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n'a pas perdu tout droit sur les marchandises consignées, alors d'ailleurs qu'il en est resté nanti. Paris, 17 déc. 1867 (S. 68. 2. 186. P. 68. 808).

137. Quoi qu'il en soit, dans l'usage on donne constamment le nom de privilége au droit de rétention accordé au commissionnaire.

138. Ce privilége ne cesse pas par cela seul que le commissionnaire a excédé les bornes de son mandat. Bruxelles, 15 juin 1822.

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139. Il peut être réclamé par tout bailleur de fonds, même non commerçant, qui se trouve dans les circonstances prévues par l'art. 95, C. com. Cass., 23 avr. 1816; Nancy, 14 déc. 1833 (S. 39. 2. 239. P. 45. 2. 128); Cass., 6 mai 1845 (S. 45. 1. 503. P. 45. 2. 126. D. 45. 1. 231); Bordeaux, 28 janv. 1846 (S. 46. 2. 213); Cass., 14 juin 1877 (S. 77. 1.408. - P. 77. 1083); Troplong, n. 159; Delamarre et Lepoitvin, t. 3, n. 241; Rivière, p. 278; Alauzet, t. 2, n. 847; Massé, t. 4, n. 2830; Namur, Cours de dr. commerc., t. 1, § 126, p. 356. — V. inf., n. 165.

140. Mais ce privilége ne peut être revendiqué par le banquier qui a fait à un commerçant d'une autre place des avances sur actions de chemins de fer ou autres valeurs industrielles. Cass., 13 janv. 1868 (S. 68. 1. 131. P. 68. 299. D.68. 1. 125); Massé, t. 4, n. 2831.

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Non plus que par le commis ou représentant de commerce sur une autre place. Bordeaux, 16 août 1871 (Rec. de cette cour, 71. 224). V. sup., n. 11.

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141. Pour faciliter l'exercice du privilége en question, le commissionnaire peut, lorsque les expéditeurs, suffisamment avertis, diffèrent de le rembourser de ses avances, faire ordonner sur requête, non communiquée, la vente des marchandises consignées entre ses mains, et s'en appliquer le prix jusqu'à concurrence de ce qui lui est dû. V. inf., n. 216.

Art. 2.

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Conditions nécessaires pour donner naissance au privilége.

142. Aux termes de l'art. 95, C. com., tout commissionnaire a privilége sur la valeur des marchandises à lui expédiées, déposées ou consignées, par le seul fait de l'expédition, du dépôt ou de la consignation, pour tous les prêts, avances ou paiements faits par lui, soit avant la réception des marchandises, soit pendant le temps qu'elles sont en sa possession. Si les marchandises ont été vendues et livrées pour le compte du commettant, le commissionnaire se rembourse sur le produit de la vente du montant de sa créance, par préférence aux créanciers du commettant.

Ainsi, il résulte de cet article que le commissionnaire a toujours privilége soit que le commettant et le commissionnaire résident ou non dans la même ville, soit que les marchandises aient ou non été expédiées d'une place sur une autre, soit encore qu'elles aient été déposées avec ou sans mandat de vendre. Demangeat, sur Bravard, t. 2, p. 213, note 3; Alauzet, t. 2, n. 878; Rivière, p. 278; Boistel, p. 348.

143. Le privilége dont il s'agit n'existe d'ailleurs que sous la condition prescrite par l'art. 92, C. com., c'est-à-dire qu'autant que les marchandises ont été mises et sont restées en la possession du commissionnaire ou d'un tiers convenu entre les parties: possession que le commissionnaire est réputé avoir lorsque les marchandises sont à sa disposition dans ses magasins ou navires, à la douane ou dans un dépôt public, ou quand, avant leur arrivée, il en est saisi par un connaissement ou par une lettre de voiture. C. com., art. 95.

144. Que faut-il pour que des marchandises soient considérées comme expédiées dans le sens de l'art. 95? — Il a été jugé que des marchandises destinées à un commissionnaire doivent être réputées expédiées, dans le sens de l'art. 95, C. com., lorsqu'au fur et à mesure qu'elles sortent des magasins de l'expéditeur, elles sont chargées sur un bateau; et peu importe que le chargement du bateau ne soit pas complet. Il en résulte qu'en cas de faillite de l'expéditeur, le commissionnaire qui est saisi par une lettre de voiture, peut exercer son privilége sur celles de ces marchandises qui se trouvent chargées à ce moment. Orléans, 18 avr. 1866 (S. 67. 2. 108. P. 67. 465); Demangeat, sur Bravard, t. 2, p. 314, note 1.

145. Ce privilége a encore lieu, bien que les marchandises n'aient pas été adressées directement au commissionnaire du point de départ; il suffit que, pendant qu'elles étaient en cours de voyage, elles lui aient été transmises par la passation à son ordre de la lettre de voiture, ou par une mention équivalant à un passé à ordre si la lettre n'était pas à ordre. Aix, 25 août 1831 (S. 33. 2. 162. — P. chr. - D. 32. 2. 218); Rouen, 29 nov. 1838 (S. 39. 2. 33. P. 38. 2. 577. D. 39. 2. 65); Douai, 29 nov. 1843 (S. 44. 2. 165. P. 44. 2. 154. - D. 44. 2. 109); Rouen, 9 déc. 1847 (S. 48. 2. 201. - P. 48. 2. 80); Cass., 18 janv. 1860 (S. 60. 1. 737. P. 60. 329. D. 60. 1. 140); Troplong, Mandat, t. 1, n. 161; Delamarre et Lepoitvin, t. 2, n. 404, et t. 6, n. 96; Pouget, Commiss., t. 1, n. 128, p. 382 et suiv.; Alauzet, t. 2, n. 882 et 887; Massé, t. 4, n. 2834 et suiv.

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146. Peu importe également que la remise du connaissement ait été effectuée dans les dix jours de la cessation de paiements, le privilége du commissionnaire n'en existe pas moins si cette remise n'a eu lieu qu'en exécution de conventions antérieures

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faites en temps non suspect. Rouen, 7 juill. 1853 (S. 54. 2. 387. P. 55. 1. 191).

147. Mais le privilége ne peut être réclamé par le tiers auquel un commissionnaire chargé de faire des avances sur marchandises à lui expédiées a transmis par endossement le connaissement de ces marchandises qu'autant que l'endossement est régulier et notamment qu'autant qu'il exprime la valeur fournie. Cass., 1er mars 1843 (D. 43. 1. 183); Amiens, 29 juill. 1843 (D. 44. 2. 88); Cass., 25 juill. 1849 (S. 53. 1. 612. — P. 53. 2. 453. D. 53. 1. 187); 30 juill. 1850 (S. 50. 1. 241); Devilleneuve, note au Sirey sous l'arrêt de Douai du 5 janv. 1844 (S. 44. 2. 257); Troplong, Nantissement, n. 334-336; Nouguier, Lettre de change, t. 1, n. 635 et suiv.; Massé, Dr. comm., t. 4, n. 2880; Alauzet, t. 2, n. 783 et suiv.; Delamarre et Lepoitvin, t. 6, n. 215 et suiv; Rivière, p. 283; Duverdy, Contr. de transp., n. 21 Pouget, t. 1, n. 128, p. 390 et suiv.; Namur, t. 1, § 126, p. 357. — Contrà, Douai, 5 janv. 1844 (S. 44. 2. 257. - P. 45. 1. 226. D. 44. 2. 192); Rouen, 9 déc. 1847 (S. 48. 2. 201. P. 48. 2. 80).

148. Toutefois si ce tiers prouve que le commissionnaire endosseur du connaissement en a reçu réellement la valeur, il est fondé à exercer son privilége sur la marchandise, non-seulement à l'encontre de l'endosseur lui-même, mais aussi, en cas de faillite de ce dernier, à l'encontre de ses créanciers. Cass., 6 déc. 1852 (S. 53. 1. 612.-P. 53. 2.453.-D. 53. 1. 187). V. aussi Cass., 7 août 1867 (S. 67. 1. 381.-P. 67. 1045.-D. 67. 1. 327); Rouen, 7 févr. 1877 (Rec. Havre, 77. 2. 93); Alauzet, t. 3, n. 1368; Nouguier, Lettre de change, t. 1, n. 464; Bédarride, id., t. 1, n. 321.-V. toutefois, Massé, t. 3, n. 1574; Demangeat, sur Bravard, t. 3, p. 184.

149. Le connaissement et la lettre de voiture sont-ils les seuls actes capables de constater une tradition virtuelle?

L'affirmative n'est pas douteuse s'il s'agit d'effets mis en route à la destination du commissionnaire, soit que le commettant les ait expédiés de son propre domicile, soit qu'il les ait fait expédier d'un autre lieu. Le vœu de la loi est formel à cet égard. Cass. deux arrêts), 13 hov. 1850 (S. 50. 1. 769 et 774.- P. 51. 1. 385). 150. Toutefois, comme le Code de commerce n'impose point, à peine de nullité, certaines formes sacramentelles à la validité des lettres de voiture, on pourrait assimiler à une lettre de voiture des bulletins de chargement ou récépissés renfermant toutes les conditions exigées par l'art. 102, C. com. Cass., 31 juill. 1844 (S. 44. 1. 110. P. 44. 2. 673. — D. 44. 1. 355; 18 janv. 1860 (S. 60. 1. 737.-P. 60. 329). — V. aussi Cass., 31 juill. 1846 (D. 47. 1. 59); Troplong, Nantissement, n. 343; Alauzet, t. 2, n. 791; Massé, t. 4, n. 298; Duverdy, n. 20.

Au contraire, des bulletins de chargement ou récépissés qui ne contiendraient pas les mentions essentielles à la validité des lettres de voiture ne sauraient en tenir lieu et ne pourraient procurer au commissionnaire privilége sur la valeur des marchandises expédiées. Cass., 12 fév. et 13 nov. 1850 (S. 50. 1. 246 et 769); Massé, t. 4, n. 2885.

151. Si la marchandise ne voyage pas; si, par exemple, demeurant à Paris, je charge Jacques, de Landernau, de vendre ma marchandise, en dépôt à la douane de Brest, il devient impossible de remettre une lettre de voiture. On supplée alors valablement à cet acte par un pouvoir spécial de retirer les marchandises et de les vendre ensuite. Ce pouvoir met, en effet, les marchandises à la disposition du commissionnaire; le lieu où ces marchandises sont déposées devient son magasin. Delamarre et Lepoitvin, t. 3, n. 250.

152. Il en est de même s'il s'agit d'effets en mer qui ne voyagent pas actuellement à la destination du commissionnaire, ou qui se trouvent dans une contrée au delà des mers. La loi n'a pas voulu priver un commerçant de la faculté de les consigner, pas plus que de la faculté de les vendre, ni dépouiller le commissionnaire de son privilége pas plus que l'acheteur de son droit de propriété. Dans ce cas, la tradition est parfaite par la remise d'une facture clairement énonciative des effets consignés et du pouvoir de s'en saisir. Valin, sur art. 3, tit. 10, liv. 2, Ord. 1681; Parl. Paris, 11 mars 1752; Cass., 16 déc. 1835 (S. 36. 1. 50. P. chr. - D. 38. 1.90).

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153. Le privilége du commissionnaire ne frappe pas seulement la marchandise même, objet de l'expédition, du dépôt ou de la consiguation. En d'autres termes, il s'exerce nonseulement sur la marchandise à l'occasion de laquelle le commissionuaire a fait des déboursés, des frais, des paiements ou des avances, mais encore, pour le solde général de son compte, sur toutes celles dont il a la détention, quelque étrangères qu'elles soient au résultat de ce compte. C. com., 95.

154. Il est indivisible tant par rapport aux marchandises retenues, que par rapport aux dettes qu'il garantit. Delamarre et Lepoitvin, t. 3, n. 260.

155. Par suite, le privilége du commissionnaire qui a reçu des envois successifs de marchandises et qui a fait des avances successives au fur et à mesure de ces envois, s'exerce, pour chacune de ces avances, sur tous les envois antérieurs, et non pas seulement sur l'envoi qui a immédiatement précédé l'avance. Cass., 14 mars 1855 (S. 55. 1. 177.-P. 55. 2. 374. -D. 55. 1. 180); M seille, 22 janv. 1864 (J. Mars., 64. 1. 60);

TOME III.

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7 fév. 1867 (ibid.,67. 1. 101); Troplong, n. 211; Delamarre et Lepoitvin, t. 3, n. 391; Massé, t. 4, n. 2864; Demangeat, sur Bravard, t. 2, p. 314, note; Alauzet, t. 2, n. 277; Boistel, p. 349. Et il frappe même les marchandises consignées avec une destination spéciale. Aix, 18 fév. 1876 (S. 76. 2. 182.-P. 76. 804). 156. Mais le privilége du commissionnaire ne peut s'exercer que sur les marchandises qui sont, au su du commissionnaire, la propriété du commettant. Spécialement, lorsqu'un connaissement est remis à un commissionnaire pour sûreté d'avances à faire, et que la marchandise qui en forme l'aliment, appartient pour moitié à l'expéditeur et pour moitié au destinataire, le commissionnaire instruit de ce fait ne peut poursuivre sur l'intégralité de cette marchandise que le recouvrement des sommes par lui avancées en vue de cette marchandise même, et s'il est créancier de l'un des deux copropriétaires pour avances antérieures, c'est seulement sur la part de son débiteur qu'il peut exercer son privilége à cet égard. Marseille, 15 fév., et Aix, 26 juill. 1866 (J. Mars., 66. 1. 107 et 264).

157. De même, le privilége du commissionnaire ne peut s'étendre aux objets appartenant à des tiers et qui ont servi à faire arriver les marchandises aux mains du commissionnaire; par exemple, aux sacs renfermant les marchandises et qui sont la propriété dûment justifiée de tiers qui les avaient loués au commettant. Havre, 11 juill. 1871 (Rec. Havre, 71. 1. 97); Marseille, 18 janv. 1872 (J. Mars., 72. 1. 62).

Mais lorsque sur les connaissements il est mentionné que les sacs sont la propriété des chargeurs, les tiers porteurs des connaissements ou les consignataires des marchandises sont fondés à exercer leur privilége aussi bien sur les sacs que sur leur contenu. Havre, 11 juill. 1871 (Rec. Havre, 71. 1. 97).

Au surplus, il ne nous paraît ni équitable ni juridique de fixer en pareille matière une règle absolue. A défaut d'une convention fixant les droits conférés au commissionnaire sur les sacs et les fûts contenant les marchandises à lui expédiées, c'est dans les agissements des parties qu'il faut rechercher leurs intentions respectives sur ce point. S'il est constant en fait que le commissionnaire a fréquemment vendu des contenants expédiés, en avisant l'expéditeur qu'il appliquait le produit de ces ventes à se couvrir de ses avances, que l'expéditeur n'a jamais protesté contre ce mode de procéder et a même accepté à son débit les frais de réparation de contenants vendus avec leur contenu, il faudra admettre que les contenants étaient considérés par les parties comme frappés de privilége en faveur du commissionnaire. Peu importe que des réexpéditions de contenants vides aient été opérées par ce dernier, si ces réexpéditions n'étaient autre chose qu'une avance en nature faite par lui au

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