Page images
PDF
EPUB

Lorsqu'on achète la mitoyenneté d'un mur, on peut faire fermer, nonobstant toute prescription, les jours de souffrance ménagés dans ce mur.

Il ne saurait en être de même des fenêtres ouvrantes, dont l'existence est consacrée soit par un titre ancien, soit par la prescription.

662. L'un des voisins ne peut pratiquer dans le corps d'un mur mitoyen aucun enfoncement, ni y appliquer ou appuyer aucun ouvrage sans le consentement de l'autre, ou sans avoir, à son refus, fait régler par experts les moyens nécessaires pour que le nouvel ouvrage ne soit pas nuisible au droit de l'autre.

663. Chacun peut contraindre son voisin, dans les villes et faubourgs, à contribuer aux constructions et réparations de clôture faisant séparation de leurs maisons, cours et jardins assis ės-dites villes et faubourgs : la hauteur de la clôture sera fixée suivant les réglements particuliers ou les usages constants et reconnus; et, à défaut d'usages et de règlements, tout mur de séparation entre voisins, qui sera construit ou rétabli à l'avenir, doit avoir au moins trente-deux décimètres (dix pieds) de hauteur, compris le chaperon, dans les villes de cinquante mille âmes et au-dessus, et vingt-six décimètres (huit pieds) dans les autres.

664. Lorsque les différents étages d'une maison appartiennent à divers propriétaires, si les titres de propriété ne règlent pas le mode de réparations et reconstructions, elles doivent être faites ainsi qu'il suit : Les gros murs et le toit sont à la charge de tous les propriétaires, chacun en proportion de la valeur de l'étage qui lui appartient. Le propriétaire de chaque étage fait le plancher sur lequel il marche. Le propriétaire du premier étage fait l'escalier qui y conduit; le propriétaire du second étage fait, à partir du premier, l'escalier qui conduit chez lui, et ainsi de suite.

665. Lorsqu'on reconstruit un mur mitoyen ou une maison, les servitudes actives et passives se continuent à l'égard du nouveau mur ou de la nouvelle maison, sans toutefois qu'elles puissent être aggravées ; et pourvu que la reconstruction se fasse avant que la prescription soit acquise.

666. Tous fossés entre deux héritages sont présumés mitoyens, s'il n'y a titre ou marque du contraire. - P. 456.

667. Il y a marque de non-mitoyenneté lorsque la levée ou le rejet de la terre se trouve d'un côté seulement du fossé.

668. Le fossé est censé appartenir exclusivement à celui du côté duquel le rejet se

trouve.

669. Le fossé mitoyen doit être entretenu à frais communs.

670. Toute haie qui sépare des héritages est réputée mitoyenne à moins qu'il n'y ait qu'un seul des héritages en état de clôture, ou s'il n'y a titre ou possession suffisante au contraire. N. 671. 672.

671. Il n'est permis de planter des arbres de haute tige qu'à la distance prescrite par les règlements particuliers actuellement existants, ou par les usages constants et reconnus; et, à défaut de règlements et usages, qu'à la distance de deux mètres de la ligne séparative des deux héritages pour les arbres à haute tige, et à la distance d'un demi-mêtre pour les autres arbres et haies vives.

672. Le voisin peut exiger que les arbres et haies plantés à une moindre distance soient arrachés. Celui sur la propriété duquel avancent les branches des arbres du voisin peut contraindre celui-ci à couper ces branches. Si ce sont les racines qui avancent sur son héritage, il a le droit de les y couper lui-même.

673. Les arbres qui se trouvent dans la haie mitoyenne sont mitoyens comme la haie; et chacun des deux propriétaires a droit de requérir qu'ils soient abattus.

A Paris, l'ancienne coutume ne prescrivait aucune distance pour planter les arbres; l'usage s'est maintenu et il n'y a pas lieu d'observer la distance légale.

SECTION II.

-

De la distance et des ouvrages intermédiaires requis pour certaines constructions 674. Celui qui fait creuser un puits ou une fosse d'aisance près d'un mur mitoyen ou non; celui qui veut y construire cheminée ou âtre, forge, four ou fourneau, — y

adosser une étable,

[ocr errors]

ou établir contre ce mur un magasin de sel ou amas de matières corrosives, est obligé de laisser la distance prescrite par les règlements et usages particuliers sur ces objets, ou à faire les ouvrages prescrits par les mêmes règlements et usages, pour éviter de nuire au voisin. - N. 1382. 1756.

D'après la coutume de Paris, le contre-mur pour fosse d'aisances et de 0m,32; la distance entre les parois intérieures d'un puits et d'une fosse doit être d'au moins 1,30, et d'au moins 1 mètre entre les parois de deux puits voisins.

D'après l'article 188 de la coutume de Paris, il faut établir dans les étables, le long du mur mitoyen, un contre-mur de 8 pouces (0,22) d'épaisseur et dont la hauteur atteigne le niveau des mangeoires. On doit étendre cette prescription à tout mur susceptible d'être endommagé par le fumier.

Il va sans dire aussi que le contre-mur doit être enraciné assez profondément dans le sol pour mettre les fondations du mur mitoyen à l'abri de toute action corrosive.

Pour les dépôts de sels ou de matières corrosives, le contre-mur doit avoir un pied d'épaisseur et occuper toute la hauteur du bâtiment.

Cheminées. On ne peut adosser une cheminée à un mur sans en avoir acheté la mitoyenneté; outre la largeur nécessaire au coffre, on achète de chaque côté un pied de large, ce qu'on appelle le pied d'aile.

A Paris, il est défendu d'accoler des cheminées à des murs en pans de bois, même avec un contre-mur, même avec le consentement du voisin.

L'âtre ou partie de la cheminée sur laquelle reposent les cendres doit être isolé des poutres et chevêtres, comme nous l'avons montré en traitant des planchers en bois.

Le contre-cœur, ou contre-mur interposé entre le mur mitoyen et la cheminée, doit, d'après l'article 189 de la coutume de Paris, être fait de tuilots ou autres choses suffisantes et de demi-pied (0,16) d'épaisseur. Ce contre-mur ne doit pas être incorporé au mur mitoyen; il est même avantageux de laisser derrière un espace vide, car l'air forme un matelas qui s'oppose à la propaga tion de la chaleur. C'est aujourd'hui une coutume générale de remplacer le contre-cœur par une plaque de fonte appliquée contre le mur mitoyen ou distante d'un pouce ou deux.

Les jambages ou murs latéraux de la cheminée doivent être écartés d'au moins 0,16 de toute pièce de bois.

Le manteau, ou pièce horizontale qui couronne les jambages, ne doit pas être fait en bois.

Lorsque la retombée d'une voûte repose sur un mur mitoyen,' il faut placer en avant un contre-mur d'épaisseur suffisante pour résister à la poussée, de telle sorte que celle-ci n'influe pas sur le mur mitoyen. De même, lorsque deux terrains sont naturellement en contre-bas l'un de l'autre, c'est au propriétaire du fonds supérieur de construire le contre-mur qui doit résister à la poussée des terres ; si la dénivellation était le fait du propriétaire du fonds inférieur, le mur de soutènement serait au contraire à sa charge.

Un contre-mur ne doit pas être incorporé au mur mitoyen, tout au plus peut-on ménager dans celui-ci quelques boutisses pénétrant dans celui-là.

[merged small][ocr errors][merged small]

675. L'un des voisins ne peut, sans le consentement de l'autre, pratiquer dans le mur mitoyen aucune fenêtre ou ouverture, en quelque manière que ce soit, même à verre dormant.

676. Le propriétaire d'un mur non mitoyen joignant immédiatement l'héritage d'autrui peut pratiquer dans ce mur des jours ou fenêtres à fer maillé et verre dormant. Ces fenêtres doivent être garnies d'un treillis de fer dont les mailles auront un décimètre (environ trois pouces huit lignes) d'ouverture au plus, et d'un châssis à verre dormant.

677. Ces fenêtres ou jours ne peuvent être établis qu'à vingt-six décimètres (huit pieds) au-dessus du plancher ou sol de la chambre qu'on veut éclairer, si c'est au rez-dechaussée, et à dix-neuf décimètres (six pieds) au-dessus du plancher pour les étages supérieurs.

678. On ne peut avoir des vues droites ou fenêtres d'aspect, ni balcons ou autres semblables saillies, sur l'héritage clos ou non clos de son voisin, s'il n'y a dix-neuf décimètres (six pieds) de distance entre le mur où on les pratique et ledit héritage.

679. On ne peut avoir des vues par côté ou obliques sur le même héritage, s'il n'y a six décimètres (deux pieds) de distance.

680. La distance dont il est parlé dans les deux articles précédents se compte, depuis le parement extérieur du mur où l'ouverture se fait, et, s'il y a balcons ou autres semblables saillies, depuis leur ligne extérieure jusqu'à la ligne de séparation des deux propriétés.

Les articles précédents portent une atteinte au droit de propriété, mais cette atteinte est parfaitement justifiée : chacun ne doit jouir de son fonds que jusqu'au point où il ne gêne pas la jouissance du voisin.

D'abord, dans un mur mitoyen, on ne peut pratiquer aucune baie sans le consentement du voisin; ce consentement écrit constitue un titre et établit une servitude, à moins qu'il n'y soit spécifié que l'autorisation est donnée à titre de complaisance et de pure tolérance.

On appelle verre dormant un verre maintenu par du plâtre ou du mastic de manière à ne pouvoir être enlevé.

Les fenêtres ouvrantes ne peuvent être établies dans un mur, si ce n'est à six pieds (19 décimètres) de la propriété voisine. Cet intervalle suffit pour que les fenêtres s'ouvrent entièrement sur la propriété à laquelle elles appartiennent et, si le voisin est incommodé de la vue directe, il n'a qu'à élever suffisamment le mur de clôture; ses droits seront ainsi sauvegardės.

La même distance est applicable aux balcons; non-seulement la ligne qui limite le balcon en avant doit être à six pieds de la propriété voisine, mais il doit en être de même des lignes latérales qui, elles aussi, constituent des vues droites.

Ces distances doivent être observées même lorsqu'il s'agit d'un terrain vague, non enclos.

Il va sans dire que l'on peut ouvrir des fenêtres à moins de 1,90 du voisin, si on élève en avant sur son propre fonds un mur dont la hauteur dépasse les fenêtres; le voisin n'est de la sorte nullement incommodė, mais la prescription ne s'acquiert point de la sorte et le jour où le mur disparaît le voisin a le droit de faire remplacer la fenêtre ouvrante par un jour dormant.

En ce qui touche les jours dormants, leur hauteur au-dessus du plancher de l'étage qu'ils éclairent est seule fixée; leurs autres dimensions sont arbitraires. Les ouvertures et lucarnes ménagées dans un toit et regardant le ciel ne nuisent pas aux voisins et ne doivent pas forcément être placées à la distance légale.

Il importe, avant d'établir des ouvertures, de faire déterminer la limite séparative des propriétés, afin de n'être point exposé à boucher ses fenêtres dans l'avenir.

Les vues droites peuvent s'acquérir par la prescription trentenaire, et lorsqu'elles sont acquises, le voisin ne peut plus élever un mur qu'à la distance légale de 1,90.

On établit quelquefois par titres ce qu'on appelle une vue de prospect ou d'agrément; elle empêche le voisin de rien changer au paysage jusqu'à une certaine distance, par exemple de masquer la vue par des bouquets d'arbres. Une pareille servitude ne peut résulter que d'un titre.

[blocks in formation]

681. Tout propriétaire doit établir des toits de manière que les eaux pluviales s'écoulent sur son terrain ou sur la voie publique; il ne peut les faire verser sur le fonds de son voisin.

Lorsque les eaux pluviales sont conduites à la voie publique, on doit se conformer à tous les règlements municipaux pris dans l'intérêt général de la circulation et de la conservation des rues.

La prescription de ne point verser les eaux pluviales sur la propriété voisine est absolue et doit être observée quelle que soit la nature de cette propriété voisine.

Les eaux pluviales une fois arrivées au sol peuvent suivre la pente naturelle du terrain et s'écouler sur le fonds voisin, conformément à l'article 640.

[blocks in formation]

682. Le propriétaire dont les fonds sont enclavés. et qui n'a aucune issue sur la voie publique, peut réclamer un passage sur les fonds de ses voisins, pour l'exploitation de son héritage, à la charge d'une indemnité proportionnée au dommage qu'il peut occasionner. - P. 471. 475.

[ocr errors]

683. Le passage doit régulièrement être pris du côté où le trajet est le plus court du fonds enclavé à la voie publique.

684. Néanmoins il doit être fixé dans l'endroit le moins dommageable à celui sur le fonds duquel il est accordé.

685. L'action en indemnité, dans le cas prévu par l'art. 682, est prescriptible, et le passage doit être continué, quoique l'action en indemnité ne soit plus recevable.

Les fonds complétement enclavés sont bien rares, cependant ils peuvent se produire accidentellement.

Du moment qu'il existe un passage, quelque incommode qu'il soit, on n'a pas le droit d'en réclamer un autre.

D'après l'article 684, le passage doit être pris à l'endroit où il est le moins dommageable; on l'établira donc plutôt sur un terrain vague qu'à travers un clos ou une maison.

Le terrain, livré pour le passage, reste la propriété de celui qui le fournit, et il peut en jouir, lui aussi, du moment qu'il n'entrave pas la servitude concédée, servitude qui se borne au droit de passage.

Le passage peut être changé de place, sur la demande du propriétaire du fonds sur lequel il est établi; lorsqu'il a besoin du terrain pour faire des constructions avantageuses et qu'il offre un passage aussi commode.

Si la nécessité qui avait forcé à ouvrir le passage venait à disparaître par suite de modifications à l'état des lieux, le passage pourrait être supprimé.

Tour de l'échelle. Le tour de l'échelle est la servitude qui permet à un

propriétaire de passer sur le fonds du voisin pour réparer son mur de clôture ou le mur de son bâtiment.

Quelquefois, en bâtissant, le propriétaire primitif a réservé au delà de son mur un espace libre, de trois pieds ou d'un mètre; cet espace lui appartient alors et il a le droit d'en disposer comme il l'entend.

Certaines coutumes établissaient formellement la servitude du tour d'échelle, même quand le terrain au delà du mur était entièrement la propriété du voisin. La coutume de Paris n'en parle pas, et le Code civil non plus.

Or, l'article 691 du Code civil dit que les servitudes discontinues et non apparentes ne peuvent s'acquérir que par un titre; le tour d'échelle est une servitude discontinue et non apparente au premier chef; elle ne peut donc s'acquérir que par un titre.

Lorsque le tour d'échelle est établi en vertu d'une ancienne coutume antérieure au code, il doit être maintenu, la loi n'ayant pas d'effet rétroactif.

Lorsque le propriétaire en construisant son mur a réservé en avant un tour d'échelle qui reste sa propriété comme nous l'avons dit plus haut, ce tour d'échelle porte le nom de ceinture, échellage ou investison, il est constaté par un titre. La largeur ordinaire est de trois pieds (0m,95); mais quelle que soit cette largeur, les relations du voisinage doivent se régler comme si le mur n'existait pas.

CHAPITRE III

Des servitudes établies par le fait de l'homme

SECTION 1. Des diverses espèces de servitudes qui peuvent être établies sur les biens

686. Il est permis aux propriétaires d'établir, sur leurs propriétés, ou en faveur de leurs propriétés, telles servitudes que bon leur semble, pourvu néanmoins que les services établis ne soient imposés ni à la personne ni en faveur de la personne, mais seulement à un fonds et pour un fonds, et pourvu que ces services n'aient d'ailleurs rien de contraire à l'ordre public. L'usage et l'étendue des servitudes ainsi établies se règlent par le titre qui les constitue; à défaut de titre, par les règles ci-après. N. 6. 544. 708.

1133. 2177.

687. Les servitudes sont établies ou pour l'usage des bâtiments, ou pour celui des fonds de terre. Celles de la première espèce s'appellent urbaines, soit que les bâtiments auxquels elles sont dues soient situés à la ville ou à la campagne. Celles de la seconde espèce se nomment rurales.

[ocr errors]

688. Les servitudes sont ou continues ou discontinues. Les servitudes continues sont celles dont l'usage est ou peut être continuel sans avoir besoin du fait actuel de l'homme tels sont les conduites d'eau, les égouts, les vues et autres de cette espèce. Les servitudes discontinues sont celles qui ont besoin du fait actuel de l'homme, pour être exercées tels sont les droits de passage, puisage, pacage et autres semblables. 689. Les servitudes sont apparentes ou non apparentes. - Les servitudes apparentes sont celles qui s'annoncent par des ouvrages extérieurs, tels qu'une porte, une fenêtre, un aqueduc. Les servitudes non apparentes sont celles qui n'ont pas de signes extérieurs de leur existence, comme, par exemple, la prohibition de bàtir sur un fonds, ou de ne batir qu'à une hauteur déterminée.

[blocks in formation]

690. Les servitudes continues et apparentes s'acquièrent par titre, ou par la possession de trente ans. - N. 2177. 2255.

691. Les servitudes continues non apparentes et les servitudes discontinues apparentes ou non apparentes, ne peuvent s'établir que par titres. La possession même

« PreviousContinue »