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PARIS. TYPOGRAPHIE DE HENRI PLON, IMPRIMEUR DE L'EMPEREUR, RUE GARANCIÈRE, 8.

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OEUVRES

DE

POTHIER

ANNOTÉES ET MISES EN CORRÉLATION
AVEC LE CODE CIVIL ET LA LÉGISLATION ACTUELLE

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DU

CONTRAT DE MARIAGE.

ARTICLE PRÉLIMINAIRE.

1. Nous avons cru ne pouvoir mieux terminer notre Traité des Obligations, et des différents contrats et quasi-contrats d'où elles naissent, que par un Traité du Contrat de Mariage, ce contrat étant le plus excellent et le plus ancien de tous les contrats.

Il est le plus excellent, à ne le considérer même que dans l'ordre civil, parce que c'est celui qui intéresse le plus la société civile.

Il est le plus ancien, car c'est le premier contrat qui ait été fait entre les hommes. Aussitôt que Dieu eut formé Eve d'une des côtes d'Adam, et qu'il la lui eut présentée, nos deux premiers parents firent ensemble un contrat de mariage; Adam prit Eve pour son épouse, en lui disant: Hoc nunc os ex ossibus meis, et caro de carne meâ.... et erunt duo in carne unâ : et Eve prit réciproquement Adam pour son époux.

2. Le terme du contrat de mariage est équivoque : il est pris dans ce Traité pour le mariage même : ailleurs il est pris dans un autre sens, pour l'acte qui contient les conventions particulières que font entre elles les personnes qui contractent mariage 1.

Nous verrons dans ce Traité du Contrat de Mariage, pris dans le premier

sens.

1o Ce que c'est que le contrat de mariage; ses différentes espèces chez les Romains, et par quelles lois il se régit;

2° Quelles sont les choses qui précèdent le contrat de mariage;

3° Quelles sont les personnes entre lesquelles il peut ou ne peut pas être valablement contracté;

4o Comment se contracte le mariage, et ce qui doit s'observer dans sa célébration.

5o Nous traiterons des effets du mariage, et de certains mariages qui, quoique valablement contractés, sont néanmoins privés des effets civils;

C'est ainsi que les rédacteurs du Code civil ont, dans le premier livre, tit. 5, traité du mariage, c'est-à-dire du contrat qui unit les époux, et dans le livre troisième, tit. 5, ils ont exposé

TOM. VI.

les règles du contrat de mariage quant aux biens et aux droits respectifs des époux. Il est facile de voir que l'un tient à l'état des personnes, et l'autre aux intérêts pécuniaires.

1

6o De la cassation des mariages, de la dissolution, soit quant au lien, soit quant à l'habitation;

7o Des seconds mariages.

Nous ferons suivre ce Traité par des traités sur les conventions les plus ordinaires qui accompagnent le contrat de mariage dans les provinces régies par le droit coutumier, telles que sont la communauté et le douaire; et sur les droits qui naissent du mariage, tels que sont les droits de puissance maritale et de puissance paternelle.

PREMIÈRE PARTIE.

CE QUE C'EST QUE LE CONTRAT DE MARIAGE; QUELLES ÉTAIENT CHEZ LES ROMAINS LES DIFFÉRENTES ESPÈCES DE MARIAGES; ET PAR QUELLES LOIS LE MARIAGE EST RÉGI.

CHAPITRE PREMIER.

Ce que c'est que le contrat de mariage

3. On peut définir le mariage, un contrat revêtu des formes que les lois ont prescrites, par lequel un homme et une femme, habiles à faire ensemble ce contrat, s'engagent réciproquement l'un envers l'autre à demeurer toute leur vie ensemble dans l'union qui doit être entre un époux et une épouse.

Il suit de cette définition, qu'un mariage, où l'on n'aurait pas observé quelqu'une des formalités que les lois requièrent pour sa validité, ou qui aurait été contracté entre des personnes que les lois rendent inhabiles, n'est pas un véritable mariage: c'est ce que nous verrons en détail dans la suite de ce Traité.

4. L'union dans laquelle les parties, par le contrat de mariage, s'engagent mutuellement de vivre, est principalement l'union de leurs esprits et de leurs volontés. Le commerce charnel n'est point de l'essence du mariage; celui de saint Joseph et de la sainte Vierge ne laissait pas d'être un véritable mariage, quoiqu'ils aient l'un et l'autre conservé toujours leur virginité.

C'est ce qu'enseigne saint Augustin dans son ouvrage de Nupt. et Concup. lib. 1, cap. 9, où il prouve, par l'exemple de saint Joseph et de la sainte Vierge, que, lorsqu'un mari et une femme s'accordent à garder la continence, leur mariage n'en est pas moins un véritable mariage et le lien conjugal qui les unit, bien loin de rien perdre pour cela de sa force, n'en est au contraire que plus fort: Quibus placuerit ex consensu abusu carnalis concupiscentiæ in perpetuum continere, absit ut inter illos vinculum conjugale rumpatur : imò FIRMIUS erit, quò magis ea pacta secum inierint quæ cariùs concordiùsque servanda sunt, non voluptariis nexibus corporum, sed voluntariis affectibus animorum: neque enim fallaciler ab Angelo dictum est ad Joseph, Noli timere accipere Mariam CONJUGEM tuam. Conjux vocatur ex primâ fide desponsationis quam concubitu nec cognoverat, nec fuerat cogniturus; nec perierat, nec mendax manserat CONJUGIS appellati, ubi nec fuerat, nec futura erat carnis ulla commixtio, etc.

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