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Etat de l'instruction primaire dans l'ancien diocèse d'Autun pendant les XVIIe et XVIIIe siècles, par A. de CHARMASSE. Autun, Michel Dejussieu, 1871, in-8° de 107 p.

Il est de mode aujourd'hui de qualifier de barbares les siècles passés, et de faire dater de la Révolution française le progrès dans tous les genres. A lire les écrivains modernes, nos pères auraient vécu au milieu de l'ignorance la plus complète, et bien des gens encore prétendent que l'Eglise et l'Etat refusaient l'instruction aux peuples, pour mieux les asservir. L'étude que M. de Charmasse vient de publier sur l'instruction primaire dans l'ancien diocèse d'Autun, pendant les XVIe et XVIIIe siècles, met à néant toutes ces calomnies. C'est une véritable enquête basée sur une foule de documents originaux. L'auteur établit d'une manière irrécusable que, en 1789, dans une grande partie de la Bourgogne, il n'y avait, pour ainsi dire, pas une paroisse qui ne fut dotée d'une école, et ce fait est fort remarquable si on considère qu'à cette époque les paroisses étaient bien plus nombreuses qu'aujourd'hui. Mgr de Roquette, évêque d'Autun, est certainement un des hommes qui ont le plus fait pour l'instruction primaire. Ses règlements, à cet égard, donnent bien l'idée de la touchante sollicitude qui l'inspirait. « C'est un ordre de l'Esprit-Saint, prononcé par la parole du Sage, dit-il, de former les enfants dès leur bas åge... Pour satisfaire à une telle obligation, nous ordonnons que les curés et prêtres tiendront de petites écoles, ou choisiront, avec les habitants de la paroisse, une personne de probité, capable d'enseigner ces jeunes enfants, et l'acte de leur choix, les attestations de probité, et leur capacité ayant été reconnus par Nous ou par Nos grands vicaires, il leur sera donné permission de tenir ces écoles >>

Quant au salaire, il était fixé à l'amiable par l'instituteur et la commune, qui pouvait y consacrer une partie des revenus de ia fabrique, ou prélever à cet effet un impôt sur les habitants. Les écoliers payaient en outre une redevance plus ou moins élevée, suivant qu'ils apprenaient à lire ou à écrire. Du reste, il était formellement recommandé aux maîtres << de recevoir les pauvres avec la même affection que les riches, et d'avoir également soin de leur instruction. » « Ces modestes écoles, dit M. de Charmasse, ne se proposaient pas seulement le but étroit de donner aux enfants une instruction plus ou moins bornée. L'éducation, telle qu'on l'entendait au XVIIe siècle, c'est-à-dire l'éducation chrétienne, y était placée au premier rang, préoccupation bien naturelle et bien légitime, puisque l'esprit chrétien était alors l'esprit public. » La surveillance des écoles était confiée aux archiprêtres, qui devaient s'informer si les maîtres avaient reçu l'institution de l'évêque, s'ils étaient de bonnes mœurs, s'ils étaient instruits des principaux points de la religion, enfin, si les classes n'étaient pas insalubres. Les visites des archiprêtres avaient lieu publiquement, et chaque habitant pouvait ainsi faire valoir devant eux les plaintes qu'il croyait fondées. Il faut dire, à la louange du clergé, que bien souvent, dans les paroisses trop pauvres pour payer un maître, le curé instruisait lui-même les petits enfants, ajoutant cette nouvelle tâche aux fonctions de son ministère.

Qu'il nous soit permis, en terminant, d'exprimer un vou, celui de voir les mêmes recherches appliquées à toutes nos anciennes provinces, et étendues mème au moyen âge. L'Eglise, si attaquée de nos jours, n'a besoin, pour se défendre, que de la vérité. Il ne serait pas inutile de mon19*

trer à ses détracteurs les efforts qu'elle avait faits pour organiser l'enseignement aussi bien, à une époque où chacun parle de décentralisation, il est intéressant de connaître les résultats obtenus sans l'intervention de l'Etat.

E. DE LACHESNAIS.

Les anciens pouillés des paroisses incorporées au diocèse de Troyes en 1801, par M. l'abbé LALORE. Troyes, Caffé, 1870, in-80 de 80 p.

La circonscription qui fut assignée au diocèse de Troyes, à la suite du Concordat de 1801, est fort différente de l'ancien diocèse. Le nouveau diocèse, en adoptant les limites du département de l'Aube, perdait un territoire assez étendu au nord-ouest (l'archidiaconé de Sézanne, et une partie du doyenné de Pont), un certain nombre de paroisses au nord-est et à l'est; mais il recevait, par compensation, au sud, cent seize paroisses de l'ancien évêché de Langres, et vingt de celui de Sens. Le pouillé du diocèse de Troyes, rédigé en 1407 et publié, en 1853, par M. d'Arbois de Jubainville, ne fournit naturellement aucune notion sur ces localités soumises actuellement à l'autorité spirituelle de l'évêque de Troyes; aussi, M. l'abbé Lalore a-t-il cru utile d'extraire d'anciens pouillés inédits des diocèses de Langres et de Sens, les articles concernant les paroisses annexées au diocèse de Troyes.

Dans une introduction (p. 5-44), M.l'abbé Lalore examine les documents dont il s'est servi pour sa publication, consacre quelques notices aux anciennes divisions ecclésiastiques (archidiaconés et doyennés), dans lesquelles étaient comprises les paroisses annexées, et résume au point de vue topographique les données des pouillés. Il publie ensuite les fragments

des plus anciens pouillés connus des diocèses de Langres et de Sens, datant du xv° siècle, et des additions tirées de pouillés plus modernes. L'éditeur a eu soin de donner en notes, au bas des pages, l'indication du vocable des églises, et, ce qui est non moins précieux, les différentes formes de noms de paroisses usitées dans le moyen âge.

Ce travail consciencieux sera utilement consulté. Cette considération nous autorise à signaler à son auteur deux petites erreurs. C'est à tort que le village de Maisons (Aube) est indiqué (p. 51, no 46) comme correspondant à Mansio in Campania, lieu nommé dans une charte de 1227; M. l'abbé Lalore n'a qu'à recourir à cette pièce pour voir que Mansio in Campania, nommé avec Loisy-sur-Marne, ne saurait désigner que le village de Maisons (Marne), contigu à celui de Loisy. Il est impossible que le villago de Chassenay (Aube), nommé Cancenneium, en 1083, dans une char e de l'abbaye de Molêmes, soit identique au Castrum Censurii, ou Castrum Censorium, mentionné, en 1095, dans le cartulaire du même établissement; Castrum Censorium désigne évidemment Châtel-Censoir, au canton de Vézelay (Yonne).

AUGUSTE LONGNON.

Monuments inédits sur l'histoire du Tiers-Etat. Cartulaire municipal de la ville de Montélimar (Drôme), publié d'après les documents originaux conservés aux archives de la commune,etc.,par l'abbé C.-V.-J. CHEVALIER, correspondant du ministère de l'Instruction publique, officier d'Académie. Montélimar, 1871, gr. in-8° de 352 p.

M. l'abbé Chevalier, en publiant le Chartularium civitatis Montilii Ademarii, n'a pas, comme on pourrait le croire, reproduit un manuscrit qui aurait renfermé les cent soixante-cinq

documents dont se compose le volume qu'il met entre nos mains: il a formé ce qui était autrement pénible et difficile un cartulaire factice, tirant telle pièce des archives de la ville de Montélimar, telle autre de diverses collections particulières, d'autres, enfin, des dépôts publics de Paris, de Carpentras, de Grenoble, etc. A force de patientes recherches, M. l'abbé Chevalier a réuni une série d'actes qui remonte jusqu'au 12 avril 1164 et qui descend jusqu'au 5 mars 1412. Je ne mentionne pas les sept premiers actes (du 3 mai 790 au 22 février 1161), parce que ces actes sont apocryphes, et que le savant paléographe les donne seulement pour montrer le peu de cas qu'il faut faire des indications qu'ils contiennent et qui ont été si souvent utilisées, comme incontestables, dans certains travaux généalogiques. M. l'abbé Chevalier nous promet de compléter bientôt le Cartulaire de Montélimar par une introduction et par une table, peut-être même par un supplément. Puisse-t-il ne pas nous faire trop attendre la réalisation de ses promesses! On ne se résigne pas aisément aux longues échéances, quand il s'agit de choses aussi précieuses.

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T. DE L.

Archives municipales de la ville de Blaye, précédées d'une table chronologique des documents qui concernent l'histoire de cette ville et qui se trouvent dans d'autres archives. Bordeaux, imprimerie Gounouilhou, 1871, in-4o de 124 p.

La Société des archives historiques du département de la Gironde avait extrait, en 1863, du tome V de ses publications, l'Esclapot ou cartulaire de Monségur (in-4o de 98 pages). Félicitons-la d'avoir extrait du tome XII un ensemble de pièces qui peuvent presque tenir lieu d'une histoire de la

ville de Blaye. La première de ces pièces, de l'an 1261, est intitulée : Libertés, priviléges el franchises de la ville de Blaye; la dernière, du 12 janvier 1698, est un procès-verbal de nomination d'experts pour les travaux faits dans les marais de Blaye. Ces diverses pièces que renferment le recueil proviennent des collections de la Bibliothèque nationale, des archives départementales de Bordeaux et surtout des archives municipales de Blaye. Quelques autres documents sont tirés de la collection particulière de M. Jules Delpit, lequel a rédigé avec tout le zèle et toute l'exactitude que l'on avait le droit d'attendre de lui, la Table chronologique qui occupe les douze premières pages du recueil et qui est pleine de toutes sortes d'utiles renseignements. En voici un que j'emprunte à la page x1: les auteurs du Gallia Christiana n'ont pas mentionné l'abbé du monastère de SaintSauveur de Blaye que le roi d'Angleterre, Henri VI, nomma, le 21 octobre 1450, membre du Conseil royal d'Aquitaine.

T. DE L.

Recherches sur l'organisation communale de la ville de SaintMaixent, jusqu'en 1790, par Alfred RICHARD, ancien élève de l'Ecole des chartes, archiviste du département de la Vienne. Poitiers, Dupré, 1870, in-8° de 245 p.

Au moment où la question des franchises locales est présente à tous les esprits, il n'est pas sans intérêt de voir ce qu'était une de ces villes privilégiées désignées sous le nom de communes. A ceux qui s'occupent des af faires publiques, je recommande la lecture du livre de M. Richard, comme aussi celle de l'histoire de la commune d'Aumale de M. Semichon : ils y trouveront des enseignements précieux, que l'histoire seule peut donner aux législateurs.

Née seulement à la fin du moyen àge, en 1440, la commune de SaintMaixent n'a pas eu une origine illustrée par ces émeutes qui ont, de nos jours, des historiens sympathiques. On n'y trouve pas de révolte ni de lutte sociale, mais un témoignage de reconnaissance du roi Charles VII envers ses fidèles sujets, qui venaient, au prix de leur sang, de donner à la Couronne des gages de leur fidélité Née au moment où le pouvoir royal était déjà fort, la commune de SaintMaixent n'eut pas de charte, mais seulement le droit de s'administrer elle-même. Ce ne fut pas sans peine qu'elle conserva ce privilége si envié. Après s'être organisé, le corps de ville se trouva bientôt en butte aux obsessions des agents du pouvoir (ce que nous appelons aujourd'hui la bureaucratie), qui cherchaient à amoindrir cette puissance locale, et la firent enfin disparaitre, en 1692, avec toutes les autres communes.

De cette date jusqu'à la Révolution, M. Richard a retracé le tableau des variations du régime accordé aux villes, tantôt libérales, tantôt oppressives, suivant les besoins des finances. Ce n'était plus qu'un fantôme d'administration, lorsque 1789 vint anéantir cette organisation complétement. modifiée déjà par l'abus de la centralisation.

Outre la liste de maires et d'échevins, complément de son travail, l'auteur y a joint 18 pièces justificatives parmi lesquelles nous citerons, outre la charte de 1440 et les statuts du corps de ville (1506), deux chartes d'Alphonse, comte de Poitou (1239), des lettres de rémission pour une tentative de soulèvement communal (1352), et divers actes du roi Charles VII, qui complètent les renseignements que l'on possédait déjà sur les guerres de la Praguerie.

Le livre de M. Richard est simple

ment écrit, il a consulté les sources avec discernement, et la critique la plus sévère ne peut que rendre justice à l'érudition de l'auteur, en même temps qu'à la méthode sobre avec laquelle il a traité un chapitre intéressant de l'histoire de son pays natal.

A. DE B.

Documents historiques inédits sur le Dauphiné. Cinquième livraison. Nécrologe et Cartulaire des dominicains de Grenoble, publiés d'après les originaux, avec plan et table alphabétique, par C.-U.-J. CHEVALIER, prètre, correspondant du Ministère de l'instruction publique, etc. Romans, 1870, in-8° de 82 pages.

M. l'abbé Chevalier continue avec la plus admirable activité à publier des documents inédits relatifs à l'histoire de sa province natale. Aujourd'hui, il nous donne réunis, dans une même livraison, le Nécrologe du couvent des dominicains de Grenoble d'après l'original malheureusement iucomplet conservé aux archives de l'évéché de Grenoble (p. 1-16), et le Carlulaire du même couvent, d'après les documents (tantôt originaux, tantôt à l'état de copie) conservés aux mêmes archives (p. 17-71). Le volume, orné d'un ancien plan de la ville de Grenoble, est terminé par un inder des personnes, des lieux et des choses dont il est question, soit dans le Nécrologe, soit dans le Cartulaire, et par un index onomastique où les mots, formes et acceptions qui n'ont pas été recueillis par Du Cange, ont été imprimés en lettres italiques, précaution dont il faut remercier M. l'abbé Chevalier. Sans avoir une haute importance historique, comme le savant éditeur le reconnait lui-même, le Nécrologe, rédigé vers l'an 1400, et le Cartulaire, qui renferme trente-deux pièces comprises entre le 28 juillet 1288 et le 12 mai 1497, méritaient de

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Pour faciliter le travail de ceux qu'il invite à l'imiter, il a donné un cadre de classement très-simple, et auquel peut être adapté tout ce que contiennent les dépôts de même nature. - Une préface relève sommairement les renseignements fournis par ces documents au sujet de la condition des personnes et des terres; puis une table alphabétique, venant en aide à ceux qui s'occupent de recherches locales, donne tous les noms de lieux ou de personnes du Poitou, de l'Anjou, de l'Ile-de-France, etc., au nombre de près de 7,000, mentionnés dans le cours de l'ouvrage; enfin, à l'analyse très-complète des textes, il faut ajouter quelques pièces insérées in extenso, telles que le testament d'un bourgeois de Poitiers, en 1443, un de ces espiciers qui prêtaient sur gages aux

gens bien nés, dont les finances réclamaient des expédients onéreux,

A. DE B.

Généalogie des marquis du Cauzé de Nazelle, par Jules DE BOURROUSSE DE LAFFORE. Bordeaux, Gounouilhou, septembre 1870, in-4° de 77 p.

Cette généalogie, tirée à cent exemplaires qui ne seront pas mis dans le commerce, n'attirerait pas, quoique très-bien faite, l'attention de la Revue, si,au milieu des renseignements fournis par M. de Laffore sur la famille, aujourd'hui champenoise et jadis agenaise, du Cauzé de Nazelle, ne se trouvait (p. 13-22) une dissertation historique intitulée: Conspiration du chevalier de Rohan, conspiration dont les auteurs (Louis de Rohan-Guémenée et Georges du Hamel, sieur de Latréaumont) furent découverts et dénoncés par Jean-Charles du Cauzė, écuyer, seigneur de Nazelle, alors étudiant à Paris (1674). M. de Laffore, pour raconter cet épisode de l'histoire du grand règne, ne s'est pas contenté d'interroger les mémoires contemporains (Lafare, Cosnac, etc.), ni la relation de M. Pierre Clément (Trois drames historiques, 1857); il a voulu avoir recours aux pièces officielles du procès conservées à la Bibliothèque nationale dans le tome CCXXVI de la collection du cinq cents Colbert, etc. Il a pu ainsi arriver, le premier, à connaître toute la vérité sur cette affaire. Une excellente note sur la marquise de Villars (Louise-Anne de Sarrau) complète (p. 67-69) la notice sur la conspiration à laquelle fut mêlée cette demi-sœur du savant Claude de Sarrau, et permet de rectifier, au sujet de ce conspirateur en robe de soie, comme l'appelle M. de Laffore, bien des renseignements erronés qui ne se trouvent pas seulement dans le

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