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Aux termes de la récente loi, il n'est pas permis de voir dans ces faits un indice quelconque de la diminution de la confiance publique dans le crédit de l'Etat.

On a publié il y a peu de jours un décret récent sur la comptabilité des Fabriques paroissiales. Cet acte est d'une gravité qui ne peut manquer de soulever des difficultés considérables. C'est tout un système d'empiètements nouveaux de l'Etat dans le domaine de l'Eglise. C'est un puissant instrument de pérsécution, dont les résultats sont incalculables et n'ont peut-être pas été prévus même par les auteurs du décret. Nous aurons à nous occuper ultérieurement de ce nouvel attentat aux droits des catholiques.

Le Vendredi saint, le ministère Ribot est tombé à la Chambre sur la question du budget, qui a soulevé un conflit entre le Sénat et le Palais Bourbon. Démission, essais de replâtrage, finalement gachis complet au moment où le Parlement en vacances va llaisser [seul M. Carnot avec ou sans douzièmes provisoires. Nous ne pouvons prévoir qui remplacerait le bijoutier Tirard aux finances; Jourde est mort; M. Sadi-Carnot ne peut pas, en ce moment, faire bénéficier ce portefeuille de l'habileté et des ressources dont il a fait preuve quand il était collègue de Baïhaut. Il ne reste que Rouvier, qui pourrait peut-être prendre Vlasto pour sous-secrétaire d'Etat. A moins pourtant que Wilson consente à recueillir cette délicate succession...

Toujours est-il que la démission du ministère a été acceptée. On est enfin délivré de Ribot et de Bourgeois, que nul ne regrettera, si mal qu'ils soient remplacés. Peu de cabinets ont été aussi déplorables que les deux derniers, présidés par Loubet et Ribot.

La parole est à M. Carnot, à qui l'opportunisme moribond veut imposer l'ami de Norodom, et qui semble récalcitrant. Le petit-fils de celui que certains s'obstinent à appeler un

grand homme a déjà perdu bien des occasions de prouver qu'il est un homme d'Etat. Nous verrons si dans la crise grave qui est ouverte, il voudra enfin se révéler.

Nous apprenons à la dernière heure la nouvelle de la délivrance... Après quatre jours d'efforts douloureux, on a vu, le 5 avril, naître le cabinet qui suit :

Dupuy, intérieur et présidence.

Develle, affaires étrangères.

Peytral, finances.

Terrier, commerce.

Poincarré, instruction publique.

Viger, agriculture.

Viette, travaux publics.

Guérin, justice.

Loisillon, guerre.

Rieunier, marine.

Voilà où en est la République. Tout commentaire serait superflu, n'est-il pas vrai ?

La mère va mal et on ne croit pas l'enfant viable.

A. DESPLAGNES,

ancien magistrat.

BIBLIOGRAPHIE

MONSEIGNEUR FREPPEL, d'aprés des documents authentiques et inédits, par le R. P. Etienne Cornut. de la Compagnie dé Jésus. In-8° de 424 pages. Paris, V. Retaux et flls, 82, rue Bonaparte, 5 francs.

Le grand évêque d'Angers a laissé un vide de plus en plus ressenti par l'Eglise de France. Il est de ceux dont la vie doit étre connue de tous, afin d'agir par l'exemple et de continuer, après sa mort, un apostolat si fécond.

Le R. P. Cornut a fait une étude très remarquable de cette personnalité et de cette carrière épiscopales. Il la donne modestement pour un premier travail destiné à préparer une bio

graphie définitive; il se trouve que ce premier travail est complet, au moins dans ses grandes lignes, et lorsque l'auteur y ajoutera les détails complémentaires qu'il a gardés, nous doutons qu'on puisse donner de l'illustre prélat un portrait plus fidèle et mieux réussi.

Le volume est divisé en cinq parties : l'Alsace, la Sorbonne, Rome, Angers, le Palais Bourbon, qui correspondent aux cinq étapes principales de cette carrière si remplie. L'auteur suit donc Mgr Freppel sur tous les théâtres où s'est développé cet esprit si ferme, si catholique,si français, si éminent en tout. Nous avons trouvé, pour chacune de ces parties, l'exposé biographique net, clair, plein d'intérêt, complet. Nous ne savons lequel peut laisser à désirer.Le récit relatif au Concile est particulièrement documenté. Une discussion récente provoquée par une Revue, mécontente d'y retrouver des actes fâcheux de certains personsonnages, a démontré la parfaite exactitude des renseignements et documents donnés par le P. Cornut. L'exposé des œuvres épiscopales de Mgr Freppel et de ses travaux à la Chambre est également complet, sobre et d'une excellente facture. Le P.Cor. nut pourra, aux éditions suivantes, ajouter des détails, des épisodes qu'il a par devers lui. Mais dès aujourd'hui, son œuvre est achevée; elle fait bien connaître l'illustre évêque à ceux qui ne l'ont point connu; elle le remet vivant devant les yeux de ceux qui ont eu l'honneur de l'approcher et de le suivre.

Peut-être l'auteur pourra-t-il, dans les éditions suivantes, modifier legèrement la distribution de son ouvrage en reportant le chap. XII de la première partie, l'Alsace, au temps correspondant à ces actes. La clarté y gagnera et la division générale du livre n'en sera pas modifiée. Suivre l'ordre des temps aide toujours beaucoup à l'appréciation d'un écrit biographique.

Nous ne voudrions pas, à propos du beau livre du P. Cornut, entrer dans l'appréciation des hommes. Mais il nous est difficile de ne pas comparer le portrait qu'il a fait de l'évêque d'Angers à celui que Mgr Baunard nous a donné du cardinal Pie. Et en comparant les deux portraits, l'un et l'autre si ressemblants, si bien peints, si beaux, nous ne pouvons nous empècher de voir dans les deux éminents prélats qui les ont inspirés la personnification la plus complète, la plus haute des grands évêques de ce siècle. Le cardinal Pie et Mgr Freppel verront grandir de plus en plus leurs noms et leur mémoire à mesure que notre pays connaitra mieux les œuvres de ces illustres enfants de l'Eglise et de la France, qui étaient d'aussi grands hommes d'Etat que de grands évêques, el tels que rarement on en vit d'aussi complets et d'aussi remarquables en toutes cho. ses sans exception. A. D.

Le Gérant: J. DARDELET.

Grenoble.

Imprimerie BARATIER et DARDELET.

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L'HISTOIRE UNIVERSELLE DE CÉSAR CANTU

PAR LE R. P. BRUNENGO, S. J.

Continué par un de ses collègues et traduit de l'italien

PAR AUG. ONCLAIR, PRÊTRE.

(Suite) (1)

2o CATÉGORIE

Doctrines Catholiques.

Le dogme, et en général les enseignements de l'Eglise catholique sont, dans l'histoire universelle de Cantù, prise dans son ensemble exposés, traités et défendus comme il convient qu'ils le soient par un fils sincèrement dévoué et soumis à l'Eglise. Sur certains points cependant l'illustre auteur paraît s'éloigner des doctrines catholiques, et cela, à cause principalement de l'ambiguité de sa phrase. Sur d'autres, il s'en éloigne de fait, certainement sans s'en apercevoir, en professant des opinions clairement opposées à la saine doctrine. En voici quelques exemples:

(1) Voir les numéros de février et avril 1893.

21' ANN. 1' SEM. 5° LIV. MAI 1893.

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I. L'inspiration divine des auteurs bibliques, d'après Cantù (XI, 60) « se restreint aux points de dogme et de morale. C'est vraiment là une limite par trop étroite. Selon la manière de voir des théologiens catholiques, cette limite doit embrasser aussi les points d'histoire, de chronologie, où tout autre, au moins pour ce qui est de la substance du fait: in rebus fidei et morum, ac in cæteris quoad rei summam, comme l'enseigne le cardinal Franzelin (1), en s'appuyant sur l'autorité des Pères et des docteurs les plus illustres. Cantù lui-même tient implicitement cette doctrine. Quand il dit, en effet, dans l'endroit cité tout à l'heure que « la Bible renferme toutes vérités » et quand ailleurs, il pose le sage principe que le Livre Saint précisément parce qu'il est inspiré, ne doit donc renfermer aucune erreur (I, 41); il est manifeste qu'il étend l'inspiration, de fait, à toute matière, quoiquecelle-ci ne soit ni dogmatique, ni morale, dans laquelle l'auteur abandonné à lui-même aurait pu errer.

Quant à la véracité de la Bible que Cantù défend partout ailleurs, elle paraît être offusquée à l'endroit où l'auteur parlant de l'histoire de Babylone et d'Assyrie et des documents officiels, c'est à dire des tablettes cunéiformes qui, de nos jours l'ont révélée, écrit : « Ces documents nous ont donné et nous donneront encore mieux par la suite une histoire aride et positive, mais certaine et complète, à l'encontre de l'histoire d'imagination, de l'histoire anecdotique qui se puisait dans les classiques et dans la Bible (I, 38). »

Ces deux caractères: d'imaginaire et d'anecdotique sont appliqués ici où peuvent, sans contredit être considérés comme appliqués à l'histoire biblique, tout aussi bien qu'à l'histoire classique. Or, pour ce qui est de la Bible, il est très vrai que l'histoire qu'elle nous donne du monde Assyro-Chaldéen est simplement anecdotique,attendu qu'elle ne touche par ci par là que les passages qui se rattachent à l'histoire du peuple hébreu, conformément au but de l'auteur sacré. Mais on ne peut en aucune façon la traiter

(1) Tractatus de divina Traditione et scriptura. Rome 1870.

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