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cents victimes. Les Marseillais appelèrent ce jourlà: le Jour de la Farce2.

tifiées, 45. Cf. Relation des Evénements de Marseille, 12. Marseille, Nimes en 1815, II, 53. D'après une autre brochure, Rapport sur les Evénements de Marseille, 6, ce fut seulement le 27 juin que la garde nationale put à grand'peine rétablir la tranquillité.

Le Comité attendit jusqu'au 27 pour faire une proclamation invitant le peuple à la modération. Cette proclamation vaut d'ètre citée : « Les violences des militaires qui ont osé faire feu sur le peuple ont pu faire excuser des vengeances exercées dans le premier moment d'un triomphe obtenu au prix de votre sang. Il est temps que tout rentre dans l'ordre; il est temps que les personnes et les propriétés soient respectées...» (Arch. Guerre.)

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1. Rapport du général Cailloux-Puget, Toulon, 29 juin (Arch. Guerre): « On fait monter le nombre des victimes, à près de 500 et les maisons pillées à plus de 50 ». — Rapport d'un douanier de Marseille, Valence, 2 juillet (Arch. Guerre): « 250 personnes égorgées dans les journées du 25 et 26 juin; 80 maisons pillées. Extrait d'une lettre de Marseille, 4 juillet (Arch. Guerre): « 242 personnes égorgées. Extrait d'une lettre de Marseille, 29 juin (Arch. Guerre): « On a tué tous les partisans de l'empereur. - Rapport sur les Evénements de Marseille (16) : Le peuple fit main basse sur tout ce qu'il rencontra d'anciens suppôts de la Révolution.

D

2. Marseille, Nimes en 1815, I, 32.

CHAPITRE III

LA COMMISSION DE GOUVERNEMENT

I. Inertie de la Commission de gouvernement dominée par Fouché. Mission de Gaillard (24 juin).

II. Proposition de Davout en faveur de Louis XVIII. de la Commission de gouvernement du 27 juin.

La séance

III. Nouvelles trames de Fouché. Mission de Macirone (25 juin). - Mission du général Le Sénécal (28-29 juin).

I

En renversant Napoléon par peur de la dictature, les Chambres avaient créé l'anarchie. En face de l'ennemi, la France se trouvait sans gouvernement. Les députés et les pairs avaient délégué le pouvoir à une Commission exécutive, ils sanctionnaient de leur vote toutes les mesures prises ou proposées par cette Commission et ils se fussent peut-être résolus à lui donner la puissance dictatoriale qu'ils avaient tant redouté de voir entre les mains de l'empereur. Mais la Commission exécutive n'était qu'un mot, un simulacre, une ombre. Sans espoir comme sans volonté, elle était asservie à Fouché qu'elle avait nommé son président et dont elle était dupe jusqu'à la complicité. Et Fouché, devenu le chef du gouvernement, n'usait de son pouvoir sur la France que pour paralyser les dernières énergies.

Pendant quelques jours, le duc d'Otrante dissimula bien ses trahisons. Il sut garder la confiance du parlement par sa proclamation aux Français1,

1. «... On peut détruire en partie des armées, mais on ne détruit, on ne soumet

par ses nombreux messages aux Chambres, par les projets de loi qu'il leur demanda de voter au nom de la Commision de gouvernement: appel ou prétendu appel des conscrits de 1815, droit de réquisition pour les subsistances militaires, envoi de commissaires aux armées, mise de Paris en état de siège, suspension de la liberté individuelle à l'égard des personnes prévenues de correspondre avec l'ennemi, de provoquer des troubles, d'engager à la désertion et « d'arborer d'autres signes de ralliement que les couleurs nationales ». Toutes ces paroles et tous ces semblants d'actes abusaient les Chambres en leur faisant croire, comme le proclamait effrontément Fouché dans un de ses messages, que « la Commission utilisait pour la défense de l'indépendance française le patriotisme et le dévouement des citoyens, et ne cessait pas de prendre des mesures pour appuyer les négociations par le développement de toutes les forces nationales3. >>

2

pas surtout une nation intrépide qui combat pour la justice et pour sa liberté. » Proclamation de la Commission de gouvernement aux Français. Paris, 24 juin. (Moniteur, 25 juin).

Berlier, secrétaire de la Commission de gouvernement, avait été chargé par Fouché de rédiger cette proclamation et «< de la faire laconique et vague ». Mais ces mots qu'il y inséra : «<... sans avoir à subir le retour d'un pouvoir qui ne serait pas dans le vœu national >> déplurent à Fouché. Il dit : « Ce n'est point cela. Je m'en occuperai moi-même », et il rédigea ou fit rédiger soit par Jay, soit par Manuel, une autre proclamation (Berlier, Précis de ma vie politique, 128-129, Bibliothèque de Dijon).

1. Au commencement de juin, l'empereur sur l'avis conforme du conseil d'État avait ordonné par simple mesure administrative la levée des conscrits de 1815, et dès le 11 juin, il y avait dans les dépôts 46 500 hommes de cette levée qui était susceptible d'en fournir 120 000. (Voir 1815, II, 16.) Ainsi, on ne fit le 24 juin que donner l'autorité d'une loi à une mesure déjà en pleine exécution. Dans la correspondance générale des Archives de la guerre, il est quelquefois question, du 25 juin au 4 juillet, de conscrits de 1815 rassemblés ou mis en marche. Mais ces réunions et ces mouvements eurent lieu en vertu d'instructions ministérielles antérieures de quinze jours à la constitution du gouvernement provisoire.

2. Procès-verbaux et correspondance de la Commission de gouvernement, du 24 au 27 juin (Arch. nat. AF, IV, 1933 et, AF. IV*, 202). Moniteur, 25 au 28 juin, 3. Message aux Chambres, 26 juin. (Moniteur, 27 juin).

Les lois furent votées, mais par la volonté de Fouché et par l'inertie de la Commission exécutive, elles restèrent sans effet. Nulle mesure ne fut prise pour accélérer la levée de 1815; on usa à peine du droit de réquisition; Paris demeura sous l'état de siège aussi agité et aussi turbulent qu'il l'était auparavant; pas un conspirateur royaliste ne fut arrêté. La Chambre transmit à la Commission exécutive, avec avis favorable, une pétition des fédérés parisiens qui demandaient des armes et une organisation militaire afin de servir aux frontières ou aux approches de Paris. C'étaient des milliers de bras pour la défense « Ces gens-là, dit Fouché, sont plus propres à effrayer Paris qu'à le défendre 2. » Les fédérés ne furent point armés3. Il y avait à prendre des mesures efficaces pour le prompt achèvement des ouvrages et lignes de retranchements que l'empereur avait ordonné d'établir autour de Paris. Rien de plus urgent. Or, le 1er juillet, ces fortifications se trouvèrent presque dans le même état qu'au 20 juin, inachevées sur la rive droite, à peine commencées sur la rive gauche. Bien loin qu'à l'approche du

1. Moniteur, 25 juin.

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Dès le commencement de juin, on avait organisé 24 bataillons de fédérés parisiens (1815 I, 623-624). C'étaient maintenant les autres fédérés de Paris qui demandaient à être enrôlés comme leurs camarades. Une lettre du général Darrican, commandant les fédérés embataillonnés, (Moniteur, 27 juin) précise la différence entre les fédérés en général et les tirailleurs fédérés, officiellement dénommés: Tirailleurs de la garde nationale,

2. Th. Berlier, Précis de ma vie politique, 132-133.

3. Non seulement les fédérés ne furent pas armés mais, malgré les instances du général Darrican, les tirailleurs fédérés eux-mêmes ne reçurent que le 30 juin 4 000 fusils (Darrican à Davout, 27, 28, 29 juin, Arch. guerre. Procès-verbaux de la Commission de gouvernement, 30 juin. Arch. Nat. AF, IV, 1933), ce qui, avec les 3 000 fusils distribués le 11 juin (1815, I, 629), portait à 7000 les armes pour un effectif de 17 280 hommes.

4. Comparer le rapport du capitaine de service de Villeneuve, du 17 juin (Arch. Guerre), et le Journal du général Valéc (manuscrit communiqué par M. le général de Salle), qui porte, à la date du 1er juillet: « Quelques ouvrages de la rive droite sont inachevés;

péril on eut accéléré ces travaux, ils s'étaient ralentis. Les ouvriers, mal payés et irrégulièrement, abandonnaient les chantiers, et les travailleurs volontaires diminuaient de nombre chaque jour par l'effet du découragement qui des gouvernants s'étendait à la population1.

Caulaincourt, ce larmoyeur, n'avait jamais cru à la défense. Grenier et Quinette, ces comparses, n'y croyaient guère, Carnot n'y croyait plus. Fouché n'en voulait point. Son espoir était ailleurs, en des négociations occultes avec l'étranger et en de multiples intrigues avec les royalistes.

Cet

Le duc d'Otrante ne se bornait pas à voir chaque jour Vitrolles qui tenait tous les fils de la conspiration bourbonniste de Paris. Dès le 24 juin2, il avait dépêché à Wellington son vieil ami Gaillard, ex-oratorien devenu conseiller à la cour impériale. émissaire devait demander un sauf-conduit anglais qui lui permît d'aller à Gand, et profiter de son entretien avec Wellington pour le pressentir sur les sentiments des puissances à l'égard du duc d'Orléans3. Tout en conspirant pour Louis XVIII, qui lui sem

sur la rive gauche, les ouvrages ne sont qu'ébauchés. » Cf. aussi le rapport du général Valence, 24 juin (Arch. Guerre) et le rapport de Carnot au conseil de guerre de la Villette, le 1er juillet, rapport dont il sera parlé plus loin.

1. Bulletin de Réal, 26 juin. (Arch. nat. AF, IV, 1934). Général Freitag à Davout, 28 juin (Arch. Guerre). Journal précité du général Valée.

Les fonds cependant ne manquaient pas. Sur les 500 000 francs affectés par l'empereur, par décret du 2 mai, aux retranchements de Paris, il restait environ 150 000 francs le 15 juin. (Davout à Napoléon, 15 juin. Arch. Nat. AF, IV, 1940.) Le 26 juin, la Commission de gouvernement vota 50 000 francs pour ces travaux, et le 27 juin, ce crédit fut porté à 300 000 francs (Procès-verbaux de la Commission de gouvernement. Arch. Nat. AF. IV, 1933). Comme les ouvriers étaient payés 1 fr. 75, par jour (Commandant Martin à Davout, s. d. [juin] Arch. Guerre), ces 300 000 francs représentaient plus de 170 000 journées. Avec cela, on pouvait remuer de la terre. Il est probable d'ailleurs que ces crédits, ouverts trop tard, ne furent que partiellement touchés.

2. Lettre de Gaillard à Vitrolles, 24 juin 1817 (citée dans les Mémoires manuscrits de Gaillard, tome X, communiqués par Mme Martineau).

3. La mission de Gaillard, mentionnée en détail dans les Mémoires de Fouché,

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