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Ces préliminaires établis, passons à la description sommaire des divers sys

tèmes de couvertures.

I. COUVERTURES EN CHAUME.

On fait des couvertures avec diverses substances végétales desséchées, telles que roseaux, fougères, bruyères, etc., mais la plus répandue est la couverture en paille ou chaume. Elle se confectionne avec la paille du blé ou du seigle dont on a enlevé l'épi et la partie haute. La paille de seigle, par sa beauté, sa longueur, sa résistance et sa souplesse, est toujours préférable à la paille de ble; mais celle-ci coûte moins cher et bien souvent on l'emploie.

La figure 9 de la planche XXIV représente, d'après Émy, la couverture ordinaire en chaume. Sur les pannes (a) et (b) en bois équarri et plus souvent en bois rond, on brandit, c'est-à-dire on fixe par une cheville en bois dur, des chevrons (c) formés de jeunes chênes ou de jeunes sapins dépouillés de leur écorce. Aux chevrons on fixe au moyen de harts en osier d'autres bois ronds de plus petite dimension qui servent de pannes. Telle est la carcasse qui supporte le chaume; la paille est réunie en petites bottes ou javelles, et deux javelles (f) sont liées ensemble au moyen d'une hart entrelacée, qui contourne la panne. Une rangée horizontale de javelles s'appelle une orgne; les orgnes sont posées à recouvrement des deux tiers de leur longueur; le lien de la javelle est à peu près au tiers de sa hauteur.

La toiture en chaume est inclinée à 45°; l'orgne inférieure est posée sur un coussin horizontal, ou sur un boudin formé de paille serrée dans des liens d'osier; la saillie sur le mur est de 0,50 afin d'en éloigner les eaux pluviales. Le faitage s'obtient au moyen de javelles posées à cheval et recouvertes d'un 'corroi en terre argileuse.

Lorsque la pose est terminée, on peigne la toiture avec un rateau et on coupe toutes les pailles qui dépassent.

S'il existe des parties faibles, on glisse entre les javelles d'autres javelles plus ou moins grosses que l'on introduit en s'aidant d'une palette en bois.

Les couvertures en chaume ont l'immense avantage d'être peu conductrices du calorique elles donnent des appartements chauds en hiver et frais en été; elles conviennent pour les glacières dont on doit empêcher le rayonnement par tous les moyens possibles. Mais elles offrent bien des inconvénients: le principal est la combustibilitė; en outre, elles offrent un asile aux insectes et à la vermine. On les réserve maintenant pour les édifices dans lesquels l'économie est une condition capitale.

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Bardeaux. Les bardeaux sont des feuilles de bois clouées sur des lattes; ce sont des tuiles en bois dont la partie inférieure est d'ordinaire arrondie ou profilée en pointe.

C'est une couverture très-légère et assez durable que l'on rencontre encore sur de vieux édifices, comme des clochers de village.

L'usage tend à en disparaître; on se sert quelquefois comme couverture provisoire de voliges posées à recouvrement; ces voliges en bois blanc ne durent guère. L'ancien bardeau en cœur de chêne posé suivant une inclinaison considérable s'égouttait facilement et durait fort longtemps.

Au lieu de poser les voliges horizontalement, on les place souvent suivant la ligne de plus grande pente du toit; elles sont alors jointives et les joints sont protégés par une latte clouée.

Parmi les couvertures végétales il faut ranger les toiles goudronnées, les feutres et les cartons bitumés dont nous dirons plus loin quelques mots.

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Les tuiles ou plaquettes en terre cuite remontent à une haute antiquité; dans ces derniers temps, elles ont reçu des perfectionnements considérables parce qu'on a eu recours au moulage mécanique.

A la page 267 de notre Traité de l'exécution des travaux nous avons décrit la fabrication des tuiles. On les obtient à l'aide d'une pâte argileuse dégraissée avec du sable; l'argile doit être choisie avec soin et le corroyage doit être beaucoup plus complet que pour la brique. On donne à la tuile une teinte grise en l'enfumant au moyen de bois verts que l'on place sur la grille du four à la fin de la cuisson.

Les tuiles vernissées qu'on employait fréquemment autrefois recevaient une couverte plombeuse; on les plongeait avant la cuisson dans un mélange de 20 parties d'alquifoux (plomb sulfuré) et 3 parties de peroxyde de manganèse, le tout pulvérisé, puis délayé dans l'eau avec de l'argile de manière à former une bouillie épaisse.

Le choix des terres entre pour beaucoup dans la qualité des tuiles; on en trouve encore dans les constructions de Paris qui datent de 150 ou 200 ans. Lorsque la pâte contient des fragments de pierre calcaire, celle-ci se change en chaux par la cuisson, la tuile placée à l'air s'exfolie et se fend. Il y a des tuiles poreuses qui absorbent l'humidité et éclatent à la gelée; elles se laissent aussi attaquer par les mousses et les végétations. Une bonne tuile doit être lisse, compacte et sonore; la tuile vitrifiée donne de bons résultats. La tuile des Romains dut sa célébrité au choix des terres, mais aussi à la vitrification.

De nos jours, c'est la tuile de Bourgogne qui a le plus de célébrité; on vante aussi celle de Marseille qui durcit à l'air.

Tailes plates. Les anciennes tuiles plates à crochet, qui tendent à disparaitre, sont de deux modèles : le grand et le petit moule.

Elles portent un talon à leur extrémité pour les accrocher sur des lattes en chène clouées sur les chevrons; l'espacement des lattes est du tiers de la longueur de la tuile. Celle-ci est donc posée à un tiers de pureau, c'est-à-dire qu'en chaque point il y a trois épaisseurs de tuiles.

Cette couverture est très-pesante et de plus elle n'est pas solide; la tuile, fixée par un simple crochet, se détache fréquemment et peut causer des accidents. Enfin, comme le moulage n'est pas parfait et que la cuisson déforme la tuile, les joints livrent passage à l'humidité et la couverture n'est pas étanche. Les lattes et chevrons pourrissent rapidement.

Les figures 12 et 13 de la planche XXV représentent la couverture en tuiles plates; sur les chevrons b sont clouées les lattes qui reçoivent les tuiles par leur crochet convenablement recourbé.

Les lattes en chêne de 1,50 de longueur reposent sur quatre chevrons; ces

lattes n'ont en général que 0,04 de largeur sur 0,004 d'épaisseur; c'est trop faible.

Dans le système de pose ordinaire représenté par les figures précédentes, on a partout trois épaisseurs de tuile; quelquefois au contraire, les tuiles d'une même file horizontale sont écartées du tiers de leur largeur, ce qui diminue d'un tiers la dépense et le poids; on porte quelquefois cet écartement jusqu'à 3 et on donne de pureau; on obtient ainsi une couverture légère et assez économique, 98 mais moins solide.

Les tuiles plates grand moule ont les dimensions: 0,311, 0,230, 0,016, il en faut 42 au mètre carré, et elles pèsent 196 kilogrammes le cent.

Les tuiles plates petit moule ont les dimensions: 0m,257, 0m, 183, 0,014, il en faut 64 au mètre carré et elles pèsent 152 kilogrammes le cent.

Ce sont les anciennes dimensions; les tuiles de Bourgogne ont maintenant 0m,30 sur 0,25 et 0m,015 pour le grand moule, et 0m,24 sur 0m,195 et 0,015 pour le petit moule. Il en faut des premières 37 au mètre carré et 64 des secondes.

Il faut toujours compter sur un déchet de 5 pour 100.

Tuiles creuses. -Les anciennes tuiles creuses qu'on ne trouve plus que dans quelques provinces de France sont représentées par la figure 1, planche XXIV. La forme et les dimensions en varient un peu suivant les localités; on les pose sur un plancher jointif en les emboîtant les unes au-dessus des autres par files dirigées suivant les lignes de plus grande pente du toit; elles sont alternativement posées suivant la convexité et suivant la concavité, de manière à former une surface ondulée; les tuiles de la file creuse sont des chanées, les autres sont des chapeaux.

Les tuiles de la partie inférieure de chaque file sont maçonnées afin de ne pas glisser et de maintenir toutes les autres.

Quelquefois on maçonne toute la surface, ce qui est coûteux; on peut se contenter de maçonner une file sur trois pour encadrer le tout et résister au souffle du vent.

Les tuiles creuses maçonnées ont une durée considérable; il est seulement regrettable de les poser sur un plancher qui pourrit et qui nécessite pour être remplacé le démontage de toute la couverture.

On arrive à de bien meilleurs résultats en posant les tuiles creuses comme on le faisait à Marseille sur un plancher de briques posées à plat suivant la pente. du toit. La couverture marseillaise est formée de briques de 0,24 sur 0,15 et 0,014, posées sur des chevrons espacés de 0,25 d'axe en axe ayant 0,07 sur 0,08 d'équarrissage et 1,75 de portée entre les pannes. Les briques sont maçonnées en plâtre, recouvertes d'un enduit de 0,005 qui reçoit les tuiles maçonnées elles-mêmes. C'est là une excellente couverture qui rend les greniers habitables; mais elle coûte cher et pèse 140 kilogrammes par mètre carré au lieu de 75 kilogrammes, poids de la couverture ordinaire en tuiles creuses. Vers 1830, les tuiles creuses ont servi à couvrir plusieurs marchés à Paris; elles augmentent la solidité et l'aspect rustique; l'usage ne s'en est point propagé pour les maisons particulières.

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Tuiles romaines. A la tuile creuse en arc de cercle, on doit préférer la tuile romaine (figure 2, planche XXIV), ce sont des tuiles se retournant verticalement sur les bords de manière à se servir mutuellement de couvre-joints.

La quantité de matière employée est beaucoup moindre qu'avec la tuile creuse ordinaire.

L'avantage des tuiles creuses en général, c'est de faciliter l'écoulement de l'eau et de donner moins de prise au vent; elles permettent de réduire l'inclinaison des toits et l'économie qui en résulte sur la charpente des fermes compense en partie le supplément de dépense qu'exige la couverture proprement dite.

Tuiles flamandes. - Les tuiles flamandes ou pannes, figure 3, planche XXIV, sont à la fois rigole et chapeau, elles se posent comme les tuiles plates sur des lattes auxquelles elles sont suspendues par un crochet supérieur. Elles ont l'une sur l'autre un recouvrement plus ou moins considérable, ordinairement 6 à 8 centimètres, mais alors le joint est maçonné.

L'inconvénient de ces tuiles est que la chanée ou rigole n'est pas assez vaste pour contenir toute l'eau qui tombe dans l'intervalle compris entre deux dos d'âne successifs; l'eau remonte alors dans le joint, même maçonné et s'épanche à l'intérieur de l'édifice.

C'est une remarque applicable à presque toutes les tuiles creuses. Les tuiles flamandes sont aussi longues que larges; elles ont 0m,35 en plan et 0,016 d'épaisseur; le cent pèse dans les 350 kilogrammes.

Tuiles à rebords ou tuiles italiennes. On emploie en Italie et en Espagne des tuiles plates å rebords, qui paraissent avoir donné naissance à nos tuiles actuelles de système perfectionné.

La tuile italienne à rebords est représentée par la figure 4, planche XXIV; cette tuile est carrée, elle s'assemble par ses quatre côtés avec ses voisines, et, pour pénétrer à l'intérieur, l'eau doit remonter un joint vertical assez élevé. La diagonale de ces tuiles est dirigée suivant la ligne de plus grande pente du toit, ce qui facilite l'écoulement de l'eau pluviale, laquelle s'accumule en grosses gouttes à la pointe de la tuile; les joints eux-mêmes ne se trouvent plus dans la direction de l'écoulement.

A Madrid, on employait sous cette forme des tuiles vernissées de 0,33 de côté et de 0,014 d'épaisseur, couverture qui ne pesait que 45 kilogrammes par mètre carré.

Les faitages et les noues dans ce système s'obtiennent au moyen de grandes briques creuses fabriquées à cet effet.

Tuiles à rebords et à couvre-joints.

- La figure 5 de la planche XXIV représente les tuiles plates à rebords et à couvre-joints inventées il y a une cinquantaine d'années par un fabricant de Saint-Omer.

On comprend toute la difficulté que l'eau éprouve à pénétrer dans les joints de ces tuiles, qu'il est inutile de poser à recouvrement.

Tuiles modernes.

Comme les précédentes, on les établit sur un plancher ou voligeage jointif. Tout le monde connaît les tuiles modernes, dont il existe de nombreux modèles, différant plus ou moins par la forme et par le mode d'assemblage. On a cherché à supprimer le recouvrement, et, en même temps, on a augmenté la surface des tuiles en diminuant leur épaisseur; la résistance se trouve néanmoins augmentée grâce à des côtes ou nervures et à une meilleure cuisson. On a pu réduire ainsi de plus de moitié le poids des couvertures. Nous citerons quelques-unes de ces tuiles modernes :

Tuile Gilardoni. — Il y a déjà trente ans que MM. Gilardoni ont commencé à fabriquer les tuiles rectangulaires qui portent leur nom. Le modèle le plus répandu qui se fabrique en beaucoup d'endroits, c'est celui à joint vertical discontinu, figures 15 et 16 planche XXIV.

Latéralement, ces tuiles présentent d'un côté un rebord avec agrafe dirigée

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vers le haut (coupe ab) et de l'autre côté un rebord inverse avec agrafe supérieure s'emboitant dans l'agrafe inférieure de la tuile voisine. En haut, la tuile présente deux crochets qui servent à la fixer sur une latte comme la tuile ordinaire; en bas, la tuile présente en son milieu une saillie qui couvre le joint de deux tuiles du rang inférieur, sur le reste de la tranche il n'y a point de rebords et l'eau pluviale s'écoule facilement comme par deux petites gouttières.

Ce système est parfaitement disposé pour recueillir les eaux, pour empêcher qu'elles remontent à travers les joints et pour briser les efforts du vent. Le recouvrement de deux rangées successives n'est que de 5 centimètres.

Ainsi pour le modèle représenté de 0,38 sur 0m, 23, la surface couverte est de 0,33 sur 0,20. Le poids d'une tuile sèche est de 2m,545 et celui d'une tuile qui a reçu la pluie pendant un quart d'heure 3 kilogrammes. Il y a par mètre carré 15 tuiles 15 centièmes et 3 lattes 5 centièmes, ce qui fait un poids de 40 à 45 kilogrammes suivant que les tuiles sont sèches et mouillées. Ces tuiles se vendent 125 francs le mille; il faut à peine une heure de couvreur pour la pose d'un mètre carré de couverture.

On ne peut guère avec ces tuiles avoir une pente inférieure à 30°.

Tuile Müller. La tuile Müller, fabriquée à Ivry, diffère peu de la tuile Gilardoni; l'agrafe est plus compliquée, il y a deux saillies de la tuile inférieure qui pénètrent dans le rebord de la tuile inférieure. On peut, avec ces tuiles, réaliser une économie de presque moitié sur la tuile ordinaire et le poids est bien moindre, comme nous venons de le voir tout à l'heure.

En comptant les lattes à 0,10 le mètre courant et la pose d'un mètre carré de tuiles à 0,60, connaissant en outre le prix du mille de tuiles, on arrive facilement à trouver le prix du mètre carré, qui sera par exemple de 3',50 à 4 francs pour la tuile Gilardoni.

Tuile Montchanin. - L'usine de Montchanin (Avril et Cie) fabrique les tuiles représentées par les figures 1 et 2, planche XXV, qui sont à côtes ou à losanges et qui se posent sur des lattes; c'est le système Gilardoni plus ou moins modifié.

Il faut des demi-tuiles pour terminer sur les rives les lignes horizontales; on fait des tuiles faitières, des tuiles de rive, des chatières d'aérage, de grandes tuiles pour châssis vitré, etc.; tout cela est moulé et fabriqué avec grand soin. Il suffit du reste d'adresser une demande au fabricant pour avoir l'album qui renferme tous ses modèles avec le prix. C'est pourquoi nous ne donnerons pas les dessins des diverses pièces qui entrent dans la composition des couvertures. Tuiles Josson. Les tuiles Josson, planche XXIV, figure 14, ne différent guère des précédentes que par la forme; ce sont des losanges irréguliers, qui, à leur sommet s'accrochent sur des lattes, et dont les deux côtés supérieurs ont des rebords saillants s'engageant dans les tuiles du rang plus élevé tandis que les deux côtés inférieurs présentent en dessous des rainures où pénètrent les rebords des tuiles du rang suivant.

Leur hauteur est de 0,40 et leur largeur 0m, 28; chacune couvre une surface de 0,32 sur 0m, 28. Mouillée, elle pèse 2,50 et sèche 28,30; il faut par mètre carré 18 tuiles et demi avec six à sept lattes; la pose demande une heure de

couvreur.

Couvertures en verre. Des terres cuites, il faut rapprocher le verre; le verre à vitres ordinaire, obtenu par le soufflage est mince, peu résistant; il ne s'obtient qu'en plaques de petites dimensions qu'il faut poser à recouvrement comme des ardoises. Il laisse passer le soleil; il est transparent, ce qui est quelquefois nuisible.

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