions de francs; ce travail souleva les protestations générales des navigateurs.

En 1855, M. de Gamond explora le fond du détroit, en plongeant soit à nu soit avec un scaphandre, il reconnut que les bancs du détroit étaient le sommet de collines portlandiennes en stratification concordante avec les couches de rivage; il n'y avait donc point de failles ni de dislocation à redouter, et l'exécution d'un tunnel apparaissait comme possible. L'idée fut favorablement accueillie par la commission française chargée de l'examiner et par Stephenson.

Le projet de 1855 comprenait un tunnel sous-marin de 34 kilomètres ayant pour voies d'accession deux autres tunnels en terre ferme dont le développement réuni atteignait 15 kilomètres, douze ilots artificiels devaient être créés pour recevoir les puits d'attaque; le tunnel sous-marin allait de la pointe Eastware au cap Grinez.

Mais M. de Gamond voulut éviter les deux longs tunnels de terre ferme, et il y arriva en faisant pivoter sur elle-même la ligne précédente, de manière à en faire correspondre les extrémités à deux dépressions dans les falaises du littoral; la nouvelle ligne, adoptée dans le projet définitif, part de l'est du promontoire de Grinez, en France, et aboutit à Cape-point, près Folkestone, en Angleterre. La figure 3 de la planche XIII représente la coupe longitudinale du tunnel projeté avec les cotes principales. Le tracé, long de 36040 mètres, présente un trajet maritime excédant de 2 kilomètres la ligne de Douvres; mais c'est le plus direct entre Paris et Londres et il possède l'immense avantage de la facilité d'accès.

Le tunnel est au-dessous des étages argileux d'Oxford et de Kimmeridge, étages qui lui constituent une chape naturelle imperméable.

En outre, la ligne projetée rencontre l'ile sous-marine ou banc de Varne, de 60 hectares de superficie qu'il sera facile d'utiliser pour établir un atelier de percement et créer en tout quatre points d'attaque; ultérieurement, un vaste puits avec rampe hélicoidale sera construit pour monter les wagons du fond du tunnel jusqu'à l'ilot artificiel qui sera créé. Cet ilot, doté de bassins entourés par des digues artificielles, est destiné, dans la pensée de M. de Gamond, à devenir le plus vaste entrepôt du monde.

La section projetée pour le tunnel est un plein cintre avec pieds-droits verticaux la largeur est de 9 mètres et la hauteur sur rails de 7 mètres.

Le tunnel ayant deux pentes inverses dirigées vers le thalweg du détroit, les eaux tendraient à s'accumuler en ce point; pour les enlever, M. de Gamond prévoit l'établissement sous le tunnel de galeries d'assainissement dirigées de l'îlot de Varne vers les terres, et amenant les eaux dans des puits d'où les extrairont des machines fixes.

L'aérage des galeries ne parait pas offrir de difficultés sérieuses si l'on consulte 'expérience du mont Cenis; les galeries du mont Cenis avaient plus de 6000 mères, celles du tunnel sous le détroit auront au maximum 10000 mètres de lon

gueur. Il est donc parfaitement permis de comparer l'une à l'autre, et la Manche ne sera pas pas un obstacle plus redoutable que les Alpes.

Les dépenses prévues par M. de Gamond, d'après un détail estimatif dressé avec soin, ne s'élèvent qu'à 180 millions de francs, et la durée du travail ne dépassera pas dix ans.

Les recettes probables au début de l'exploitation s'élèveront bien à 23 millions de francs, qui suffiront à couvrir les frais de toute nature et l'intérêt des sommes engagées.

En résumé, le projet de M. de Gamond est conçu dans des idées très-larges et n'offre pas de difficulté insurmontable. Aurait-il sur le développement des relations commerciales entre la France et l'Angleterre l'influence qu'on lui prête? Nous ne le pensons pas.

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