Page images
PDF
EPUB

1106, tre, est celui qui a lieu pour l'intérêt et l'utilité réci proque des parties, comme la vente, l'échange, le prêt à intérêt, etc.

[L'article 1106 définit le contrat à titre onéreux, celui qui assujétit chacune des parties à donner ou à faire quelque chose. Mais il est évident que cette définition, qui est réellement celle du contrat synallagmatiquë, ne peut s'appliquer au contrat à titre onéreux. Car, sous ce rapport, elle pèche contre une des règles de la logique, qui veut que toute définition convienne omni, et soli definito. Elle ne convient pas omni definito; car elle ne convient pas au prêt à intérêt, qui est certainement un contrat à titre onéreux, et dans lequel le prêteur n'est tenu de rien donner, ni de rien faire. Elle ne convient pas soli definito; car elle peut s'appliquer au dépôt, au mandat, qui sont des contrats de bienfaisance.]

Le contrat à titre onéreux est commutatif proprement dit, ou aléatoire. [Il est évident que cette division n'est pas une division principale, mais seulement une subdivision des contrats à titre onéreux, puisque tous les contrats à titre onéreux ne peuvent être que commutatifs ou aléatoires, et que, d'un autre côté, tous les contrats commutatifs ou aléatoires sont censés à titre onéreux.]

Il est commutatif proprement dit, quand ce que chacune des parties reçoit, est censé l'équivalent effectif de ce qu'elle donne. [Nous avons ajouté ces mots proprement dit, parce que le contrat aléatoire est aussi commutatif, puisque l'on donne quelque chose en échange de ce que l'on reçoit, ne fût-ce qu'une chance, une espérance. Mais comme cette chance, cette espérance, peut se réduire à fort peu de chose, et même quelquefois à rien, j'appelle proprement commutatifs, les contrats dans lesquels il y a réellement quelque chose d'effectif donné de chaque côté. ]

[Ce qui est reçu est censé l'équivalent effectif de ce qui est donné, parce qu'il n'est pas nécessaire, au moins dans le for extérieur, que la chose donnée soit absolument et réellement d'égale valeur à la chose reçue. Il suffit que les parties l'aient considérée comme telle, sauf le cas de lésion

dans certains contrats, ou à l'égard de certaines personnes (art. 1118), à la différence du contrat aléatoire, dans lequel l'équivalent ne consiste que dans une chance de gain ou de perte.]

Le contrat commutatif est aléatoire, quand l'équivalent consiste dans une chance incertaine de gain ou de perte; 1104. tels sont tous les jeux, les gageures, les contrats d'assurance, la rente viagère, etc.

La quatrième division des contrats est en principaux et accessoires.

Les contrats principaux, sont ceux qui peuvent subsister par eux-mêmes, et indépendamment de toute autre convention.

Les contrats accessoires, sont ceux qui ont pour objet d'assurer l'exécution d'un autre engagement, duquel ils dépendent, et sans lequel ils ne peuvent subsister: tels sont le cautionnement, le nantissement, l'hypothèque.

Enfin, il est une cinquième division des contrats, en contrats que nous appellerons solennels et non solennels.

Les contrats non solennels sont ceux qui ne sont assujétis à aucune forme particulière, mais seulement aux règles générales des contrats, comme la vente, le louage, le mandat, etc. [Ce sont les contrats que POTHIER, d'après le droit Romain, appelle contrats du droit des gens. Nous avons changé cette dénomination, d'abord, parce que le droit des gens s'entend principalement, chez nous, du droit inter gentes; et en deuxième lieu, parce que le mot solennel paraît désigner mieux ces espèces de contrats, dont l'existence dépend de l'observation de certaines formalités, qui sont exigées ad solemnitatem, non verò ad probationem tantùm.]

Les contrats solennels sont, au contraire, ceux dont l'existence est subordonnée à l'observation de certaines formalités, sans lesquelles ils ne produisent aucun effet civil: tels sont l'hypothèque conventionnelle, le contrat de mariage, etc. [Ces contrats sont appelés par PoTHIER, Contrats du droit civil. (Voyez ce que nous avons dit plus haut des contrats non solennels.)]

[ocr errors]

Il faut, au surplus, observer que la distinction établie par les lois Romaines, entre les contrats nommés et innommés, déjà proscrite dans notre ancien droit, l'est également dans le droit actuel; et que tous les contrats, soit qu'ils aient, ou non, une dénomination propre, sont 1107. soumis aux règles générales portées dans le présent Titre. [Avec cette différence cependant, que les contrats qui sont traités spécialement dans le Code, et qui peuvent être regardés comme ayant une dénomination légale, sont assujétis aux règles particulières énoncées sous les titres qui les concernent, tandis que les autres, outre les règles générales des contrats, sont encore soumis aux règles spéciales concernant le contrat de la nature duquel ils participent davantage. C'est une observation importante, surtout relativement à la prestation des fautes. Ainsi deux paysans sont convenus de se prêter mutuellement leurs boeufs pour labourer leurs terres. Devra-t-on, en cas de perte des boeufs dans la main de l'un des contractans, appliquer l'art. 1882? Non, sans doute; car, quoiqu'il soit dit que les parties se sont prêtées, il est évident qu'il n'y a pas prêt, tel que ce contrat est entendu dans les articles 1875 et suivans. Le Code considère le prêt à usage comme un pur contrat de bienfaisance de la part du prêteur; et il a dû en conséquence assujétir l'emprunteur à la plus grande responsabilité possible. Ce caractère de contrat de bienfaisance existe-t-il dans la convention dont il s'agit? Non. Car chacun des paysans reçoit le prix du prêt qu'il fait à l'autre, par le prêt qu'il en reçoit lui-même. C'est donc, sous ce rapport, un contrat qui participe davantage de la nature du louage des objets mobiliers, et auquel on doit appliquer de préférence les règles de ce dernier

contrat.

Quid de la distinction établie par le droit Romain, entre les contrats de bonne foi, et les contrats de droit strict? Quoique cette distinction paraisse abrogée par l'article 1155, il est cependant vrai qu'elle existe encore dans notre droit. En effet, la différence consistait en ce que dans les contrats de droit strict, le juge était obligé de se

renfermer dans les bornes de la convention, sans pouvoir condamner aucune des parties au delà de ce à quoi elle s'était formellement obligée. Dans les contrats de bonne foi, au contraire, la condamnation pouvait s'étendre à tout ce que l'équité pouvait exiger. Ainsi, dans le prêt. d'argent, qui était de droit strict, le juge ne pouvait ordonner le paiement des intérêts, qu'autant qu'ils avaient été formellement stipulés, quelque retard que le débiteur eût mis d'ailleurs dans le paiement. (L. 32, § 2, ff. de Usuris.) Or, il en est de même chez nous; y eût-il dix ans qu'un billet est échu, tant qu'il n'y a pas eu de demande judiciaire, le créancier ne peut exiger d'intérêts (art. 1153); et si la loi les fait courir du jour de la demande, c'est à titre de dommages et intérêts, et pour punir le débiteur qui, par une contestation injuste, a voulu élu der l'exécution de son obligation.

Dans la vente, au contraire, les intérêts du prix étaient dus par l'acheteur, par le fait seul du retard, parce qu'il était juste, disait-on, que, jouissant des fruits de la chose, il payât les intérêts du prix. Or, cette disposition est consacrée, avec quelques légères modifications, par l'art. 1652 du Code. Enfin l'art. 1514 présente une disposition qui est de droit très-strict, puisqu'elle ne s'étend pas même aux héritiers de la partie qui a stipulé, à moins qu'ils n'y soient formellement compris. ]

On distingue encore, dans chaque contrat, les choses. qui sont de son essence, celles qui sont de sa nature, et celles qui sont accidentelles. Cette distinction établie par les auteurs, est indiquée d'ailleurs dans plusieurs articles 1719. du Code, comme nous le verrons par la suite. 1876.

Les choses qui sont de l'essence du contrat, sont celles sans lesquelles ce contrat ne peut subsister, tellement que le défaut de l'une d'elles fait, ou qu'il n'y a pas du tout de contrat, ou qu'il y en a un d'une toute autre espèce que celui que les parties paraissent avoir eu l'intention de former. Ainsi, il est de l'essence de la vente qu'il y ait une chose vendue, et un prix réel et effectif, Si donc, au moment de la vente, la chose vendue n'existait plus, il

1601. n'y a ni vente, ni aucune autre espèce de contrat. S'il n'y

avait pas de prix, ou s'il était tellement inférieur à la valeur de la chose, qu'il fût à peu près illusoire, alors ce ne serait pas une vente, quoique les parties l'eussent ainsi qualifié; ce serait une donation.

Les choses qui sont de la nature du contrat, sont celles qui, sans être de son essence, en font cependant partie même sans aucune stipulation spéciale de la part des con1986. tractans. Ainsi, il est de la nature du mandat d'être gratuit. Les choses qui sont de la nature du contrat, diffèrent de celles qui sont de son essence 9 en ce que le contrat peut subsister sans elles, et qu'elles peuvent en être détachées par la convention des parties.

Enfin, les choses qui sont accidentelles au contrat, sont celles qui, n'étant ni de sa nature ni de son essence, n'y sont renfermées que par suite de quelque clause particulière que les parties y ont ajoutée, comme le terme, la condition, etc.

REMARQUES SUR LE CHAPITRE PREMIER,

contenant les dispositions préliminaires.

Le chapitre rer du titre 3 du 3e livre du Code civil, est consacré aux dispositions préliminaires. M. Delvincourt en a fait précéder le commentaire d'observations très-importantes sur la définition des contrats. Ce petit traité est une espèce d'appendice au Code civil, qui n'a pas distingué d'une manière assez formelle, ce qu'on doit entendre par obligation naturelle, par obligation civile, et par obligation mixte. Nous allons joindre à ses observations, quelques remarques sur l'importance et la rédaction des contrats ou obligations conventionnelles.

De toutes les manières d'acquérir la propriété, celle qui a lieu par contrat ou obligation conventionnelle, est la plus sujette aux formalités que doivent observer les officiers ministériels chargés de leur rédaction.

Dans le premier âge du monde, et lorsqu'il touchait encore à son berceau, la loi naturelle était la seule qui formait le contrat de la propriété ; mais on eut à peine reconnu le nécessité de constituer la société en états séparés, et sous la direction d'un chef, qu'on reconnut en même temps celle de recourir à des lois positives, pour garantir la propriété des atteintes

« PreviousContinue »