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On a vu dans le traité franco-danois, ci-dessus cité, que, pour un certain nombre de matières sur lesquelles, d'après la loi territoriale, l'autorité judiciaire serait compétente, le litige ne doit être soumis à l'arbitrage qu'après que la juridiction nationale aura statué définitivement.

Il y a lieu de compléter cette disposition par une autre qui constate que l'exception de la chose jugée ne pourra jamais être opposée dans certains cas à préciser.

Une autre question qui à une certaine importance, bien qu'il soit à souhaiter qu'aucun Etat ayant le sentiment de sa propre dignité ne s'en servirait, c'est celle de la prescription technique (je veux dire la prescription dérivant de la loi nationale) pendant que la réclamation reste entre les mains de la diplomatie. Aussitôt que le gouvernement qui a présenté la réclamation s'est retiré de l'affaire et que la partie qu'il a représentée en aura été dument avertie, il n'y a plus de raison pour que la prescription ordinaire nationale ne commence pas à courir. Et dans le cas où, par suite de la prescription, après dessaisissement de l'Etat en question, l'affaire est rayée, elle ne devrait plus être portée devant la Cour de La Haye, puisque la partie privée pourrait sans cela de son propre chef annuler l'étape de la juridiction nationale qu'il y a lieu de

conserver.

Le projet qui suit tient compte des considérants exposés ci-dessus mais n'essaie pas de comprendre dans l'arbitrage les différends qui le plus souvent mènent à la guerre. L'histoire récente à démontré la futilité des efforts faits en vue de les soumettre au règlement pacifique.

Pour permettre à l'arbitrage de régler de telles questions, il faudrait permettre aux juges de se placer au point de vue du Dieu des batailles, de la fortune des guerres, du sort du conflit armé. Ils auraient à tenir compte, comme je l'ai dit, de

l'intérêt prépondérant, de l'équilibre des Etats, de la force tellement supérieure de l'un que l'issue d'une guerre serait absolument certaine. On cherche en vain des formules d'arbitrage permettant des solutions où la justice joue si peu de rôle. Pour des cas pareils il n'y a que la médiation, à laquelle on pourrait, dans certaines éventualités, donner le caractère d'une menace d'intervention. En général pour le présent, le mieux qu'on paraisse pouvoir faire c'est de stimuler la condamnation publique des violences intéressées, des violations des traités et de toute l'immoralité internationale qui continue à souiller notre époque.

Projet de Convention Générale d'arbitrage obligatoire

Les Hautes Puissances Contractantes etc.:

Attendu que dans l'article 38 de la convention du 18 octobre 1907, pour le règlement pacifique des conflits internationaux, il est déclaré que :

<< dans les questions d'ordre juridique, et en premier lieu «dans les questions d'interprétation ou d'application des « Conventions internationales, l'arbitrage est reconnu par <«<les Puissances contractantes, comme le moyen le plus << efficace et en même temps le plus équitable de régler les «litiges qui n'ont pas été résolus par les voies diplomati<< ques. >>

et que

<< en conséquence, il serait désirable que dans les litiges << sur les questions susmentionnées, les Puissances Con<< tractantes eussent, le cas échéant, recours à l'arbitrage, << en tant que les circonstances le permettraient. >> Affirmant de nouveau ce sentiment, et animées du désir de

donner un plus grand effet pratique au principe ci-dessus énoncé.

Ont arrêté, d'un mutuel accord, les dispositions suivantes : 1. Les Hautes Puissances Contractantes s'engagent à soumettre à l'arbitrage de la Cour de La Haye les différends:

a. qui résultent de l'interprétation du sens des clauses contenues dans toutes conventions actuellement en vigueur entre Elles qui contiennent une clause d'arbitrage;

b. qui résultent de l'application des dites conventions, soit par suite de non-exécution soit par suite d'exécution imparfaite de leurs clauses :

c. qui sont d'ordre juridique, c.-à-d. susceptibles d'être résolus par des indemnités pécuniaires.

2. Les H.P.C. pourront, par simple notification au Bureau International créé par l'art. XXII de la Convention du 29 juillet 1899, ci-dessus cité, faire conjointement ou séparément, les additions, qu'Elles jugeront utiles, à la liste établie dans l'article précédent.

Dès maintenant les Puissances suivantes : (Désignation des Puissances adhérentes.)

S'engagent à soumettre à l'arbitrage de la Cour de La Haye, les différends entre Elles qui n'auraient pu être réglés par les voies diplomatiques concernant : (p. ex.) la pêche, les câbles sous-marins, les questions sanitaires, les incidents de frontière, abordages entre navires publics et navires privés étrangers, etc.

3. Toute affaire des catégories ci-dessus mentionnées est arbitrable.

1° Quand les deux Parties Contractantes sont directement en jeu;

2o Quand une des Parties est un Etat contractant et l'autre un individu ou des individus appartenant à l'Etat contractant qui propose l'arbitrage.

4. Lorsqu'il s'agit d'un différend du ressort des autorités judiciaires nationales, selon les lois territoriales, les Parties Contractantes ont le droit de ne pas soumettre le différend au jugement arbitral, jusqu'à ce que la juridiction nationale compétente se soit prononcée définitivement (1).

Quand une affaire est ainsi justiciable, l'Etat défendeur n'aura pas le droit de soulever la prescription tant que l'affaire n'est pas sortie de la voie diplomatique et, en ce cas, la prescription ne courra que du moment où la partie privée aura reçu notification par écrit que le gouvernement par lequel elle est représentée s'est dessaisi de l'affaire.

5. Les engagements pris dans la présente convention n'impliquent pas l'obligation de soumettre à la Cour de La Haye des différends ayant un caractère local et qui pourront mieux être résolus par un arbitrage sur place. Une transcription complète des actes et procès-verbaux de tout arbitrage tenu ailleurs qu'à la Cour de La Haye sera, toutefois, déposée aux archives de la dite Cour.

6. La nomination de l'arbitre ou des arbitres et la fixation de tous les détails de procédure auront lieu en conformité des articles 45 et 52, de la Convention du 18 octobre 1907, cidessus citée.

7. Pour tout différend qu'une Puissance Signataire considérerait comme n'étant pas susceptible d'être soumis à l'arbitrage, les Puissances Signataires s'engagent, dans la mesure du possible, à donner effet à l'article 8 de la Convention du 18 octobre 1907, en nommant, chacune des parties en litige, un médiateur.

8. Toute Puissance Signataire pourra se retirer de la pré

(1) Basé sur l'art. 6 du traité Italo-Hollandais du 30 novembre 1909.

sente Convention en donnant notification, au susdit Bureau International de La Haye, de son intention à cet effet, un an d'avance.

9. Le dit Bureau International de La Haye est chargé de transmettre immédiatement aux Puissances Signataires toutes communications qui lui seront adressées au sujet de la présente Convention.

En foi de quoi, etc.

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