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2. 413; D. 47. 2. 198.

Rennes, 12 déc. 1846, S. 60. 1. 241

(ad notam); D. 47. 2. 199) et quelques auteurs, notamment MM. Lecourtois et Surville, Contrat de mariage, t. I, p. 302.

9. Effets du remploi; subrogation.

La Cour de cassation a fait justice d'une thèse au moins singulière qui avait été admise par la Cour de Toulouse. Cette juridiction avait estimé que l'hypothèque (dans l'espèce une hypothèque conventionnelle) grevant l'immeuble aliéné est transportée de plein droit, par l'effet de la subrogation, sur l'immeuble acquis en remploi. C'était là abuser de l'idée de subrogation. qui n'intervient que pour assurer à une valeur sa destination, et, par exemple, la permanence de sa dotalité, mais qui ne saurait exiger que le bien nouvellement acquis prenne exactement la situation du bien aliéné, ce qui pourrait d'ailleurs lui être malaisé, surtout s'il est de nature mobilière, alors que la valeur précédemment sortie du patrimoine de l'époux était immobilière. Cass., 12 avr. 1902, Gaz. Pal., 1902. 1. 715.

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LOUIS JOSSERAND,

Professeur agrégé à la Faculté de droit de l'Université de Lyon.

1.

B. Obligations et contrats spéciaux.

I.

OBLIGATIONS EN GÉNÉRAL.

a) Conditions d'existence et de validité des obligations.

Moment de la formation du contrat.

Quand un contrat est-il juridiquement formé? Spécialement, une compagnie de tramways ayant affiché ses prix et son horaire, quand est-elle réputée avoir contracté avec le voyageur? C'est non seulement du moment où il y a acceptation expresse de l'offre, mais encore dès qu'il y a acceptation tacite, dit un arrêt de Bruxelles du 19 nov. 1900 (D. 1902. 2. 356), notamment par le fait de saisir une poignée de voiture pour monter. De ce moment donc commence la responsabilité de la compagnie quant aux accidents dont sont victimes les voyageurs.

2. Conséquences de l'annulation d'un contrat pour er

reur.

Quand un contrat est annulé pour erreur sur la substance, une

des parties peut être en faute de n'avoir pas examiné suffisamment l'objet du contrat et d'avoir ainsi laissé se glisser dans la convention une erreur qui en altère la validité. Il semble juste en ce cas d'admettre qu'une indemnité pourra être accordée à l'autre partie, et notamment qu'elle pourra obtenir une réduction dans les restitutions auxquelles elle est obligée par l'annulation du contrat. Cependant la Cour de cassation, statuant dans une vente d'un faux Corot, vient d'introduire ici une distinction bien difficile à justifier: cette faute d'un des contractants, dit-elle, aurait pu être prise en considération dans une demande en dommages-intérêts, mais elle est absolument inopérante pour justifier la réduction du prix de vente à restituer à la suite de la résolution prononcée. - Cass. civ., 25 juill. 1900, S. 1902. 1. 317. 3. Annulation d'une transaction pour erreur sur l'objet. D'après l'article 2053 du Code civil, en matière de transaction l'erreur n'est une cause de rescision que si elle porte sur la personne ou l'objet de la contestation. Faut-il considérer comme erreur entraînant la nullité celle qui porte sur l'importance du préjudice causé? La Chambre civile vient d'admettre la négative précisément dans un cas où elle présente un très grand intérêt : lorsqu'un ouvrier victime d'un accident accepte une indemnité par transaction, il arrive souvent qu'on ne sait pas encore exactement quelle est l'étendue du dommage résultant de l'accident, et on aurait pu se demander s'il ne devait pas être possible, les événements venant à tromper les prévisions, de faire annuler la transaction. La solution négative, qu'a donnée la Cour de cassation (29 juill. 1901, D. 1902. 1. 297) à cette question, est juridique et satisfaisante en pratique; cependant il ne conviendrait peut-être pas qu'elle fût appliquée avec trop de rigueur; par exemple si une blessure qu'on croyait devoir créer une infirmité temporaire entraînait la mort de l'ouvrier: car alors la nature du préjudice serait véritablement modifiée.

4.- La majoration d'un prix ne suffit pas à constituer le

dol.

Si le dol atteint la validité des conventions, il n'en est pas de même d'une simple majoration de prix de vente, alors que l'acheteur était à même de contrôler la valeur véritable de l'immeuble acheté. C'est ce que vient de déclarer la Chambre des requêtes le 7 janv. 1901 (D. 1901. 1. 128; Pand. fr., 1902. 1.406). Un pacte de quota litis est-il nul?

5.

Les règlements du barreau (art. 36 du décret du 14 déc.

1810) interdisent aux avocats de faire avec leurs clients des pactes de quota litis. La violation de cette règle salutaire entraîne certainement pour l'avocat des peines disciplinaires. Mais est-elle sanctionnée également par la nullité de l'obligation contractée? La doctrine l'avait toujours admis. La Cour de cassation vient à son tour d'avoir à résoudre cette question et de se ranger à la même opinion (Cass. civ., 22 avr. 1898, D. 98. 1. 415; S. 1902. 1. 343). Cette solution est admissible, mais il faudrait peut-être se garder de la généraliser par une logique rigoureuse, car il semble difficile d'admettre que tout acte punissable disciplinairement soit nul: ainsi des actes de commerce faits par un officier ministériel.

6.

Caractère d'une vente d'objet susceptible seulement d'emploi frauduleux.

La Cour de cassation dans l'appréciation du caractère illicite des conventions et dans les conséquences qu'il faut en tirer semble bien s'être préoccupée surtout des conséquences pratiques de ses décisions, et on ne saurait qu'approuver cette manière de voir. Elle vient de l'affirmer à nouveau en déclarant illicite le contrat relatif à des liqueurs colorantes susceptibles seulement d'être employées pour colorer le cidre. La convention, dit-elle, avait pour objet, dans la commune intention des contractants, une œuvre de falsification : elle était dès lors viciée dans son principe même. Ainsi donc le but poursuivi peut suffire à faire déclarer la convention illicite. Cass., 2 déc. 1901, S. 1902. 1. 333; D. 1902. 1. 48.

7.

Promesse de procurer la conclusion d'un contrat. Quand une personne promet contre argent d'agir pour assurer à une autre la conclusion d'un contrat, c'est au juge du fait à décider s'il y a là un simple contrat de courtage, ou bien une promesse d'user de son influence, de ses relations près d'une administration, véritable trafic d'influence qui rend le contrat illicite. C'est ce qui ressort d'un arrêt des requêtes du 5 févr. 1902 (S. 1902. 1.389; D. 1902. 1. 158).

8. — Annulation, pour cause de fraude, d'une constitution d'hypothèque.

Un créancier obtient de celui qui est déjà son débiteur une hypothèque. Elle ne peut, nous dit la Cour de Grenoble (20 juin 1900, D. 1902. 2. 277), être annulée en vertu de l'article 1167 que si elle a pour résultat moins de sauvegarder l'intérêt d'un des créanciers que de diminuer le gage des autres et de soustraire

à leur action une partie du patrimoine. En tout cas elle ne peut être traitée comme une libéralité si le créancier qui pouvait exiger un paiement immédiat a consenti un nouveau délai.

9. L'action paulienne suppose l'insolvabilité du débi

teur.

Le principe que l'action paulienne ne peut triompher qu'en cas de preuve faite de l'insolvabilité du débiteur est absolu. La Cour de cassation (Req. 22 juill. 1902, D. 1902. 1. 399) vient de l'appliquer au cas où un créancier était intervenu à un procès de son débiteur, procès qui s'était terminé par une transaction faite à son insu. Cette transaction ne peut être attaquée que dans les conditions ordinaires de l'article 1167 du Code civil, et l'intervention du créancier ne peut lui conférer une situation particulière, et spécialement le dispenser de démontrer l'insolvabilité du plaideur qui lui doit de l'argent.

10. Conditions de la ratification tacite.

La Cour de Besançon, par arrêt du 6 févr. 1901 (D. 1902. 2. 119; Pand. fr., 1902. 2. 190), vient de consacrer à nouveau la doctrine admise par la Cour de cassation dans des arrêts déjà anciens (Cass., 19 déc. 1853, S. 54. 1. 686, et surtout 28 nov. 1866, S. 67. 1. 18). D'après cette théorie, en matière de ratification tacite par exécution volontaire, il ne suffit pas que le débiteur ait agi connaissant le vice de son obligation; il faut encore qu'il ait eu la volonté dé ratifier, et notamment on peut induire des faits que cette volonté fait défaut si on a simplement payé des intérêts en vue de retarder des poursuites.

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b) Effets des obligations.

11. La demande en justice fait-elle toujours courir les intérêts?

Quand une demande est présentée en justice, elle fait courir les intérêts de la somme due lorsque ces intérêts ne couraient pas encore. Mais cela suppose toutefois que le paiement pouvait être réclamé. Si la somme n'est pas exigible, c'est du jour de cette exigibilité que courront les intérêts. C'est ce que vient d'admettre la Cour de Pau (17 juill. 1902, S. 1902. 2. 216).

12.

légal.

Etendue d'application de la nouvelle loi sur le taux

Les intérêts qui ont commencé à courir au taux légal avant la loi du 7 avr. 1900, qui a réduit ce taux, continuent à courir

au taux ancien malgré cette loi. C'est ce que vient de déclarer le Tribunal de la Seine, le 13 juin 1901 (D. 1902. 2. 340). C'est qu'en effet, dit-il, le taux légal constitue pour le créancier, du jour où les intérêts commencent à courir, non plus une espérance, mais un droit entré définitivement dans son patrimoine. Le jugement nie d'ailleurs que la loi soit d'ordre public au sens exact du mot. Peut-être cela pourrait-il être contesté et serait-il plus sage de décider le contraire, car le droit à l'intérêt constitue une sorte de droit successif qui naft à mesure que le débiteur jouit du capital, et qui naît par conséquent chaque jour, comme le règle la loi en vigueur ce jour-là.

13. La grève doit-elle être rangée dans les cas de force majeure?

Une grève constitue-t-elle un cas de force majeure exonérant le débiteur qui ne s'exécute pas de dommages-intérêts? Le Tribunal d'Hazebrouck (18 janv. 1890, D. 91. 3. 24; S. 95. 2. 109, ad notam) avait répondu sur ce point que la grève « dans certaines industries et notamment dans celle des charbonnages était un fait relativement fréquent, facile à prévoir et qui ne peut être considéré comme un cas de force majeure ». La Cour d'Aix (21 nov. 1901, S. 1902. 2. 51; D. 1902. 2. 197) admet ici une distinction judicieuse. La grève peut être générale; c'est « lorsque tous les ouvriers d'une corporation se solidarisent à ce point, que leur demande n'est satisfaite et le travail repris que lorsque tous les chefs d'exploitation, quels qu'ils soient, ont adhéré aux nouveaux salaires exigés; dans ce cas, il ne peut dépendre d'un chef d'exploitation, fit-il tous les sacrifices demandés, de tenir ses engagements; alors qu'un seul de ses concurrents, sur lequel il n'a ni pouvoir ni action, peut empêcher par son refus la reprise du travail ». En ce cas, il y a véritablement force majeure la responsabilité du débiteur ne persisterait qu'au cas de grève particulière ou plus exactement de grève non solidaire des ouvriers des divers établissements.

14. Pleine capacité du débiteur déconfit.

La déconfiture du débiteur insolvable n'ayant pas été réglementée par la loi, il résulte que le déconfit n'est point incapable de faire des actes juridiques, et qu'il n'y a non plus aucune période suspecte avant l'existence de la déconfiture. La seule ressource des créanciers est donc l'action paulienne. Bordeaux, 29 juin 1898, sous Cass., D. 1902. 1. 337.

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