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des cartes,

cette année (1), une ordonnance par laquelle il défendit de jouer et de donner à jouer aux dés, aux dames et aux échecs; mais il n'y parla pas parce qu'elles n'étaient pas inventées. La copie que Blanchard a suivie était fautive. Celle qui est dans le premier tome de la nouvelle édition des Ordonnances des rois de France de la troisième race, est bien plus exacte (2); les cartes n'y sont ni nommées ni désignées : elles ne le sont pas non plus dans un fragment de la même ordonnance, que le savant Thiers a rapporté dans son Traité des jeux (3).

(1) T. 1, des Ordonnances des rois de France de la troisième race. Paris, de l'imprimerie royale, in-fo, 1723, p. 61-75.

(2) Cette ordonnance est imprimée en latin et en français dans l'édition qui est citée dans la note précédente. L'article latin en est le trente-cinquième, et le français le vingt-huitième. Voici l'un et l'autre :

Preterea prohibemus districtè ut nullus homo ludat ad taxillos, sive aleis aut scaccis; scholas autem deciorum prohibemus et prohiberi volumus omninò, et tenentes eas districtius puniantur. Fabrica etiam deciorum prohibetur. (P. 74, col. 1.)

« Et avec ce nous deffendons étroictement que nul ne jeüe aux dez, aux tables, ne aux échets, et si deffendons escoles de dez, et voulons du tout estre devées, et ceux qui les tendront soient très-bien punis. Et si soit la forge, ou l'euvre de dez deveyé partout. » (Ibid., col. 2.)

(3) Voyez la p. 184 du Traité des jeux et des divertissemens qui peuvent être permis ou qui doivent être défendus aux chrétiens, selon les règles de l'Eglise et le sentiment des Pères. Par M. JeanBaptiste Thiers, docteur en théologie et curé de Champrond. A Paris, chez Ant. Dezallier, 1686, in-12.

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NOTICES HISTORIQUES ET CRITIQUES

De deux manuscrits de la bibliothèque de M. le duc de la Vallière, dont l'un a pour titre : Le Roman d'Artus, comte de Bretaigne, et l'autre Le Rommant de Perthenay ou de Lusignen, par M. l'abbé Rive.

:

I.

Extrait du Journal de Paris, no 217, août 1779, p. 882.

L'AUTEUR a inséré dans la première de ces Notices un éclaircissement très-curieux sur l'invention des cartes à jouer.

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M. l'abbé Rive, qui a acquis de très-grandes connaissances non seulement dans la bibliographie et dans ce qui concerne l'historique des manuscrits, mais qui encore joint une grande érudition à une critique sage et éclairée dans la littérature en général, a cru devoir donner une notice exacte de ces deux manuscrits, dans la crainte qu'ils ne s'égarassent un jour, etc., p. 654.

Il commence par décrire, avec la plus grande exactitude, la forme du premier, et en donner l'histoire.

A l'occasion de ce roman, qu'on croit être du règne de Charles VI, roi de France, M. le C. de T*** (Tressan) a dit que l'invention des cartes à jouer est

due aux Français, et qu'elle est du règne de ce roi. C'est aussi le sentiment d'un grand nombre d'auteurs, M. l'abbé Rive cite. D'autres ont cru que les cartes que avaient été inventées en France; mais ils en reculent l'époque au règne de Charles V, vers l'an 1376. Meermann (1) la fixe vers l'an 1367, et ne dit point en quel pays elles ont pris naissance. L'abbé de Longuerue et le baron de Heinken (2) ont cru qu'elles ont été inventées, l'un en Italie, dans le quatorzième siècle; l'autre en Allemagne, sur la fin du dix-septième (3).

M. l'abbé Rive fait voir très-clairement qu'en 1330, elles existaient déjà en Espagne, long-temps avant qu'on en trouve la moindre trace chez aucune nation, p. 655, col. 2 et suiv.

Dans cette courte notice, M. l'abbé Rive cite, avec la plus grande exactitude, ses autorités; et dans des notes à part, il indique les différentes éditions des divers auteurs dont il a parlé, p. 656, col. 2.

(1) Lisez Meerman.

(2) Lisez Heineken.

(3) Lisez treizième, et non pas dix-septième.

Il s'est glissé d'autres fautes dans le Journal des savans, au sujet de cette Notice. On y lit, p. 655, col. 2 : A la tête du catalogue de Guyon de Lardière : on devait dire Sardière. On y lit, p. 656, col. 2: La seconde est appuyée sur ce que saint Louis, en 1354: lisez 1254. (Notes de l'abbé Rive.)

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NOTICE SUPPLÉMENTAIRE

SUR L'ORIGINE DES CARTES (1).

LES Recherches historiques sur les cartes à jouer, par Bullet, parurent en 1757; elles présentaient alors l'état le plus exact des connaissances acquises sur cette question. On a vu que l'auteur fixe l'époque de l'invention des cartes à l'année 1376, et qu'il est convaincu que c'est en France qu'elles ont pris naissance. La Notice où l'abbé Rive traite ce sujet, fut publiée vingt-trois ans après l'ouvrage de Bullet. Déjà l'on y

trouve des faits inconnus à ce dernier. Nous donnerons ici un aperçu des nouvelles découvertes dont l'histoire des cartes s'est enrichie depuis les éclaircissemens de l'abbé Rive. Le but de la Notice supplémentaire qu'on va lire est de faire connaître les nouvelles données que les savans ont obtenues à ce sujet depuis le travail de l'abbé Rive.

-Cet écrivain avait déjà observé que les fleurs de lys qui se trouvent peintes sur les cartes en usage chez presque toutes les nations de l'Europe, n'étaient point une preuve indubitable de leur origine française: nous ajouterons qu'il existe, dans les cabinets

(1) Par l'Edit. J. C.

II. 3o LIV.

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des curieux, plusieurs anciens jeux de cartes allemands et italiens, sur lesquels on ne voit aucune trace de cet emblême.

Tous les savans sont d'accord aujourd'hui sur ce point, que les cartes n'ont été inventées ni en France, comme l'a cru le Père Ménestrier, et, après lui, Bullet et beaucoup d'autres; ni en Espagne, comme l'a soutenu l'abbé Rive; mais qu'elles ont une origine orientale, et qu'introduites d'abord dans le midi de l'Europe, elles se sont étendues par degré, d'un peuple à l'autre, dans la direction du sud au nord.

Le nom espagnol de naipes, semble venir de l'arabe, dans lequel nabi signifie un diseur de bonne aventure; et l'on sait, en effet, que dès l'origine les cartes ont servi à cet usage superstitieux.

Ce que l'on n'indique ici que comme une conjecture des plus probables, le savant Court de Gebelin, qui, dans ses profondes recherches, s'est laissé plusieurs fois égarer par l'esprit de système, l'a présenté comme une vérité incontestable. Dans une Dissertation fort étendue sur le jeu des tarots, il s'attache à prouver que ce jeu renferme toute la théogonie des anciens Egyptiens. Le docteur anglais Buchan a modifié son système, dont il a cependant adopté les principales bases.

L'assertion la plus solide de Court de Gebelin, c'est que les cartes ont été apportées en Europe par les Bohémiens, que l'on croit communément tirer leur origine de l'Egypte. Il est certain que l'époque où l'usage des cartes a commencé en Europe, corres

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