Page images
PDF
EPUB

près dans les mêmes termes : quant à celui-ci, le roi fut si jaloux de le faire observer, que, dès le jour même, un prince qui désirait lui parler fut obligé de quitter ses gants, où brillait une broderie d'or. Pendant long-temps, personne n'osa se présenter à la cour avec des objets défendus, et le monarque lui-même cessa de porter du clinquant et des broderies.

Quoi qu'il en soit, il fut souvent nécessaire de rappeler, sous des peines sévères, les dernières dispositions de cette loi. Les partisans du luxe remplacèrent les métaux précieux par les points coupés, les broderies et dentelles de fil: une nouvelle ordonnance les priva de cette ressource. Un édit de 1629 défendit de faire porter à ses domestiques les livrées du roi. Enfin, nous trouvons encore sous ce règne un règlement sur le poids de la vaisselle d'or et d'argent; mais il ne demeura en vigueur que pendant un an. On commença par excepter quelques objets, et bientôt on ferma les yeux sur les autres contraventions qui eurent lieu à cet égard.

Le règne de Louis XIV ne fut pas moins fécond que les précédens en lois somptuaires. Dès l'an 1644, une déclaration du roi renouvela les défenses des étoffes d'or et d'argent, paillettes, broderies en pierreries et perles, et des boutons non seulement d'or et d'argent simple ou doré, mais même de cuivre ou de laiton doré ou émaillé.

Ces règlemens furent exactement observés pendant quatre ou cinq ans; après quoi, les troubles de la fronde y donnèrent quelque atteinte, et le luxe com

mença à reprendre le dessus. Ce fut à cette époque que l'on apporta du Canada les premiers chapeaux de castor : ils se vendirent à des prix excessifs. Aussitôt que le calme fut rétabli, le roi essaya d'arrêter cet abus par une déclaration (1), dont le cinquième article défendait de vendre des chapeaux de castor audessus de 50 liv.

La licence, ou plutôt la liberté de l'industrie se rétablit de nouveau pendant les guerres étrangères que la France eut encore à soutenir. On inventa pour lors les guipures et autres ornemens de soie qui se mettaient sur les habits des femmes, et qui leur coûtaient presque autant que l'or et l'argent. Ils furent défendus par une déclaration de 1660, que l'on modifia cependant l'année suivante, sur les réclamations des passementiers.

Plusieurs ordonnances furent aussi rendues, vers cette époque, pour défendre l'usage des dentelles étrangères; et en 1669 on renouvela la défense de se servir de carrosses, litières, chaises ou calèches dorées en tout ou en partie.

On a vu plus haut divers règlemens contre l'excès du luxe de la vaisselle et des meubles d'or et d'argent: on peut juger du point où ce luxe était porté, par l'ordonnance de 1672, qui défend de vendre des bassins d'argent au-dessus du poids de douze marcs, et de fabriquer en ce métal précieux, des buires, seaux, cuvettes, chenets, feux, brasiers, chandeliers à bran

(1) 26 octobre 1656.

ches, girandoles, plaques à miroirs, miroirs, cabinets, tables, guéridons, paniers, corbeilles, vases, urnes, et tous autres ustensiles d'argent massif ou appliqué sur bois, cuirs et autres matières.

[ocr errors]

Quelques années après (1), on défendit de faire dorer aucun meuble de bois, tel que chaises, tables, bois de lits, etc.; et dans l'année 1687, l'ordonnance contre les ouvrages d'orfévrerie ayant été renouvelée, il fut décidé que tous ceux qui existeraient seraient brisés et fondus après que la façon en aurait été remboursée à l'ouvrier au prix d'estimation. A cette occasion, on trouva chez un orfèvre un brasier d'argent d'un pied et demi de haut sur deux pieds trois pouces de diamètre il était du poids de cent trois marcs quatre gros, et la façon en fut estiméc à 100 sous le marc. Le marc valait alors 29 liv. Le poids total des divers ouvrages défendus que l'on trouva chez les orfèvres, fut de 3266 marcs.

Une ordonnance plus sévère encore fut rendue deux ans après. On fixa le poids de tous les différens objets de vaisselle, et l'on ordonna que tous ceux d'un poids défendu, qui feraient partie d'un inventaire particu lier, seraient brisés et fondus, sans pouvoir être exposés en vente publique.

Le dernier édit de Louis-le-Grand contre le luxe, est du mois de mars 1700: il renouvelle et amplifie tous les édits précédens, et fixe la jurisprudence en cette matière. Après avoir indiqué les objets qui ne

(1) 10 mars 1679.

devront jamais être faits d'argent, il fixe le poids qui pourra être donné aux objets permis: ainsi, les bassins pourront peser douze marcs, les plats huit marcs,

les assiettes trente marcs la douzaine, les soucoupes cinq marcs chacune, les aiguières sept marcs, les sucriers trois marcs; les salières, poivrières et autre menue vaisselle, deux marcs. Il défend aux banquiers, orfèvres et marchands de vendre ou acheter l'argent et l'or au-dessus du prix fixé par les tarifs des cours de monnaie. De là, l'édit passe aux vêtemens, puis aux carrosses et aux meubles : il défend de mettre sur les tables, bureaux, armoires et boîtes de pendules et horloges, sur les consoles et autres meubles, des figures et ornemens de bronze doré. Enfin, par le dernier article de cette ordonnance, il est défendu aux femmes, et aux filles non encore mariées, des grcffiers, notaires, procureurs, commissaires, huissiers, marchands et artisans, de porter aucunes pierreries de quelque nature que ce puisse être, à la réserve de quelques bagues; ni aucune étoffe, galons, franges ni broderies d'or et d'argent.

Depuis la mort de Louis XIV, les règlemens contre le luxe des habits sont tombés en désuétude. Les véritables principes de l'économie politique étant mieux connus, on a senti que l'administration ne saurait intervenir pour arrêter ce mouvement de la civilisation, sans nuire au progrès de l'industrie et compromettre une autorité dont on ne pouvait plus se dissimuler l'impuissance en pareil cas.

[ocr errors][ocr errors][merged small][merged small][merged small]

L'AUTEUR d'un Mémoire sur l'usage des carrosses, commence ainsi ce petit ouvrage (2):

« Le R. P. de Montfaucon, dans ses Antiquités (3), << a fait la description des chars de triomphe dont se << servaient les Grecs, les Romains, et les autres na<«<tions. Dans la seconde partie du même tome (4), il <«< indique les diverses espèces de chariots, et autres

voitures roulantes à deux et à quatre roues, tirées << par deux, quatre, six ou huit chevaux, dont se ser<< vaient les anciens pour transporter leurs armes, ba« gages, ustensiles et marchandises.

<< Toutes ces voitures roulantes, à l'exception des «< chars de triomphe que l'on accordait par honneur << à ceux qui avaient vaincu les ennemis, et des chars << sur lesquels les généraux d'armée étaient montés

(1) Extr. de sa Mythologie française.

(2) Voyez le t. 2 des Variétés historiques, etc., p. 87. Paris, 1752, 4 vol. in-12.

(3) T. 4, part. 1, l. 6, c. 5, p. 162 et suiv. 6, p. 190 et suiv.

(4) L.

I, C.

II. 3e LIV.

(Edit.).

31

« PreviousContinue »