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navires de cartel (qui peuvent très bien aussi être des navires de geurre).

Comme vous, je suis d'avis que l'Institut doit maintenir le principe de l'immunité de la propriété ennemie même sur mer et que cette immunité doit s'étendre aussi aux navires publics qui ne sont pas des navires de guerre et à leurs chargements. Comme les règles doivent être les mêmes, ou à peu près les mêmes, pour ces deux catégories, il y aurait avantage à traiter en premier lieu des navires privés et de leurs cargaisons et de renvoyer, pour les navires publics, à ces dispositions, en y ajoutant les exceptions, qui pourront être jugées nécessaires. Quant aux cas dans lesquels la saisie et la confiscation d'un navire privé ennemi ou de sa cargaison seraient admises, je suis d'avis qu'en principe il faut se borner aux cas où de telles mesures seraieni autorisées s'il s'agissait d'un navire neutre. Dans tous les cas il ne paraît pas justifié de qualifier les actes mentionnés sous les numéros 7 et 8 de l'art. 39 transport de contrebande et violation de blocus comme des actes constituant une participation aux opérations de guerre. Pour ce qui concerne la faculté de réquisitionner ou de retenir un navire ennemi ou sa cargaison, on pourrait peut-être l'admettre sous des conditions un peu moins restrictives que celles sanctionnés par les art. 52 et 53 du Règlement concernant la guerre sur terre. Mais la règle du dernier alinéa de l'art. 52, ainsi que celle figurant à la fin de l'art. 53, doivent naturellement être maintenues.

D'après les idées exprimées plus haut il serait naturel de traiter aussi du blocus et de la contrebande de guerre. Si l'on voulait maintenir une différence essentielle entre le traitement de la propriété privée ennemie et celui de la propriété neutre, il faudrait ne pas passer sous silence les règles sur les caractères constitutifs de la qualité ennemie des navires et de ses cargaisons, et les règles concernant le transfert du pavillon.

En terminant ces observations qui, sans doute, n'auront pas beaucoup de valeur, vu le peu de temps que j'ai eu à ma disposition, je tiens à vous rendre mon hommage le plus sincère à votre projet et à vous exprimer mes sentiments les plus distingués.

BEICHMANN

Associé de l'Institut de droit international.

i. Observations de M. L. de Bar.

Göttingen, 28 mai 1912.

TRÈS HONORÉ CONFRÈRE,

Conformément à la circulaire de M. notre Secrétaire général et à votre invitation, je vous communique les observations suivantes concernant votre projet d'un manuel de guerre maritime, quoique, de même que M. Holland, je doute que l'Institut doive, sans discussion préalable des matières en séance plénière, voter en bloc, même un projet en général excellent (1).

1) J'approuve d'abord la disposition de votre projet et, de même, je suis d'avis comme vous qu'il serait pour le moment trop difficile et trop dangereux d'étendre le projet aux règles trop peu précisées concernant les neutres. Pourtant il faut le dire dans un manuel qui doit servir de guide aux commandants en mer, les dispositions qui concernent les neutres, selon mon opinion, ne devraient pas être omises, parce que l'observation au même moment de deux manuels, dont l'un concerne les ennemis et l'autre les neutres, serait une source de doutes et de méprises souvent déplorables (v. aussi les observations de M. Kaufmann). Il faudra donc réserver la rédaction d'un manuel définitif comprenant les deux espèces de règles.

2) De même, comme vous, je suis d'avis que l'Institut doit affirmer de nouveau comme principe: l'inviolabilité de la propriété privée ennemie. Mais je propose en outre, quoique je ne doute pas de l'opinion de la majorité de notre Institut, une discussion préalable sur ce principe, parce que, dans ces dernières années, l'opinion contraire, dans les parlements,

(1) Comme vous le savez je n'ai pas pris part à la réunion de la Commission préparatoire à Paris.

dans les cabinets et même dans la littérature, a gagné plus d'adhérents qu'il n'y en avait il y a trente ans. Je crois qu'il serait utile de démontrer par une discussion que la chasse sur mer à la propriété privée n'est plus un moyen de guerre aussi eficace qu'autrefois, et que, par contre, l'abolition de cette chasse est un moyen très efficace et très pratique de restreindre les armements maritimes et, en conséquence, les lourdes dépenses qui ruinent les finances des Etats (1).

En même temps, par l'adoption de ce principe, les difficultés juridiques assez grandes concernant la transformation de navires privés en navires de guerre diminueraient d'importance; car, s'il n'y a plus de chasse aux navires privés ennemis, cette transformation sera d'une utilité beaucoup moindre, les navires, qui servent au transport régulier de marchandises et de voyageurs ne pouvant être transformés d'une manière suffisante pour combattre contre les cuirassés. Seulement, pour l'interception de navires chargés de contrebande, on pourrait faire usage de ces navires transformés

3. En ce qui concerne quelques dispositions spéciales. a) La rédaction de l'article 4 ne me semble pas parfaitement correcte. Aux termes de cette rédaction. « La transformation... peut-être faite... dans un port ou dans les eaux territoriales de l'Etat dont le navire porte le pavillon» la transformation serait permise dans les ports et les eaux territoriales d'un Etat neutre, si le navire, acheté par un Etat belligérant, portait jusqu'alors le pavillon de l'Etat neutre, ce qui n'est pas conforme aux règles du droit des gens en vigueur. Je propose donc de mettre simplement.

<< La transformation d'un navire privé en navire militaire

(1) Plus utile encore à la restriction des armements et dès lors des dépenses écrasantes serait, cela va de soi, l'abolition du droit de capture et de confiscation des marchandises, dites contrebande de guerre, le droit de confiscation étant naturellement réservé en cas de rupture d'un blocus.

dans un port ou dans les eaux territoriales d'un Etat neutre est défendue »>.

Abstraction faite de cette modification de rédaction, l'on devrait selon moi défendre la transformation en pleine mer, parce qu'une telle transformation peut même être regardée en quelque sorte comme une perfidie, envers un Etat neutre, dans le port duquel le navire est entré auparavant pour gagner en en sortant une bonne occasion de faire la chasse aux navires privés ennemis. En cas de violation de cette défense l'équipage n'aurait pas droit au traitement des prisonniers de guerre.

b) L'art. 12 du projet interdit l'usage de projectiles explosibles ou chargés de matières fulminantes ou inflammables. Cette interdiction ne me semble pas soutenable. L'art. 23, sub. c du Règlement de La Haye concernant la guerre sur terre interdit seulement d'employer des armes, des projectiles ou des matières propres à causer des maux superflus, l'usage de tels projectiles d'un poids inférieur à 400 grammes (1); or, si l'on permet de se servir des aéronefs et hydro-aéroplanes comme moyens de destruction, et notamment, comme actuellement pendant la guerre Tripolitaine, pour tuer directement des hommes par des bombes jetées du haut des aéronefs, il faut, en abolissant en quelqne sorte la convention mentionnée de St-Pétersbourg, permettre l'usage de petites balles explosibles contre les aéronefs ennemis. C'est souvent l'unique moyen efficace de défense contre ces terribles machines, pour des soldats et des établissements non pourvus de canons propres à tirer sur des aéronefs.

c) La défense exprimée par l'alinéa second de l'article 15, quoique conforme aux résolutions de l'Institut, va trop loin. Il est possible que le placement de mines automatiques dans un détroit, soit le seul moyen assez sûr pour défendre

(1) Peut-être cette restriction est-elle omise dans l'article par une faute typographique.

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