Page images
PDF
EPUB

ception de M. de Vareilles-Sommières, mais, dans tous les cas, l'ouvrage aura contribué grandement à nous libérer de certains raisonnements traditionnels.

Dans une première partie, l'auteur expose et critique toutes les théories contemporaines sur la personne morale. En particulier, il attaque la thèse de la personne morale fiction légale créée par l'État, et la thèse de la personne morale organisme vivant et réel, avec cette fougue et cette verve incisive dont il avait déjà fait preuve dans la Synthèse du droit international privé. Rude attaque venant peu après les critiques dont ces deux thèses avaient été l'objet de la part de M. Duguit dans son beau livre sur l'État!

Dans une seconde partie, M. de V.-S. établit les principes d'une théorie nouvelle. L'auteur, ayant répudié la thèse de la personnalité fictive et ne concevant pas d'ailleurs de droit sans sujet (pp. 123-131), substitue à la personne morale ou au patrimoine : d'affectation les personnes physiques bien vivantes des associés ou des bénéficiaires. Seulement, s'il convient de rattacher tous les droits quelconques, réels ou personnels, à des personnes physiques, M. de V.-S. entend démontrer que tous les biens compris dans le patrimoine d'une personne physique ne sont pas nécessairement soumis au même régime. Lorsque plusieurs personnes ont fondé une association ouverte, les biens mis en commun, destinés à l'usage du groupe, vont désormais être soumis, en vertu même du contrat d'association, à un régime particulier. Or l'auteur reconnaît que l'idée d'attribuer tous ses biens à une personne fictive peut servir à représenter et à définir commodément le régime de la propriété et des droits mis en commun. M. de V.-S. conserve donc l'idée de personne fictive, mais comme un artifice doctrinal destiné à décrire le régime personnifiant, le régime spécial des biens d'une association ouverte. Mais en réalité ce régime reste l'œuvre, la conséquence du contrat d'association et il ne dérive pas d'une personnalité légale ou réelle.

Dans une troisième partie, M. de V.-S. expose les applications de son système et se préoccupe notamment de le mettre en rapport avec la loi du 1er juillet 1901.

On trouvera dans la Réforme sociale (1901, 5o série, tome I, pp. 345-360) un aperçu général de la doctrine de M. de V.-S. 21. La théorie des Personnes juridiques dans le Code civil allemand a été développée d'une manière complète par M. SALEILLES dans la Revue du droit public (1901, t. XV, pp. 193–

250, 428-464 et t. XVI, pp. 212-264), sous forme de traduction, avec notes, des articles 21 à 89 du Code civil. M. Saleilles s'est attaché particulièrement à nous faire connaître tout ce qui a trait à la dissolution des associations, au droit d'opposition de l'administration en matière d'immatriculation et enfin à la théorie des fondations.

-

22. Plus spéciale dans son objet et moins exclusivement juridique, en ce sens que la polémique n'en est point absente, est la monographie de M. GUSTAVE THÉRY: De la capacité juridique des associations et de leurs membres, d'après la loi du 1er juillet 1901 (Revue catholique des institutions et du droit, 1901).

23. Nous devons signaler ici, puisque nous tenons compte dans le plan de cette chronique de la confusion classique entre le régime du patrimoine des associations et la personnalité morale, la leçon d'ouverture d'un cours de droit civil comparé : La Propriété corporative, par M. CHARMONT (Revue critique, 1901, pp. 430-443). M. Charmont esquisse les lois qui dominent l'évolution de la propriété corporative. Il est, d'ailleurs, de ceux qui pensent que la personnalité civile n'est qu'un procédé pour la réaliser.

24 à 26. Enfin nous rapprocherons de tous ces travaux les études de MM. DES GRANGES: Le droit d'association et les congrégations religieuses (Revue politique et parlementaire, 1901, t. XXVII, pp. 34-74) et BOITARD: La loi sur les associations au point de vue des associations laïques ordinaires (op.cit., 1901, t, XXVIII, pp. 259-279); ainsi que la consultation de M. BARBOUX sur les congrégations non autorisées, publiée notamment par la France judiciaire, 1901, p. 97.

27.

Des personnes morales nous allons passer aux personnes physiques.

M. MORAND a étudié dans la Revue algérienne et tunisienne, de 1901, l'interdiction en droit musulman.

[ocr errors]

28. La thèse de doctorat consacrée par M. FRIBOURG-Blanc au Conseil de famille (Grenoble 1901), contient une étude complète et purement juridique du conseil de famille dans le droit actuel. Si l'auteur a étudié dans la première partie l'organisation du conseil de famille, sa composition, la façon de le convoquer, ses délibérations et la sanction de ses règles d'organisation, dans la seconde partie il examine les attributions du conseil de famille à l'égard du mineur émancipé ou non, puis des autres incapa

bles. Il termine par une étude des voies de recours. Les innombrables questions dont il a donné la solution sont exposées d'une façon claire et nette, sans toutefois être dominées par des idées générales.

29. Le lieu de réunion des conseils de famille a été examiné dans un article anonyme publié par la Revue des justices de paix, 1901, pp. 1 et s.

30. La même revue a publié également un article de M. SouLIÉ sur les personnes à qui il appartient de se pourvoir contre le refus du conseil de famille de désigner un subrogé tuteur (1901, pp. 326 et s.).

31. La séduction et la recherche de la paternité, par M. ALBERT GIGOT, est une étude dirigée contre l'irresponsabilité actuelle du libertinage (Réforme sociale, 1902, 5e série, III, pp. 189-202).

32. De l'alliance ou affinité, étude d'histoire et de droit comparé (thèse de Paris), par LOUIS CARON. L'utilité de ce travail. est de réunir une série de documents qui jusque-là étaient épars. Après une étude assez longue sur le droit de l'antiquité et principalement sur le droit romain, l'auteur consacre toute une suite de développements intéressants au droit canonique et aux diverses sortes d'alliances qu'il reconnaissait; il étudie les différents effets de cette alliance et les transformations historiques des conceptions canoniques. Après des développements sur le droit coutumier et le Code civil, l'auteur donne des renseignements complets sur le droit comparé et conclut, en se fondant sur eux, à une atténuation des effets de l'alliance. Il se montre partisan de la possibilité du mariage entre beaux-frères et belles-sœurs sans autorisation, et de la restriction des récusations en justice pour cause d'alliance.

33. Le mariage civil, étude historique et critique (thèse de Paris), par RENÉ LEMAIRE. Ce travail pourrait être intitulé tout aussi bien : le mariage religieux devant la loi civile. L'auteur, après avoir exposé le caractère religieux qu'a toujours eu le mariage, examine comment, après la période du Moyen âge où l'Église régissait seule la matière du mariage, un mouvement séparatiste s'est peu à peu dessiné, d'abord par la doctrine gallicane suivant laquelle le mariage est un contrat civil auquel vient se joindre un sacrement, puis par le mariage des protestants. L'auteur critique très vivement la théorie de la Révolution, puis du Code civil sur le mariage. Il expose comment la théorie des deux mariages, civil et religieux, aboutit pratiquement à des conséquences re

grettables: notamment un des époux mariés civilement pouvant refuser de se marier religieusement après que le mariage civil est célébré. Il l'attaque également au point de vue moral, estimant que le mariage civil n'a pas toute la dignité ni la solennité qui convient à un acte aussi important. Enfin il l'attaque encore en déclarant que le mariage civil conduit logiquement et nécessairement au divorce, et que le fait d'avoir établi le mariage civil est la cause directe des abus en matière de divorce et même du développement de l'union libre.

La conclusion de l'auteur, qu'il appuie de la législation comparée et de notre législation coloniale, c'est que le mariage religieux devrait avoir force civile, et néanmoins rester du domaine des règles canoniques et des juridictions ecclésiastiques. La loi devrait seulement maintenir le mariage civil pour ceux qui ne voudraient pas participer aux cérémonies religieuses.

34. Dans un tout récent ouvrage, Le féminisme français, M. CHARLES TURGEON a voulu exposer dans son ensemble le programme des revendications féministes. L'ouvrage dépasse par conséquent, si l'on veut, le domaine du droit civil, le féminisme ayant surtout revêtu un caractère politique et social. Néanmoins le mouvement féministe doit avoir de très importantes répercussions sur le droit privé et tous les civilistes liront avec intérêt l'ouvrage de M. Turgeon.

35. La Société d'économie sociale ayant tenu à Paris, en 1901, un congrès sur la condition de la femme, ce congrès a donné lieu à de très intéressantes communications publiées depuis par la Réforme sociale.

Dans l'ordre du droit privé nous signalerons, M. SALEILLES : La situation juridique de la femme dans le nouveau Code allemand (Réf. soc., 1901, 5o série, t. II, pp. 717-744). Le rapport recherche dans quelle mesure le Code allemand a satisfait aux revendications féministes, en envisageant d'abord la femme indépendamment du mariage, puis la femme mariée et enfin la mère. 36. De M. MATEITCH: La femme et la famille dans le droit slave (Réf. soc., op. cit., p. 25).

37. De M. CRÉTINON L'organisation de la famille dans le nouveau Code allemand (Réf. soc., op. cit., pp. 154-181).

38. De M. ESCARD: Des fiançailles et de la nécessité de les faire intervenir dans la loi du mariage (Réf. soc., op. cit., p. 888-898).

39. De M. MORIZOT-THIBAULT: La femme et le divorce (Réf.

soc., op. cit., pp. 195-216). Le rapporteur examine si le divorce est un instrument de défense pour la femme ou une arme d'oppression aux mains du mari. Il conclut que le divorce est surtout dirigé contre l'époux.

40 et 41.- De M. THALLER: Le contrat de mariage et le régime normal des biens à établir entre les époux (Réf. soc., op. cit., pp. 461-476).

De M. BOISTEL: Des limites à apporter aux pouvoirs du mari dans l'administration de la communauté (Réf. soc., 1902, 5o série, t. III, pp. 48-60).

Ces deux rapports recherchent dans quelle mesure et par quels moyens il convient de procurer à l'époux la disponibilité de son salaire.

42.- On lira sur cette même question un article de M. RIVE : Des droits de la femme mariée aux produits de son travail, dans les Questions pratiques de législation ouvrière et d'économie sociale (1901, p. 33).

43. M. PAUL GRIVEAU, ayant procédé à une enquête au sujet de l'application en France du régime dotal, en a publié les résultats dans son livre : Le régime dotal en France, ses avantages et ses inconvénients, étude théorique et pratique (Marchal et Billard, 1901). Il résulte de cette enquête la très importante conclusion que le régime dotal est encore fréquemment stipulé, mais aussi que des clauses diverses en ont modifié considérablement la physionomie.

[ocr errors]

44. M. DEPINAY s'est livré à la même enquête parallèlement à M. Griveau et lui aussi nous apporte ses conclusions dans un livre fort intéressant: Le régime dotal, étude historique, critique et pratique (Marchal et Billard, 1902). Nous nous bornons à cette indication sommaire; il paraîtra ultérieurement dans la Revue un compte rendu détaillé de ce livre et du précédent.

-

45. - De l'inclusion de la dot sous le régime dotal, par PAUL ROUSSET (thèse de Dijon). Dans ce travail l'auteur expose la théorie de la dotalité renfermée qu'il admet comme une conséquence directe de l'inaliénabilité de la dot mobilière et qu'il explique par l'idée de subrogation réelle. La femme dotale posséderait selon lui deux patrimoines, l'un dotal et l'autre paraphernal et la théorie de la dot incluse serait le moyen pour maintenir la démarcation entre les paraphernaux et la dot, en empêchant d'une part la masse paraphernale de s'accroître aux dépens de la dot, et d'autre part en s'opposant à ce que les

« PreviousContinue »