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15. En pratique, on remplace très-souvent la lettre de voiture par un simple récépissé remis par le voiturier à l'expéditeur, et qui ne diffère guère de la lettre de voiture que par la formule employée. Les compaguies de chemins de fer sont obligées de remettre un récépissé à l'expéditeur, même lorsqu'il ne le demande pas, avec l'indication du prix du transport. Boistel, p. 357 et 358; Alauzet, t. 2, n. 977. V. Chemin de fer, n. 221 et s., 257 et suiv.

14. La lettre de voiture et le récépissé sont soumis à un droit de timbre, qui était primitivement de 50 cent. pour la lettre de voiture et de 20 cent. pour le récépissé (L. 13 mai 1863, art. 10). La loi du 28 fév. 1872, art. 11, a ordonné le paiement simultané du droit de timbre (avec double décime, soit 60 c. et 25 c.) et du droit de décharge de 10 cent. créé par cette loi, ce qui a fait 70 cent. pour la lettre de voiture, et 35 cent. pour le récépissé; enfin la loi du 30 mars 1872, art. 1, a élevé à 70 cent. le timbre des récépissés, en décidant qu'ils pourront servir de lettres de voitures, si le transport se continue par route, canaux ou rivières; on n'aura donc plus d'intérêt à se servir d'un titre plutôt que de l'autre. Boistel, p. 358.

15. Preuve du contrat. La preuve qu'un commissionnaire s'est chargé du transport de marchandises résulte suffisamment de l'apposition de sa signature au bas de la lettre de voiture. Bruxelles, 30 août 1814.

16. Dès lors le commissionnaire signataire ne peut se soustraire à la responsabilité qui résulte, contre lui, de la perte et de l'avarie des marchandises, en soutenant n'avoir pas entendu se charger de l'expédition, mais avoir remis seulement au voiturier une lettre de voiture fausse ou simulée, pour être remboursé des avances par lui faites au voiturier sur les bonnes lettres qui lui ont été laissées en gage. Bruxelles, 30 août 1814.

17. La lettre de voiture sert à établir la preuve du contrat intervenu entre l'expéditeur, le commissionnaire et le voiturier. C. com., 101.

18. Mais les lettres de voiture souscrites par le commissionnaire seul ne forment pas un contrat synallagmatique entre lui et le propriétaire des marchandises. Cass., 21 janv. 1807.

19. La lettre de voiture constitue le commissionnaire dans l'obligation de remettre tous les effets qui y sont énoncés, encore bien qu'il soit agent de la personne pour laquelle il fait le transport, et sans qu'il puisse lui suffire d'alléguer une erreur commise dans le lieu du départ. Cass., 20 mai 1818.

20. La lettre de voiture n'est pas indispensable pour obliger le commissionnaire à rendre les choses qu'on prouve par un autre moyen lui avoir été confiées. Nîmes, 11 août 1831, et Cass., 3 août 1835 (S. 35. 1. 817. P. chr. D. 35. 1. 366);

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Troplong, Louage, n. 909; Pardessus, n. 540; Alauzet, t. 2, n. 894; Boistel, p. 358.

21. Ainsi on peut être admis à prouver par témoins que des effets ont été remis à un commissionnaire pour être transportés. Metz, 17 juin 1819; Cass., 18 juin 1833 (S. 33. 1. 705.P. chr. D. 33. 1. 281); Alauzet, n. 894 et 981; Bédarride, n. 245; Galopin, n. 33.

22. On pourrait également le prouver par le serment déféré par le commettant au commissionnaire. V. Dalloz, v° Commiss., n. 411.

23. Ou par le registre spécial que les voituriers sont obligés de tenir pour enregistrer tous les colis dont ils se chargent. C. civ., 1785; C. com., 96; Boistel, p. 358; Alauzet, t. 2, n. 981. V. infrà, n. 27 et suiv.

24. Enfin, à défaut de ces modes de preuve, on pourrait prouver par tous les moyens possibles. C. com., 109.

SECTION II.

OBLIGATIONS DES COMMISSIONNAIRES DE

TRANSPORTS.

25. Les commissionnaires de transports, outre les obligations qui leur sont communes avec les commissionnaires en général, — V. ce mot, ont à remplir certaines obligations particulières.

26. Ainsi, faute d'avoir pris une patente, ils sont non recevables à exciper de leur qualité de commissionnaires vis-à-vis des contributions indirectes. Cass., 18 juill. 1806.

27. Tout commissionnaire qui se charge d'un transport par terre ou par eau, est tenu d'inscrire, sur son livre-journal, la déclaration de la nature et de la quantité des marchandises, et, s'il en est requis, de leur valeur. C. com., 96. Cette disposition a pour but de faciliter la demande en restitution et le règlement des droits des parties en cas de perte.

28. Cette inscription sur les registres sert à constater la remise des objets entre ses mains; toutefois cette remise peut être établie d'une autre manière. Cass., 4 déc. 1837 (P. 38. 1. 284). - V. suprà, n. 21 et suiv.

29. Quand il y a une lettre de voiture signée par lui, le commissionnaire doit la copier sur un registre coté et paraphé, sans intervalle et de suite. Č. com., 102. Cette mesure a pour objet de sauvegarder les droits des tiers intéressés à prouver, en cas de perte ou d'altération de la lettre de voiture, qu'elle a été délivrée et comment elle l'a été.

30. Le commissionnaire de transports est en outre tenu de remplir différentes obligations qui résultent de sa double qualité de dépositaire et de mandataire.

esi, comme dépositaire, il doit: 1. Faire tout ce qui

est convenable pour la garde, le chargement et la conservation des marchandises durant le voyage. C. civ., 1927; Pardessus, n. 542. - Par exemple, réparer les tonneaux qui fuient. Pardessus, ibid.

2o Rendre identiquement les objets qui lui ont été confiés. C. civ., 1931; Troplong, Louage, n. 919.

3° Ne pas se servir des objets commis à sa garde, et ne point chercher à connaître quelles sont les choses qui lui ont été déposées, si elles lui ont été confiées dans un coffre fermé ou sous une enveloppe cachetée. C. civ., 1930 et 1931; Troplong, Louage, n. 917 et 918.

Par cela même que sa profession consiste à recevoir en dépôt des marchandises appartenant à autrui, il s'ensuit qu'on ne peut lui appliquer le principe de l'art. 2279, C. civ., qu'en fait de meubles la possession vaut titre. Une pareille possession n'opère pas même une présomption de propriété en sa faveur.

32. Comme mandataire salarié il est obligé : 1° De se conformer littéralement, de même que ses correspondants, aux instructions qu'il a reçues de l'expéditeur. Cass., 13 fév. 1844 (S. 44. 1. 417. P. 44. 1. 664); Alauzet, t. 2, n. 900 et 901.

2o De faire parvenir les objets à leur destination dans le délai déterminé par la convention ou par l'usage; un retard peut souvent causer un préjudice considérable à l'expéditeur par suite de variations dans le cours des marchandises; il est juste qu'il soit indemnisé.

3o De remplir, ou faire remplir par ses voituriers, toutes les formalités et conditions imposées soit par les lois, soit par les règlements locaux, par exemple, d'acquitter les droits de douanes ou d'octroi dont les marchandises sont passibles, sauf à se les faire rembourser par l'expéditeur ou par le destinataire. Metz, 9 déc. 1817; Cass., 26 fév. 1855 (S. 57. 1. 197); Colmar, 21 déc. 1856 (S. 57. 2. 763); Seine, 28 fév. 1877 (Gaz., 21 mars); Pardessus, n. 542; Alauzet, t. 2, n. 909.

4° De faire vérifier et constater, dans la forme et de la manière prescrites aux voituriers par l'art. 106, C. com., l'état des objets transportés, dans le cas de refus ou de contestation de la part du destinataire relativement à leur réception. Cet article 106, il faut le remarquer, n'a rien de limitatif; il n'indique qu'une forme de constatation qui peut être suppléée par d'autres mesures équivalentes, notamment par la preuve testimoniale. Nîmes, 19 nov. 1851 (S. 52. 2. 362. — P. 53. 2. 55). - V. infrà, n. 187 et suiv.

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33. Relativement au dépôt ou séquestre ou au transport de la marchandise dans un dépôt public, ainsi qu'à la vente qui peut en être ordonnée en faveur du commissionnaire en cas de refus de réception du destinataire, V. Voiturier.

34. Quand les formalités exigées par la loi ou d'autres mesures équivalentes ont été remplies, le commissionnaire doit, en outre, pour opérer sa décharge, en prévenir de suite l'expéditeur. Boulay-Paty, Dr. comm. marit., t. 2, p. 471; Van Huffel, n. 31; Alauzet, t. 2, n. 993.

53. Remarquons enfin que les formalités de l'art. 106, C. com., ne sont exigées que pour la réception des marchandises relativement au voiturier ou au commissionnaire à qui il s'adresse ou au nom duquel il agit. Malgré leur inobservation l'acheteur conserve toujours l'action qu'il peut avoir contre son vendeur ou contre l'expéditeur. Bruxelles, 25 janv. 1816; Aix, 15 juill. 1825; Bédarride, n. 404; Alauzet, t. 2, n. 995. V. inf., n. 200.

SECTION III. DROITS DES COMMISSIONNAIRES DE TRANSPORTS.

36. Il est permis au commissionnaire, si la faculté ne lui en a pas été interdite par une convention expresse, de charger en route un autre commissionnaire de rendre les marchandises à destination. Cass., 1er août 1820; Dalloz, Rép., v° Commiss., n. 387; Alauzet, t. 2, n. 966. — Ce sous-commissionnaire est alors réputé l'agent du commissionnaire principal. V. inf., n. 139 et suiv.

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37. Les commissionnaires ont tous les mêmes droits et actions que le voiturier tant contre l'expéditeur que contre le destinataire. C. com., 107.-V. Voiturier.

38. Ils peuvent, par conséquent, retenir le prix qui leur est dú pour le transport, sur les marchandises transportées, parce que, en droit strict, on ne saurait les forcer à faire une délivrance définitive qu'après les avoir payés. Vincens, t. 1, p. 628; Bédarride, n. 285 et 381; Rivière, p. 303.

39. Ils ont également privilége sur le prix des objets transportés pour les frais de voitures et dépenses accessoires, par exemple pour celles de conservation. C. com., 106; C. civ., 2102, §6; Cass., 9 avr. 1829; Troplong, Hypothèques, t. 1, n. 207; Rivière, loc. cit.

40. Comme il n'est ni dans les usages, ni dans les convenances, hors certains cas extraordinaires, que le commissionnaire ou le voiturier exige toujours le prix de la voiture avant de délivrer les effets, la coutume commerciale lui reconnaît un droit de privilége, même après qu'il s'est dessaisi, pourvu qu'il ait agi dans un court délai, dont la durée utile est à l'appréciation du juge; et il en est ainsi, encore que le destinataire soit tombé en faillite et qu'il y ait eu atermoiement. Duranton, t. 19, n.134; Troplong, Prw. et hyp., n. 207; Pardessus, t. 4, n. 1205; Bravard-Veyrières, t. 2, p. 376 et suiv.; Emion, Man. de l'exploit. des chem. de fer, t. 2, n. 183; Persil et Croissant, p. 234, n. 6;

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Delamarre et Lepoitvin, Dr. comm., t. 3, n. 257; Duverdy, Contr. de transp., n. 131; Bédarride, Commiss., n. 384; Alauzet, t. 2, n. 994. Contrà, Massé, Dr. comm., t. 4, n. 2868 ter et suiv.; Malleville, t. 4, p. 250; Delvincourt, t. 3, p. 442; Pont, Priv. et hyp., n. 169; Rivière, p. 304; Valette, Priv. et hypoth., t. 1, p. 91 et suiv.; Demangeat, sur Bravard, t. 2, p. 378; Aubry et Rau, t. 2, § 261, note 29.

41. C'est en ce sens qu'il a été jugé que le commissionnaire de transport conserve son privilége sur la marchandise transportée, bien qu'elle ait été enlevée par voie de fait à son insu. Trib. civ. Seine, 12 oct. 1861 (J. trib. com., t. 11, 166).

42. Sur l'étendue et la portée du privilége du commissionnaire de transport, V. Voiturier.

45. Le commissionnaire de transport qui a acquitté de ses propres deniers les droits de douane dus par les marchandises qu'il a fait entrer en France ne pourrait être considéré comme légalement subrogé au privilége de la douane vis-à-vis du propriétaire de ces marchandises. Douai, 16 juin 1858 (S. 59. 2. 175. P. 59. 758. D. 59. 2. 84); Alauzet, t. 2, n. 994.

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44. Le commissionnaire qui fait une avance à un voiturier, sur dépôt de sa lettre de voiture, n'a point de privilége sur le montant du transport, par préférence aux autres créanciers du voiturier; car, relativement à celui-ci, le montant de la lettre de de voiture n'est plus qu'une créance ordinaire qui est le gage commun de tous ses créanciers. Horson, Quest. 35.

SECTION IV. - RESPONSABILITÉ DES COMMISSIONNAIRES.

45.Le commissionnaire de transports est garant : 1° du défaut de transport des objets dans le délai fixé; 2° de leurs avaries ou de leur perte; 3° des faits des agents intermédiaires.

46. Il ne peut exiger de l'expéditeur le prix du transport, qu'en rapportant la preuve qu'il a remis les marchandises à leur destination, lors même qu'il n'aurait été employé que comme agent de la personne pour laquelle il a fait le transport. Cass., 20 mai 1818.

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47. S'il les avait remises à une personne qu'il aurait faussement présumée être le destinataire, il demeurerait responsable envers l'expéditeur. Cass., 25 avr. 1837 (S. 37. 1.401. P. 37. 2. 429. D. 37. 1. 314). V. aussi Paris, 22 août 1872 (J. trib. com., 72. 531).

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48. Ainsi, par exemple, le commissionnaire serait responsable du défaut de remise d'un colis, portant pour simple adresse: à Paris, lorsque le destinataire y est bien connu. Paris, 22 mai 1863 (J. trib. com., t. 13, 49).

48 bis. Il serait encore responsable si, malgré l'avis de l'expéditeur de ne pas livrer les marchandises transportées, il les

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