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« dié à Louis III, son frère (1). René se plaisait tant « à la joûte, qu'il se trouvait presque toujours en ces « occasions, où il faisoit tellement paraître sa vertu « et son adresse, qu'il gagnoit le plus souvent le prix,... << Il alla joûter contre des gentilshommes qui gar<< daient un Pas, à force d'armes, entre Razilly et « Chinon, en Touraine...... Le prix du Pas lui fut << publiquement adjugé. On fit alors les vers suivans:

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-René, en l'an 1464, institua à Angers l'ordre du « Croissant, qui eut pour devise: Loz en Croissant; «loz signifie louange. On portait ce croissant sous le << bras droit, attaché à une chaîne d'or sur la manche. << Il avait pour devise des réchauts ou chaufferettes « pleines de feu, au bas desquelles il y avait cette «< inscription: D'ardent désir. Il y faisait mettre au« près un chapelet avec des patenôtres, et au milieu « ces mots : Dévot lui suis. »

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On voit encore ses armoiries et ces emblêmes audessus de la porte d'entrée de la salle des Pas-Perdus.

(1) Le manuscrit de cet ouvrage, enrichi de miniatures, se trouve à la Bibliothèque du roi. Nous y reviendrons dans un autre lieu. (Edit. C. L.)

PLAINTES A GASSENDI

SUR LES USAGES PEU CHRÉTIENS DE SES COMPATRIOTES, ET SUR L'INDÉCENCE DE LEURS MŒŒURS,

à l'occasion dés bouffonneries ridicules

avec lesquelles on célèbre à Aix la fête du Saint-Sacrement.

TRADUIT LIBREMENT DU LATIN (1).

L'ABUS contre lequel on s'emporte ici avec tant de raison, n'a point cessé (2). On vient encore à Aix de tous les coins de la Provence, où cette ville est située, assister à des cérémonies indécentes, que ni la sagesse des magistrats ni le zèle éclairé des évêques n'ont pu supprimer. Peut-être cette satire, qui est du célèbre Gabriel Naudé (3), eut-elle ralenti l'ardeur

(1) Extr. du Conservateur de juillet 1757. (2) Au milieu du dernier siècle.

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que

(3) Ce n'est point Naudé, comme on l'a cru long-temps, qui est l'auteur de la lettre à Gassendi, mais Mathurin Neuré, ami et disciple de ce dernier. Voici le titre exact de l'original, qui est fort rare :

Querela ad Gassendum de parùm christianis provincialium suorum ritibus, nimiùmque insanis eorumdem moribus: ex occasione ludicrorum, quae Aquis-Sextiis in solemnitate corporis Christi ridiculè celebrantur.

Neuré, dont l'indignation n'est pas exempte d'amertume, et même de sarcasme, a été réfuté dans quelques-unes de ses déclamations par Joseph du Haitze, auteur d'une explication mystique dont il sera parlé ci-après. Nous opposerons

des gens, très-sages d'ailleurs, ont pour un usage insensé, et préparé sa suppression, s'il l'eût écrite dans notre langue au lieu de l'écrire en latin, et si elle eût été aussi connue qu'elle l'est peu. L'autorité et les représentations ont souvent moins de force pour déraciner une coutume vicieuse, que n'en a le ridicule jeté à propos.

Lorsque M. l'abbé Boileau donna son Histoire des Flagellans, on lui sut mauvais gré de quelques tableaux un peu vifs qui s'y trouvent répandus; nous ne croyons point être exposés au même reproche, dont la différence des circonstances doit nous sauver. M. l'abbé Boileau faisait l'histoire d'un mal qui n'existait plus; on n'aurait aucun intérêt à avoir connaissance qu'il eût existé, si l'on ne pouvait le retracer sans s'exposer à en causer un autre. C'était une raison pour que l'on fût en droit d'exiger de lui qu'il adoucît ses couleurs. Le mal au contraire dont il s'agit dans l'ouvrage de Naudé, subsiste encore; et indépendamment de la religion, l'honnêteté publique est intéressée à le voir s'éteindre. Nous aurons soin d'ailleurs de représenter les choses d'une manière qui ne blesse point la décence, et ce sera plutôt le tableau de la folie humaine que celui du dérèglement que nous offrirons. Au reste, l'on ne peut guère faire le procès à la chaleur avec laquelle s'exprime Naudé, sans le

les justifications à la plainte, sur les chefs les plus importans. (Voyez les notes et les pièces supplémentaires.) (Edit. C. L.)

faire en même temps à l'emportement plein de charité que la plupart des Pères de l'Eglise ont montré contre les vices de leur temps, dont on ne saurait les aceuser d'avoir fardé la difformité.

entre trop

Cette satire, qui est devenue fort rare, ainsi que la plupart des ouvrages de Naudé, contient quatrevingt-trois pages. Les treize premières n'offrent qu'une sortie des plus vives, où les divertissemens d'Aix sont comparés aux fêtes de la déesse Cotytto, aux bacchanales, aux lupercales, enfin à tout ce que le paganisme a eu de plus dissolu. Le récit des choses qui se passent à Aix mettra les lecteurs à portée de juger s'il d'amertume dans les plaintes de Naudé. Plus les fêtes que l'Eglise célèbre sont solennelles, plus la sainteté de notre religion veut que l'on s'y prépare par des actes vraiment religieux. C'est alors que la prière, l'aumône et la pénitence, doivent plus que jamais être mis en usage. On tient à Aix, dit Naudé, une conduite bien différente. Long-temps avant le jour dont il s'agit, on ne s'occupe dans cette ville que de l'apprêt et de la répétition de réjouissances insensées. Il se tient une assemblée de ville, où l'on élit des intendans de spectacles, c'est-à-dire des directeurs de bouffons et de bateleurs, dont l'emploi est de faire le choix des extravagances qui doivent se commettre, Ces directeurs sont au nombre de deux : l'un s'appelle le prince des amoureux, l'autre le chef du peuple, ou plutôt de la populace: tout roule sur ces deux personnages. Le premier est tiré du corps de la noblesse, et le second choisi dans la plus vile ca

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naille. Dès que ce choix est fait, on confère les emplois subordonnés : il y a un roi, des secrétaires, des scribes, des délateurs, des calomniateurs; et un autre officier prend le titre d'abbé des revendeurs, des cabaretiers, des maquignons et des manouvriers. Ils n'ont pas seulement le nom de roi, mais encore toutes les marques extérieures de la royauté, et l'on brigue avec ardeur l'avantage d'être mis au nombre de leurs gardes et de leurs officiers. Ce que l'on se dispute le plus vivement, c'est le partage des rôles et des des rôles et des masques les plus ridicules. Comme les habits de caractères qui servent à ces spectacles grotesques, se gardent avec soin à la maison-de-ville, il n'est permis à personne de figurer à la fête, s'il n'en a une permission expresse de ceux qui sont chargés de l'exécution. Il y a une espèce de droit héréditaire qui met celui qui en jouit en possession de prendre tel ou tel déguisement; on n'y a cependant point toujours égard, et rien n'est plus plaisant que les disputes qui s'élèvent à ce sujet. « C'est moi, dit l'un, qui dois porter la couronne et le sceptre de Pharaon; c'est moi, dit un autre, qui dois représenter le veau d'or. » Tel proteste qu'il ne souffrira pas qu'on le dépouille des tables, de la verge et des cornes de Moïse, dont sa tête est en possession d'être parée tel se débat comme un énergumène, parce qu'il prétend au rôle du diable, qui lui est échu par succession; on l'entend crier : « C'est moi qui fais le diable tous les ans; mon père a été diable, mon grand-père a été diable, diable a été mon bisaïeul, et enfin, de temps immémorial, le diable a été re

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